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Malgré toutes tensions potentielles, les donateurs et les fondeurs ont dû travailler ensemble, notamment pour choisir les matières premières appropriées pour la fonte des cloches. Ils partageaient deux préoccupations : d’un côté, quels types de matériaux permettraient de

72 Ibid., p. 369-370.

73 Gao Shouxian , « Ming Wanli nianjian Beijing de wujia he gongzi », Qinghua daxue

xuebao , no 3, 2008, p. 45-62.

74 BJTB, vol. I, p. 300-302.

fabriquer des cloches qui sonneraient suffisamment bien pour communiquer avec les êtres spirituels des autres mondes, et, de l’autre côté, où les obtenir.

Valeurs des métaux

Les cloches utilisées dans les rites d’État étaient en général fondues en bronze selon les règles transmises depuis le fondateur d’une dynastie. Néanmoins, à un certain moment, les empereurs Ming ont souhaité faire fabriquer des instruments pour les cérémonies sacrificielles avec des métaux autres que le cuivre et l’étain, deux composants de l’alliage bronze. En 1502, la quinzième année de son règne, l’empereur Hongzhi voulut ordonner aux spécialistes en musique de la Cour des sacrifices impériaux (Taichangsi) de fabriquer une cloche en or pur ainsi qu’un bol sonore en jade de l’ouest (xiyu 使 ) pour les grands sacrifices de l’État. Cet ordre fut cependant mis en cause par les lettrés-fonctionnaires. Ils soulignèrent la tradition des rites et de la musique « depuis Yao et Shun », en précisant que la cloche devait toujours être fondue en bronze et le bol sonore en pierre de Lingbi (lingbishi 丑 , nom d’un site en Anhui). Pour eux, la modification à l’improviste des matériaux aurait entraîné deux résultats complémentaires : d’une part, les sons des deux instruments risquaient de ne pas être compatibles avec les autres ; d’autre part, les sons dissonants qui n’auraient plus la capacité d’émouvoir les divinités provoqueraient la perte de l’effet des rites. Ayant reçu les rapports de ses ministres, l’empereur suivit finalement leurs conseils et renonça ainsi à l’idée de fondre une cloche en or76. Certes, la remontrance des ministres peut être interprétée dans le contexte du

discours sur l’orthodoxie vers le milieu des Ming et sur l’ambition politique de l’empereur lui- même, mais on ne peut ignorer sa réflexion sur les idées suivant lesquelles la matière d’une cloche agit sur sa sonorité et la qualité du son détermine l’efficacité des rituels77.

Des discours sur le matériau idéal pour la fabrication des cloches se trouvent également dans des textes canoniques du bouddhisme et du taoïsme. Si nous remontons au VIIe siècle,

nous lisons, dans le Sûtra illustré sur le Monastère du Jetavana de Śrāvastī en Inde centrale de Daoxuan, comment les cloches d’un monastère bouddhique idéal étaient aménagées et utilisées mais aussi en quelles matières elles étaient fondues. Celles qui étaient employées le plus couramment étaient en or et en argent, deux éléments qui faisaient presque toujours partie des Sept Joyaux bouddhiques (qibao ) bien qu’il y ait des listes variées de ces trésors. Le cuivre

76 Ming Xiaozong Jing Huangdi shilu い , juan 188, rééd. Taipei, Zhongyang yanjiuyuan lishi yuyan yanjiusuo,

1966, p. 3479-3480.

ou le bronze était une matière fréquemment utilisée. Sur un total de 17 cloches décrites par Daoxuan, neuf étaient fondues en or ou en argent, six en cuivre ou en bronze. Il y en avait encore deux, rares, qui ont été fabriquées respectivement en pierre et en bambou. Sous la plume de Daoxuan, la majorité de cloches n’était pas faite d’un seul matériau : celles en or ou en argent étaient souvent décorées de perles précieuses, celles en bronze étaient parfois ornées de reliefs en argent. La cloche de la Cour pour les adeptes de trois véhicules venus d’autres terres [pour étudier] les huit voies saintes (Tafang sancheng xueren bashengdao zhi yuan [

) était même divisée en trois parties : la section inférieure en or, décorée de reliefs émaillés ; celle au milieu en argent, avec des reliefs en cristal, la portion supérieure en agate mélangée à de l’or céleste (tianjin )78. En apparence, il n’y a pas de différences évidentes

entre les cloches en or, en argent et en cuivre/bronze en termes de fonctionnalité et d’efficacité, mais il est facile de remarquer qu’aucune de ces cloches, réputées avoir été fabriquées par des bouddhas, des boddhisattvas ou des saints, n’étaient en fer.

