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QUELQUES ELEMENTS SUR LES TRAVAUX EN DIDACTIQUE DE

2.2 Le modèle de l’activité algébrique (Kieran, 2007)

2.2.1 Les sources de signification de l’algèbre

Kieran (2007) décrit ce qui peut rendre l’algèbre significative « Algebraic meaning : Where does it come from ? » ; elle se réfère à la classification de sources de signification développée par Radford (2004), et en ajoute une supplémentaire « Meaning from the other

Faculté des sciences de l’éducation-U.S.J. 49 mathematical representations, including multiple representations ». Kieran considère que les trois sources introduites par Radford prennent peu en compte la place qu’occupent les représentations mathématiques13 (représentations graphiques, tableau de valeurs, etc.) dans les programmes scolaires actuels.

La classification adaptée correspond à :

« 1. Meaning from within mathematics :

a. Meaning from the algebraic structure itself, involving the letter-symbolic form b. Meaning from the other mathematical representations, including multiple representations

2. Meaning from the problem context

3. Meaning derived from what which is exterior to the mathematics/problem context (e.g. linguistic activity, gestures and body language, metaphors, lived experience, image building) » (Kieran, 2007, p. 711)

Cette classification nous paraît pertinente et à retenir pour notre étude parce qu’elle permet d’éclairer ce qui donne du sens aux objets de l’algèbre, question principale dans notre recherche, ainsi que les difficultés des élèves.

Nous développons alors chaque source de signification.

a) Meaning form the algebraic structure itself, involving the letter-symbolic form

Cette source de signification concerne la construction du symbolisme algébrique. Elle est considérée comme fondamentale dans l’apprentissage de l’algèbre et précisément dans la compréhension des objets algébriques. Le symbolisme algébrique se construit à travers :

- les liens avec le numérique et donc la dialectique numérique/algébrique (Chevallard, 1985) ;

13 Kieran désigne par « mathematical representations » les « représentations mathématiques » que nous traduisons dans les termes de Duval (1993) par « registres de représentations sémiotiques », pour unifier la terminologie avec Pilet (2012) étant donné que nous nous référons à ses travaux par la suite.

Faculté des sciences de l’éducation-U.S.J. 50 - les liens entre les formes symboliques, leurs équivalences et les propriétés de manipulation correspondantes et donc les aspects syntaxiques et sémantiques des objets algébriques ;

- les liens entre l’aspect structural et l’aspect procédural des expressions algébriques. Selon Kieran, « This structural source of meaning not only links letter-symbolic representations to their numerical foundations but also provides connections among the symbolic forms of algebra, its equivalences, and its property-based manipulation activity. Although the algebra research literature often refers to the structure of expressions, the latter phrase both shuns definition and proves difficult for students to grasp. » (Kieran, 2007, p. 711)

La manipulation des expressions algébriques s’appuie donc à la fois sur les aspects syntaxique et sémantique d’une part, et structural et procédural, d’autre part, déjà introduits dans la section 2.1.2.

Quant à la fonction sémiotique, elle apparaît dans les travaux de Bosch et Chevallard (1999), dans le cas de la dialectique ostensifs/non-ostensifs.

Les ostensifs et les non-ostensifs sont deux types d’objets institutionnels, introduits dans la TAD afin de comprendre la « nature » des objets mathématiques et leur « fonction » dans l’activité mathématique (Bosch et Chevallard, 1999). Ils permettent de décrire les ingrédients qui composent les types de tâches, les techniques, les technologies et les théories des organisations praxéologiques. Les objets ostensifs sont les objets matériels et sensibles, ils peuvent être concrètement manipulés, vus, entendus, les auteurs distinguent des ostensifs matériels, gestuels, discursifs, graphiques et scripturaux. Les objets non-ostensifs sont ceux qui ne peuvent pas être manipulés, comme les notions, les idées, les intuitions. Par exemple, la factorisation est un objet non-ostensif. Pour Chevallard (1994), les objets ostensifs sont « les objets qui ont pour nous une forme matérielle, sensible au demeurant quelconque. Un objet matériel (un stylo, un compas, etc.) est un ostensif. Mais il en va de même pour les gestes, les mots, les schémas, les dessins, les graphismes et les écritures et formalismes. […] Au contraire des ostensifs, les non-ostensifs – soit ce que l’on nomme usuellement notions, concepts, idées, etc. – ne peuvent pas à strictement parler, être manipulés : ils peuvent

Faculté des sciences de l’éducation-U.S.J. 51 seulement être convoqués à travers la manipulation d’ostensifs associés. » (Chevallard, 1994, p. 4-5).

