• Aucun résultat trouvé

2. ENVIRONNEMENT

2.6. LE MOBILE BANKING AU SÉNÉGAL

2.6.3. LIMITES DE L’IMPACT DES INITIATIVES EN COURS

(1) Les initiatives en cours présentent trois limites majeures dans leur état actuel :

Faible amélioration de l’accessibilité des services financiers.

Risque concurrentiel pour les IF.

Gamme limitée de services offerts.

Les initiatives décrites ci-dessus constituent un début de réponse pour faciliter les transferts d’argent domestiques, aujourd’hui très largement informels malgré l’accessibilité des mandats postaux. Ceci constitue un premier besoin évident en milieu rural, et un marché très important. Le paiement de factures (principalement électricité, eau et téléphone fixe) est leur deuxième objectif et correspond également à un réel besoin, toutefois moins en milieu rural, où les services publics sont encore peu diffusés, qu’en ville. Ces initiatives sont toutefois des approches partielles et limitées du mobile banking, qui n’ont pas la dimension nécessaire pour impulser un développement significatif u système financier au Sénégal, et particulièrement dans les zones rurales.

Trois limites majeures de ces initiatives doivent être soulignées :

1. Faible amélioration de l’accessibilité des services financiers (« Access to Finance ») : Les initiatives en cours (hors Mobile Cash) ne soutiennent pas le développement des IF. En effet, elles ne font pas de lien entre les nouveaux services offerts et les autres services financiers de l’IF, ce qui ne permet ni de créer

- HORUS Development Finance -

une synergie avec leurs produits ni d’attirer de nouveaux clients. Avec ces initiatives orientées « porte-monnaie électronique », les clients des services « mobile banking » ne sont pas encouragés à ouvrir un compte de dépôt dans une IF (SFD ou non) ; la bancarisation, des populations actuellement exclues du système financier, n’est donc pas accompagnée. Enfin, l’IF distributrice est simplement un intermédiaire et non pas un partenaire, le partage de valeur ajoutée est davantage en faveur du promoteur de l’initiative MB (opérateur télécom et/ou fournisseur de service mobile) et de la banque associée (apport de trésorerie, informations sur les transactions réalisées).

2. Risque concurrentiel pour les IF :

 Les initiatives actuelles sont toutes gérées de façon exclusive, soit par un opérateur télécom associé à une banque (un seul opérateur, excluant les clients des autres opérateurs télécom – une seule banque gérant la trésorerie), soit par un fournisseur technique associé à une banque ou à un SFD (une seule IF bénéficiant de la trésorerie). Chaque initiative représente pour les IF associées (et également pour les IF non impliquées) un détournement de leur client ou d’une partie des services rendus à leur client (Ex : virement compte à compte, utilisation du compte de dépôt… susceptibles d’être remplacés par l’utilisation du porte-monnaie électronique).

 Les offres fondées sur un porte-monnaie électronique ont pour conséquence de capter l’épargne, des clients actuels des SFD comme des nouveaux clients, pour la transférer vers l’IF sur laquelle est adossé le système qui bénéficie donc de cette trésorerie gratuite venant pour partie réduire la trésorerie des autres IF.

 La banque partenaire du système MB, qui est garante de l’intégrité du système, reçoit à ce titre l’information sur toutes les transactions effectuées par ses utilisateurs et peut donc sur cette base développer une approche commerciale vers les clients potentiellement les plus intéressants, notamment par l’envoi de SMS commerciaux ciblés. Un risque non négligeable à court terme pour les SFD est donc la captation de la clientèle la plus intéressante par cette banque. Le risque à terme pour le secteur de la MF serait que ces systèmes MB donnent naissance à des banques sans guichets qui serviraient les clients les plus rentables des SFD, ce qui fragiliserait l’économie des SFD en la recentrant sur les clients les plus difficiles à rentabiliser.

3. Gamme limitée de services offerts : le service majeur offert est le transfert Cash à Cash ; d’autres services sont envisagés mais sans répondre complètement aux larges besoins des IF et de leurs clients pour faciliter l’accès, la gestion et le suivi des crédits et des comptes de dépôts (voir liste des besoins de services identifiés en fin de ce chapitre).

- HORUS Development Finance -

(2) La mise en place d’un projet appuyé par le gouvernement et les PTF est nécessaire pour créer une incitation à servir des zones peu rentables a priori et devra se fixer pour objectif de permettre aux institutions financières d’approfondir leur offre de services en milieu rural.

L’économie du mobile banking est par nature une économie de réseau. En d’autres termes, l’étendue du réseau de points de distribution est l’un des facteurs-clé de succès : il est nécessaire de dépasser une certaine taille, de proposer une complète couverture du territoire (en particulier pour les transferts). Par conséquent, la mutualisation de l’initiative pour un grand nombre d’IF au sein d’un opérateur commun est sans doute le seul moyen pour arriver à créer un réseau suffisant. Dans une économie comme le Sénégal, il n’y a probablement la place que pour 2 ou 3 réseaux généralistes rentables et durables. Pour développer un réseau d’agents dans les zones où la densité de la population ainsi que le montant et la fréquence des transactions sont faibles, il est nécessaire de mettre en place un système mutualisé. Dans ce contexte, l’appui des bailleurs de fonds est nécessaire pour créer une incitation à servir des zones peu rentables a priori.

L’étude d’opportunité avait investigué entre autres options d’appuyer l’offre MB pour les SFD sur Orange Money, pour s’appuyer sur la notoriété, le sérieux et le réseau commercial Orange, en faisant évoluer cette solution, d’une part pour qu’elle s’ouvre aux autres opérateurs Telco, et d’autre part pour qu’elle prévoie une articulation avec le SIG des SFD. Cette perspective a suscité beaucoup d’inquiétudes et une forte réaction de rejet chez les SFD au cours de l’atelier de restitution de l’étude d’opportunité. De plus, le risque concurrentiel exposé ci-dessus, inhérent à tout système Telco-led, est une limite très importante à l’impact positif pour l’offre de services financiers en milieu rural. L’étude de faisabilité a alors été orientée vers l’étude de la mise en place d’une offre mobile banking mutualisée offerte par un Gestionnaire externe, qui ne sera ni un opérateur télécom ni un fournisseur de solution technique ni une IF.

Avec ce Gestionnaire Mobile Banking et son offre mutualisée, le principe prioritaire est de favoriser pour chaque service offert le maintien et même le renforcement du lien entre l’IF et son client, dans le but de permettre aux institutions financières d’approfondir leur offre de services en milieu rural. Un 2ème principe essentiel pour s’assurer que les IF bénéficieront de cette initiative est leur implication dans le recrutement et l’accompagnement financier des agents et marchands. En contrepartie elles seront rémunérées pour ce travail, selon un pourcentage des commissions accordées à l’agent. Ces principes favoriseront le développement du système et ainsi le développement d’un large réseau d’agents et d’une gamme complète de services.

- HORUS Development Finance -

L’impact véritable sur les activités économiques des ruraux se fera sentir lorsque le Mobile Banking permettra de rapprocher le crédit des populations. Il est clair que la technologie MB ne sera jamais suffisante pour permettre d’octroyer des crédits mais elle peut en revanche alléger de façon très significative les coûts d’extension dans des zones à densité faible et donc non rentables actuellement, en ouvrant la possibilité d’y lancer l’activité en externalisant le coût des guichets et en s’appuyant uniquement sur des agents de crédit. Cette approche rejoint celle qui est retenue par FIDES pour son projet Saint Louis Microfinance dont le démarrage est prévu en 2010.

- HORUS Development Finance -