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CHAPITRE 2 – Les caractéristiques des politiques publiques dans l’organisation urbaine et

B- Les conséquences des politiques Urbaines et touristiques

B-1- Des politiques urbaines d’essais centrées essentiellement sur le développement de la ville

Depuis l’Indépendance du pays en 1956, la question d’accès au sol urbain était considérée par les politiques urbaines comme un enjeu incontournable et qu’il fallait maîtriser dés le départ. A cet effet, des efforts considérables ont été déployés par le gouvernement tunisien en vue d’établir une utilisation rationnelle du sol et des ressources naturelles et, assurer conjointement une meilleure organisation du territoire.

La décennie 1960-1970, période durant laquelle le système d’accès au sol urbain est étatisé, a été caractérisée par la prééminence de l’Etat comme promoteur quasi exclusif du développement économique et social. L’organisation des coopératives à la campagne, la nationalisation du commerce extérieur et l’encouragement des productions de substitution aux importations constituaient les principales caractéristiques du modèle de développement mis en place au cours de cette période. Les politiques urbaines reposaient essentiellement sur la démolition des gourbivilles et le relogement d’une part des populations dans des cités de recasement aménagées à cette fin. La réalisation de l’habitat réglementaire et décent a profité surtout aux membres de l’appareil de l’Etat, tout en excluant les populations pauvres à cause de leur faible solvabilité (Chabbi et Bouraoui, 2000, Belhedi, 2005). Cela coïncide avec le renforcement du pouvoir des maires, lesquels sont davantage confortés par la promulgation d’une loi visant à obliger les propriétaires à vendre, dans un délai de deux ans, tout sol urbain à un prix fixé par des Commissions Municipales. A défaut de quoi, l’expropriation de la propriété privée était prononcée de droit (Chabbi, 2000). Ce contrôle strict de l’accès au sol urbain a engendré la naissance d’un marché parallèle privé, organisé par des filières illégales dans la plupart des cas. « Ainsi, l’occupation clandestine des terres agricoles par la société

jugée insolvable s’est amorcée progressivement »282 à travers les plus grandes villes

tunisiennes, notamment les villes littorales (Tunis, Sfax et Sousse) aux dépens des ceintures maraîchères et vergers (senia et jnēn). Cela s’est traduit par :

- l’accroissement des populations urbaines ;

- la redistribution interne des populations urbaines entre 1960 et 1980 ;

- le développement de nouvelles zones d'habitat, surtout spontané suite à l'exode rural des années 1960-1970 ;

- La recherche d’un cadre de vie meilleur, à partir de 1980.

L’accroissement démographique est lié tant à des facteurs socio-économiques conjugués à une mobilité liée à la vie professionnelle et active qu’à l’émergence de nouvelles aspirations sociales émanant de citadins aisés qui sont partie à la recherche de domiciles plus spacieux dans des lieux plus calmes et plus naturels. Selon Chabbi (2000), cette situation a permis aux catégories sociales moyennes et populaires d’acquérir un bien foncier : 78% de la population étaient devenus propriétaires de leur logement. Mais l’urbanisation incontrôlée de l’espace rural n’a cessé de faire régresser les terres agricoles autours des villes tunisiennes y compris celles aménagées en périmètres publics irrigués (Mlika, 1996 ; Bouraoui et Chabbi, 2000 ; Belhedi, 2005).

282 Bouraoui M., « de Saclay à Sijoumi, deux moments d’agriculture urbaine », in Actes du séminaire Etapes de recherches en paysage, n° 1, Ecole nationale supérieure du paysage, Versailles 2000 p. 45.

B-1-1- Plus de vingt ans d'adaptation des politiques d’aménagement urbain

L’échec de la politique des années 1960-1970 a été une occasion pour élaborer de nouvelles politiques urbaines, capables d’assurer une meilleure planification du territoire. En effet, et dès le début des années 1970, l’engagement du pays dans l’activité touristique comme axe de développement économique place, pour la première fois, l’aménagement du territoire comme un préalable voire une préoccupation majeure à la mise en œuvre de ce projet. Une démarche de planification urbaine s’engage à travers le pays en vue d’une « définition spatiale de la

