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Afin de défendre et d’améliorer leurs conditions et intérêts professionnels, les fonctionnaires se rassemblent en groupement leur permettant d’atténuer leur position d’infériorité par rapport à celle de la puissance publique. Le droit pour les fonctionnaires de se regrouper de la sorte a souvent sucité de vives réactions. La question qui y est liée est résolue en France tandis qu’elle demeure « tabou » au Liban. La législation libanaise prive en effet le fonctionnaire du droit de former des syndicats et d’y adhérer. Il ressort du statut général

des fonctionnaires actuel qu’« il est interdit au fonctionnaire (…) d’adhérer aux organisations

ou syndicats professionnels »418. Toute entrave à ce texte donne lieu à une faute disciplinaire qui justifie une sanction disciplinaire.

On espère de toute évidence que le droit libanais évolue d’une telle façon qu’il coincide avec l’ère du temps et qu’il aboutisse à une justice équitable. Au regard de la différence qui existe entre la législation française, où le droit des fonctionnaires d’adhérer aux syndicats est consacré, et libanaise, où la rigueur et la clarté du texte ne laisse aucune interprétation jurisprudentielle dans ce domaine, notre étude portera sur l’analyse des dispositions juridiques relatives à ce sujet dans le système français. La législation française comporte cependant des limites à l’exercice de la libérté syndicale (§2) – laissant le choix d’appartenir ou non à une organisation professionnelle reconnue par la loi – bien qu’en même temps, elle soit très souple à l’égard de cette liberté (§1).

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§1. La consécration du droit syndical en France

La jurisprudence française (A) s’est conformée avec le législatif (B) qui a, suite à une progression remarquable, consacré l’existence du syndicalisme dans la fonction publique. Il faut noter que le développement de la jurisprudence dépend du développement de la loi, parce que sa règle est basée sur son autorité. Pour cela, la jurisprudence a admis la reconnaissance du droit syndical suite à la promulgation de ce droit dans des textes légaux.

A. La consécration du syndicalisme par la loi

Le droit syndical a été promulgué aux fonctionnaires pour la première fois avec le

statut général des fonctionnaires du 19 octobre 1946 qui prévoit que « le droit syndical est

reconnu aux fonctionnaires (…) »419. De là il semble nécessaire d’éclairer la situation antérieure et postérieure à l’année 1946.

1. La prohibition du syndicalisme

La liberté des agents publics à se constituer en syndicats a suivi une lente évolution avant les années 1946. L’état du droit est passé de la prohibition totale de tout type de regroupement des fonctionnaires jusqu’à la reconnaissance du droit d’association. Bien que le

développement des groupements de fonctionnaires ait commencé dès le Second Empire420, la

conception individualiste de la vie publique que traduisait la loi de 1791, dite « Loi Le

Chapelier »421, eut comme conséquence la prohibition formelle de toute organisation

corporative ou professionnelle. Elle signifiait que les fonctionnaires seraient « isolés face à la

puissance publique »422. Cette conception expliquait pourquoi les règles édictées en faveur des fonctionnaires tendaient à les protéger individuellement contre les abus d’autorité, et elles ne devaient pas avoir comme conséquence la création de groupes privilégiés, dont la force

pourrait s’opposer à celle des autorités politiques423. La prise de conscience par les

419 Art. 6 de la loi n° 46-2294 relative au statut général des fonctionnaires du 19 octobre 1946.

420 Ces groupements étaient constitués sous forme des sociétés mutualistes ; V. R. Pierot, « La naissance du pouvoir syndical dans la fonction publique française », article in « Mélanges offertes à Georges BURDEAU », LGDJ, Paris, 1977, p. 848.

421 Pour le texte de cette loi, V. A. Lefas, « L’Etat et les fonctionnaires », Paris, M. Giard, 1913, p. 175-177.

422 R. Grégoire, « La fonction publique », A. Colin, Paris, 1954, p. 51.

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fonctionnaires, ne pourrait ainsi pas s’exprimer juridiquement par la création des groupements sans l’autorisation du Gouvernement et dans des cas expressément autorisés par la loi. En

effet, la loi du 21 mars 1884424 a permis de construire des syndicats d’ouvriers ayant pour but

exclusif « l’étude et la défense des intérêts économiques, commerciaux et agricoles». Mais

hélas cette loi restait muette quant à la question des fonctionnaires.

La loi du 1er juillet 1901, par sa portée générale, a donné aux fonctionnaires le droit de

constituer toute forme d’association quel que soit le service auquel ils appartenaient.

