Chez
ces mollusques, la disposition particulièredu
foieautour de l'estomac, qui s'ycreuse en quelque sorte des cavités plusou moins
profondes et plus oumoins
nombreuses, rend l'isolementde l'organe hépatique difficile etmême
inqiossible.Néanmoins
les résultats qui vont suivre suffisentpour montrer que
le tissudu
foie contientéga-lement du
sucrechez cesanimaux
etque
sa sécrétion sucrée se dé-verse également dans l'estomac, ainsique
nous l'avons ditpour
les gastéiopodes.i"
Sur une
grosseanodonte de41 centimètresde circonférence, très bien nourrieetenpleine digestion (de petitesanguilles),j'aiséparéle le tissudu
foie en 1isolantautantque
possible des parties environ-nantes. J'obtins ainsi 7grammes
de substance hépatique aussipeu mélangée que
possible <!etissus étrangei's. I^a décoctiondonna un
li-quideopalin offrant
beaucoup
degraisse àsasurface.Une
très petite partiedece liquide mise en contact avecdu
liquidecupro-potassiquele réduisit coni|)létement.
Le
restedu
liquidefutsoumisàla fermen-tationavec de lalevure de bière, etl'onobtintd'unepai't,de l'acide carbonique, et, de l'autre, on sépara par la distillationune
petite quantitédeliquide danslequelon
constata les propriétés caractéris-tiques del'alcool.2°Sur
ime
autre grosseanodonte de 35centimèti'esdecirconférence, prisependant
l'étéetdanslesmêmes
circonstancesque
la précédente, lefoiefburnitune décoction opalinetrèssucréequi parledosagedonna
o^''
833
de sucre,pour
100 parties de tissu hépatique, débar-rassé autantque
possibledes(issuscnvironnanisaveclesquelsilse méla'.ige.3°
Chez
desmoules
examinéespendant
l'été etétant bien vivantes, j'aiconstaté delamême
manièrelaprésencedu
sucredans leur foie.Mais,en outre,j'ai
remarqué que
lesang prisdansle cœiu', oumême
leliquide qui s'échappaitau
moment
oùl'onouvraitlacoquillede l'a-nimal, réduisaient toujourstrèsévidemment
leréactifcupro-potassique, tandisque
cela n'avaitpas lieupour
lesmollusques gastéropodes,telsque
les limaces et lesescargois.§ II. Articulés.
Dans
les crustacésdécapodes le foie est voiumineux, etchez cesanimaux,
il contient trèsévidemment
delamaîière sucrée. C'est ceque
j'ai constatéchezi'écrevisse{Jslucusflupiatilis^,lulang^ouste etlehomard
i^Astacusmurinus), prisdanslapériode deladigestion.Dans
les insectes, le foie n'est pas déterminé de lamême
manière partousleszoologisteset lesanatomistes.Dans
touslesinsectes(à l'exception des Pucerons etdesKermès),
soit ailés, soitàl'étaldelarves,on trouveà la terminaison
du
ventri-cule chylifique, ou estomac,un
plusou moins grandnombre
de vais-seaux presquetoujours simples,fort déliés, capillaires, lissesou bour-souflés,vainqueux,tantôttrèslongsetreployés au milieu des viscères, tantôt courts,maisalorsplus multipliéset moinsfléchis. Cesorganes, dont j'emprunte la descriplion àM.