planification économique »283 ainsi que les outils et les stratégies du développement sur les régions et les villes. Cette nouvelle orientation politique s’est soldée par la création du programme de développement régional (PDR) en 1973. Une décennie plus tard, le peu d’effets de cette démarche concourre à la transformation du PDR en programme de développement rural intégré (PDRI), à partir de 1983. Pour garantir cette nouvelle mission qui est l’intégration, il y a eu création d’une nouvelle institution, le Commissariat Général au Développement régional (CGDR) qui se transforme en 1985 en Commissariat Général au Développement Régional et à l’Aménagement du Territoire (COGEDRAT), (Abdelkefi 2001). En raison de ces diverses hésitations, la notion d’aménagement du territoire n’a pas trouvé une formulation institutionnelle adéquate et stable. Les modifications du code de l’urbanisme en 1979 étaient une étape nécessaire pour pallier aux faiblesses du document précédent (le règlement de l’urbanisme et de la construction de1969)284.

Les principales catégories de documents apparus dans ce code sont les suivants :

- le plan directeur d’urbanisme (PDU) qui fixe les orientations fondamentales de l’aménagement sans opposabilité aux tiers,

- le plan d’aménagement urbain (PAU) qui fixe les règles générales d’utilisation du sol avec opposabilité aux tiers,

- le plan d’aménagement de détail (PAD) qui fixe les programmes opérationnels pour la réalisation des lotissements (Abdelkefi, 2001)

B-1-2- Des instruments de planification et de gestion territoriale à l’appui de l’engagement politique dans la question urbaine

Le gouvernement tunisien a compté, dés le départ, sur l’initiative publique pour développer les divers secteurs dont celui de l’habitat. Toutes les politiques publiques des deux premières décennies de la Tunisie indépendante (1956-1976) reposaient sur des programmes de développement urbains et ruraux de rattrapage du retard accumulé durant la période coloniale. C’est ainsi que fut créée respectivement le Fonds National pour l'Amélioration de l'Habitat (FNAH), crée depuis la première année de l’indépendance en 1956, la première Société Nationale Immobilière de Tunisie (SNIT), en vertu de la loi n°57-19 du 10 septembre 1957 et plus tard, la Caisse Nationale d'Epargne Logement (CNEL)285 instituant le régime d'épargne logement. Ces diverses structures ont été appuyées par la création de l'Office de la Topographie et de la Cartographie (OTC) en 1974286, (Slim, 1998). Néanmoins, toutes ces structures et textes fondamentaux dont l’objet est de contrôler la construction, permettre l’aménagement pour utilité publique et la cadastration du sol urbain, ont été souvent confrontés à des difficultés administratives majeures que Abdelkefi (2001) alloue aux insuffisantes capacités de l’administration centrale et au dénuement des communes.

283 J. Abdelkefi, plan bleu 2001, op. cit. p. 19.

284 Pour J. Abdelkefi, le règlement de l’urbanisme et de la construction de1969 est une « sorte de guide d’une grande utilité en matière de construction mais il était peu satisfaisant en matière d’urbanisme car il n’autorisait pas l’opposabilité aux tiers ». Plan bleu 2001, p. 21.

285 Loi n° 73-24 du 7 mai 1973.

286 Loi n°74-100 du 25 décembre 1974, portant la création de l'Office de la Topographie et de la Cartographie (OTC).

En effet, la mise en place de ces importants dispositifs institutionnels287, financiers (création de plusieurs caisses pour la promotion du logement)288, professionnels (création de sociétés étatiques «SNIT, SPROLS289» pour la réalisation de logement, clé en main) et juridiques (loi de 1977 organisant la promotion immobilière et le code de l'urbanisme de 1979), n’est pas arrivée à maîtriser parfaitement l’évolution géographique de l’espace périurbain.

B-1-3- Des outils de planification dépourvus des moyens financiers et humains nécessaires à leur mise en œuvre

