• Aucun résultat trouvé

FORMALISER LA DECOUVERTE. PRODUIRE UNE NOUVELLE FONCTION SEMIOTIQUE

Chapitre 6 : La fonction sémiotique de la découverte

6.2. Les unités de composition de la structure de la découverte

6.2.1. Les unités de composition de la fonction sémiotique

Comme nous avons commencé à l’envisager, différentes unités, linguistiques et visuelles, composent les fonctions sémiotiques de la découverte. Afin d’observer leur moment d’apparition, nous avons réalisé un tableau (cf. ci-dessous). Ce tableau a été fait après consultation des différentes publications scientifiques qui se sont succédé au cours du temps, depuis 1802 jusqu’à aujourd’hui. Le découpage temporel est lié à cette succession des revues. Il nous permet de balayer l’emploi et l’apparition des unités qui composent les fonctions sémiotiques de la découverte sur la période étudiée. Répétons-le, il s’agit ici d’une vision diachronique de l’usage des unités de notre structure :

Emploi/ usage

Unités linguistiques Unités visuelles

Unités/ Dates

Nom de

l’espèce Diagnose Description

Clés de détermin ation

Dessin Photographie Herbier

1802-1810’s Oui Oui Oui Non Oui Non Non

1815-1832 Oui Oui Oui Non Oui Non Non

1895-1906 Oui Oui Oui Non Non Non Non

121

1948 (peu) (rare)

1950-1975 Oui Oui Oui Oui (peu) / Non Non

1961-1981 Oui Oui Oui Oui Oui Oui Non

1971-1978 Oui Oui Oui Oui Oui Oui (peu) Non

1981-1996 Oui Oui Oui Oui Oui Oui Non

1997-2016 Oui Oui Oui Oui Oui Oui Oui

Ce tableau nous donne un aperçu temporel de l’usage des unités dans les fonctions sémiotiques selon les différentes périodes d’édition des revues du Muséum. Il concerne uniquement le domaine de la botanique. On observe ainsi que la fonction sémiotique, dès le début des publications, est un ensemble syncrétique, c’est-à-dire qu’elle met en négociation plusieurs langages19. Par la suite, nous questionnerons cette dimension syncrétique de la découverte (nous le ferons à partir des relations).

A partir du tableau, observons que seules les unités linguistiques « Nom de l’espèce », « Diagnose » et « Description » recouvrent toutes les périodes de publication. L’usage de l’unité linguistique « Clés de détermination » arrive dans les articles à partir des années 1950, dans la revue Mémoires du Muséum, série B, Botanique. En ce qui concerne les unités visuelles, on observe que l’usage de l’unité « Dessin » commence dès le début des publications en 1802. Cependant, et sans en connaître la raison, on remarque que l’usage du dessin (pour les articles de découvertes au moins) cesse plus ou moins entre 1895 et 1950. On peut noter que le dessin n’est pas pour autant remplacé par un autre type d’unité visuelle ou même linguistique. C’est manifestement à partir des années 1960 que cette unité revient de façon régulière. L’unité « Photographie » fait timidement son apparition à partir des années 1920, mais notons qu’elle est de plus en plus fréquemment utilisée à partir des années 1960. On note sur cette période l’usage

19

GREIMAS A. J., COURTES J., Sémiotique, dictionnaire raisonné de la théorie du langage, Paris, Hachette supérieur, 1993, p. 374-375.

122

de plus en plus constant de la photographie qui correspond aussi au retour de l’unité Dessin dans les fonctions sémiotiques. Les unités Dessin et Photographie retrouvent ainsi un usage régulier simultané. Cette observation laisse entendre que l’une ne remplace pas l’autre, bien au contraire. Leur usage suppose une fonction différenciée, ou plutôt un usage différencié pour montrer la nouvelle espèce. Nous y reviendrons. Enfin, l’unité « Herbier », comme pour celle de la photographie, est employée à partir des années 1920. Mais comme cette dernière, son emploi reste rare. On ne retrouve son utilisation de façon plus conséquente qu’à partir des années 2000. Soulignons que son usage récurrent est lié à la politique de numérisation des années 2000 qui facilite son emploi dans les articles (devenus numériques eux aussi).

L’usage systématique à quasi-systématique dans les fonctions sémiotiques concerne ainsi trois des unités linguistiques :

 Nom de l’espèce ;

 Diagnose ;

 Description.

Ces unités se présentent donc comme les unités fondamentales dans la composition de la structure élémentaire de la fonction sémiotique d’une espèce botanique. En outre, par sa fréquence, l’unité visuelle

 Dessin

peut être, elle aussi, considérée comme une composante fondamentale pour l’identification des nouvelles espèces. En effet, elle est utilisée de façon très régulière depuis le début des publications jusqu’à aujourd’hui, bien qu’une période lui ait été moins favorable et que son utilisation n’ait pas été utilisée de façon aussi systématique que les unités linguistiques. Ce constat soulève la question de la fonction, mais aussi de la hiérarchie entre les unités linguistiques et les unités visuelles. Cela pose la question d’une négociation syncrétique afin de manifester la plante, négociation qui interroge finalement les stratégies de manifestation de la nouvelle espèce. Nous y reviendrons. Précisons enfin que l’usage des unités

 Clés de détermination ;

 Photographie ;

 et Herbier ;

n’arrive que plus tardivement et de façon plus ponctuelle. Ces unités vont imposer leur présence progressivement, mais ne remplacent aucunement les premières unités. Nous relevons

123

cependant que depuis les années 1990, la photographie et les clés de détermination sont de plus en plus présentes. Cela interroge d’autant plus leur emploi. L’unité Herbier reste encore en retrait. Remarquons cependant que sa présence ponctuelle n’est pas de l’ordre de l’exceptionnel. Son usage s’intensifie à partir des années 2000. Comme nous l’avons dit, cet emploi est en lien étroit avec les politiques de numérisation de l’Herbier. Précisons qu’actuellement plus de 6 millions de planches d’herbiers sont numérisées et disponibles sur le site web du Muséum. Depuis les années 2000, relevons également que la revue Adansonia fait l’objet d’une sortie en version numérique, en plus de la revue papier. Ajoutons que ces versions numériques sont enrichies de liens hypertextes qui nous redirigent notamment vers les plateformes d’herbiers disponibles sur Internet, particulièrement vers celle du Muséum.

Ainsi, nous posons comme unités fondamentales des fonctions sémiotiques de la découverte d’une espèce végétale les trois unités linguistiques et l’unité visuelle :

 Nom ;

 Diagnose ;

 Description ;

 Dessin.

Sans réduire leur importance ni leur valeur, nous considérons les autres unités,

 Clés de détermination ;

 Photographie ;

 et Herbier

comme « non fondamentales » dans la composition des fonctions sémiotiques de la découverte. Afin de poursuivre notre travail d’identification des unités, considérons, dans un premier temps, les unités dites fondamentales et leurs relations associatives.