Cette position a été soutenue par la majorité des juristes425. Néanmoins, les gouvernements

étaient opposés à la reconnaissance du droit syndical par les fonctionnaires. Ils ont donc distingué les fonctionnaires « de gestion » et les fonctionnaires « d’autorité » comme un

ultimum refugium. Par exemple, en 1905, le ministre du Commerce a prohibé le droit syndical

aux fonctionnaires de l’Administration des postes. Cette politique constante 426 visait

implicitement à prohiber les associations des fonctionnaires427. Elle a eu pour conséquence la

révocation des syndicats grévistes.

2. La consécration du syndicalisme

Il ressort du Préambule de la Constitution de 1946 que « tout homme peut défendre ses

droits et ses intérêts par l’action syndicale et adhérer au syndicat de son choix »428. Suite à ce changement, le droit syndical a été promulgué aux fonctionnaires avec le statut général du 19

octobre 1946 qui a disposé que « le droit syndical est reconnu aux fonctionnaires (…) »429.

Avec l’avènement de la Vème République, la loi du 19 octobre 1946 fut remplacée par

424 Loi du 21 mars 1884 relative à la création des syndicats professionnels, « Duvergier », 1884, pp. 174-186.

425 Par ex. L. Duguit, op. cit., p. 243 et G. Jèze, op. cit., p. 257.

426 Pour l’épreuve de force des postiers syndiqués avec le Gouvernement et les révocations qui suivirent les grands mouvements grévistes de 1909, V. Siwek-pouydesseau, op. cit., p. 91.

427 G. Cahen, « Les syndicats de fonctionnaires », RPP juillet 1906, n° 145, p. 86.

428 De même la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948 précise par son Art. 23 que « toute personne a le droit de fonder avec d’autres des syndicats et de s’affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts ». Et en plus, La Convention Européenne des Droits de l’Homme du 4 novembre 1950 généralise dans son Art. 11, al. 1, « le droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association ». Mais ouvre le débat en consacrant son al. 2 à quelques réticences qui mérites d’être citées : les « restrictions » retenues sont « celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sécurité publique, à la défense de l’ordre et la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, ou la protection des droits et libertés d’autrui » ; s’y ajoutent des « restrictions légitimes (…) imposées (…) par les membres des forces armées, de la police ou de l’Administration de l’Etat ».

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l’ordonnance du 4 février 1959430 dont l’article 14 reprenait l’intégralité des termes de l’article

6 du texte abrogé. Ce droit a été consacré par le statut actuel qui pose que « le droit syndical

est garanti aux fonctionnaires. Les intéressés peuvent librement créer des organisations syndicales, y adhérer et y exercer des mandats (…) »431 .

Le législateur français a ainsi consacré clairement le droit syndical pour les fonctionnaires civils et leur a garanti la liberté de créer des syndicats et de s’y activer, d’y adhérer et de participer à leurs actions. Le législateur français ne s’est pas contenté de reconnaitre l’existence des syndicats dans le service public. Il a en plus consacré aux

« organisations syndicales des fonctionnaires la qualité pour participer au niveau national à des négociations relatives à l’évolution des rémunérations et du pouvoir d’achat des agents publics avec les représentants du gouvernement »432. En effet, le Conseil d’Etat a affirmé le

26 septembre 1996433 que seul le législateur a le droit de déterminer les conditions relatives à

l’exercice du droit syndical reconnu aux fonctionnaires et que ce droit a un valeur constitutionnelle.

Avant d’étudier la position de la jurisprudence administrative, il faut mentionner que la législation libanaise refuse toute tentative de développement concernant les activités syndicales des fonctionnaires et que quiconque de ces fonctionnaires qui chercheraient à désobéir aux dispositions de l’article 15 du statut général se veraient disciplinairement sanctionné.

B. Le développement de la jurisprudence

Dans une thèse soutenue en 1939 à l’Université de Paris, Proktich défendait l’idée selon laquelle, bien qu’ils soient différents, les droits syndicaux et de grève étaient

inséparables434. Toute forme d’arrêt concerté du travail conduisait inévitablement à défendre

le droit de former des syndicats. Jusqu’en 1914 pourtant, tant le juge judiciaire

430 Ordonnance n° 59-244 du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires.

431 Art. 8 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 relative au statut général actuel.

432Idid., Art. 8 bis, al. 1.

433 C.E., 26 septembre 1996, « avis », EDCE 1996, p. 290 ; AJFP janvier-février 1997, p. 6.

434 L. Proktich, « Le droit syndical des fonctionnaires », Thèse soutenue le 11 juillet 1939 à l’Université de Paris, éditée par l’Imprimerie des Invalides, Liège, p. 71.