Les objets non-ostensifs ne peuvent être évoqués que par la manipulation adéquate de certains objets ostensifs associés (graphisme, mot, phrase, geste, etc.), et la manipulation d’objets ostensifs est conditionnée par les non-ostensifs. D’où la dialectique entre ostensifs et non-ostensifs.

« Toute technique suppose l’activation d’un complexe d’objets, les uns ostensifs (ils seront manipulés), les autres non ostensifs (ils seront évoqués). La manipulation des ostensifs est réglée à l’aide notamment des non-ostensifs, et ces derniers, inversement, sont évoqués à l’aide des ostensifs. Il y a ainsi une dialectique nécessaire entre ostensifs et non-ostensifs. » (Chevallard, 1993, p. 5)

Les ostensifs admettent deux fonctions, la fonction sémiotique qui correspond à leur capacité à produire du sens et la fonction instrumentale qui correspond à leur capacité à s’intégrer dans des manipulations.

Le traitement algébrique est aussi décrit comme une manipulation d’ostensifs et de non-ostensifs.

Meaning from the other mathematical representations, including multiple representations

Cette source de signification souligne l’importance de la coordination de plusieurs représentations, comme par exemple le graphique et le symbolisme algébrique, et les liens entre les différents registres sémiotiques (Pilet, 2012).

Selon Duval (1993), la dimension sémiotique du travail algébrique réside dans la mise en jeu, parallèlement au registre des écritures algébriques, d’autres registres sémiotiques comme celui des écritures numériques, celui des représentations graphiques, celui des dessins en géométrie ou encore celui de la langue naturelle.

Faculté des sciences de l’éducation-U.S.J. 52 Kieran explique que, selon Kaput (1989), la diversification des liens entre les écritures algébriques et différentes représentations peut mener à une conceptualisation des objets algébriques par les élèves et donner davantage de signification à l’activité algébrique. « Kaput (1989) has argued that the problem of student learning in algebra is compounded by the inherent difficulties in dealing with the highly concise and implicit syntax of formal algebraic symbols and the lack of linkages to other representations that might provide feedback on the appropriate actions taken. As a consequence, he has promoted the kind of mathematical-meaning building that has its source in translations between mathematical representation systems. » (Kieran, 2007, p. 712). Cependant, comme le souligne Kieran, certains élèves peuvent éprouver des difficultés à établir les liens entre le registre des expressions algébriques et celui des représentations graphiques.

b) Meaning from the problem context

Kieran (2007) évoque également l’importance de la résolution de problèmes internes ou externes aux mathématiques dans la construction du sens donné aux objets algébriques. Ce point rejoint alors plusieurs autres travaux comme ceux de Chevallard (1985), de Gascón (1994) et de Grugeon (1997) qui insistent sur le sens donné à travers la résolution de problèmes. Ainsi, l’algèbre est à la fois, un ensemble d’objets ayant des propriétés et des caractéristiques, et un outil pour résoudre des problèmes de mise en équation, de généralisation, de modélisation et des problèmes fonctionnels.

c) Meaning derived from what which is exterior to the mathematics/problem context

Kieran considère qu’il existe des faits extérieurs aux mathématiques, qui participent à la constitution de l’activité algébrique comme les gestes, les mouvements du corps, les mots, les artefacts. Ces éléments sont pris en compte dans des travaux récents en didactique de l’algèbre (Arzarello et Robutti, 2001 ; Radford, Demers, Guzmàn et Cerulli, 2003).

« Hence it seems to us, one of the didactic questions with which to deal is that of the understanding of how those non-algebraic meanings are progressively transformed by students up to the point to attain the standards of the complex algebraic meanings of contemporary school mathematics. » (Radford, cité dans Kieran, 2007, p. 713).

Faculté des sciences de l’éducation-U.S.J. 53 En se référant aux sources de signification présentées ci-dessus, et considérant que l’algèbre est une activité, d’après Lee (1997), Kieran (1996) construit le modèle GTG à travers trois types d’activités: l’activité générative, l’activité transformationnelle et l’activité globale que nous présentons brièvement dans la suite.