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APPERCU HISTORIQUE SUR LE GABON PRECOLONIAL

II- Les peuples Bantous : origines et migrations

3- Le groupe du Sud-Est

Au départ, la région est peuplée par les Pygmées. Dès le XVIIe siècle, elle a vu arriver des peuples d’origines diverses et variées. Il y avait les Kélé méridionaux ou

Mbahouin, Wumbu et Ndassa. Ici est aussi notée la présence des Nzébi, Aduma, installés

depuis longtemps dans la région.

Les Bandjabi ou Nzébi sont l’un des peuples les plus nombreux du Gabon. Ils occupent la plus grande partie des districts de Mbigou et de Koulamoutou au sud-est des Massango, et débordent sur les districts de Larstourville chez les Badouma et de Franceville où vivaient des Ambama, des Batéké, des Bakanighi et des Mindoumou. Les Nzébi et les Badouma qui occupent la rive gauche de l’Ogooué aux environs de Larstourville seraient partis du nord-ouest de la République populaire du Congo, plus précisément vers la région de la Sangha. Leur dernier foyer se situerait autour des centres urbains de Mossendjo et Divenié où vit encore une importante colonie Nzébi55. Après la traversée de plusieurs rivières dont la Lebagni au Haut-Ogooué56, ils s’installèrent sur le mont Moanda et fondèrent des villages tels que Kegha et autres. A la suite des disputes entre les clans, ils se dispersèrent. Une portion du groupe se dirigea vers la Bouenguidi, une autre alla en direction de la Ngounié. Les Aduma se dirigèrent sur l’une des rives de la Lolo et traversèrent. Leur fusion avec les Aduma permit la fondation d’importants villages parmi lesquels Mulundu. Les Awandji, un clan Aduma, ne maîtrisant pas la nage, prit la forêt et atteignit les monts Moanda et Boudinga, où il s’établit. Sur ce, voici ce que dit la tradition orale, dite par Georges Mboyi :

« Partis de l’est, ils passèrent les rivières Rombo et Lebagni (Haut-Ogooué). Ils suivaient les Pygmées, et les Pygmées suivaient les pistes des éléphants.

      

55Gilchrist Anicet Nzenguet Inguemba, Introduction à l’histoire des Nzébi du Gabon, 2e moitié du XIXe, 1e moitié du XXe siècle. Rapport de licence, UOB, 1996, p. 38.

56Georges Dupré, Un ordre et sa destruction, Ed. de l’ORSTORM, collections mémoires, n° 93, Paris, 1982, p. 98.

Les animaux étaient dans la barrière de Manondzo ; mais les éléphants avaient cassé la barrière. Les informateurs de Mbigou parlent aussi de Koto, puis de Tseghe, vers l’est. Irogolo fait passer les Nzabi à Mossendjo où ils auraient laissé les Batchangui, puis ils auraient traversé la Nyanga, trouver la mer à Mayumba ; chassés par les crocodiles et le froid, ils seraient revenus habiter ici.

Il y a eu une guerre et ils se sont dispersés, les Nzébi sont allés à la Bouenguidi, les autres sont partis à la Ngounié et les autres à la Léyou. Les Badouma ont suivi la Sébé ils ont fait des canots d’écorce et sont descendu par la rivière jusqu’aux rapides de Doumé.

Certains sont restés là, d’autres sont allé à Ikondo. S’étant multipliés, ils se sont avancés le long de l’Ogooué et ont établi un village à Mandji, puis à Boundji. Il y aurait des dessins dans des grottes. Mais à l’arrivée des Badouma, il n’existait dans le pays que les Pygmées (Babongo), qui avaient suivi le chemin des éléphants. Les Babongo ont fait des alliances avec les Badouma ; chaque clan Badouma a ses Babongo »57

Concernant les origines du peuple Aduma, nous avons le récit suivant :

« Besu lamata u koto Batu bosi ba lilongo. Bumata ni ligona. Ya besu

layanga lapendra ni mu nzali ka lasuta ya Mulundu.

Pola besu lapasana ni mu nzela. Bake ba lota mu pindri, bana mu mamba Batu baba lota mu nzali bakela icina muti kumbu Muduma. Lina ni Litatu li burebala bo Baduma.

Pola kumbua muwanji ya mata ni kala. Liwanji mutu wasaga na nyuta Baduma badugi, bawanji basali »58

Traduction littérale

« Nous revenons du Koto. Tous les hommes du monde ont pour origine ce lieu.

      

57Georges Mboyi : voir infra, annexe, texte n°20.

Lors de notre arrivée, nous avons emprunté la rivière. Nous sommes arrivés à Mulundu. Mais c’est en route que nous nous sommes séparés. Certains sont passés par la forêt, d’autres par l’eau.

Ces derniers passèrent la nuit sous un arbre appelé Muduma. C’est la raison pour laquelle ils sont appelés Duma.

Mais le nom Muwandji c’est depuis les origines. Liwandji c’est le jeune homme. Les Duma sont des pagayeurs, tandis que les Wandji, des agriculteurs ».