La littérature taoïste de la même époque, cependant, divise clairement les matériaux utilisés pour fabriquer des cloches en niveaux hiérarchisés. Selon le Texte révélé sur les règles

relatives à la cloche et à la pierre sonore de la tradition Lingbao du canon Dongxuan (le Zhongqing weiyi jing), les cloches installées dans le Ciel Daluo (Daluotian 代 ), dans les cieux des Trois Purs (Sanqingtian ) et dans les Neuf Cieux (Jiutian ] ), c’est-à-dire, dans les sphères supérieures suivant la vision cosmologique taoïste des Tang, ont été réalisées à partir de la véritable essence et du souffle merveilleux de la nature ; celles qui étaient dispersées dans les Cieux des quatre Brahmas (Sifantian ) et dans les Cieux des trois mondes (Sanjietian ), quant à elles, ont été fabriquées en or en provenance du phénix pourpre et du dragon vert et en pierre précieuse capable d’illuminer la nuit, eux-mêmes fusionnés par les neuf souffles célestes et le feu des neuf sources ; tandis que celles dans le Ciel Wanli (Wanlitian ), la couche inférieure, ont été fondues en or, en argent, en cuivre/bronze et en fer79. Il va de soi que les cloches les plus proches des niveaux supérieurs

des cieux taoïstes sont censées être faites de matériaux plus proches du souffle primordial, et inversement, les plus éloignées, de métaux ou de pierres communs.

78 T. 1899, vol. 45, p. 885c20-28.

La littérature religieuse des VIIe aux VIIIe siècle ne se limite pas à décrire les matières

idéales pour fabriquer des cloches divines, mais elle fournit une base théorique pour la pratique du moulage dans la réalité. La description des cloches célestes a pour but, d’une part, de décrire leur origine et leur fonction et, d’autre part, de souligner l’importance du choix de leur matériaux de construction. Après avoir discuté en détail des cloches dans les cieux, le

Zhongqing weiyi jing ajoute que celles utilisées dans le monde d’ici-bas devaient être fondues

en or, argent, cuivre ou fer, et que leur forme et leur taille pouvaient varier selon les circonstances80. Un autre texte datant du début des Tang, le Règlements pour la pratique du

taoïsme conformément aux textes des Trois grottes du canon Dongxuan de la tradition Lingbao

(Dongxuan lingbao sandong fengdao kejie yingshi ) de Jinming

Qizhen , a enrichi cette liste en précisant qu’il existait cinq matériaux utilisables, à savoir, or, argent, la fusion de cinq métaux (wujin , or, argent, cuivre, fer et zinc), cuivre, et fer81. Bien que Daoxuan ne l’ait pas affirmé, le même ordre a été suggéré dans son Tujing par

le fait que le nombre des cloches en or et en argent dépasse celui de cloches en bronze, et que les cloches en fer soient totalement absentes dans son monastère idéal82. À quelques exceptions

près, les quatre métaux, or, argent, cuivre et fer, apparaissent en général dans cet ordre fixe dans les textes bouddhiques ou taoïstes à partir de la période médiévale chinoise, ce qui indique la priorité de sélection des matières par les donateurs et les fondeurs de cloches.

