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3 Description d’une cellule élémentaire à l’échelle microscopique

3.1 Caractérisation morphologique d’un fil

3.1.1 Fraction volumique de fibres

La fraction volumique de fibres est certainement l’un des paramètres importants étant donné qu’il affecte au premier ordre les propriétés effectives des fils. Cette quantité peut être mesurée par dissolution chimique de la matrice. On en détermine le poids et la densité volumique des constituants. Des techniques de photomicro-graphies sont également utilisées pour déterminer le nombre de fibres suivant un fil sectionné, et caractériser l’arrangement des fibres. Pour un composite tissé de type CMO et CMC, le fil est composé d’un amas de fibres cylindriques très désordon-nées, comme le montre la FigureIV.4. Les propriétés locales d’un fil se trouvent être fortement influencées par les distances locales interfibres. Les modélisations basées sur un arrangement parfait des fibres (arrangement carré ou hexagonal) ne sont pas capables de prendre en compte cette variabilité et restent donc très insuffisantes. Couegnat [Cou08] a mis en place un programme, nommé GENCELL, permettant de caractériser le "désordre" dans l’arrangement des fibres à partir d’analyses de covariance, dans le but de déterminer la taille minimale d’un volume élémentaire représentatif (VER).

De plus, l’organisation des fibres est localement modifiée par des sollicitations mécaniques externes comme la compression. La fraction volumique de fibres n’est donc pas uniforme le long d’un fil. Ces fluctuations peuvent être estimées à par-tir de modèles mécaniques prenant en compte la compressibilité des fils [Lom00b].

RC

2a2

2a1=f(RC)

2a2

seq seq

Figure IV.3 – Définition géométrique de l’ellipsoïde équivalent représentant un segment courbe d’une mèche.

L’arrangement des fibres est estimé à partir d’observation sur des coupes expérimen-tales. Des fractions volumiques moyennes sont alors obtenues pour chaque segment discrétisant et constituant le fil. Leurs valeurs oscillent typiquement entre 60 et 80% pour des composites tissés.

(a) Micrographie d’une section de fil

CMC (b) Image binarisée obtenue à partir dela micrographie

Figure IV.4 – Arrangement de fibres dans un fil de CMC [Cou08]

3.1.2 Orientation des fibres

Alors que la fraction volumique de fibres est principalement responsable du com-portement mécanique global du composite, les directions d’anisotropie sont quant à elles pilotées par les distributions d’orientations des renforts. Les différentes orien-tations dans les composites tissés ne sont pas simples à obtenir expérimentalement, c’est pourquoi elles sont généralement issues des modèles géométriques. Les me-sures expérimentales s’appuient sur les propriétés géométriques des fibres, à savoir qu’elles sont de sections circulaires. Ainsi, en mesurant les longueurs des

demi-3. Description d’une cellule élémentaire à l’échelle microscopique 121 axes des sections elliptiques des fibres inclinés, on peut remonter à l’orientation des fibres [Gom98,May92]. Cette méthode laborieuse laisse supposer que les fibres restent parallèles à ligne moyenne du fil. L’orientation de chaque section du fil est caractérisée par trois angles ZXZ (voir Figure IV.5). Les trois étapes suivantes dé-crivent la rotation :

1. Effectue la rotation des axes x1, x2 et x3 autour de l’axe x3 par φ (˘π < φ < π), ce qui produit les axes x,

1, x,

2 et x3. 2. Effectue la rotation des axes x,

1, x,

2 et x3 autour de l’axe x,

1 par θ (0 < θ < π), ce qui produit les axes x,

1,x,,

2 et x,

3. 3. Effectue la rotation des axes x,

1,x,,

2 et x,

3 autour de l’axe x,

3 par (˘π < ψ < π), ce qui produit les axes x,,

1, x,,,

2 et x,

3.

D’autres combinaisons plus classiques comme les angles d’Euler(ZXY) sont égale-ment applicables. La distribution des orientations peut alors être décrite avec des fonctions probabilistes. x1 x3 x2 x1' x2' ϕ

(a) Rotation sur l’axe x3 x1 x3 x2 x1' ϕ x2'' x3' θ

(b) Rotation sur l’axe x,

1 x1 x3 x2 x1' ϕ x2'' x3' θ x1'' x2'''

(c) Rotation sur l’axe x,

3

Figure IV.5 – Définition de la rotation de chaque section d’un fil avec les angles d’Euler φ, θ, et ψ.

3.2 Estimation des propriétés élastiques

Pour déterminer les propriétés élastiques effectives du fil, deux approches analy-tiques sont généralement utilisées pour les composites à renforts particulaires et à fibres courtes : la méthode de Mori-Tanaka et la méthode auto-cohérente. Quelque soit la méthode utilisée, le comportement effectif du composite est donné par :

Cef f = CM + n X α=1 Vα f  Cα − CM Aα (IV.2)

où Cef f représente le tenseur de rigidité effectif du composite, Aα le tenseur de loca-lisation des déformations pour une inclusion ellipsoïdale α, να

f la fraction volumique des renforts, Cα la rigidité des fibres et CM celle de la matrice.

Le tenseur de localisation des déformations prend une forme différente selon la méthode d’homogénéisation utilisée. Ces méthodes restent basées sur le prin-cipe de transformation d’Eshelby. Quelques équations utiles aux développements des différents méthodes d’homogénéisation sont rappelés. La solution du champ de

déformation induit par une hétérogénéité ellipsoïdale Ωα de constantes d’élasticité

Cα dans une matrice élastique infinie de constantes d’élasticité CM soumise à une déformation à l’infinie ε0, est donnée par :

εα ij(x) = Sα ijklεα ijkl, ∀x ∈ Ω (IV.3) εα ij(x) = Dα ijkl(x) εα ijkl, ∀x /∈ Ω (IV.4) Ces deux équations permettent d’établir l’équation d’équivalence suivante :

Cα ijkl  ε0 kl+ Sα klmnεα mn  = CM ijkl  ε0 kl+ Sα klmnεα mn− εα kl  (IV.5) Les avantages et les inconvénients de ces deux méthodes sont exposés par la suite.

