• Aucun résultat trouvé

territoires urbains

Chapitre 2 : Les typologies résidentielles

B. Méthodologies de construction des typologies résidentielles

Les variables à partir desquelles ces typologies vont être construites s’inscrivent dans le cadre d’une réflexion sur la ségrégation résidentielle. Elles portent sur les dimensions socio-économiques, démographiques et ethniques évoquées dans la problématique. Nous y ajouterons une dimension propre au cadre bâti et à la localisation des zones dans les aires urbaines en question. Diverses caractéristiques du tissu urbain (densité, localisation vis-à-vis du centre, types de logements, etc.) ont en effet un impact sur les choix des citadins quant à leur lieu de résidence et à l’inscription territoriale de leurs activités. Les regroupements effectués dans cette partie concernent les zones des aires urbaines et se basent sur des caractéristiques propres à celles-ci et aux ménages qui y résident.

Si les variables diffèrent légèrement selon les contextes et la disponibilité de données fiables et exhaustives, elles s’inscrivent dans des thématiques similaires pour les quatre villes. Des données issues des recensements de population ont dû être utilisées pour pallier certaines lacunes des enquêtes-ménages vis-à-vis de nos besoins de traitement. Nous concentrerons tout d’abord notre attention sur la structure, la forme des ménages. Si la problématique de notre recherche est centrée sur l’importance d’une prise en compte individuelle de la ségrégation urbaine, une part de la mobilité et des activités reste directement associée aux contraintes et avantages liés aux autres membres du ménage. Par exemple, la mobilité des adultes est dépendante de la présence ou non d’enfants dans le ménage, tout comme les achats à destination du ménage (produits d’entretien ou nourriture) peuvent éventuellement être gérés collectivement dans les ménages à plusieurs adultes… L’âge du chef de ménage permet également de préciser la génération dans laquelle le ménage se situe. Nous avons cependant décidé de ne pas aborder ce point précis pour éviter de faire redondance avec les caractéristiques individuelles considérées dans la première section de la troisième partie. Les niveaux de vie des ménages (leurs conditions de revenu) seront ensuite étudiés, sur la base de proxys à Niamey et Puebla dans la mesure où les revenus y sont soit non renseignés, soit jugés statistiquement peu fiables. La dimension économique de la ségrégation résidentielle est fondamentale, nous en avons fait état dans la problématique. Cette dernière approche vise à en rendre compte. La dimension ethnique de la ségrégation résidentielle n’est considérée que dans les cas de Niamey et Montréal, sur la base des origines ethniques et nationales pour les citadins étrangers dans la capitale nigérienne et relativement aux langues parlées par les citadins à l’intérieur de leur foyer dans la métropole québécoise. Cette approche n’a pas été menée à Puebla et Lyon, à cause d’une indisponibilité des données adéquates. Notre

connaissance de ces contextes urbains nous a permis cependant de veiller à ce que les résultats obtenus respectent une certaine réalité (c’est le cas des banlieues de grands ensembles à Lyon, qui ressortent bien de notre analyse sans même avoir pris en compte la dimension ethnique). Il n’est pas possible en France de compiler des données statistiques sur cette thématique, l’objectif étant d’éviter que des dérives dans leur utilisation ne puissent se produire. Cela nous semble dommageable puisqu’une étude précise de la situation est impossible alors même que des spécialisations ethniques existent effectivement dans certains territoires urbains. Mieux connaître le phénomène et son ampleur permettrait pourtant de mieux l’appréhender, ce qui appuierait et aiderait les choix politiques allant dans le sens d’une amélioration des conditions de vie des populations concernées.

Du point de vue des caractéristiques propres au cadre bâti et à la localisation des zones dans les aires urbaines, trois variables ont été considérées. La première renvoie au type de logement occupé par les ménages, la seconde à la densité de population résidente et la troisième permet d’évaluer la distance au centre-ville. Au-delà d’une description de la forme de l’habitat dans chacune des villes considérées, l’approche des types de logement a surtout vocation à éclairer les différentes manières d’habiter des citadins, de leur logement à la ville en passant par leur quartier. Le rapport à la ville de chacun peut effectivement être associé à la forme (et en particulier la taille) et la nature du logement occupé (pièces ou espaces en commun entre plusieurs familles dans les habitats de cour à Niamey et les vecindades à Puebla, promiscuité avec les voisins dans les appartements, ou repli sur la sphère privée dans les villas ou les maisons individuelles). Les activités et les mobilités quotidiennes ont également toutes les chances de différer selon que l’on habite dans un petit appartement ou dans une grande maison. La relation entre la mobilité et la forme urbaine (et en particulier la densité) de la zone de résidence a été abordée et confirmée par nombre de spécialistes de la ville ([Krizek & Waddell, 2002], [Genre-Grandpierre & Foltête, 2003], [Baudelle & alii, 2004]). La distance au centre fait quant à elle plus directement référence à la position des ménages et des citadins vis-à-vis des activités et des réseaux de transports permettant d’y accéder. Si cette vision concentrique de la ville est ancienne et fait référence aux travaux menés par E.W. Burgess [1925], elle schématise encore aujourd’hui avec pertinence l’organisation de certaines métropoles. L’importance des centres-villes dans les typologies fonctionnelles construites précédemment en rend bien compte.