À ce sujet, la théorie au niveau technologique coïncide avec les discours religieux. Dans son Les œuvres du Ciel et la création des dix-mille choses (Tiangong kaiwu ), une compilation sur les connaissances technologiques dans dix-huit domaines sélectionnés, Song Yingxing (1587-1666 ?), un fonctionnaire local mineur qui vécut dans le sud de la Chine à la fin des Ming, a hiérarchisé divers métaux en fonction de leur valeur, et la séquence ainsi obtenue est également « or, argent, cuivre et fer » 83. En analysant les quatre œuvres

existantes de ce « Diderot de la Chine » (appellation proposée par Joseph Needham84) dans son

contexte original, Dagmar Schäfer a pu préciser la manière dont Song Yingxing interprétait les phénomènes naturels et produisait des savoirs pratiques. Dans le monde de ce spécialiste de la

80 Ibid., p. 865b.

81 Sandong fengdao kejie yingshi , DZ. 1125, vol. 24, p. 752c. 82 T. 1899, vol. 45, p. 882b01-896b096.

83 Song Yingxing , Tiangong kaiwu , 1637, xiapian, « wujin », rééd. Guangzhou, Guangdong renmin

chubanshe, 1976. Voir aussi sa traduction en anglais, Sung Ying-hsing, Chinese Technology in the Seventeenth Century:

T’ienkung k’ai-wu, trad. et annotés par E-Tu Zen Sun and Sun Shiou- Chuan, Mineola, New York, Dover Publications, 1997,

part III, chapter 14, “The metals”.

84 Joseph Needham, Military Technology: The Gunpowder Epic, partie 7 du vol. 5, Chemistry and Chemical Technology, in

science et de la technologie du XVIIe siècle, les questions que nous considérons comme

« scientifiques » ou « technologiques » étaient abordées en termes de quelques notions philosophiques chinoises, dont le qi (souffle)85. Pour l’auteur du Tiangong kaiwu, les

minerais d’or et d’argent nécessitaient un mélange spécial et rare de conditions de qi qui ne se rencontrait qu’au plus profond de la terre et ne faisait surface que dans de très rares régions montagneuses éloignées. En revanche, d’autre métaux pouvaient être trouvés en grande quantité dans des endroits faciles d’accès et être produits à plusieurs reprises. C’est ainsi que le cuivre et le fer ont été classés par l’auteur comme des « métaux de moindre valeur »86.

La même vision sur l’ordre des métaux a été intégrée à la discussion des techniques de la fonte de cloches dans la même œuvre. Comme les exemples de cloches fondues en or ou en argent purs étaient rares, Song Yingxi a affirmé que les cloches de qualité supérieure étaient toutes fabriquées en bronze mais celles de qualité inférieure en fer. Selon les spécialistes de l’histoire des sciences et des technologies, les cloches en bronze des Ming et des Qing encore visibles aujourd’hui à Pékin sont généralement fabriquées dans un alliage contenant 70 à 80 % de cuivre et 11 à 17 % d’étain (avec un certain pourcentage d’autres métaux comme le plomb et le nickel), un ratio déjà consigné dans le Mémoire sur les Arts et Métiers (Kaogongji 仲

) datant des Royaumes combattants87. Cet alliage est devenu la matière idéale pour fondre

des cloches non seulement en raison de ses bonnes propriétés physiques88, mais aussi parce qu’il

est l’un des éléments permettant de produire des sons retentissants qui se propagent sur une longue distance89. Cependant, l’effet de la concentration des métaux dans les cloches en fer

(dont la teneur en fer est en général supérieure à 94%90) sur la production des sons reste peu

étudié91.

85 Dagmar Schäfer, The Crafting of the 10,000 things: Knowledge and Technology in Seventeenth-century China, Chicago, The

University of Chicago Press, 2011, p. 3.

86 Ibid., p. 151.

87 Wu Kunyi, « Mingqing fanzhong », art. cit., p. 292-293.

88 Joseph Needham, Mining, partie 13 du vol. 5, Chemistry and Chemical Technology, éd. par Peter Golas, in Science and

Civilisation in China, Cambridge, Cambridge University Press, 1999, p. 71.

89 Yang Yang, « Beijing zhonglou shengxiaoying », art. cit. p. 167.

90 Han Zhanming , Chen Jianli , Li Yanxiang , Han Rubin •, « Dazhongsi guancang tiezhong fenxi

baogao 僖住 », in Dazhongsi guzhong bowuguan éd., Dazhongsi, op. cit., p. 232-246.

