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Matériaux composites tissés : classification, intérêts, élaboration

3 Comportements et endommagements des ma- ma-tériaux composites tissés

3.1 Matériaux composites tissés : classification, intérêts, élaboration

3.1.1 Classification des matériaux composites

Un matériau composite est constitué d’au moins deux éléments structuraux prin-cipaux (comme par exemple le béton armé), dans le but d’obtenir un nouveau maté-riau possédant des propriétés globalement améliorées par rapport à ses constituants pris séparément. Il est généralement composé :

– De renforts. Ils sont généralement constitués de fibres courtes ou longues, ou de particules, et constituent l’armure structurale du composite en assurant l’essentiel des propriétés mécaniques du composite.

– Et d’une matrice dans laquelle sont noyés les renforts, assurant la cohésion de l’ensemble et le transfert des efforts ainsi que l’essentiel des propriétés autres que mécaniques.

Un troisième constituant, appelé interphase, peut éventuellement être déposé autour de chaque fibre qui joue un rôle fondamental dans les propriétés thermo-mécaniques du matériau, en assurant le transfert de charge entre les fibres et la matrice.

Il est d’usage de classer les composites par la nature de leur matrice, pour deux raisons : la matrice assure toutes les fonctions autres que la tenue mécanique voire une partie des propriétés mécaniques, et conditionne le choix du procédé de mise en forme. On distingue habituellement trois familles :

Les composites à matrice organique (CMO)

Il s’agit, de loin, des composites les plus répandus : ce sont en effet les seuls com-posites ayant, pour beaucoup d’entre eux, des coûts unitaires suffisamment réduits pour pouvoir être produits en grandes séries. Les matrices employées pour ces com-posites sont des résines polymères de deux types : les thermodurcissables comme les résines polyester et époxy (les plus utilisées en raison de leur plus grande facilité de

3. Comportements et endommagements des matériaux composites tissés 21 mise en forme), et les thermoplastiques (moins utilisés mais recyclables). Différentes fibres peuvent être employées avec ces matrices. Les plus courantes sont les fibres de verre (95% des renforts), les fibres de carbone, les fibres d’aramide (kevlar) ou de polypropylène, et les fibres végétales (chanvre, lin). Les applications « hautes perfor-mances », comme dans l’industrie aéronautique, utilisent des fibres longues tissées ou encore empilées en plis unidirectionnels, ce qui permet d’optimiser les propriétés mécaniques du composite.

(a) Aube Fan - Snecma/Safran (b) Contre-fiche train d’atterrissage -Messier-Dowty/Safran

Figure I.13 – Quelques applications des composites à matrice organique (CMO) « hautes performances » dans l’industrie aéronautique

Les composites à matrice céramique (CMC)

Beaucoup moins répandus que les CMO en raison d’un coût élevé, les CMC sont des matériaux thermostructuraux généralement destinés aux applications de très haute technicité et à haute température comme l’aéronautique et le nucléaire. Les renforts et la matrice sont souvent constitués de carbure de silicium (SiC), de carbone (C) ou d’alumine (Al2O3). Ayant des comportements assez similaires aux matrices céramiques, les matrices de carbone sont souvent assimilées aux CMC. Il est relativement fréquent que les renforts et la matrice soient faits du même matériau : le rôle de la structure composite, ici, n’est pas tant de combiner les propriétés des constituants que d’en faire émerger de nouvelles, à savoir la ténacité et la ductilité.

(a) Volets froids en composites thermostruc-turaux C/SiC (Avion de combat Rafale).

(b) Prototype de mélangeur en CMC sur moteur CFM56-5C.

Figure I.14 – Quelques applications des composites à matrice céramique (CMC) sur les moteurs civils et militaires.