3.2.1 Modèle de Mori-Tanaka

L’approche proposée par Mori-Tanaka considère une fraction volumique Vf d’in-clusions de même forme et de même orientation dans une matrice infinie [Mor73]. Le principe de l’estimation des modules effectifs du matériau par cette approche consiste à considérer, pour chaque famille d’inclusions, une inclusion ellipsoïdale unique équivalente, dans la phase matrice supposée infinie, en supposant que cette inclusion est soumise à l’infini, à un champ de déformation homogène égal au champ moyen εm dans la matrice. En d’autres termes, la déformation moyenne de la matrice est égale à la déformation macroscopique du VER.

On cherche à déterminer le champ de déformation moyen dans une inclusion α, entourée de (n − 1) inclusions β (voir Figure IV.6),

εα = Sααεα+ n X β=1,β6=α Sαβεβ (IV.6) où

Sijklαβ = Dijklβ (xα) (IV.7)

CM Equivalence CM Cα εα* εβ* εβ* ε0 ε0 Ωα Ωβ Ωβ Ωm Ωm

Figure IV.6 – Passage d’un milieu constitué d’hétérogénéités vers un milieu consti-tué d’inclusions par ajout de déformations d’incompatibilité nommées « eigens-trains »

Le champ de déformation total dans un domaine constitué de la matrice et de n inclusions s’exprime tel que,

Vfmεm+

n

X

α=1

3. Description d’une cellule élémentaire à l’échelle microscopique 123

εm représente le champ de déformation moyen de la matrice, Vα

f et Vm

f sont les fractions volumiques des inclusions et de la matrice, respectivement.

Vm f + n X α=1 Vα f = 1 (IV.9)

Le second terme de l’équation IV.6 représente les perturbations secondaires in-duites par les inclusions voisines sur l’inclusion α. Cette seconde partie, encore ap-pelée déformation image εim, est considérée identique dans tout le domaine, quelque soit l’inclusion α. εmΣ = ε0+ εim (IV.10) εαΣ= ε0+ εim+ Sααεα (IV.11) εα = (Sαα)−1α Σ− εm Σ) (IV.12)

La première étape de ce procédé d’homogénéisation consiste à définir un tenseur de localisation et un tenseur de localisation dilué (voir Figure IV.7). Le tenseur de localisation Aα relie la totalité des déformations induites dans l’inclusion en fonction de la déformation appliquée à l’infini. Le tenseur de localisation dilué Aα

m (« pseudo-tenseurs de localisation » relie la déformation totale dans l’inclusion en fonction de la déformation moyenne de la matrice.

εαΣ = Aαε (IV.13)

εαΣ = Aα

mεm

Σ (IV.14)

A partir de l’équation IV.8 une expression explicite du tenseur de localisation est établie, Aα = Aα m Vm f Id+ n X β=1 VfβAβ m (IV.15)

Le tenseur de localisation dilué est obtenu à partir de la combinaison des équa-tions IV.5 etIV.12 telle que,

Aα m =  Id+ SααCM−1 Cα − CM−1 (IV.16) Les interactions entre les inclusions sont prises en compte de manière indirecte à travers la moyennation des déformations. Chacune des inclusions ressent indirec-tement la présence des inclusions voisines à travers la déformation totale dans la matrice. Néanmoins, ce modèle ne s’applique correctement que lorsque la fraction volumique d’inclusions reste modérée, typiquement, inférieure à 30%.

3.2.2 Modèle auto-cohérent

Cette approche [Hil65], initialement développée pour les agrégats (polycristaux), consiste à établir une loi de localisation en considérant chaque phase du matériau (renforts) comme une seule inclusion ellipsoïdale dans un milieu infini homogène

Ω

α

ε

Σm

0

m

ε

0

A

α

A

mα

Ω

m

ε

Σα

0

α

Figure IV.7 – Différents tenseurs de localisation.

qui possède le comportement du milieu homogène équivalent recherché, caractérisé par Cef f. La résolution de l’équation s’effectue selon une procédure itérative sur le tenseur matériau effectif Cef f :

1. Le tenseur matériau effectif est initialisé par la valeur du tenseur matériau de la matrice Cef f = CM.

2. Le tenseur d’Eshelby Sαα est calculé pour chaque inclusion individuellement. Sa valeur dépend des propriétés matériaux effectifs de la matrice.

3. On détermine le tenseur de localisation des déformations.

Aα = Aαm VfmId+ n X β=1 VfβAbetam −1 (IV.17) où, Aα m =  Id+ Sαα Cef f−1 Cα − Cef f−1 (IV.18) 4. On calcule le tenseur matériau effectif du composite actualisé

Cef f = Cef f + n X α=1 Vα f  Cα − Cef fAα (IV.19) 5. On itère sur le tenseur matériau effectif jusqu’à convergence de celui-ci.

La convergence est relativement rapide, hormis des situations impliquant des inclusions de propriétés matériaux très différentes. L’approximation autocohérente prend en compte de manière globale les interactions entre les inclusions d’un agrégat dans une hypothèse de « désordre parfait ». En comparaison, la méthode de Mori-Tanaka ne les considèrent que partiellement.

4 Description du modèle d’endommagement