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qu’administratif adoptait la même position. Elle visait à l’interdiction des syndicats et à la répression sévère de tout mouvement de grève.

En 1885, la Cour de Cassation435 refusa aux médecins la possibilité de se syndiquer.

En même temps, elle considérait que la loi du 21 mars 1884 sur les syndicats professionnels n’était pas applicable à toutes les professions. Pour y parvenir, elle interpréta restrictivement la notion d’intérêt économique qu’allait défendre un syndicat. Se basant sur l’article 3 de la

loi, cette notion d’intérêt devait être « exclusivement industriel, agricole ou commercial ».

Ainsi la Cour de Cassation adoptait la neutralité politique des objectifs des syndicats436.

Cet arrêt qui limitant le champ d’application de la loi de 1884 fit jurisprudence jusqu’à la Libération. Elle devint l’arrêt de principe en matière de syndicalisme des fonctionnaires qui fonda leur neutralisation sur la spécificité de leurs fonctions. Pourtant, la décision de 1885

n’avait pas résolu complètement le problème de la syndicalisation des fonctionnaires437. Elle

conduisait certes à la neutralisation de la plus grande partie des fonctionnaires qui n’étaient pas attachés à un travail industriel, commercial ou agricole et qui devaient se voir refuser le droit syndical. Toutefois elle était critiquée en ce sens que certains fonctionnaires exerçaient des activités partiellement ou totalement économiques de telles sorte que leur neutralisation

paraissait injustifiée438. Cette jurisprudence reste à la base de vastes discussions théoriques sur

la nécessité de diviser les fonctionnaires en catégories qui, selon leurs tâches, devaient se voir reconnaître ou non le droit syndical.

Cette position de la jurisprudence ne fut d’ailleurs pas ébralée par la loi du 1er juillet

1901. L’hostilité du juge à l’encontre des syndicats de fonctionnaires se ressentait tout autant.

435 Cass. Crim. 27 juin 1885 « Lory et autres c. Ministère public », D.P 1886.1.137.

436 La Cour précisa « que les travaux préparatoires ont constamment affirmé la volonté du législateur d’en restreindre les effets à ceux qui appartiennent, soit comme patrons, soit comme ouvriers ou salariés, à l’industrie, au commerce et à l’agriculture, à l’exclusion de toutes autres personnes et de toutes professions ; que la loi n’est pas moins absolue dans ses termes, puisque, d’une part, dans l’Art. 6, elle réserve les droits qu’elle confère aux seuls syndicats des patrons et d’ouvriers ; que, d’autre part, dans l’Art. 3, elle limite l’objet de ces syndicats à l’étude et à la défense des intérêts économiques, industriels, commerciaux et agricoles, refusant ainsi le droit de former des syndicats à tous ceux qui n’ont à défendre aucun intérêt industriel, commercial ou agricole, ni, par suite, aucun intérêt économique se rattachant d’une façon générale à l’un des intérêts précédents ».

437 R. Pierrot, « La naissance du pouvoir syndical dans la fonction publique française », article in « Mélanges Burdeau », Paris, LGDJ, 1977, p. 847.

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Mais l’adoption de cette loi conduisit le Conseil d’Etat439 à atténuer les résultats de la

neutralisation complète des fonctionnaires qui découlaient de la décision de 1885 et à admettre qu’ils pouvaient légalement constituer des associations. Ainsi, lorsqu’une association lui

présentait une requête, le Conseil d’Etat l’accueillait440. Cela révélait d’ores et déjà un

assouplissement de la position du juge en matière de neutralisation à laquelle les fonctionnaires étaient soumis.

Jusqu’à un arrêt en date du 13 janvier 1922, le Conseil d’Etat évita de se prononcer sur

la légalité des syndicats de fonctionnaires441. Ce n’est qu’à cette date qu’il déclara le caractère

illicite des syndicats et refusa d’accueillir une requête présentée par un groupement de

fonctionnaires qui se réclamait de la loi de 1884442. Jusqu’à la Libération, cette jurisprudence

ne fut pas remise en cause. Mue par une volonté de neutraliser les fonctionnaires443, lesquels,

avec la prolifération de syndicats compromettaient l’édifice administratif de l’époque fondé sur un pouvoir de plus en plus en déclin, le Conseil d’Etat a rejoint la position de la Cour de

Cassation de 1885. Il se fondait sur la particularité de leur métier qui en faisait des

représentants de l’intérêt général. Or, si l’idée s’est avérée être « très critiquable »444, elle reposait sur celle consistant à dire que la permission de la création de syndicat impliquait selon lui la permission de la grève : dans l’hypothèse où cette dernière était admissible pour les

439 C.E., 11 décembre 1908, « Brugnot et autres (1ere espèce), et Association professionnelle des employés civils de l’Administration centrale du ministère des Colonies », Rec., p. 1016-1022, Concl. Tardieu ; D.P 1909.3.49, Concl. Tardieu ; RDP 1909, p. 61, note Jèze et 11 décembre 1908, « Association des fonctionnaires civils de l’Administration centrale de la Marine », RDP 1909, p. 46 et 14 juin 1912, « Fédération nationale des professeurs des lycées de garçons et des établissements secondaires de jeunes filles », Rec., p. 672 ; S. 1916.3.36.

