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CHAPITRE 1 – La périurbanisation et l’espace agricole en Tunisie

C- La régression des agricultures autour des villes

Depuis que l’agriculture a commencé à s’éloigner davantage de la ville et avant même que les planificateurs s’aperçoivent de son importance comme espace vert ouvert (non construit), une part importante de citadins avait déjà choisi l’espace rural pour y élire domicile. Le développement des infrastructures routières, des moyens de transport, ainsi que la fourniture et des unités de conservation des produits agricoles périssables conjuguée à la généralisation de l’automobile a facilité l’établissement de nouveaux rapports entre le monde urbain et l’espace rural. Aujourd’hui, on découvre en fait que la proximité de la ville ne constituait plus un atout pour le développement des activités agricoles comme cela l’était il y a quelques décennies. L’activité agricole se confronte à la concurrence d’une urbanisation rarement maîtrisée (préemption des terres pour des biens collectifs, emprise croissante des routes, implantations de zones industrielles et de l’habitat) qui semble rompre l’équilibre ancestral ville/campagne.

C-1 – Le processus de recul

Les terres agricoles autour des villes entrent progressivement, depuis quelques temps, dans un processus de transformation permanent et l’agriculture dans ces lieux ne cesse de connaître de sérieuses difficultés pour s’y pérenniser. De ce fait, les périphéries rurales des villes se transforment rapidement en territoires de négociation entre les usages urbains et les usages agricoles. Et, le foncier devient un enjeu monétaire, en premier lieu, parce qu’il peut porter des bâtiments ou des équipements lucratifs. Cela s’explique par le fait que l’achat d’une parcelle pour la construction des logements qui seront loués est généralement plus rentable que l’exploitation du même terrain à des fins agricoles (Moustier et al., 2004). La mobilité géographique des populations (exode rural puis exode urbain) mais aussi l’inadaptation ou l’inefficacité des instruments de planification urbaine à bien gérer l’extension de la ville sont autant de facteurs qui expliquent le déclin de l’agriculture périurbaine.

Au niveau mondial, le taux d’urbanisation dans les régions méditerranéennes a en effet fortement progressé depuis 1950 : il est passé de moins de 30 % à cette date à plus de 60 % en 1995, (Plan Bleu, 2000)93. Selon les mêmes sources de l’ONU, seuls les pays méditerranéens de l’Union Européenne avaient un taux d’urbanisation supérieur à 50 % au début des années 1950. Ce seuil est largement dépassé à l’aube du XXIe siècle. Selon les pays, le taux d’urbanisation varie entre 70 % et 80 % ; et plus de 60 % de la population vit dans des zones urbaines ou périurbaines.

En France, le taux d’urbanisation est passé de 59 % en 1950 à 75 % en 199594 et à 80 % en 2004. Les villes consomment chaque année 55 000 ha de bonnes terres, selon les statistiques du Ministère de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement (1999)95. Le recul des terres agricoles concerne presque toutes les régions françaises. D’après l’Observatoire National de l’Agriculture (ONAGRI)96 dont les informations ont été tirées d’une étude réalisée par le journal spécialisé Agreste Primeur, la superficie des terres agricoles cultivées en France a reculé de 720.000 ha, soit 100.000 ha par an en moyenne, entre 1992 et 1999.

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Source : UN, Espaces et territoires, habitat et systèmes urbains, Population Division, Plan Bleu, 2000. 94 Source : UN, Plan Bleu, 2000, op. cit.

95 Ministère de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement, Résumé du Rapport « Résultats de la recherche et veille scientifique », 1999. http://www.ecologie.gouv.fr/IMG/pdf/19990809.pdf.

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Cette situation est due tant à l'abandon des terres peu rentables qu'à la poussée urbaine qui a consommé à elle seule prés de la moitié des terres. Cela concerne toutes les formes des extensions urbaines : constructions, routes ou jardins d'agrément, etc. Les pertes sont assez générales, mais sont particulièrement importantes en Bretagne, en Aquitaine, et sur la façade méditerranéenne. La structure urbaine, constituée d’un semis plus ou moins dense de villes moyennes et de grandes agglomérations reliées par les principales infrastructures de transports, augmente partout (Ifen, 2005) 97. C’est dans les zones littorales que le processus de régression des activités agricoles est le plus important. Nous l’analyserons maintenant.