Parallèlement, le manque de moyens financiers a amené les opérateurs publics comme l’AFH à augmenter le prix de vente des terrains à bâtir dans des lotissements aménagés sur d’anciennes terres agricoles, de plus en plus éloignés des centres urbains. Cette nouvelle formule a accentué l’exclusion des ménages à bas salaires de l’accession à la propriété. En l’occurrence, ces populations sont allées chercher la solution sur le marché parallèle, chez des spéculateurs fonciers privés qui opèrent souvent sur des terrains agricoles non viabilisés, en toute infraction aux lois foncières en vigueur (comme la loi de protection des terres agricoles) et aux règlements élémentaires de l’urbanisme (comme le permis de construire par exemple)290. Cela s’est traduit par la production importante d’un habitat de plus en plus diffus et extrêmement consommateur d’espace, transformant profondément l’espace agricole périurbain (Fradi, 1996). Cela est vrai dans la mesure où les divers opérateurs publics ou privés sont tous partis à la recherche de terrains moins coûteux dans l’arrière-pays proche de la ville, ce qui a généré une forte consommation d'espace dans des zones périurbaines classées agricoles. Ces dérapages dans l’organisation du territoire sont dus aux limites de certains outils de planification urbaine. En effet, sur les trois outils de planification urbaine retenus par le code de l'urbanisme (loi de 1979), seul le plan d'aménagement de détail (PAD) paraît efficace du moment qu’il est considéré comme un outil opérationnel, d'aménagement et d'équipement de terrains bâtis et non bâtis ; malgré l’insuffisance de financement qui réduit son utilisation. Pour ce qui est des deux autres outils, le plan directeur d'urbanisme (PDU) et le plan d'aménagement urbain (PAU), leur mise à l’œuvre a dévoilé leur défaillance et leur inadéquation aux circonstances de l’évolution des territoires urbains.

Le PDU, cet outil d’orientation de l’urbanisation en coordonnant les programmes des équipements publics, s’est montré incompatible avec les projections d’une planification économique et sociale assez sectorialisée et quinquennale, « alors que les projections du plan

directeur d'urbanisme sont établies pour des horizons de 15 à 20 ans, ce qui rend difficiles les choix sectoriels à long terme et réduit le rôle du plan directeur urbain »291. De même, le manque de financement nécessaire à la constitution et/ou au renouvellement des réserves foncières a « réduit le rôle du plan directeur à une simple cartographie adaptable en toute

287 Loi des communes, agences foncières publiques, agence de réhabilitation et de rénovation urbaine (ARRU). 288 La Caisse Nationale d’Epargne Logement (CNEL) créée en 1973 transformée en Banque de l’Habitat et du Logement en 1989 – La Caisse de Sécurité Sociale créée en 1977 intervenant dans le financement de la production du logement – Le Fond de Promotion des Logements Sociaux (FOPROLOS) créé en 1977. 289 SNIT c’est la Société Nationale de Promotion Immobilière créée en 1957 et SPROLS c’est la Société de Promotion des Logements Sociaux créée en 1977.

290

Les opérateurs publics (AFH-AFT-AFI) assure une part importante de la mise en œuvre des plans d’aménagement urbain et dont l’objectif et de constituer des réserves foncières, de viabiliser et commercialiser des terrains à bâtir tout en veillant à la régulation du marché foncier. Mais face à la difficulté de mobiliser des moyens financiers, à l'augmentation des valeurs foncières, ces opérateurs publics, agissent, selon Abdelkader Fradi, suivant une logique d'équilibre financier, et de moins en moins pour la régulation du marché foncier. La conséquence est que l'offre foncière bénéficie à la catégorie sociale aisée et solvable, ce qui a marginalisé la demande foncière de la population à faible revenu, qui s'est trouvée dans l'obligation de s'approvisionner sur le marché informel ce qui à engendré le développement de l'habitat spontané sur les terres agricoles, notamment autour des grands pôles urbains.

291

circonstance »292. Concernant le PAU, le caractère sélectif pour l’usage du sol et le défaut des moyens financiers en ont fait de lui non pas un efficace instrument de réglementation de l'usage du sol, mais une source d'injustice et d’iniquité et qui l’ont donc rendu inopérationnel (Fradi, 1996).

B-2- Décentralisation de l’économie et conséquences géographiques

Les pouvoirs publics se sont préoccupés de résoudre les écarts entre les régions par l’adoption d’une stratégie nationale de développement économique à travers tout le territoire. Mais la politique de la collectivisation des terres des années 1960 n’a pas atteint les objectifs escomptés. Car, la modernisation de l’agriculture et sa mécanisation ont coïncidé avec une bureaucratisation des organismes de gestion des projets agricoles et une paupérisation accrue des paysans. Parallèlement, l’extension toujours croissante des villes côtières comme Tunis, Sfax et Sousse était sous-tendue par la polarisation des moyennes et des petites unités de production comme le textile, l'agroalimentaire, les industries du cuir, le secteur de la mécanique et notamment le secteur du bâtiment et du tourisme. De fait, les ruraux arrivent par milliers dans ces villes où l’essor du secteur du bâtiment draine lui aussi les chômeurs et les paysans ébranlés par les conditions de vie médiocres suite à la collectivisation de leurs terres293. Toutes ces politiques économiques ont favorisé de fait la ville à la campagne et accentué le processus de l’exode rural. Même les projets de création de métropoles d'équilibre dans les villes les plus touchées par la pauvreté et le chômage ne sont pas parvenus à freiner ce processus.