I.éonDufour
(i), sont, pour cet entomologiste, des conduitsbiliaires, et les représentantsdu
foie chezles insectes.D'aprèslemême
auteur, ces tubesrenfermentun
li-quidevert, ou jaune, ou brun,
ou
violet,ou
blanc ou incolore, d'une saveuramère comme
labile.Ces appendicestubulairesdel'intestindes insectes,découvertschez le verà soie par Malpighi, sousle
nom
devasavaiicosa, etsignalés ensuite parSwammerdam
sous lesnoms
de vaisseaux aveugles, variqueux,cœcums,
n'ont pas lamême
significationpour
tous les naturalistes.CuvieretRamdhor
(2) lesontregardéscomme
lefoiedes insectes.M. Léon Dufour
s'estapproprié cette dernière opinion en développant en safaveurdesargumentsnombreux. Pour
établir que les tubescœcaux
des insectes sontlesanaloguesdel'organehépatique desanimaux
supérieurs,M. Léon Dufour
signale la saveur biliaire de leur contenu; et il insiste spécialementsur leur insertion qui, à l'exemple dece qui se passe chezles vertébrés, aconstamment
lieu dansl'intestin grêle. Ilprouve que
lesinsertions rectalesde ces con-duits chez les Mordelles (3), lesMélassomes
(4) , lesLongi-(1) Léon Dufour,Surlefoie desInsectes [Jnimles dessciences naturelles,2'séi-., t.XIX,p.Ii6).
(2) Abluuull.iiber dievcrdciungiverh: Verni. Schrijt,t.I.
(3) Léon Dufour, Métamorph. etanat. des Mordelles. [Annales dessciences natu-relles.2" sér.,t.XIV, p.225).
[h]Annales dessciences naturelles,
T
sér.,t.XIX,p. 152.cornes (i), les
Hémiptères
[^),ne
sont qu'apparentes.M.
Laboul-bène(3)aencoredémontré,à l'appuides opinionsdeM. Léon
Dufour,que
chez lesAnobium
l'insertion rectale des vaisseaux biliaires est égalementfausse.En
1817,Rengger
indiqua, maissanspreuves, lesconduitscœcaux
des insectescomme
des organes urinaires , mais aujourd'hui cette opinion,soutenue parbeaucoup
d'auteurs, sefonde surlaprésence de l'acideuriquedans ces conduitscœcaux
desinsectes, constaté soitau
microscope,soitàl'aidedel'analysechimique.On
voiten
effet,en sou-mettant aumicroscope
lecontenu
des tubescœcaux de
certains in-sectes, des cristaux offrant tous les caractères physiques del'acide urique.Avec M.
Rayer,j'aieumoi-même
l'occasiondeconstaterle fait surles tubesbiliairesde
diverses chenilles.M. Dumas
adémontré
chi-miquement
lescaractèresde
l'acideurique dansun
calcul trouvé parM. Audouin
dans les tubes hépatiques chezun
cerf-volant{Lucanus
cervus) (4).MM.
Chevreul,Milne Edwards
etWurzer
ont également trouvé del'acideurique danslesexcrémentsde
diversinsectes.Ilparaîtdonc
positif qu'ilyade
l'acideurique dans les conduitscœcaux
des insectes,ce quin'infirmeaucunement
l'existence simultanée danscesmêmes
conduits decertainsprincipesconstitutifsou
colorants de la bilequisont évidents, par exemple, chezlacourtilière {Grillo-talpa).L'opinion mixte qui regardelestubes
cœcaux
des insectescomme
des organesurino-biliaires,émise par
Meckel
en 1826, etpartagée en France parMM. Audouin
etMihieEdwards,
s'accordeavecles faitsque
nous avonsprécédemment
cités.Toutefois, ily
aune
distinctionqu'ilme semble
nécessaire d'établirrelativementàlavaleurcaractéristique àattribueraux produitsde
la bileou de
l'urine.En
effet,un
organe estbienplutôt caractérisépar les produitsqu'ilforme que
par ceux qu'ilexcrète.Ou
ignorele lieu précis delaformation del'urée et de l'acideurique;on
saitseulementque
par l'intermédiairedu
sang qui lescharrie, ces matières sonthabituellement éliminées parlesreins.Quand on
enlèvelesreinschezles chiens, l'nréequinecessepasde
se(1) Loc.cit.,p.155.
(2) Annalesdessciences naturelles,t. XIX,p.177et suiv.
(3) A.Laboulbène, Ann. Soc.entomologique de France,
T
sér.,t.X,p.339-340.[k] Annalesdessciencesnaturelles, 2" sér.,t.V,p. 129.