C-1-1- Une urbanisation littorale en pleine expansion

L’accroissement démographique naturel des villes constitue un des facteurs qui sont l’origine de la croissance urbaine des villes littorales. L’exode rural favorisé par la déstructuration de l'économie et des sociétés rurales traditionnelles des arrières pays, d’une part et la littoralisation des fonctions urbaines, particulièrement celles liées aux activités économiques de base (tourisme, industrie, services), d’autre part, se sont traduits par une urbanisation intense des zones littorales. Dans certains territoires littoraux, la qualité agronomique des sols est parfois de très bonne qualité et l’agriculture peut se développer jusqu’au rivage. C’est le cas de certaines villes littorales tunisiennes où les pouvoirs publics ont investi pour développer une agriculture intensive à caractère marchand, ce qui a nécessité la réalisation de grands travaux de mise en valeur agricole des plaines côtières. Néanmoins, l’essor de l’activité touristique, de l’urbanisme balnéaire et de la villégiature semblent être à l’origine d’une importante consommation d’espace, notamment des terres à vocation agricole. Le cas tunisien n’est donc pas unique puisque la périurbanisation des agglomérations littorales et de leur aire d’influence (des terrains à vocation agricole) est désormais un processus généralisé. Cela s’explique par le fait que l'agriculture peine à lutter contre les changements de destination et à se maintenir dans les espaces convoité par l'urbanisation. Le cas de la côte espagnole est instructif à cet égard.

Dans la région de Marbella-Malaga sur la côte andalouse (Espagne), les images par satellite issues du programme européen "Lacoast" (images Corine Land Cover) permettent de montrer l'importance et la vitesse de l'artificialisation : sur une bande littorale large de un kilomètre, la partie artificialisée est passée de 37 % du total en 1975 à 68 % en 1990 (soit un accroissement de 83 % sur la période, avec un taux de croissance annuel de 4 %). Cette progression s'est réalisée essentiellement aux dépens des terres agricoles (passée de 26 % à 9 %, soit une perte de 64 %), des forêts et des milieux semi-naturels (qui ont régressé de 22 %) et des surfaces en eau (passées de 1,20 % du total à 0,20 %), (Plan Bleu, 2000 et 2003). «Dans l'aire

métropolitaine de Barcelone (en Espagne), l'espace agricole s'est fortement contracté face à une extension rapide et multiforme du cadre bâti. Ce recul concerne au premier chef les zones littorales et sub-littorales, dans lesquelles la concurrence entre modes d'occupation du sol est particulièrement forte »98. En quarante années, la huerta (delta du Llobregat et Vall Baixa), profondément déstructurée par les activités humaines non agricoles, a vu sa superficie (3 000 ha) divisée par quatre.

Dans la plupart des ces cas, la planification urbaine ignore les activités agricoles et les espaces qui les concernent.

97 Institut Français de l’Environnement.

98 Jacques Daligaux, «Urbanisation, planification territoriale et enjeux de pouvoir dans l'aire métropolitaine de Barcelone.». rives, 8-2001, Nature" et urbanisation. Un enjeu pour les aires métropolitaines méditerranéennes. http://rives.revues.org/document51.html

C-1-2- Une planification urbaine souvent peu adaptée à la conservation des activités agricoles

Le maintien de l’agriculture urbaine et périurbaine n’est possible que si la reconnaissance des fonctions diverses (alimentaire, sociale, environnementale et paysagère) s’accompagne de la prise en compte de l’activité dans les documents de planification urbaine. Dans les conditions de vive compétition, cette agriculture pourrait n’être que transitoire ; il est alors difficile d’envisager sa pérennisation dans ces lieux sans l’intervention des pouvoirs publics dans le cadre d’une planification favorisant le couplage entre bassin de production et bassin de consommation (D. Doucouré et A. Fleury, 2004). Mais, très souvent, la planification urbaine se trouve en porte-à-faux car il y a des contradictions entre :

- la planification de l’aménagement du territoire par les administrations centrales ou décentralisées,

- les stratégies des pouvoirs locaux (les maires) confrontés à la rareté des réserves foncières pour satisfaire les besoins socioéconomiques de leurs communes (développement des infrastructures de transport, extension des zones d'habitat et d'activités économiques), qui cherchent la réponse spatiale dans les terres agricoles voisines,

- les stratégies des propriétaires fonciers (agriculteurs ou autres) qui souhaitent tirer parti de la rente foncière.