B-3- Conséquences de la programmation d’activités économiques dans l’espace rural aux alentours de Sousse à partir de 1970

Profitant à la fois d’une assise urbaine coloniale, d’une position géographique de plus en plus valorisante et des privilèges dont elle jouit de la part des pouvoirs publics294, la ville de Sousse a toujours conservé sa position de troisième ville du pays. Sa population n’a cessé de croître, son économie s’améliore davantage et son urbanisation se déchaîne sur un espace périurbain à dominante agricole. Ces évolutions se sont accompagnées par l’abondance des équipements urbains (Figure 34). Ils ont fait de Sousse une ville qui n’a cessé de rayonner, depuis les années 1980, sur les villes voisines et les dominer, élargissant de fait son aire d’influence. Le tourisme, l’industrie et dans une importance moindre, l’agriculture étaient considérés comme les moteurs de développement économique régional295.

292 A. Fradi, op. cit. p. 47.

293 Les petits fellahs sont devenus des salariés après avoirs rendu tous leurs biens à la collectivité. Néanmoins, des difficultés financières ont contraint les responsables locaux de retarder les payements de plusieurs mois des « soi-disant » associés qui ne sont en fait que des salariés occupé à temps plein. Cette situation est, pour certains petits exploitants, semblable à la stratégie d’exploitation adoptée à leur égard par les colons. Ça était un autre motif pour rompre définitivement avec le métier de fellah et la campagne et choisir la ville comme une fin de course pour le reste de leur vie.

294 « Sousse a bénéficié d'un effort considérable de la part des pouvoirs publics en vue de sortir le Sahel du marasme économique et social dans lequel la région se débattait à la veille de l'Indépendance ». Ridha Lamine, « Tourisme et urbanité à Sousse », in Espaces et territoires, Tourisme et ville, Politique de la ville, tourisme et extension urbaine, Actes du Colloque de Hammamet 25-27 octobre 1997, sous la responsabilité de Abdallah Gabsi et Jean-Marie Miossec, Bulletin de la Société Languedocienne de Géographie Fascicule 3-4, tome 32, Juillet-Décembre 1998. p. 193.

295 Cela s’est traduit par l’offre de l’emplois notamment dans le bâtiment, un secteur en pleine évolution, et un étalement, sans précédant, de la ville sur sa campagne voisine.

L’habitat moyen et rudimentaire s’accumule de part et d’autre des

voies de liaison

interurbaines où se concentrent les activités du tertiaire, sur les impluviums et dans les interstices des oliveraies qui évoluent encore difficilement dans le périmètre communal. Les citadins aisés, influencés par les nouveaux modes d’habiter, ont choisi l’espace rural de la bande littorale pour ériger des

demeures de luxe,

consacrées surtout à la villégiature, de part et d’autre de la station balnéaire d’El Kantaoui. Suite à cela, les dunes ont été gommées du paysage côtier et les dépressions

maraîchères qui

structuraient l’espace ont

été condamnées à

disparaître

progressivement, tout

comme les paysages

singuliers qu’ils

produisaient auparavant. Figure 34 : Équipements urbains de Sousse en 1995. Source :

Lamine (1998).

B31- Effets de l’urbanisme balnéaire sur les cultures et les terres agricoles

« Le développement du tourisme international balnéaire, comme l'aspiration aux loisirs de

vacances et de week-end des tunisiens, ont contribué à une large occupation des espaces

littoraux dotés de rivages plats et de belles plages »296. Vers la fin du XXe, la consommation

des terres agricoles littorales (en Tunisie) serait de l'ordre de 10 000 ha, dont 4 000 ha en 1993 (Plan bleu, 2000). Pourtant, l’essentiel des aménagements touristiques a été fait sur des sebkhas non agricoles et sur des dunes consolidées à sols peu fertiles. Mais l'abandon de l'agriculture périurbaine au profit des activités touristiques, de la résidence secondaire et la villégiature est très net, ce qui a développé une spéculation foncière forte autour des zones touristiques.

