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Les espaces de loisirs intégrés à l'espace urbain

A. Rôle de l'urbanisation

Mais, expliquer l'engouement des visiteurs pour les espaces naturels, seulement par le fait que le temps de loisirs a cru par rapport au travail n’est pas suffisant, la semaine des 39 / 40 heures est bien antérieure au phénomène. Il existe une nouvelle perception du territoire liée à la localisation de sa résidence et à son mode de vie qui s'est modifiée ces dernières années avec la croissance de l'urbanisation des agglomérations et la variation des distances parcourues.

Caractéristique des sociétés post-industrielles, la qualité de l’environnement, liée au cadre de vie, est devenue une variable fondamentale de localisation sur les territoires urbains. La libération de certaines contraintes de localisation, par le développement des voies de communication urbaine et des transports, a eu pour conséquence de réduire les temps de parcours entre différents espaces. Si ces réseaux de transport ont été créés pour une meilleure fluidité des déplacements urbains et interurbains, ces infrastructures ont aussi permis de rapprocher les espaces naturels des villes.

En effet, l'autoroute A6 a eu pour première fonction de relier Paris à Lyon, puis cet axe routier est devenu, lors des week-ends, une véritable artère de desserte de Paris vers la forêt de Fontainebleau, phénomène valable aussi pour des espaces bien desservis par des autoroutes tels que la Sologne, la Normandie ou le Perche. Ces exemples se reproduisent autour de chaque grande ville et métropole en France; Lyon et les Alpes, Lille et la Côte d'Opale, Bordeaux et la côte atlantique...

Déjà en 1974, P. George anticipe les problèmes de saturation de certaines zones en fonction de la croissance des infrastructures routières qui accompagnent l'urbanisation des grandes villes "[ ] Encore est-elle (la "conservation"), en proie à des pressions multiples, et le grignotage incessant finit

par faire craindre la dénaturation complète de l'espace naturel, dont l'écologie est bouleversée à partir du moment où il est rogné sur ses marges et éventré par des grands axes de circulation"57, et déjà, on entrevoit toute la

problématique des déplacements liée aux migrations pendulaires récréatives que l'on connaît aujourd'hui :"L'espace de loisirs hebdomadaires, pour celui qui n'a pas de résidence secondaire, est le bord de

la route"58.

57 George (P.) , "L'ère des techniques, constructions ou destructions", collection SUP, PUF, 1974. p. 165. 58 Ibid. - p. 165.

Cet espace apparaît ségrégatif suite aux processus d'acquisition des terrains et des immeubles pour en faire des résidences secondaires de l'aire périurbaine. Mais ces aires ont été depuis englobées dans l'espace urbain, et le phénomène s'est reporté sur des aires plus périphériques. Le modèle de Lundgren59 (page suivante) décrit bien ce phénomène de croissance urbaine et

de la dynamique de localisation des aires récréatives.

Figure 3 : Intégration des territoires touristiques dans l'espace urbain (Lundgren, 1984) 1). Croissance des réseaux de transports

La croissance des fréquentations des espaces naturels est concomitante à la croissance de l'urbanisation et à la nouvelle façon dont les citadins appréhendent leur espace en intégrant, dans leur cadre de vie, l'environnement dans lequel s'inscrit la ville, phénomène relayé par le desserrement de l'habitat en zones périphériques.

Il a été clairement mis en évidence que la croissance urbaine s'est accompagnée d'une croissance des infrastructures de transports60. Qu'ils soient intra-urbains ou inter-urbains, ces

réseaux de transports ont facilité la mobilité urbaine des citadins en leur permettant, grâce à une réduction des temps de transport, d'obtenir une plus grande liberté de localisation résidentielle dans la ville, la métropole, l'agglomération, etc.

Ce qui nous intéresse dans ce phénomène, c'est la réutilisation de ces réseaux pour consommer sur les espaces naturels, "Le tourisme implique d'une part une motivation de détente, de

plaisir et d'enrichissement culturel, d'autre part, il met en œuvre des structures d'offres et de transport

59 Lundgren (J.), "Géographic concept and the development of tourism research in Canada", Geojournal, Dordecht/Boston,

vol. 9, n°1,1984. pp17-25.