91 Je n’ai trouvé qu’un article co-écrit par trois spécialistes d’histoire de la métallurgie américains, basé sur les résultats d’une

séquence d’expérimentations métallurgiques et acoustiques effectuées en 1984 sur cinq cloches des Ming et des Qing conservées au Field Museum of Natural History à Chicago, États-Unis, qui suggère que les cloches chinoises en bronze n’étaient pas toujours de bonne qualité et que celles en fer pouvait être compétitives tant au niveau du son qu’au niveau de prix. Voir William Rostoker, Bennett Bronson, James Dvorak, « The Cast Iron Bells of China », Technology and Culture 25-4, 1984, p. 750-767.

Disponibilités des matériaux

Bien que le bronze soit un bon matériau pour la fabrication des cloches, ses deux ingrédients principaux, le cuivre et l’étain, n’étaient pas abondamment produits au nord de la Chine des Ming et des Qing. Des tonnages importants de minerais de cuivre ont été extrait en surface à la fin de l’époque impériale, essentiellement pour le monnayage. Pourtant, l’État des Ming connut de graves pénuries de ce métal. Même l’exploitation des riches gisements de cuivre du Sichuan et du Yunnan au milieu et à la fin du XVe siècle n’aidèrent pas le

gouvernement à résoudre la pénurie car la réalisation de leur plein potentiel de production a été un processus long qui a duré des siècles. Notamment, les minerais de cuivre extraits ne pouvant pas être utilisés directement, un processus d’extraction et d’affinage du métal sous haute température, souvent effectué à proximité de la source du minerai, était nécessaire pour que le cuivre métal qui en résultait puisse être expédié ailleurs. Jusqu’à la fin des Ming, les petites quantités de la production de cuivre sur le territoire chinois ont dû être complétées par des importations en provenance du Japon92. Sous les Qing, même si la production des mines du

Yunnan a commencé à reprendre pendant l’ère Kangxi et a atteint son maximum à la fin du XVIIIe siècle, l’importation de ce métal depuis l’extrême sud-ouest à Pékin n’était jamais facile,

car celle-ci nécessitait une implication systématique du gouvernement central dans la gestion des mines provinciales et locales, ainsi que de longues routes de transport. Similairement, l’étain, dont les principaux gisements se trouvaient dans les provinces du Yunnan, du Hunan, du Jiangxi, du Guangdong et du Guangxi, était un autre métal qu’il fallait sécuriser à distance et importer à Pékin à partir de lieux éloignés93.

Un autre facteur qui contribuait aux restrictions de cuivre consistait dans le fait qu’il était l’ingrédient principal non seulement des objets en bronze, mais aussi des pièces de monnaie coulées qui était la forme de base de la monnaie pour la plupart des gens. Les États des Ming et des Qing furent donc très impliqués dans la garantie d’un approvisionnement en ce métal, un besoin qui n’a fait que se confirmer avec le temps. Sous les Ming, le code stipulait que les gens du peuple ne pouvaient posséder aucun objet en bronze ou en cuivre, à l’exception des miroirs, des instruments militaires, ainsi que des objets rituels comme des cloches ou des bols sonores dans les temples. Le reste devait être vendu au gouvernement conformément à un prix officiel uniforme. Ceux qui possédaient illégalement des objets en cuivre illégalement, ou

92 Joseph Needham, Mining, op. cit., p. 88-89. 93 Ibid., p. 90-91.

qui en faisaient le commerce étaient punis par la flagellation94. Cependant, un nombre de faits

montrent que l’interdiction du cuivre sous la dynastie des Ming n’était pas strictement appliquée. L’un d’entre eux fut l’essor de la frappe de la monnaie privée durant le XVe siècle, conduit par

la demande aiguë de pièces de monnaie dans les petits commerces, rendu possible par le relâchement du contrôle du cuivre. Cela a par ailleurs entraîné le fait que la monnaie à forte teneur en cuivre acquit une valeur plus élevée sur le marché, ce qui éliminait la monnaie émise par le gouvernement95. La cour impériale des Ming n’a repris le contrôle sur la masse monétaire

qu’après le début du règne de l’empereur Jiajing dans les années vingt du XVIe siècle96.