Au Sahel, et à l'issue d'un quart de siècle (1980-2005) de croissance démographique, d'extension spatiale et de développement industriel et touristique, l'organisation spatiale de Sousse et sa banlieue ont été profondément transformées. La station balnéaire d’El Kantaoui,

296

aménagée en zone rurale à plus de sept kilomètres de la ville de Sousse, a généré une littoralisation sans précédant. Actuellement, la station balnéaire constitue un péricentre important autour duquel s’est accompli un étirement latéral de l’urbanisme balnéaire. « L'urbanisation touristique du front de mer par une chaîne quasi continue d'hôtels et

d'installations para-hôtelières, a été un élément moteur dans les processus d'urbanisation des banlieues Nord de Sousse et de la banlieue Est de Hammam Sousse (El Menchia) », écrit R.

Lamine297. Par ailleurs le développement de l’industrie, des infrastructures, des services publics (transports, santé, enseignement supérieur, etc.) ont considérablement participé au processus urbain actuel. L’hôpital Sahloul, créé au début des années 80 en pleine zone rurale, représente aujourd’hui un péricentre de Sousse et de Hammam Sousse.

B-3-2- Mutation d’un foncier agricole périurbain très convoité pour l’urbanisation

La ville de Sousse s’étale dans toutes les directions au point que la juxtaposition des quartiers dissout les frontières avec les villes voisines. Le processus des transformations spatiales n’a épargné, ni les terres voisines des centres urbains ni celles encore plus éloignées comme les périmètres irrigués, notamment ceux de Chott Mariem, dont les infrastructures hydrauliques et autres ont nécessité d’importants fonds publics.

Selon Lamine (2000), les extensions qui se sont faites au nord du marabout de la ville, Sidi Boujaâfar, étaient essentiellement résidentielles. Elles se sont faites sur des terres qui étaient auparavant occupées par des cultures maraîchères sur la frange côtière et par des oliviers à l'intérieur (figure 35). Au nord de l'Oued Blibene qui représentait à l'époque la limite nord de la ville de Sousse, les terres étaient occupées par des jardins irrigués par de nombreux puits de surface et par un semis lâche de maisons dispersées à travers les jardins. Tout autour de Hammam Sousse et le long des secteurs côtiers situés au nord d’oued Blibene et au nord d’oued El Hammam, s'étendaient des terres dont la frange littorale abritera l'extension touristique de Sousse vers le nord. L’analyse de la carte IGN de 1958 et des photos aériennes de 1962 et 1970 illustre bien ces propos. Cela montre que pendant la première décennie de l’Indépendance, la question de l’habitat n’était pas très préoccupante, ni pour les pouvoirs publics qui se sont beaucoup plus concentrés sur les questions économiques et politiques, ni pour les populations urbaines, résidentes en médina et qui se sont réfugiées dans les résidences vacantes, laissées par les étrangers après leur départ. Une part de la population rurale a trouvé également refuge en médina après la désertion progressive de sa population originelle. Les plus démunis des ruraux ont construit des bidonvilles dans les marges agricoles de la ville formées surtout par les berges des oueds et les zones inondables. Ces espaces sont constituées de sédiments alluviaux fertiles et propices aux cultures.

Depuis les années 1970, les quartiers Khézama nord et sud, œuvres d’opérateurs privés, ont été aménagés aux dépens des olivettes et des jardins maraîchers périphériques de Sousse. C’était les premières formes d’étalement urbain qui avaient accompli la « soudure minérale » entre les communes de Sousse et Hammam Sousse. Plus tard, c’est au tour de Hammam Sousse de combler le vide urbain. Les jardins de Sidi Sahloul, lieux de villégiature aussi bien des riches habitants de Sousse que ceux de Hammam Sousse durant la période coloniale, se sont transformés en de vastes chantiers de construction. Il s’agit d’un habitat règlementaire dont l’infrastructure a été réalisée par un opérateur public : l’Agence Foncière de l’Habitat (AFH). Les cités Sahloul doivent leur désignation au nom du marabout Sidi Sahloul qui