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Le déroulement de la poursuite disciplinaire à la lumière du déroulement de la poursuite pénale

L’action pénale ayant pour but de réparer un préjudice social, l’initiative de

poursuite519 du ministère public déclenche des poursuites pénales. Celles-ci met la personne

poursuivie dans une situation critique puisqu’il risque d’être mis en examen voire être privé

de sa liberté par exemple par une mesure de détention préalable520.

Il peut de la même manière, au nom du principe de liberté d’investigation, faire l’objet d’enquête et d’instruction confié notamment à un juge d’instruction. Afin d’assurer une répression efficace, il est octroyé à ce dernier – comme à toute autorité répressive compétente – de larges pouvoirs qui lui permettent de rechercher si une infraction a été commise et si la responsabilité de la personne mise en examen ou poursuivi devra être retenue.

Autrement-dit, ces différentes opérations appelées « actes de l’instruction », visent à

rassembler les éléments de preuve et, le cas échéant, à la mise en œuvre de l’action en responsabilité de la personne poursuivie.

519 Art. 1 du C.P.P français « le ministère public exerce l’action publique et requiert l’application de la loi (…) » ; Art. 5 al. 1 du C.P.P libanais « l’action publique, ayant pour objet la poursuite des auteurs des infractions et ceux qui y participent, et l’application des peines et des mesures prises à leur encontre, est engagée par les magistrats du ministère public (…) » ; Sauf dans certains conditions ou le législateur dans les pays concernés permet que la mise en mouvement de l’action publique se fait par la victime, Art. 1 al. 1 du C.P.P français « cette action (l’action publique) peut aussi être mise en mouvement par la partie lésée (…) » ; Art. 68 al. 1 et 5 du C.P.P libanais « toute personne lésée par un crime ou un délit peut déposer une plainte avec constitution de partie civile directement devant le premier juge d’instruction dans le ressort duquel se trouve le lieu de l’infraction, le lieu de l’arrestation du défendeur ou son lieu de résidence (…)L’action publique est mise automatiquement en mouvement par le dépôt de plainte avec constitution de partie civile (…) ».

520 En raison des nécessités de l’instruction où à titre de mesure de sûreté, la personne mise en examen peut être placée sous contrôle judiciaire et, lorsque ces mesures se révèlent insuffisantes, elle peut être assignée à résidence avec surveillance électronique. A titre exceptionnel, elle peut être placée en détention provisoire si les obligations du contrôle judiciaire ou de l’assignation à résidence avec surveillance électronique ne permettent pas d’atteindre ces objectifs. Art. 137 in fine du C.P.P français ; Art. 61 al. 2 du C.P.P libanais « si l’enquête nécessite de procéder à une constatation de visu sur les lieux de (…), le juge d’instruction s’y transporte en compagnie du greffier de sa section (…) » ; Art. 107 al. 3 du C.P.P libanais « après avoir interrogé le défendeur et recueilli l’avis du ministère public, le juge d’instruction peut décerner un mandat de détention provisoire à l’encontre du défendeur, à condition que l’infraction qui lui est imputée soit punissable d’une peine d’emprisonnement de plus d’un an ou qu’il ait déjà fait l’objet d’une condamnation criminelle ou d’une peine d’emprisonnement sans sursis de plus de trois mois ».

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En ce sens, le juge d’instruction peut se rendre sur les lieux pour y effectuer toutes

constatations utiles ou procéder à des perquisitions521. Ces dernières sont effectuées dans tous

les lieux où peuvent se trouver des objets ou des données informatiques dont la découverte serait utile à la manifestation de la vérité522. Si les besoins de l’enquête l’exigent, le juge

d’instruction procède à la saisie de tous les documents ou données informatiques utiles523 et il

peut solliciter l’audition de toute personne dont la déposition lui parait utile524. Toute

juridiction d’instruction, dans le cas où se pose une question d’ordre technique, peut ordonner une expertise et le juge d’instruction désigne l’expert chargé de procéder à l’expertise et si les

circonstances le justifient, il désigne plusieurs experts525.

Finalement, le prononcé de la décision pénale, qui prend la forme d’un jugement, est confié à un tribunal. Le rôle du tribunal ne se limite pas à l’application du comportement de l’accusé ou au choix de la peine adéquate. Pendant la procédure d’audience appelée

« instruction définitive », le juge pénal, dans les pays concernés, est obligé de rechercher les

521 Art. 92 al. 1 du C.P.P français « le juge d’instruction peut se transporter sur les lieux pour y effectuer toutes constatations utiles ou procéder à des perquisitions(…) » ; Art. 98 al. 1 du C.P.P libanais « le juge d’instruction peut se transporter (…) sur le lieu de (…) pour y effectuer toutes constations ou (…) pour y procéder à une perquisition aux fins de mettre la main sur des pièces à conviction ou sur tout objet susceptible d’éclairer l’enquête ».