440 C.E., 11 décembre 1908, « Association professionnelle des employés civils de l’Administration centrale du ministère des Colonies », op. cit. ; C.E., 21 novembre 1923, « Association de fonctionnaires des postes et télégraphes », Rec., p. 37.

441 M. Hauriou, note sous C.E., 13 janvier 1922, « Boisson et Syndicat national des agents des Contributions indirectes », S. 1922.3.1.

442 Ce qui attire l’attention à la lecture de l’arrêt de 1922 c’est que dans ses visas fut expressément invoquée la loi des 7-14 octobre 1790 à côté d’autres textes législatifs – comme par exemple, les lois du 21 mars 1884, du 30 novembre 1892, du 1er juillet 1901, du 12 mars 1920 – pour servir de base légale à la neutralisation des fonctionnaires et à l’interdiction de former des associations professionnelles se réclamant de la loi de 1884 (V. au plus C.E., 25 juillet 1939, « Medori et syndicat national des surveillants des ponts et chaussées », Rec., p. 526).

443 La loi de 1884 permit la constitution des syndicats de patrons et d’ouvriers ayant exclusivement pour objet l’étude et la défense des intérêts économiques, industriels, commerciaux et agricoles de leurs membres, à savoir des « intérêts particuliers ». À cette interprétation conduisaient également, selon le Conseil d’État qui suivit sur ce point son commissaire du Gouvernement, tant les travaux préparatoires de la loi de 1884 que l’interprétation de cette loi faite par le Parlement qui excluait son application pour les fonctionnaires.

444 Comme la caractérisait, par exemple, G. Jèze dans sa note sous l’arrêt du 13 janvier 1922, op. cit. ; RDP 1922, p. 59.

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fonctionnaires, les syndicats auraient du l’être également. Ces appréhensions et craintes

ressortent clairement de la position adoptée par le Conseil dans des arrêts de 1925 et 1926445

où il conclut qu’aucun groupement de fonctionnaires ne pouvait prétendre constituer un

syndicat professionnel fondé sur la loi du 21 mars 1884446. Cette logique qui réclamait la

neutralité des fonctionnaires visait en réalité à réaliser deux objectifs tout à fait opposés : assurer la protection de ces fonctionnaires et réaliser en même temps l’oppression.

Le juge administratif a changé sa position dès la Quatrième République et a suivi l’évolution législative en la matière de telle sorte que des arrêts ont été rendus relativement aux droits syndicaux. Ainsi, depuis 1946, la jurisprudence considère que les syndicats possèdent la qualité et l’intérêt pour contester devant les tribunaux compétents des mesures

administratives qui portent atteinte aux intérêts collectifs des fonctionnaires447. Par exemple,

les syndicats, sans nécessairement répondre de la qualité représentative globale448, peuvent

contester un décret qui vise au recrutement des fonctionnaires dans des conditions contraires aux règlements et conditions juridiques relatifs au principe du recrutement et nomination des

fonctionnaires449. Cependant, ces syndicats ne possèdent pas la qualité de protester en leur

445 C.E., 20 février 1925, « Union des employés de l’octroi de Paris », Rec., p. 180, RDP 1925, p. 82, note Jèze ; C.E., 15 janvier 1926, « Union générale des fonctionnaires de l’Enregistrement », Rec., p. 46 ; C.E., 7 août 1926, « Syndicat du personnel non gradé des asiles nationaux et sieurs Chinchante et autres », Rec., p. 890 ; C.E., 18 mars 1927, « Syndicat des agents des lycées nationaux et Sieurs Boisson et Jego », Rec., p. 358 ; C.E., 29 juillet 1927, « Sieur Simula », Rec., p. 849 ; C.E., 25 janvier 1928, « Syndicat du personnel des services municipaux d’Ajaccio c. Sieur Nebba », Rec., p. 110 ; C.E., 28 janvier 1931, « Sieur Maye », Rec., p. 96 ; C.E., 14 février 1934, « Sieur Massan », Rec., p. 207 ; C.E., 8 mai 1934, « Sieur Doineau », Rec., p. 539 ; C.E., 11 mai 1934, « Lamy et autres », Rec., p. 550 ; C.E., 14 décembre 1934, « Sieurs Budon, Testeaud et Union générale de l’enregistrement », Rec., p. 1188 ; C.E., Sect., 24 mai 1935, « Syndicat des agents de maîtrise de la manufacture nationale d’armes de Tulle et Sieurs Boudrie et autres », Rec., p. 590 ; C.E., 16 avril 1937, « Syndicat indépendant des fonctionnaires et employés de l’institut d’assurances sociales d’Alsace et de Lorraine », Rec., p. 394.