Par ailleurs, la planification urbaine devrait aller au-delà de la formulation de plans et schémas directeurs et impliquer les parties prenantes (FAO, 2000). C’est ce que confirme encore D. Doucouré et A. Fleury (2004) selon lesquels le partage de la gestion de l’espace par des instruments de planification souvent irréductibles comme le code rural et le code de l’urbanisme99 et des acteurs a des objectifs généralement contradictoires qui génère des conflits à arbitrer par les planificateurs. Mais très souvent, l’arbitrage profite à la ville et à son développement, surtout lorsque les agriculteurs urbains et périurbains sont peu impliqués. Cela s’explique aussi par le fait les planificateurs et les responsables politiques accordent généralement peu d'intérêt à l'égard de la production agricole urbaine et périurbaine. Par conséquent, il est rare de trouver une démarche cohérente à son égard. Il se trouve en fait que dans la plupart des cas, les acteurs et les institutions concernées dans le processus de planification (agences foncières et immobilières) ont plus de pouvoir que d'autres. Et leurs actions se concentrent particulièrement sur l'utilisation des terres pour l’urbanisation (projection des infrastructures et des zones à urbaniser) sans trop se soucier des conséquences sur les ressources naturelles (sol, eau, systèmes hydrauliques) et l’avenir des activités agricoles.

Dans ces conditions, la concurrence pour l’occupation du sol génère des conflits d’usages des ressources spatiales. C’est ce qu’observe Prost (1994) en écrivant que « L’affrontement

commence là où s’arrête la dernière conquête urbaine, autour du dernier lotissement, à un carrefour périphérique, à proximité du village le plus proche. C’est dire que tout territoire non urbanisé contigu à la ville est l’objet potentiel d’une annexion par la ville, indifférente à la nature de ce territoire, intéressée uniquement par sa valeur urbanistique. L’espace périphérique n’est pour elle qu’un espace en attente qu’elle pourra occuper au rythme de ses

besoins d’extension »100. Ce n’est que par le biais d’une gouvernance territoriale

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Au moment où le code rural a pour objectif de gérer tant l’activité agricole que le foncier en fixant le statut des agriculteurs, la valeur des baux agricoles, …, en vue d’une meilleure valorisation des terres, le code de l’urbanisme s’oriente à la mise à disposition de sols pour l’extension urbaine par des schémas directeurs qui localisent les grandes affectations, la localisation et la réglementation de l’habitat zone favorable. Opérant sur le même territoire périurbain, ces deux outils peuvent constituer une source de conflits qui accélère le recul de l’agriculture urbaine.

100 Prost B., « L'agriculture périurbaine : analyse d'une marginalité », Bulletin de l’Association des Géographes Français, n°2, 1994, p. 147.

opérationnelle que l’agriculture urbaine pourrait se développer conjointement avec l’urbanisation sans que l’une exclut l’autre. C’est du moins ce que l’ont peut observer dans certaines villes selon les rapport de la FAO (2000). Après la deuxième guerre mondiale, des raisons strictement économiques et culturelles étaient à l’origine d’un appui public favorisant l'accès aux terres urbaines des populations défavorisées à des fins de production alimentaire. C’était le cas des réformes de Gorbatchev en Russie, des "zonas verdes" au Mozambique, des "hidropónicos" cubains, des jardins-écoles en Mongolie, des petites exploitations urbaines en Afrique du Sud et des "jardins communautaires" en France et aux Etats-Unis. Ces expériences d'agriculture urbaine ont été guidées par deux principes :

- Le droit de l'homme à produire des aliments en facilitant l'accès aux terres, dans des sites appropriés, aux populations défavorisées (lotissements et autres).

- Le droit de l'homme à accéder aux ressources naturelles, à la propriété et au droit à l'usufruit101.

Mais depuis que la ville s’étale sans frein, la conservation de l’agriculture urbaine est rendue de plus en plus difficile. La planification est sensée prendre en compte toutes les activités productives (agricoles et urbaines) dans les territoires périurbains en facilitant leur co- développement, mais ce n’est rarement le cas.

