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Type VI Episodes mixte labile-agité dans la survenue de démence.

III. GRANDES NOTIONS SUR LES DEMENCES

3.4. Causes de troubles cognitifs sévères et de démences

3.4.2. Troubles neurodégénératifs

3.4.2.3. Maladie de Parkinson et démence parkinsonienne

Nous n’aborderons que brièvement la maladie de Parkinson (MP) et la démence parkinsonienne (DP), à travers notamment leurs manifestations neuropsychiatriques et leurs différences avec la démence à corps de Lewy (DCL).

a. Généralités

La MP est la 2ème maladie neurodégénérative (et non pas la 2ème cause de démence) la plus fréquente après la MA. D’après l’Inserm, elle est rare avant 45 ans, se déclare généralement entre 50 et 80 ans avec un pic autour de 70 ans : 1 % des plus de 65 ans sont concernés. Au total, entre 100 000 et 120 000 personnes sont touchées en France, 8 000 nouveaux cas se déclarent chaque année. L’incidence progresse, du fait du vieillissement de la population (169). L’étiologie et les facteurs de risque sont encore mal connus. L’âge constitue le facteur de risque principal. Il existe souvent une prédisposition génétique (surtout lorsque la maladie débute chez avant 50 ans). Il existe également des preuves de dysfonctionnement mitochondrial. Cette pathologie est plus fréquente chez les hommes que chez les femmes (169) (170). Dans la MP, le processus neurodégénératif touche les NGC au niveau des neurones dopaminergiques de la substance noire du locus niger. Il s’agit sur le plan histologique d’une alpha synucléinopathie, (maladies neurodégénératives caractérisées par l'accumulation anormale d'agrégats de protéine synucléine dans les neurones, les fibres nerveuses ou les cellules gliales) (169). Il existe 3 principales synucléinopathies : la MP, la DCL et l’atrophie multisystématisée (AMS).

b. Diagnostic

La maladie est caractérisée par des troubles moteurs d’apparition progressifs, avec un syndrome parkinsonien « typique ». Les troubles cognitifs et à fortiori la DP sont d’apparition plus tardive dans la forme pure de la maladie. Concernant la triade du syndrome parkinsonien dans la MP :

- L’akinésie est caractérisée par un retard à l’initiation du mouvement et à des difficultés de son exécution. La marche est lente, difficile à initier, à petits pas, avec une diminution du ballant des bras et à une position penchée du tronc, les demi-tours sont décomposés. L’akinésie entraîne une micrographie et une dysarthrie.

- La rigidité est extrapyramidale, « plastique », le sujet résiste de manière constante pendant tout le mouvement, avec une « roue dentée », c’est-à-dire une résistance cédant par à-coups lors de l’extension du bras ou de l’avant-bras (170).

- Les tremblements de repos constituent un signe d’appel important mais peuvent ne pas être visibles au début et d’abord être ressentis comme des « tremblements internes » (170).

Le diagnostic de la MP est essentiellement clinique et confirmé par l’efficacité du traitement dopaminergique sur les signes moteurs. La HAS précise qu’il faut éliminer un syndrome parkinsonien médicamenteux : antipsychotiques, anti-émétiques, et autres neuroleptiques cachés, et plus rarement inhibiteurs de recapture de la sérotonine, lithium, ou encore amiodarone (171). Aucun examen complémentaire n’est justifié si le tableau est typique (171). Dans quelques cas où le diagnostic est beaucoup plus difficile ou atypique, il est possible d’avoir recours aux examens complémentaires, notamment d’imagerie. Ces signes d’atypicité sont notamment : une absence de tremblement de repos, un syndrome parkinsonien symétrique (ou rigidité axiale dominante), des signes neurologiques inattendus ou atypiques (syndrome cérébelleux, syndrome pyramidal, troubles oculomoteurs, dysautonomie sévère …)(171). La réalisation d’un DAT-SCAN permettra de confirmer de manière directe la perte dopaminergique devant un syndrome parkinsonien douteux, afin d’aider au diagnostic différentiel avec un tremblement essentiel. Lorsqu’un doute subsiste entre une MP et une autre démence (et notamment en cas de syndrome parkinsonien atypique), il est possible de réaliser une scintigraphie myocardique au MIBG. Pour rappel, dans la MP et la DCL, il montrera une hypocaptation cardiaque significative de la MIBG, alors que dans les autres syndromes parkinsoniens atypiques, la réduction de la captation sera modeste, qualifiée de normale. Chez un sujet jeune (moins de 40 ans) présentant un syndrome parkinsonien, il est obligatoire d’éliminer une maladie de Wilson par le biais d’un bilan du cuivre assorti d’une IRM cérébrale.