Les composites à matrice métallique (CMM)

Ils comportent une matrice en métal léger (aluminium et ses alliages, magnésium, titane,...) et un renfort pouvant être, comme pour les CMO ou CMC, soit des fibres courtes céramiques ou particules, soit des fibres longues céramiques ou métalliques. Un avantage de ces composites est que la matrice étant métallique, ses caractéris-tiques mécaniques intrinsèques sont généralement bonnes. Un inconvénient est la grande réactivité chimique des métaux : lors de la mise au point du composite, il faut s’assurer que la matrice et le renfort ne peuvent pas réagir entre eux, faute de quoi les conséquences sur les propriétés mécaniques peuvent être catastrophiques. Les matériaux composites à matrice métallique (CMM) sont utilisés dans les zones de température relativement élevée (jusqu’à 500˚C). Le disque ANAM (Anneau Aubagé Monobloc), développé par Snecma, est fabriqué avec une matrice de titane renforcée des fibres longues Sic. L’usage de ce matériau a permis une optimisation de la structure (passage d’un disque à un anneau) réduisant ainsi la masse, à perfor-mance égale, d’environ 50% (voir FigureI.15). Les composites à matrice métallique sont également utilisés par Messier-Dowty pour la fabrication de trains d’atterrissage pour les avions Airbus A400M et Boeing 787.

Figure I.15 – Utilisation du composite Sic/Titane pour la fabrication de disque ANAM.

L’architecture des renforts doit être adaptée aux fonctions techniques à remplir. Une voie intéressante concerne les techniques textiles qui sont maintenant utilisées pour concevoir des structures composites de plus en plus complexes. Dans ces struc-tures, les fibres sont tressées ou alignées en « câbles » nommés torons ou simplement fils, comptant chacun quelques centaines ou milliers de fibres. Ces fils sont ensuite tissés selon des motifs plus ou moins sophistiqués. Une fois la mise en forme termi-née, la matrice est présente à deux niveaux : au sein des fils (ie. entre les fibres), et au sein du tissu (ie. entre les fils). Les motifs du tissu peuvent être extrêmement variés. La figure I.16 montre une gamme type de préforme textile plus répandues dans le domaine des structures composites. Elles sont de deux types, bidimensionnelles et tridimensionnelles. Les préformes bidimensionnelles se composent d’un empilement de plis indépendants l’un de l’autre, dont le transfert de charge est réalisé principale-ment dans les deux directions du plan. Par contre, les préformes tridimensionnelles permettent d’assurer un transfert de charge selon les trois directions de l’espace. La majorité des préformes textiles bidimensionnelles sont les tissus, les tricotés, les

3. Comportements et endommagements des matériaux composites tissés 23 tressés et les triaxiaux. Pour les tridimensionnelles ce sont les tissés, les cousus, les tricotés et les tressés.

Pr éf or m es Te xt il es Bi di m ensi onne ll es T ri di m ens ionne ll es Cousu Tissé Tressé Tricoté

Stratifié cousu (tissé et non tissé) Sandwich cousu Interlock 2.5D Interlock 3D Interlock orthogonal Solide Cartésien Tubulaire

Chaîne de tricotage multiaxial Sandwich tricoté

Tricoté

Tissus

Tressé

Tricoté en sens trame Tricoté en sens chaîne Taffetas Satin Sergé Hybride Circulaire Figuré

Plat BiaxialTriaxial

Couche-Couche Couche à couche 2-pas 4-pas Multi-pas Tricoté 3D multiaxial Adanur et Liao (1998) Tressé 3D Dexter (1998)

Tissage angle Interlock 3D Adanur et Liao (1998) Stratifié cousu (non tissé) Drapier et Wisnom (1999) Tressé circulaire Adanur et Liao (1998) Tissus taffetas 2D El-Hage (2006) Tricoté en sens chaîne Falconnet et al. (2002)