60 Baptiste (H.), " Interactions entre le système de transport et les systèmes de villes", Thèse de doctorat, Université de Tours,

organisées".61

L'utilisation de la voiture et le développement des réseaux de transports ont contracté les espaces de circulation et provoqué un desserrement de l'habitat sur les franges urbaines. Ces phénomènes ouvrent sur une nouvelle organisation devenue plus urbaine du territoire français. Avec une mobilité urbaine croissante et des accessibilités plus fortes, on pense en réseaux de villes62 qui forment des territoires urbains plus ou moins maillés.

La carte de la Figure 5 (page 44) est une simulation des moyennes des gains de temps que procurent l'achèvement de l'autoroute A51 (Gap –Sisteron). Si le gain de vitesse moyenne paraît négligeable sur des longs trajets, il reste important si l'on tient compte des vitesses moyennes relativement basses que procure le relief dans ces régions. L Chapelon écrit que "l'A 51 ne peut prétendre qu'à une vocation de desserte régionale"63.

Si l'on fait un rapprochement entre la richesse naturelle de la région et le niveau d'urbanisation de la région (Grenoble, Toulon, Cannes, Nice, Marseille), il est indéniable que l'achèvement de ce tronçon d'autoroute aura des répercussions sur l'espace en le rendant plus accessible lors des déplacements récréatifs. Des gains de temps de quelques minutes sont d'autant plus importants que les trajets sont de faibles durées, et cela est particulièrement vrai en milieu urbain.

Prenons un autre exemple issu d'une simulation de NOD64, mais qui concerne une

infrastructure intra-urbaine : il s'agit de l'achèvement du périphérique de Tours.

La création de cette rocade aura un impact certain sur les temps des trajets effectués sur les zones situées à l'est de l'agglomération. Si des gains de temps paraissent négligeables sur de longs trajets, ils représentent pour des déplacements quotidiens des gains considérables et peuvent alors rendre plus attractifs, parce que plus accessibles, des sites qui étaient jusqu'alors délaissés.

61 Potier (F.), "Les métamorphoses du tourisme", Sciences humaines, n°73, juin 1997. p. 34 - 37.

62 On renvoie ici à l'analyse de H. Baptiste sur le rôle des réseaux de transport et des réseaux de ville, et de leur

croissance simultanée.

63 Chapelon (L.), "Offre de transport et aménagement du territoire. Evaluation spatiotemporelle des projets de modification de

l'offre par modélisation multi-échelles des systèmes de transport", Thèse de doctorat, Université François rabelais – Tours, 1997.

64 NOD est un modèle élaboré au Laboratoire du CESA par L. Chapelon A. L'Hostis et Ph. Mathis afin de

calculer l'impact des offres de transports sur l'espace. Il a pour object l'évaluation spatio-temporelle des projets visant à modifier l'offre de transport.

169 000 80 000 16 000 POPULATION

A MOINS DE 1H30 ET DE 3H EN MODE ROUTE DES VILLES DE PLUS DE 100 000 HABITANTS

0 km 160 km CHAMBERY LYON AMIENS LE HAVRE PERPIGNANMARSEILLE MONTPELLIE CAHORS TOULOUSE PAU TROYES TOURS RENNES BREST BORDEAUX NICE CLERMONT BESANCON STRASBOURG CHERBOURG LA ROCHELLE LILLE DUNKER Q UE R Q CHAMBERY LYON AMIENS LE HAVRE PERPIGNANMARSEILLE MONTPELLIE CAHORS TOULOUSE PAU TROYES TOURS RENNES BREST BORDEAUX NICE CLERMONT BESANCON STRASBOURG CHERBOURG LA ROCHELLE LILLE DUNKERQUE R 152 000 80 000 15 000

* Pour toute ville i, on effectue la somme des populations de toutes les villes j de plus de 100 000 habitants à moins de 1h30 ou 3h en mode route de la ville i, pondérées par le temps de parcours entre i et j

Route 70 Voie express Autoroute Route 60 Route 50 Réseau routier

A MOINS DE 3H EN MODE ROUTE

A MOINS DE 1H30 EN MODE ROUTE

Lyon Clermont-Fd Montpellier Nice Marseille Castellane Gap Aspres Sisteron 0 100 km Evolution (en km/h) Pertes 0 3 12 -3 Gains

Evolution des vitesses moyennes

Différences absolues entre

les vitesses calculées avant et après simulation dans une logique de minimisation

des temps de parcours

A 51 : Grenoble - Sisteron Légende carte Projets autoroutiers Binômes fonctionnels Légende commune aux 2 cartes Voie express Autoroute Route 70 km/h Route 60 km/h Route 50 km/h

EVOLUTION DES VITESSES MOYENNES LIEE A