L’est du territoire est aussi le pays du groupe Mbédé-Obamba qui occupe le nord du district de Franceville et presque tout le district d’Okondja. Leur migration est partie de l’est ; ils sont venus par Kélé Ngouali (région d’Ewo), repoussés par les Mbochi. Ils fondèrent le village Andjoukou, sur une montagne à côté d’Okondja où ils trouvèrent sur la Sébé le chef Oshashi qui commandait aux Akanigui, venus avant avec les Pygmées (Akoula ou Abongo). Ils luttèrent contre eux et les repoussèrent sur l’Ogooué. Ils ont donc émigré il y a longtemps de la république populaire du Congo sous la pression des Mbochi. Les Obamba, vers 1850 se trouvèrent sur la moyenne Sébé et poussèrent devant eux les Ndumu. Ils ont rejoint les Kanighi, les Mbahouin et les Wumbu, qui les avaient précédés dans la région de Franceville.59 Il y avait également les Téké, parents linguistiques des Obamba, des Ndumu, des Kanighi des Nzébi, et des Tsengui.

Ce peuple occupe les savanes à l’est de Franceville. D’après la tradition orale, les Téké viennent d’Amaya-Mokini (pierre résistante), près d’Ewo et d’Okoyo, sur l’Alima. Repoussés par les Mbochi, ils sont venus sur les plateaux entre la Léconi et l’Alima, et ont planté des palmiers dans la savane. Ils se sont avancés et à la suite des conflits, et se sont scindés en trois groupes, sur la Passa, la Léconi, la Lebeni. Ils sont venus là au temps du grand-père de Ndiémé. A l’arrivée de Brazza, ils avaient deux chefs : Ngoshana (Léconi et Lebeni), Mbana-Lekivi (Passa). Il n’y avait personne avant eux sur la Leconi et la haute Passa. Les Ndoumou, les Ambama et les Akoura

      

(Ambama de la forêt) occupaient la basse Passa. Leur implantation s’est faite pacifiquement60. Ce parcourt migratoire est retracé par un de nos informateurs :

« Les Atèghè sont des vrais parents des peuples qui cohabitent avec eux (Mindoumou, Ambama, Bakanighi). Leur famille est restée au Congo. Ils sont partis d’Amaya-Mokini, la fameuse pierre résistante, près d’Ewo, à l’Alima.

Ils ont eu plusieurs fois des litiges avec les Bambochi. C’est pourquoi ils sont allés se cacher sur les plateaux entre Leconi et l’Alima. Presque tous les ancêtres parlaient que nous étions parentés et qu’avec les alliances matrimoniales, les liens se sont renforcés. Je pense moi que leur organisation sociale est la même sinon presque identique. Ils faisaient tous les Ndjobi pour punir ou trancher les litiges »61

Il y a enfin, les Tsengui qui occupent la ville de Bakoumba et ses environs où on les retrouve dans quelques villages au voisinage des Nzébi et des Avandji (dans le département de Lékoko, au sud-est du Gabon). La migration Tsengui est parfois mêlée à celle des Nzébi et des Aduma. Suite à l’absence de documents, à travers ce récit, nous allons retracer leurs circuits migratoires à partir de la rivière Lebeni où ils se seraient certainement séparés des groupes précédemment cités. Voici ce que dit Jean-Paul Mouélé à propos de ce périple migratoire.

« Batsengui ngule a lebèni be mate. Bol bu bubatonge tsomi Walla, ghu tung’a rombô. Bivonda bia bésa béne mô Lekike bona mekèdi andé Tsogho. Bésa bena la mate walla mu mabêdi ne bangome. besa bena le mate walla la ya tongâni bole bua na mandza, Kumbi, ya tunge lebombi, ya tsa tchèghè. M’fum’a bésa béna yane a be tsomia tsomi Mekunzu.

Ya kumbi yane aba bibande bia lotela: na besanga, Mighâla, Bavonda, Makanda, Metâta, Ikolo. Ake kumbi ngai ba gnaghe mu bibamba; bole bu bui biapole tsomi Mekegni. Bu ba ye ne mandjile ma b’utonge, na

      

60 Ibid. p. 61-63.

niro bésa béna lake mu yu yi. Bibambe ne bi bia tsamene bésa béna : lolo ake ubaghesange batsengui ghu Kegha na ghu Machuku »62

Traduction littérale

« Les Tsengui sont venus des environs de Lebeni. Le village qu’ils construisirent fut Walla aux bords de la rivière Rombo. Leurs ancêtres sont Lelika et son épouse Tsogho. Walla a été abandonné à cause des guerres contre les Bangomo. Partis de ce village, les Tsangi ont édifié un nouveau village, Kumbi près de la rivière Lebombi, dont le chef était d’abord Mukundzu qui laissa le trône à Kuala-kuala. A Kumbi, on trouvait plusieurs lignages tels, Bassanga, Mighâla, Bavonda, Makânda, Metate, Ikolo. Kumbi a été abandonné à la suite de l’arrivée des blancs dont le premier village qu’ils atteignirent fut Mekegni. Ils sont venus avec le travail de l’or. C’est le premier travail qui explique notre situation actuelle. C’est ainsi que l’on trouve aujourd’hui des Tsangui au Kegha et à Machuku ».