89
former s'accumule plus tarddansle san.o-,ainsiquel'ontétabli les expé-riencesde
MM. Dumas
etPrévost.Mais en
même
temps,j'aifait voirque
l'urées'élimineparle canal intestinal (i).Cesrésultatsd'expériencesontétéconfirméspardes re-cherches analogues deStannius,et setrouvent en rapport avec des ob-servationspathologiquesde M.
Rayer. Les matériaux del'urine (urée etprobablement
aussi l'acideurique)peuventdonc
s'éliminerpar dif-férentes voieset,euparticulier,parlecanaldigestif,qu'onnesaurait à causedecelaconsidérercomme un
appareil urinaire.Chez
les insectes, ilse pourraitfaireque, des appareils urinairesanalogues à ceux des vertébrésmanquant,
cette élimination desmatériaux del'urineparletube intestinal fût l'état normal,et il n'y aurait rien d'étonnant de trouver ces matériaux dans les vaisseaux
cœcaux
et peut-être anssi dansd'autres partiesdu
lubeintestinal.Il enesttoutautrementdes principesessentiels delabile. Ils pren-nentnaissancedansle foie,quilesexcrète, maisqui doit être surtout considéré
comme
leur appareilformateur.D'aprèstoutcela, ets'ilestbienconstatéc[ue lesconduits
cœcaux
des insectes renfermentàlafois des produits biliaires et urinaires,ilme
sembleutiledefairesentir
que
parla dénomination d'organes urino-biliaires,on
veutentendreque
cestubessontdesorganesbiliairesdans lesquelsalieucoïncidemment
l'excrétion desmatériauxurinaires.Cetteappréciation,quiestenrapport avecl'étatactueldelascience, nepourraitse trouverdétruite,
que
sil'onvenait àprouver que, chez lesvertébrés,lefoie estlelieu de production de l'acideurique sans êtresonorgane excréteur normal.Relativement à cette question de détermination des organes urino-bUiaires des insectes, j'ajouterai qu'ils ne représentent cer-tainement pasl'élément sucré
du
foie; car en ayant réuniun grand nombre
et lesayantfaitbouillir avecun peu
deliquide cupro-potas-sique, ilnes'estmanifestéaucune
tracede réduction dansleliquide à l'œilnu,nimême
au microscope. J'insisteraisurlavaleur de ce ca-ractère négatif parce que, chez lesmêmes animaux,
j'ai constatéla t>résencedela réductiondu
liquide cupro-potassiqueavec le liquide qui humectaitlesparois intestinales.(1) BernardetBaneswil,Archives gciiéialesdemédecine, 1846.
12
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La
présencedu
sucre peut secomprendre
parce qu'on rencontie danslaparoimême
del'inlestin desinsectesdescelluleshépatiques(i).De même
aussi chez les annélides,on
retrouvedans les parois in-testinales,descelluleshépatiquesdisposéesencouche
et parfaitement reconnaissables.On
esl en droit d'admettre, ceme
semble,que
chez cesanimaux, bienque
lesélémentsdu
foienesetrouvent passousforme
d'un organelobuleet ilistinct,l'organeexistecependant,mais seulement disséminé dans les paroisdu
canalintestinal oiiil peut, malgrécela, trèsbien remplirsa fonction.L'arrangement du
foie chez les mollus-ques lamellibranchesoù
l'organeforme une
sortedecouche
autour de leur estomac aufractueux, n'est qu'un passage à la disposition qui existerait chezles insectes et lesannélides. Enfin,il se pourrait peut-êtreque
lesdeux
fonctionsdu
foie,sécrétionde
sucre et sécré-tionde
bile, déjà distinctesphysiologiquement chez lesmollusques, fussent chez lesinsectesunatomiquement
séparées, etque
les tubescœcaux
correspondissentau foiebiliaire, tandisque
lescellules hépa-tiquesdes parois intestinales correspondraient aufoiesucré?(1)De Siebold, Anatomie comjwtér,traduct.française,t. I, p.588.