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APPERCU HISTORIQUE SUR LE GABON PRECOLONIAL

I- Les Pygmées ou Négrilles, essai d’histoire

L’histoire des groupes Pygmées du Gabon est particulièrement mal connue et la littérature à leur endroit est assez rare en dépit du fait que les études réalisées sur l’histoire du peuplement de l’espace Gabon signalent toujours la présence de ce groupe. D’après Ratanga-Atoz et all, ils sont donc les occupants les plus anciens du territoire et ils sont éparpillés sur l’ensemble du pays. Les pygmées semblent avoir existé presque partout au Gabon.

Les traditions de la plupart des peuples déclarent que les pygmées les ont précédés ou guidés dans la forêt lors des migrations ou des implantations. Aujourd’hui ils semblent avoir à peu près disparu dans l’Ogooué. Dans le sud, au contraire ils se rencontrent un peu partout par très petits groupes, vivant plus ou moins en symbiose avec les peuples voisins. Les analyses des données recueillies au cours des enquêtes réalisées auprès des populations pygmées ne nous donnent pas avec exactitude leur nucleus ou foyer originel. Néanmoins, d’après les études de l’Organisation Non Gouvernementale, UNESCO-PRECED-Promotion et Revalorisation des Cultures En voie de Disparition, les Babongo seraient originaires de trois (3) foyers dissemblables, à savoir, Diboua, Pongo, et Iboudji. Les Bakoya proviendraient des foyers Gnabi, région à cheval entre le Congo et la Centre-Afrique ; Angonda et Moubango, située sur les rives des fleuves Mouzaï et Mvadi, en amont du fleuve Ivindo. A l’instar des Bakoya, les pygmées baka seraient partis de la Centre-Afrique passant par le Cameroun pour aboutir à Minvoul (province du Woleu-Ntem)23. Les guerres tribales et la nécessité de s’établir sur un nouveau site favorable à l’épanouissement du groupe demeurent les points communs d’émigration des populations pygmées. Cependant, le mouvement migratoire varie selon les groupes pygmées en présence. Le mouvement migratoire des pygmées Babongo a été multiforme. Un groupe aurait longé la rivière Ikoye pour atterrir enfin au village Mimongo (Province de la Ngounié). Dans l’intervalle, un autre groupe aurait traversé la région de Bakongué pour aboutir également au village Mimongo. Un troisième groupe serait parti de Pongo, traversant la région de Bakongué pour se

      

23 ONG UNESCO-PRECED-Promotion et Revalorisation des Cultures En voie de Disparition. p. 8-12.

sédentariser, à leur tour, dans un petit village aux alentours de Sindara. Un quatrième groupe enfin serait parti d’Iboudji, pour s’implanter définitivement au village Osimba vers Tchibanga (Nyanga), sur l’axe d’Ikobé en transitant par le village Mimongo. Enfin, deux groupes auraient traversé l’Ogooué et l’un se serait sédentarisé dans la région de la lolo (Ogooué-Lolo), l’autre dans la région des plateaux Batéké (Haut-Ogooué)24. Certains groupes pygmées ont migré à cause de la chasse à l’éléphant, des conflits avec les Akélé et de la recherche d’un nouvel espace vital.

Selon la communauté culturelle voisine , les pygmées recevaient une dénomination différente : ainsi au nord, les Fangs les appellent Baka, Bekü ou Bibaya, dans l’Ivindo, les Bakota les nomment Bakola, dans le centre et l’est, les Okandé et les Téké, Akowa ou Babougou, dans tout le sud, on les appelle Babongo, Barimba, Abongo, Bambènga, Békwéyo, Bagama, à l’ouest, ils sont appelés Akowa par les Ngwè-Myéné, etc. Seuls les Baka, au nord, parleraient un idiome non-bantou, au Gabon. La littérature leur a également attribué différentes appellations telles chasseurs-cueilleurs, hommes de petite taille, hommes de la forêt, les nomades

2- Localisation

La devise des pygmées est caractéristique « Bongongo bwa imo-imo » comme pour dire « le pygmée, l’invisible, l’insaisissable, vous le voyez à côté de vous, l’instant

d’après il a disparu »25. Au cours de nos recherches, nous nous sommes principalement intéressés aux études des historiens tels que Raponda-Walker, Hubert Deschamps, qui ont fait dans leurs travaux une analyse assez approfondie de ce groupe durant la période précoloniale.