En revanche, au début des Qing, le gouvernement fut particulièrement préoccupé par la disponibilité du cuivre pour la frappe de la monnaie, surtout avant que les mines de cuivre du Yunnan ne produisent suffisamment de minerai. C’est pourquoi l’utilisation d’ustensiles en laiton (alliage de cuivre et de zinc de couleur jaune, très ductile et malléable) fut interdite entre 1726 et 1736. Après 1736, leur fabrication était toujours surveillée, à Pékin en particulier. En principe, tout le cuivre était acheté par l’État et ce n’est qu’après le milieu du règne de Qianlong qu’une petite quantité de cuivre dit « commercial » a été légalement mis sur le marché97. En

effet, la quantité de cuivre et d’objets en ce métal disponible sur le marché de la capitale sous les ères Daoguang et Xianfeng était encore limitée. En 1861, un rapport adressé à l’empereur a même déclaré que l’État était à nouveau confronté à une pénurie de cuivre, principalement à cause de la guerre qui coupait les sources et routes d’approvisionnement, et a suggéré ainsi que les fonctionnaires en poste dans la capitale, quel que soit leur rang, devaient remettre à l’État tous les objets en bronze ou en cuivre de leurs maisons qui pesaient plus d’un jin, afin d’alléger la pression sur la fabrication de la monnaie métallique98.

Le fer, moins prestigieux que le cuivre et l’étain, était en revanche disponible dans la région de Pékin. De grands gisements de minerai facilement exploitables se trouvaient dans plusieurs endroits dès l’antiquité jusqu’à la fin de la période impériale. La quantité de minerai était si considérable que, après plus de 2000 ans d’exploitation, Song Yingxing pouvait encore écrire, au début de sa discussion sur le fer dans son Tiangong kaiwu, que l’on pouvait trouver

94 Da Ming huidian, juan 164.

95 Ricard von Glahn, Fountain of fortune, Money and Monetary Policy in China, 1000-1700, Berkeley, University of California

Press, 1996, p. 84-88.

96 Ibid., p. 97-104.

97 Ibid., p. 207-211; Hans Ulrich Vogel, « Chinese Central Monetary Policy, 1644-1800 », Late Imperial China, Volume 8, no

2, 1987, p. 1-52 ; Christine Moll-Murata, State and Crafts in the Qing Dynasty, Amsterdam, Amsterdam University Press, 2018, p. 95.

98 Zouwei tongjin duanchu bufu guzhu qing zai Jing daxiao guanyuan chengjiao tongqi shi

des mines partout. Il a précisé par la suite que le minerai fer affleurait à la surface de la terre et était abondant sur les collines basses et ensoleillées. Après avoir expliqué les différents types de minerais dans lesquels les métaux apparaissaient, il a énuméré quelques endroits où l’on trouvait du minerai de fer en abondance, parmi lesquels figure Zunhua (dans l’actuelle Hebei) près de la région de la capitale99.

L’histoire de la production du fer dans ce site à environ 150 km à l’est de Pékin remonte probablement aux Tang, par la suite, il devint progressivement l’un des centres importants de l’industrie métallurgique au nord. Comme l’indique Donald Wagner, cette industrie a pu se développer non seulement en raison de grands gisements de métal, mais aussi grâce à plusieurs conditions socio-économiques et géologiques qui étaient réunies, dont une demande locale robuste et un accès suffisant à un combustible nécessaire pour la fusion100.

Depuis les Song, la croissance démographique dans le nord de la Chine a entraîné une demande accrue de fer, au niveau de la vie quotidienne comme au niveau politico-militaire de l’État. C’était particulièrement le cas au début des Ming. À l’ère Yongle, le fer forgé pour l’armement n’était produit que dans le sud, de plus, les transports et le commerce n’étaient pas suffisamment développés pour fournir un approvisionnement sûr à la capitale du nord101.

L’établissement d’un centre de production de fer au nord, à proximité de Pékin, était ainsi impératif.

La densité de la population a stimulé la demande économique d’un côté, mais a provoqué une pression foncière et la destruction des forêts de l’autre côté. L’importance des forêts réside dans le fait qu’elles fournissaient du charbon de bois, un meilleur combustible pour la fusion du métal car le fer produit à partir de combustible minéral a une forte teneur en soufre et raffiner ce fer pour produire du fer forgé aurait abouti à un produit de qualité inférieure.