C-1-2-1- L’agriculture urbaine est en marge de la planification dans les pays en voie de développement : le cas de quelques pays africains

Dans la plupart des pays en voie de développement, la planification n’a pas tenu compte de la sauvegarde de l’agriculture urbaine. L’augmentation de la rente foncière constitue un facteur fort de rejet de l’agriculture urbaine. Pourtant, cette agriculture ne cesse de contribuer, en marge de la planification urbaine, à la construction urbaine en imposant ses pratiques à l’instar de l’élevage dans de nombreuses villes d’Afrique de l’Ouest et du Centre D. Doucouré et A. Fleury (2004).

Dans certaines villes africaines, la faiblesse voire l’absence de planification urbaine adéquate constitue un handicap majeur. Très souvent, la politique de gestion des espaces agricoles périurbains constitue selon N'guessan K. V. (2003) une source de conflit pour la pratique des activités agricoles, généralement ignorées de la part des autorités municipales. Les espaces agricoles périurbains sont perçus surtout comme des réserves foncières pour de futures extensions urbaines.

La faiblesse de planification de la ville de Bouaké en Côte d'Ivoire en est un exemple. Dans cette ville où l’agriculture joue des rôles socio-économiques importants, il était question d’établir un plan d’urbanisme directeur (PUD) qui intègre de façon rationnelle l’activité agricole aux autres usages (non agricoles) dans les espaces périurbains. Mais, lors de sa soumission à l’approbation des autorités municipales de Bouaké, le PUD n’a envisagé la conservation d’aucune zone d’activités agricoles ce qui explique selon l’auteur le désintérêt des planificateurs et des autorités municipales pour l’agriculture dans l’espace communal. En fait, le contenu du PUD est orienté davantage vers la gestion de la croissance urbaine que vers la planification globale du développement de l'ensemble du territoire urbain et périurbain ainsi que de l’ensemble de ses activités. Du coup, ce plan renforce le grignotage de l'espace rural

101 « Le droit à l'usufruit prévoit que chaque citoyen a le droit de cultiver ou d'utiliser comme pâturage la terre non exploitée, étant entendu que cette utilisation ne constitue pas pour le propriétaire une diminution de la valeur de la propriété ». In Drescher Axel W. « L’agriculture urbaine et périurbaine et la planification urbaine », Document de discussion pour la conférence électronique de FAO-ETC/RUAF, 2000. http://www.fao.org/urbanag/Paper3-f.htm

périurbain par l’annexion de nouvelles zones rurales à la ville et les terroirs villageois périurbains deviennent l'enjeu d'une véritable spéculation foncière pour des utilisations plus rentables (habitat, équipements, etc.).

Ce phénomène concerne aussi l’agriculture urbaine sénégalaise. Cela s’explique par le fait que l’ensemble des lois relatives à l’agriculture porte plutôt sur l’agriculture rurale102 pratiquée loin des agglomérations urbaines. En revanche, la plupart des lois relatives à la gestion du domaine urbain portent essentiellement sur la projection des infrastructures et équipements publics, la réglementation du domaine public et la mise en valeurs des terrains à construire. Dans ces conditions, l’agriculture urbaine et périurbaine, ignorée par la planification, se confronte à des difficultés qui rendent son maintien illusoire face à une urbanisation croissante.

C-1-2-2- Une reconnaissance insuffisante de l’agriculture urbaine dans les pays industrialisés : le cas de la France

Si l’agriculture urbaine semble de plus en plus reconnue par les planificateurs dans les pays industrialisés, elle est loin d’atteindre les objectifs escomptés face à une demande accrue en terrains à bâtir qui ne cessent de transformer les espaces ruraux en dépit de la réglementation et de la planification en vigueur. C’est ce qu’observe Gérald P. (2004) à propos des espaces littoraux français. Selon cet auteur, le littoral français a subi des transformations sous l’effet de la pression de l’urbanisation, sans que la « loi littoral » ne parvienne à maîtriser parfaitement le processus. Les conséquences préjudiciables de l’urbanisation excessive se sont traduites, entre autres, par l’émergence de conflits d'usage sur le rivage terrestre, la réduction de l'activité agricole, l’occupation illégale du domaine public maritime, etc. En effet, le développement de l’économie touristique et résidentielle génère des tensions foncières qui pèsent sur le développement des activités productives. C’est ainsi que la concurrence pour l’usage du sol entre les activités traditionnelles (agriculture et pêche) et le tourisme, d’une part, les résidents permanents et les résidents secondaires, d’autre part, font monter la pression foncière à des niveaux très élevés103, rendant difficile les missions des planificateurs.