446 Ainsi, le juge administratif tirant toutes les conséquences de cette position stricte contre les syndicats décida qu’aucun représentant d’un syndicat ne pourrait être appelé à siéger en cette qualité dans un organisme associé même à titre simplement consultatif, à l’exercice de l’autorité administrative (C.E., 31 mars 1935, « Fédération nationale non-syndiquée des professeurs de lycées de garçons et des membres du personnel de l’enseignement secondaire féminin », Rec., p. 327). Plus encore, il autorisa l’Administration à méconnaître les garanties de carrière que des règlements illégaux auraient empruntées à l’intervention syndicale : il l’obligea à substituer à ces garanties équivalentes (C.E., 8 novembre 1935, « Sieur Descottes », Rec., p. 1019).

447 C.E., 12 juin 1959, « Syndicat Chrétien du ministère et du commerce », Rec., p. 360 ; C.E., 14 novembre 1984, « Syndicat de l’aéronautique civile », Rec., p. 361.

448 C.E., 14 novembre 1984, « Synd. De l’aéronautique civile », Rec., p. 361.

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nom contre une décision individuelle qui n’affecte que l’intérêt personnel de certain

fonctionnaire450, comme la décision de lui infliger une sanction disciplinaire451.

Les prérogatives à disposition des fonctionnaires visant à défendre leur intérêt

collectif452 leur sont donc reconnues via la possibilité de se constituer en syndicats depuis

1946. En effet, la jurisprudence a considéré que les recours des syndicats sont recevables dans le cas où il s’agit des actes positifs qui lèsent les droits de leurs membres ou affectent leurs

intérêts généraux453. Elle a acceptée en plus que les syndicats puissent contester les décisions

de nomination ou de promotion et les tableaux d’avancement454. Elle reste toutefois contre

l’idée qui consiste à ce qu’un syndicat soit recevable à contester une réquisition de service, une mutation d’office, un refus de nomination, une notation et surement une sanction disciplinaire car ces décisions n’intéressent que les fonctionnaires concernés par lesdites mesures455.

La jurisprudence a considéré que les syndicats sont désormais capables de provoquer

légalement des grèves dans les services publics et par la suite négocier dans ce domaine456.

Mais l’action des syndicats ne doit jamais être politisée et doit se limiter à la défense des intérêts professionnels. En plus, les organisations syndicales ont une compétence de négociation plus étendue notamment en ce qui concerne les questions relatives aux conditions et à l’organisation du travail ainsi qu’aux problèmes relatifs à l’évolution des rémunérations.

450 C.E., 13 décembre 1991, « Syndicat Inter-COCFDT de la Vendée et Audrain », Rec., p. 445.

451 C.E., 13 janvier 1950, « Fédération des syndicats des fonctionnaires », Rec., p. 26 ; C.E., 13 décembre 1991, « Synd. INTER-COCFDT de la Vendée et Audrain », Rec., p. 445, etc.

452 Selon la distinction célèbre de Romieu dans ses Concl. sur l’arrêt syndicat des patrons coiffeurs de Limoges : C.E., 28 décembre 1906, Rec., p. 977.

453 Un syndicat a été déclaré recevable à contester la régularité des opérations électorales qui ont eu lieu pour la désignation des représentants des membres d’un corps d’instituteurs dont il s’est donné pour mission de défendre les intérêts collectifs au sein de la commission administrative paritaire, cette commission « étant un organisme collégial qui a pour objet d’associer des élus du personnel à la gestion de ce corps », V. C.E., Sect., 23 octobre 1981, « Fédération des groupes autonomes de l’enseignement public de l’académie de Strasbourg », Rec., p. 389 ; AJDA 1982, p. 99 et p. 81, Chron. jurisprudentielle.

454 C.E., sect., 12 juin 1959, « Syndicat chrétien du ministère de l’Industrie et du Commerce », Rec., p. 360 ; AJDA 1960, II, 62, Concl. M. Mayars.