Figure I.16 – La structure des types de préforme textile

Dans le cadre de ces travaux de thèse, nous nous sommes plus particulièrement intéressé aux matériaux composites tissés qui sont caractérisés par une orientation à 90˚des fils de chaîne et de trame dans le plan. La catégorie des renforts tissés bidimensionnels est constituée des taffetas, des sergés et des satins (voir Figure

I.17). On distingue différentes catégories de préformes de tissage tridimensionnelles réunies sous le terme générique de tissage « angle interlocks ». Ils sont constitués d’une structure de plusieurs plans nominaux contenant des mèches droites dirigée en sens chaîne et sens trame qui sont reliés entre eux à travers des mèches tissés en sens chaîne. Plusieurs types de tissage angle interlock peuvent exister :

– Le tissage angle Interlock 3D, ou encore appelé « Through-Thickness Angle Interlock ».

– Le tissage couche-couche 2.5D, ou encore appelé « Layer-Layer Angle Inter-lock ».

– Le tissage couche à couche 2.5D, ou encore appelé « Layer to Layer Angle Interlock ».

– Le tissage orthogonal Interlock, ou encore appelé « Layer to Layer Angle In-terlock ».

(a) Tissu taffetas. (b) Tissu sergé 2x2. (c) Tissu satin de 5.

Figure I.17 – Quelques types de tissus 2D.

3.1.2 Procédés d’élaboration des matériaux composites tissés

Précédemment, nous avons vu que les composites diffèrent par la nature de leur architecture interne. Un autre critère de classification est la nature de la matrice. Dans le cadre de ce travail de thèse, nous nous sommes focalisés uniquement sur les matériaux composites tissés à matrice organique et à matrice céramique. La fabrication de structures en composites tissés se décompose usuellement en deux étapes principales.

Dans un premier temps, il convient de réaliser une préforme fibreuse sèche ou armure demandant un savoir-faire technologique important. Ensuite, la matrice est injectée au sein de la préforme fibreuse sèche. Ce procédé de fabrication permet la réalisation de structures de formes complexes « one shot », réduisant au maximum l’étape d’assemblage et évitant l’introduction de jonctions (boulonnées ou collées) fragilisant la pièce. Il existe différents procédés de fabrication des matériaux tissés.

Les composites à matrice organique

Ils peuvent être élaborés par injection ou infusion. Les pièces tissées 3D CMO élaborées par Snecma sont conçues par injection RTM (Resin Transfer Moulding). Le procédé RTM consiste à placer la préforme fibreuse entre deux moules rigides chauffant et à injecter sous pression au moyen d’une pompe, la résine (matrice), mélangée au catalyseur. Les résines utilisées dans ce procédé présentent une faible viscosité afin de faciliter son écoulement au sein de la préforme fibreuse et de mi-nimiser les porosités. Lorsque la résine est polymérisée, le moule est ouvert et le composite retiré. Ce procédé permet ainsi de fabriquer des structures composites de tailles modérées et présentant deux faces lisses.

3. Comportements et endommagements des matériaux composites tissés 25 On dénombre trois techniques de densification : la voie gazeuse, la voie liquide ou bien la voie solide [Pen02]. La technique retenue par Snecma Propulsion So-lide est l’infiltration chimique en phase vapeur CVI (Chemical Vapor Infiltration). Le principe de la CVI consiste à densifier des préformes, constituées de fibres, par « craquage » d’un gaz porté à haute température [Nas04]. Autrement dit, un gaz est injecté dans une enceinte, et pénètre par diffusion, ou par convection, dans le réseau poreux jusqu’au cœur de la préforme, et vient y déposer par réaction chi-mique un dépôt solide. L’un des défauts majeurs de ces matériaux pour les appli-cations à hautes températures (>500˚C) est la sensibilité de la fibre de carbone à la thermo-oxydation. C’est la raison pour laquelle des matrices multiséquencées ont été développées afin de ralentir la progression de l’oxygène et ainsi augmenter la durée de vie du matériau [Lam05].

3.2 Comportement mécanique des matériaux composites