La présence des chasseurs-cueilleurs fut attestée au Gabon depuis la création du comptoir du Gabon, même-si les sources portugaises du XVIe siècle ne le

      

24 Ibid. p. 9.

25 Collectif, Pouvoir., Les sociétés traditionnelles dans la région de la Cuvette, Ministère de la culture et de l’enseignement technique chargé du patrimoine national au Congo. Ministère de la coopération. Mission française de coopération et d’action culturelle de Brazzaville-Congo, p. 58.

mentionnaient pas. D’après Raponda-Walker Lorsque la France prit possession de l’Estuaire du Gabon (1839-1848), il existait déjà un fort contingent de Pygmées, cantonnés sur la rivière Otandé, aux environs de la pointe Santa-Clara, à une douzaine de kilomètres au nord de Libreville. Un autre groupement, situé sur la rive gauche, s’était mis sous la protection des chefs de la famille des Asiga, dont le plus connu fut le roi Denis Kowé-Rapontchombo26.

Sur les bords de la Rèmboue, un des affluents de l’estuaire du Gabon, il y avait quelques petits villages de pygmées, vivant les uns près des Fang Béti, les autres près des Ashekiani ou Sékiani, avec lesquels ils faisaient très bon voisinage. En remontant l’estuaire, vers le nord de la colonie, on trouvait dans le massif montagneux qui sépare la Monda du Rio-Muni une fraction de pygmées, qui vivait très isolés, sous la dépendance de chef Ashekiani. Un peu plus haut, vers l’intérieur, entre le Ntèmboni et la Mandjanyè, un nouveau groupe assez important y était installé.27

Plus haut encore, après avoir dépassé la Woleu, qui vient tomber dans l’atlantique sous le nom de Rio San Benito, dans les monts de Cristal, au milieu des populations Mekurk, on trouvait une série de petits villages où ils habitaient à l’écart, sous le nom de Bengiel. Sous la même latitude, vers les sources de l’Ayina ou Ivindo, on rencontrait un groupe de Pygmées plus homogènes que les précédents, se rattachant probablement aux Ba-Binga du Moyen-Congo. Crampel en a vu quelques-uns dans les parages, vivant près des Fang Béti qui les nomment Bekü.28

Les Pygmées de la Pointe Denis se trouvaient en relation avec un autre clan demeurant en arrière des Orungu de Sangatanga (région du cap Lopez). Entre le grand Okano et l’Abanga, on retrouvait ici et là quelques petits villages de Pygmées, vivant au milieu des Fang. En remontant l’Ogooué, Marche (1873), Mgr Le Roy

      

26 André Raponda-Walker, Notes d’Histoire du Gabon. Mémoire de l’Institut d’Etudes Centrafricaines, n°9, Libreville, 2002, p. 234.

27 André Raponda-Walker, 2002, op.cit, p. 234

(1893) ont signalé la présence des Pygmées, au delà de Ndjolé, plus nombreux chez les Bakota et les Chakè.29

Sur les affluents de gauche, le Père. Trilles a retrouvé autour de la Ngounié et de ses hauts tributaires les Pygmées « Abongo ou Babongu », signalés depuis longtemps par du Chaillu, notamment dans le massif montagneux du « Moukumu-na

Bouali », où les Eshira les appelle « Barimba ». De là, revenant vers la côte, par le

« Rèmbo-Nkomi » et le « Fernan-vaz », on rencontre encore nos petits hommes.30

Dans le bassin de la Ngounié, vivaient les Pygmées de Mantèndè, sur la Louga, installés chez les Mitsogo, dans des huttes de feuilles, ensuite au village même de Mobaï, Mikanda. De même, ils habitaient deux petits campements aux environs des villages de Géndèndè, chez les Mitsogo, et Ndjona, chez les Ivéa-Moé. A Dibandi, (l’est des Mimongo), ils vivent en symbiose avec les Massango. A l’est de Minvoul sont installés les Baka où ils côtoient la population fang.31

Les Baka se distinguent des autres Pygmées à la fois par leur statut linguistique car ils parlent une langue non bantoue tandis que les autres Pygmées parlent des langues apparentées à celles de leurs voisins bantous, parce que les autres groupes sont moins nomades.32

Photo Un village pygmée (durrutyguedjphoto.free.fr/pygmee.htmw.jpg)

      

29 Crampel cité par Raponda-Walker, 2002, op.cit, p. 237.

30Alfred Marche (1873) et Mgr Le Roy (1893) cités par André Raponda-Walker, 2002, p. 237.

31 André Raponda-Walker, 2002, op.cit, p. 234.

Photo 1 : Une famille pygmée Baka du Gabon : (durrutyguedjphoto.free.fr/pygmee.htmw.jpg).