Selon le même rapport, l'évolution de l'agriculture du littoral français reste sous la menace du développement de l’urbanisation. En effet, cette agriculture qui couvre 7,5 % de la superficie du territoire, compte 57.000 exploitations employant 72.000 personnes, soit 8,6 % des exploitations et 5,2 % des emplois agricoles français. La pression foncière exercée sur la frange littorale par le développement de l’urbanisme balnéaire (tourisme et villégiature) conjugué au vieillissement des exploitants sans successeurs et à la difficulté à trouver des repreneurs pour les exploitations, ont été à l’origine d’une régression de la surface agricoles de 17 % entre 1979 et 1988, et de 6 % entre 1988 et 1998.

En 1999, l’agriculture littorale qui occupait 45 % de l'espace littoral français, soit 723 000 hectares, constituait la première forme d'utilisation de l'espace littoral104. Toutefois, cette agriculture est souvent fragilisée par l'application rigide des dispositions de la « loi littoral ». En effet, l’interdiction de construction de nouveaux bâtiments d'exploitation (comme les locaux techniques nécessaires pour des activités telles que les cultures ou l'élevage) contraint les agriculteurs à l’abandon de leurs exploitations en zone littorale (J. Le Guen, 2004). Il

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La loi sur le domaine foncier rural est difficilement applicable à l’agriculture péri-urbaine. Elle porte sur les zones exclusivement rurales alors que les espaces agricoles en zones urbaines et péri-urbaines, non prise en compte par la loi, sont considérées comme des zones non rurales.

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In Gérald Patrice, L'application de la "loi littoral" : pour une mutualisation de l'aménagement du territoire, Rapport d'information n° 421 (2003-2004), SÉNAT, 2004. http://www.senat.fr/rap/r03-421/r03-421_mono.html 104 Selon les statistiques fournis par l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCA), in Le Guen Jacques, L'application de la loi littoral, Rapport d’information N° 1740, Sénat, 2004. http://www.assemblee- nationale.fr/12/rap-info/i1740.asp.

semble qu’en France, l’Ouest breton et le littoral méditerranéen sont les régions les plus touchées par la périurbanisation. Il s’agit surtout des rivages atlantiques : la Vendée, la partie sud des Landes, le golfe du Morbihan et de ceux de la Manche : Côtes-d’Armor, ouest du Cotentin, côtes de Nacre et d’Opale et tout le long de la façade méditerranéenne, de Nîmes à Narbonne ou de Toulon à Nice où un corridor « artificiel » se densifie et gagne sur l’arrière- pays, (Ifen, 2005).

Par ailleurs, en France, les schémas directeurs de planification urbaine, puis les Schémas de Cohérence et d’Organisation Territoriale en 2000, ont succédé (depuis 1983)105 aux schémas directeurs d'aménagement et d'urbanisme (SDAU) créés par la loi d'orientation foncière du 30 décembre 1967. Ils sont destinés à assurer une planification urbaine intercommunale, aussi bien en zone urbaine qu'en zone rurale (Larcher, 1997-1998). Selon l’article L-122-1, 1er alinéa du Code de l'urbanisme français, les schémas directeurs, " fixent les orientations

fondamentales de l'aménagement des territoires intéressés compte tenu de l'équilibre qu'il convient de préserver entre l'extension urbaine, l'exercice des activités agricoles, des autres

activités économiques et la préservation des sites et paysages naturels ou urbains »106.

En effet, les schémas directeurs déterminent la destination future des sols selon les besoins de la ville en espaces urbanisables (zone d’activités économiques et de localisation des services, équipements d'infrastructure, etc.) et en espaces naturels ou agricoles nécessaires aux nouvelles extensions urbaines et à la ville en général. Il visent aussi assurer un meilleur équilibre entre les usages de l’espace et les populations concernés en considérant l’emploi tout comme les transports collectifs. Le contenu des plans d'occupation des sols (POS, puis PLU en 2000) et les dispositions des schémas directeurs sont censés permettre une gestion satisfaisante du territoire en question. Mais la pratique montre que leur utilisation n’atteint pas souvent les objectifs escomptés en matière de planification. Il se trouve en fait que ces documents sont souvent victimes d’une instabilité permanente qui réduit leur efficacité. Au 1er juillet 1997, les schémas directeurs ne couvrent que 12 % du territoire national français et 45 % des plans d'occupation des sols étaient en révision (Larcher G., 1997/1998). Le