522 Art. 94 du C.P.P français « les perquisitions sont effectuées dans tous les lieux où peuvent se trouver des objets ou des données informatiques dont la découverte serait utile à la manifestation de la vérité, ou des biens dont la confiscation est prévue à l’article 131-21 du code pénal » ; Art. 61, 98 et 104 in fine du C.P.P libanais, v. la traduction de ces articles en annexe n°V, p. 445, 451 et 453.

523 Art. 97 in fine du C.P.P français ; Art. 102 al. 2 du C.P.P libanais « le juge d’instruction peut prendre connaissance des télégrammes et correspondances saisis et conserver ceux qu’il juge nécessaires à la manifestation de la vérité ou ceux dont la divulgation à des tierces parties peut porter préjudice à l’enquête ».

524 Art. 101 al. 1 du C.P.P français « le juge d’instruction fait citer devant lui, par un huissier ou par un agent de la force publique, toutes les personnes dont la déposition lui paraît utile (…) » ; Art. 86 al. 1 du C.P.P libanais « le juge d’instruction cite les personnes nommément visées par la plainte, la dénonciation ou l’enquête, ainsi que toute autre personne dont il estime les déclarations utiles à l’instruction » et Art. 87 al. 2 du même Code « le juge d’instruction entend chaque témoin séparément en présence du greffier ».

525 Art. 156 al. 1 du C.P.P français « toute juridiction d’instruction ou de jugement, dans le cas où se pose une question d’ordre technique, peut, soit à la demande du ministère public, soit d’office, ou à la demande des parties, ordonner une expertise. Le ministère public ou la partie qui demande une expertise peut préciser dans sa demande les questions qu’il voudrait voir poser à l’expert » et Art. 159 du même Code « le juge d’instruction désigne l’expert chargé de procéder à l’expertise. Si les circonstances le justifient, il désigne plusieurs experts. » ; Par exemple Art. 81 al. 3 et 4 du C.P.P libanais « si le défendeur ne maîtrise pas la langue arabe, le juge d’instruction lui assigne un interprète (expert du langue), lequel ne commence à interpréter qu’après s’être engagé sous serment à accomplir sa mission en toute sincérité et fidélité. Si le défendeur est sourd, muet ou incapable de s’exprimer, le juge d’instruction fait appel à un expert capable de communiquer avec lui par la langue des signes ou par tout autre moyen, après que cette personne s’est engagée sous serment à accomplir sa mission en toute fidélité et sincérité. Si le défendeur sourd ou muet sait écrire, les questions lui sont posées par écrit et ses réponses sont également consignées par écrit lors de son interrogatoire. Le papier sur lequel il a porté ses réponses est joint au procès-verbal d’interrogatoire ».

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circonstances de l’affaire via ses propres moyens et ne se contente pas d’étudier le dossier qui

lui est transmis par les organes d’instruction526.

Ce schéma non exhaustif du procès pénal révèle clairement, d’une part, que la répression répressive est avant tout un mécanisme qui use de formes d’actions bien organisées, et d’autre part, l’étendue des pouvoirs confiés aux organes répressifs compétents par les législateurs franco-libanais.

La question peut donc légitimement se poser de savoir dans quelles mesures les caractéristiques du déroulement de la procédure disciplinaire en France et au Liban sont inspirées de la procédure pénale. Pour y répondre, il est nécessaire dans un premier temps d’analyser les procédure des systèmes disciplinaires appliqués dans ces deux pays notamment sur le terrain de la procédure de rassemblement de preuve (Section I), puis, de voir en quoi, sur le terrain des mesures conservatoires pouvant être prononcées durant la phase de procédure (Section II), la procédure disciplinaire s’apparente aux formes empruntées par la procédure pénale.

526 Par ex. Art. 283 du C.P.P français « le président (de la cour d’assises), si l’instruction lui semble incomplète ou si des éléments nouveaux ont été révélés depuis sa clôture, peut ordonner tous actes d’information qu’il estime utiles. Il y est procédé soit par le président, soit par un de ses assesseurs ou un juge d’instruction qu’il délègue à cette fin. Dans ce cas, les prescriptions du chapitre Ier du titre III du livre Ier doivent être observées, à l’exception de celles de l’article 167 » ; Art. 191 al. 1 du C.P.P libanais « dès l’achèvement des actes qu’il estime nécessaires à la formation de son intime conviction, le juge entend les prétentions de la partie civile ou la plaidoirie de son avocat, puis le défendeur ou son avocat en sa plaidoirie, ainsi que, le cas échéant, la personne civilement responsable et le garant ou leurs avocats respectifs, le dernier mot revenant toutefois au défendeur ».

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Section I

Les procédures disciplinaires devant l’autorité