c. Évolution de la maladie

La MP est lentement évolutive ; classiquement on dénombre 4 stades :

- Stade prodromique : il peut évoluer sur plusieurs années, avec des signes discrets voire passant inaperçus. Une dépression ou une apathie peuvent notamment être inauguraux.

- Stade de « lune de miel » : la phase d’état s’installe, avec des signes parkinsoniens francs. Le traitement dopaminergique est alors efficace sur les troubles moteurs avec peu de prises quotidiennes.

- Stade des complications motrices : les symptômes moteurs commencent à résister au traitement, avec des fluctuations et des dyskinésies résistantes. A un stade très évolué de la maladie, les signes axiaux deviennent marqués, avec des troubles posturaux, des blocages moteurs (« freezing ») et un risque accru de chutes (172). On observe également l’émergence de troubles cognitifs.

- Démence parkinsonienne (DP) : ce stade peut survenir de manière concomitante avec le stade des complications motrices. La DP est souvent tardive lorsque la maladie est survenue de manière précoce, mais elle peut s’observer beaucoup plus rapidement si la MP débute chez un sujet déjà âgé (173). Les signes les plus fréquents sont liés à une atteinte sous-cortico-frontale, avec (de façon plus modérée que dans d’autres démences) une réduction des capacités attentionnelle et de la planification, des troubles mnésiques, des atteintes du langage ou encore un ralentissement intellectuel (174). Les SPCD sont fréquents dans la DP (175). Il est parfois difficile de faire le diagnostic différentiel avec d’autres démences (DCL, DV ou MA).

c. Manifestations psycho-comportementales dans la maladie de Parkinson

Plus de 60 % des patients atteints de la MP présentent des troubles psychiatriques ou psycho- comportementaux à un moment ou l’autre de l’évolution de leur maladie (176). On peut retrouver :

- Dépression : elle est difficilement diagnostiquée dans la MP, parce que souvent banalisée,

et parce que de nombreux symptômes de dépressions peuvent se confondre avec ceux de la MP (ralentissement psychomoteur, akinésie, baisse des performances cognitives, troubles du sommeil et de l’appétit, etc.) (177). L’hypothèse étiologique la plus commune est celle d’une dépression réactionnelle (annonce, ou vécu d’une maladie chronique). Certains auteurs considèrent la dépression comme un signe à part entière de la MP, pouvant être inaugurale dans 10,4 % des cas (178). Une étude montre même un risque de développer une MP trois fois plus élevé en cas d’antécédents dépressifs (179). Parmi les autres pistes étiologiques, l’hypothèse iatrogène est discutée, les agonistes dopaminergiques ne semblent pas directement associés à la dépression, mais pourraient majorer les symptômes (180). Enfin, la dépression pourrait être liée

diminution corticale dopaminergique et sérotoninergique (181). Lors de survenue d’une dépression dans la MP, une coordination interdisciplinaire est nécessaire, avec si besoin une adaptation du traitement antiparkinsonien. Aucun traitement antidépresseur n’est contre- indiqué, et il est recommandé de traiter les symptômes dépressifs, avec en première intention des antidépresseurs ISRS et IRSNA associés à une prise en charge psychothérapeutique (182). Certains ISRS peuvent aggraver le syndrome parkinsonien par altération de la transmission dopaminergique. Les antidépresseurs tricycliques peuvent être mal tolérés (effets anticholinergiques : constipation, rétention d’urine, confusion). Notons que les antidépresseurs sont souvent sous dosés dans la MP (183). Lors de dépressions sévères (mélancoliformes), avec mauvaise tolérance au traitement et/ou résistance, une prise en charge par sismothérapie peut être envisagée. L’ECT n’aggrave pas le syndrome parkinsonien. L’intérêt de la stimulation magnétique transcrânienne n’a pas été démontrée chez ces patients (184).

- Troubles anxieux : tous les troubles anxieux peuvent être observés, avec une prévalence plus

élevée par rapport à la population générale, ou à des groupes de patients ayant d’autres maladies neurologiques ou chroniques (185).