Chacune de ces perspectives (5 à Puebla et Lyon et 6 à Niamey et Montréal) est résumée par une variable qualitative que nous avons construite. Certaines d’entre elles sont ordonnées,

d’autres non. Pour les construire, nous avons principalement utilisé les analyses de classification ascendante hiérarchique (C.A.H.). Elles permettent de regrouper les entités statistiques (ici les zones) selon leur « distance » les unes par rapport aux autres. Nous avons utilisé dans nos travaux la distance de Ward, qui est la plus fréquemment mobilisée. Initialement, tous les individus statistiques sont considérés comme des clusters à une seule observation (singletons). La première étape consiste alors à réunir en un seul cluster les deux clusters les plus proches (selon la distance de Ward). Le même principe est utilisé jusqu’à ce que toutes les entités statistiques soient dans un seul et même groupe. Il suffit ensuite de lire le dendrogramme (arbre synthétisant les regroupements et la valeur associée de la distance de Ward) pour choisir le nombre de groupes et en déduire leur composition.

Dans certains cas, il existe une relation linéaire entre les modalités considérées (par exemple les fréquences relatives de chacun des types de logements, avec un total pour chaque zone qui est égal à 100 %). L’utilisation directe de la C.A.H. n’est pas possible alors et nous sommes donc passés préalablement par une analyse factorielle des correspondances simples, qui permet de synthétiser et projeter sur des axes factoriels (triés selon l’importance de l’inertie qu’ils expliquent) les individus statistiques étudiés. La classification hiérarchique ascendante est alors lancée sur la base des coordonnées de ces points sur les axes retenus.

Tableau 6 : Description des groupes de quartiers selon la densité de population

La dernière étape de la construction des typologies résidentielles correspond au regroupement final des zones les unes avec les autres relativement aux valeurs des 5 (ou 6) variables qualitatives initialement construites. Ce regroupement a été opéré en 4 temps que nous proposons de décrire maintenant. Nous avons utilisé dans un premier temps une analyse factorielle des correspondances multiples (A.F.C.M.). Celle-ci permet de synthétiser la relation entre plusieurs variables qualitatives et de positionner les individus statistiques les uns par rapport aux autres sur des axes dits axes factoriels, considérés dans l’ordre décroissant de l’inertie du nuage de points qu’ils expliquent. Le choix du nombre de dimensions (axes factoriels) retenu est lié à cette inertie expliquée, mais aussi en notre capacité à interpréter et donner du sens à chacun des axes. Une fois ce choix réalisé, nous retenons les coordonnées des points sur les axes retenus et passons à la seconde étape, qui mobilise une classification ascendante hiérarchique (C.A.H.). Les résultats visualisables sur un dendrogramme permettent de choisir le nombre de groupes que nous retiendrons au final pour la typologie résidentielle. Relativement à ce choix et aux coordonnées moyennes (sur les axes de l’A.F.C.M.) pour chaque groupe retenu, nous procédons à une seconde agrégation, dite cette fois des centres mobiles, ou K-means. Elle permet de préciser les résultats initialement obtenus par la C.A.H.. Au lieu d’agréger les deux individus statistiques les plus proches puis de relancer la procédure pour l’agrégation suivante (ce que fait la C.A.H.), l’agrégation se fait autour des K centres mobiles indiqués en entrée (ils correspondent aux centres de gravité des points de chaque classe, recalculés à chaque évolution dans le contenu des groupes). La

partition obtenue à la fin de cette troisième étape pourrait être utilisée telle quelle. Il reste cependant une étape d’ajustement manuel. Certaines zones correspondent mal selon nous au groupe dans lequel elles se retrouvent, leur classement est alors modifié. Nous nous basons pour ce faire à la fois sur la localisation précise de la zone en question dans l’aire urbaine (de son voisinage en particulier), mais également de notre connaissance de cette zone, qui peuvent compléter les données dont on dispose. Cette méthode en 4 temps a été utilisée pour les quatre aires urbaines que nous étudions.

II. La typologie résidentielle de l’aire urbaine

niaméenne

Documents relatifs