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LES PARTICULARITÉS DES NOUVEAUX PUBLICS DANS LES DOM

AGRICOLE ALTERNÉ

MOTS-CLÉS : ALTERNANCE NOUVEAUX PUBLICS OUTRE-MER ÉDUCATION

A. GIORDAN, J L MARTINAND et D RAICHVARG Actes JIES XXIV,

4. LES PARTICULARITÉS DES NOUVEAUX PUBLICS DANS LES DOM

Dans leurs propos les formateurs ont évoqué des particularités historiques, sociales, et malheureusement des particularités liées aux conduites à risques de ces nouveaux publics. Le premier point concerne l'oubli par ces jeunes de leur histoire, de leur culture. Effet de la mondialisation, des médias, de l'arrivée en masse des NTE, les formateurs ont peur que Nike et Coca-cola dissolvent quelque peu l'histoire même de l'île, le colonialisme, la religion, les particularités ethniques. Cette inquiétude de banalisation concerne l'identité en construction tout entière de ces jeunes, leur positionnement, leur projet dans un contexte de dépendance fort perçu vis à vis de la métropole. Cela nous permet de faire un lien avec le second point que nous avons relevé à propos de la situation sociale des DOM avec en autre, le taux de chômage très élevé qui offre des perspectives très réduites aux jeunes. Dans ce contexte l'idée de projet professionnel et personnel souffre et accentue les problématiques de motivation de ces jeunes.

en génération. Le "Zammal"4 pousse dans les talus, le "Charrette5" se distille et coûte pas très cher. Les jeunes sont très tôt en rupture avec leur environnement immédiat qu'il soit familial ou bien social. Souffrant des effets de mode, ils reproduisent maladroitement des stéréotypes, se sentent victimes et agressent leur entourage par des recherches incessantes de valorisation et de reconnaissance. Des juxtapositions de "MOI" très différents sont à l'origine de tout cela. Ils rejettent leurs traditions, perdent leurs repères ; c'est à dire le système de valeurs dont ils ont hérité. En restant dans leur monde, ils recherchent une certaine paix (culture rasta très présente à la Martinique), une reconnaissance pour ce qu'ils sont particulièrement dans leurs temps libres. Oisiveté, laxisme sont les mots qu'emploient leurs formateurs pour signifier leurs difficultés de concentration et de socialisation. La fameuse crise d'adolescence semble ainsi poussée à son paroxysme, même s'ils soulignent en même temps leur besoin d'apprendre, leur envie d'être aimé. Ces difficultés diverses arriveraient de plus en plus tôt dans l'âge. De grosses différences en termes d'excès s'opèrent en fonction des âges, des sexes et de la présence plus ou moins importantes de leaders. Ils ont, de plus, une image négative de leur formation ; car l'agriculture est pour eux péjorative (synonyme de la non réussite sociale de leurs parents) ; en résulte une nonchalance, une démotivation. Des clans se forment et bousculent les normes proposées par les formateurs. Des excès de violence réguliers perturbent la vie de la structure associative. Très peu habitués à être guidés, ils résistent à toute forme d'élaboration de leur projet personnel.

En conclusion nous retiendrons que face à ces nouveaux publics, les formateurs se rendent compte que leurs domaines de compétences initiaux sont caducs, puisqu’ils s’adressent à une population plus diversifiée. En faire le deuil n'est pas chose aisée, car avec ces jeunes, la démarche pédagogique première, consiste à les aider à se comprendre. Pour y arriver des efforts importants de communication doivent être accomplis par ces professionnels de l'éducation. L'apprentissage de techniques de communication s'avère utile, pour d'une part, décrypter des situations pédagogiques difficiles (altercation, mutisme…) et, d'autre part, se prémunir en tant que personne. Si de telles nécessités de formations apparaissent utiles aux formateurs, peu s'engagent réellement dans des cursus de perfectionnement.

En termes d'organisation interne, ces nouveaux publics demandent une cohérence au niveau de l'équipe éducative. Cette cohérence se construit, nous dit une formatrice "au regard des problèmes rencontrés… le plan de formation et le projet d'établissement doivent refléter une mobilisation générale, pour satisfaire nos élèves et nos partenaires". Par ces propos, on ressent l’importance chez ces formateurs de développer des compétences collectives pour répondre au sens nouveau de leur métier.

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Le Zammal désigne le cannabis ; les jeunes disent « fumer un B52 », du nom d'un bombardier bien connu.

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Cette envie de développer des compétences correspond aussi paradoxalement à un besoin de retour aux sources de la pédagogie de l'alternance des Maisons Familiales Rurales. Avec l'arrivée de ces nouveaux publics, les formateurs redécouvrent les pédagogies nouvelles qui reposent sur une certaine éducation par l’action, les relations familiales et groupales. Cette approche de la socialisation semble cependant aller à l'encontre des besoins de ces nouveaux publics. Leurs familles se décomposent, le travail disparaît et leur mode d'apprentissage est plus que jamais individualisé. Les bases d'une nouvelle pédagogie de l'alternance sont donc à construire selon les représentations de ces formateurs au regard des éléments qui ont composé les bases historiques du mouvement des Maisons Familiales et des particularités nouvelles de ces publics accueillis.

BIBLIOGRAPHIE

MASSIP C., Nouveaux publics et nouvelle professionnalité en alternance ? in Alternance, développement personnel et local sous la coordination de Demol J.-N. et Pilon J.-M., Paris : Éditions L’Harmattan, 1998, pp. 209-219.

MASSIP C., Des associations pour les jeunes des villes : Le cas de l’expérimentation des Maisons Familiales Urbaines, in Élèves à problèmes, écoles à solutions ?, Paris : Éditions ESF, 2000, 235 p. MASSIP C., Évolution des publics en alternance et de la professionnalité du formateur, Paris : Éditions L’harmattan, 2000, collection alternance, 173 p.

MASSIP C., Nouveaux publics en alternance et professionnalité du formateur : le cas des Maisons Familiales pour les jeunes des villes, Villeneuve d'Asq : Presses universitaires du Septentrion, 2000, 467 p.