- Apathie : l’apathie parkinsonienne serait secondaire à la dénervation dopaminergique

mésocorticolimbique. Il faut éviter d’instaurer des antidépresseurs en cas d’apathie non associée à des symptômes dépressifs. Cette indication n’est pas valable que dans la MP.

- Troubles du sommeil : ils sont présents à tous les stades de la maladie et sont multifactoriels

(liés à l’anxiété, à la dépression, iatrogènes..) ; ils peuvent associer une insomnie d’endormissement, un sommeil fragmenté, des troubles du sommeil paradoxal avec rêves intenses, des hallucinations nocturnes hypnagogiques (à l’endormissement) ou hypnopompique (au réveil) un syndrome des jambes sans repos, une apnée du sommeil, une somnolence diurne … (148).

- Manifestations psychotiques : on retrouve des hallucinations visuelles, auditives,

somesthésiques ou olfactives, plus rarement des idées de persécution (étiologies multifactorielles : iatrogène, secondaires à la démence, une dépression ou à une autre démence associée (148). Devant un syndrome délirant dans la MP, la HAS recommande d’abord d’exclure une cause somatique ou iatrogène, de diminuer voire d’arrêter les médicaments antiparkinsoniens les plus pourvoyeurs de symptômes délirants (anticholinergiques, amantadine, agonistes dopaminergiques puis IMAO B et ICOMT). Cependant, le retrait de ces

médicaments est souvent mal toléré, et les symptômes psycho-comportementaux peuvent persister si la cause est multiple. Les symptômes délirants dans la démence parkinsonienne peuvent s’intégrer au cadre global des SPCD. Rappelons encore qu’il est recommandé de privilégier les prises en charge non pharmacologiques (Cf annexe n°14 sur les SPCD). Les neuroleptiques risquent, du fait de leur effet antagoniste sur les récepteurs D2, d’aggraver les troubles moteurs, notamment les antipsychotiques de première génération qui sont donc fortement déconseillés. Selon la HAS, la clozapine a une indication spécifique pour le « traitement des troubles psychotiques survenant au cours de l’évolution de la MP, en cas d’échec de la stratégie thérapeutique habituelle », car il s’agit du traitement le moins pourvoyeur de syndrome extrapyramidal (171).

- Manifestations psychiatriques iatrogènes.

 Comportement hyperdopaminergique et syndrome de dysrégulation dopaminergique : Les agonistes dopaminergiques peuvent entraîner des troubles du

comportement répétitifs et impulsifs. On parle du « comportement hyperdopaminergique » devant un jeu pathologique, des achats pathologiques, des troubles alimentaires compulsifs, une hypersexualité, des comportements répétitifs non-orientés vers un but (punding) (186). Lorsque cet état est associé àun usage compulsif de médicaments dopaminergiques, on parle de « syndrome de dysrégulation dopaminergique ». Cet état pourrait rappeler un accès maniaque, mais le comportement hyperdopaminergique est beaucoup plus comportemental que psychique. Il n’y a pas de fuite des idées, les sujets sont conscients de leur comportement aberrant, sans anosognosie. Face à ce syndrome, il convient de diminuer le traitement dopaminergique.

 Oscillations de l’humeur lors des fluctuations motrices on/off : on peut retrouver une oscillation importante de l’humeur et du comportement entre des états d’euphorie et d’hyperactivité en phase « on » et des états de sevrage avec humeur dépressive, apathie, anxiété en phase « off », avec un risque accru d’addiction dopaminergique.

 Troubles psycho-comportementaux en lien avec la stimulation cérébrale profonde : on peut observer une apathie, une dépression, de l’anxiété, une hypomanie, des fous rires ou pleurs immotivés, des troubles du comportement, suite à la mise en place d’une stimulation cérébrale profonde. Ces troubles peuvent être liés à des changements brutaux de mode de vie après la mise en place de la stimulation, une décompensation d’une addiction dopaminergique, ou la stimulation des structures adjacentes. Ils sont d’apparition aiguë,

directement liés à un contact précis de stimulation. Pour les limiter, il faut d’abord adapter les paramètres de stimulation (148).

3.4.2.4. Démence à corps de Lewy et autres syndromes parkinsoniens atypiques