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Cadrage préalable et théorique

21. Les approches retenues

La démarche systémique44 a été retenue afin d’expliquer la dégradation du couvert végétal fourrager par la prise en compte des interactions entre les différents facteurs et éléments constitutifs de la prairie. L’approche systémique est une « une approche qui se veut plus synthétique [que celle analytique] qui reconnaît les propriétés d’interaction dynamique entre éléments d’un ensemble, lui conférant un caractère de totalité » (Brossier, 1987 ;Brossier et

al., 1990). La théorie des systèmes pose les bases d’une pensée de l’organisation. La première

pertinence de la systémique est que « le tout est plus que la somme des parties ». Cela signifie qu’il existe des qualités émergentes, c'est-à-dire qui naissent de l’organisation d’un tout, et qui peuvent rétroagir sur les parties. Toutefois, le tout est également moins que la somme des parties car les parties peuvent avoir des qualités qui sont inhibées par l’organisation de l’ensemble (Morin, 2000). Donc comme Blanfort (1996), nous avons opté aussi pour des études analytiques spécifiques pour relever des causalités particulières (Cf. figure n° 35). Pour tenir compte de l’apport systémique et analytique dans un processus de construction de la connaissance nous avons aussi adopté une démarche constructiviste. Elle a pour objectif de produire des connaissances actionnables, "qui marchent", le constructivisme reconnaît la pertinence des disciplines "appliquées" comme l'ingénierie et le management (Le Moigne, 1994). Granger et Balent (1994) considèrent que «la diversité et la complexité des prairies

permanentes en font un objet d’étude adapté à une approche systémique ». Pour notre étude

nous avons considéré les prairies implantées pâturées en Guyane, comme des systèmes à analyser par une démarche constructiviste. Elles se caractérisent par des :

 composantes structurelles : limites spatiales et mêmes temporelles (elles sont implantées à une date donnée et à un certain stade de dégradation, elles peuvent disparaître),

 éléments constitutifs : le sol, la végétation, le bétail et l’homme qui ont des aspects fonctionnels (flux et interactions entre eux)45.

Figure n° 36 :

44 Le système fait référence à un assemblage d’éléments fonctionnant de manière unitaire et en interaction permanente. En grec sustêma signifie ensemble. Ce mot provient du verbe synistanai (grec) qui veut dire combiner, établir,

rassembler.

45 D Sauvant, INAPG, communication personnelle,1997.

Inter connections des recherches appliquées pour les systèmes de productions agraires d’après Thierry Doré (2001).

22. Transdisciplinarité

La transdisciplinarité a été pour nous une posture scientifique et intellectuelle qui se situe à la fois entre, à travers et au-delà de toute discipline, même si nous avons notre centre de gravité situé en agronomie. Déjà dans ce champ disciplinaire, nous pouvons décliner l’agronomie des faits et l’agronomie des actes46 (Figure n° : 36).

La transdisciplinarité est aussi à considérer comme un processus d’intégration et de dépassement des disciplines qui a pour objectif la compréhension de la complexité du monde moderne et présent, ce qui constitue en soi une étape importante de légitimité (Morin, 1981). Elle a été pour nous comme une forme d’attitude, ce qui peut sembler cohérent pour faire progresser une « recherche impliquée ». En aucun cas il n’a été question pour nous d’établir un supra discours pour une méta-science qui aurait pour prétention d’expliquer la complexité en se positionnant comme une nouvelle épistémologie des disciplines actuelles, telles que conçues actuellement.

Nous avons ressenti cette nécessité de transversalité car nous avions besoin de compétences (tenues par des personnes) ou d’outils qui se trouvaient dans des champs scientifiques dépassant celui de l’agronomie (au sens large, élevage et forêt compris). Cette situation s’expliquait autant par un besoin provenant du mode de conduite de notre « recherche impliquée » (comprendre par exemple le ressenti des partenaires), que pour étudier les relations explicatives à l’évolution des prairies (en cela l’écologie nous a apporté des grilles d’analyse fondamentales comme celles des perturbations, successions). Nous respectons néanmoins la légitimité des cœurs disciplinaires. Pour reprendre la métaphore du Prix Nobel de chimie, Jean-Marie Lehn (2002), si chaque champ scientifique est un arbre, leur rencontre entre eux se fait par le feuillage qui pourra être d’autant plus important que chaque arbre a de puissantes racines. Concernant notre étude, il s’avérait pragmatique de savoir passer ces frontières disciplinaires. Nous avons, pour notre étude, tenté d’adapter, trouver un contour des sciences qui nous convenait le plus pour progresser. En cela, nous nous inscrivons dans les appels et démarche de Bertrand Hervieu (2002) Chantal Blanc-Pamard47 & André Lericollais (1985, 1986), Marcel Jollivet (Jollivet et Pena-Vega, 2002), Jean Boiffin (Boiffin et al., 2004), Bernard Hubert (2001) pour savoir rendre en synergie des champs de connaissances au service d’une recherche pour l’action et le développement. Ces passages de frontières comme l’indiquait Marcel Jollivet (1992) nous ont permis de construire notre réflexion, stratégie et base de connaissances dans un cadre de repères ; cadre de repères et de compétences initiales qui s’inscrivait dans l’agronomie et plus particulièrement dans l’agropastoralisme.

221. Recours aux Sciences humaines

Notamment celles dont le GERDAL48 a eu recours pour nous montrer l’importance du "sens"

à travers les pratiques des paysans, cultivateurs, éleveurs (Darré, 1996 ; Darré, 1997 ; Darré et

al., 2004). Ces connaissances nous ont permis de saisir aussi l’importance du positionnement

social sur les choix techniques et les pratiques employées (Dupré, 1991 ; Darré, 1991) : travaux en Sciences humaines qui apportent un éclairage sur la dynamique des savoirs locaux et des savoir-faire ; Eclairages qui sont aussi dirigés sur les conditions d’évolution des "fonds culturels techniques communs" ; Apports qui se sont révélés indispensables pour conduire notre étude en commun avec nos partenaires.

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Communication personnelle avec Bernard Hubert en 2001. 47

Et aussi Blanc-Pamard (1993) ; Blanc-Pamard et Boutrais (1994).

Les résultats de nos recherches ne pouvaient trouver une orientation qu’en s’instruisant dans les flux de connaissance locaux. Nous avons donc tenté de prendre en compte (au mieux) des modalités de diffusions du savoir dans le développement agricole et notamment à travers les réseaux du secteur de l’élevage en Guyane (Darré, 1996 ; Lemery, 1995 ; Lemery, 2003 ; Remy et al., 2006). Les recherches réalisées en matière d’innovation en milieu rural nous ont aussi permis de discerner certaines dynamiques de savoirs en émergence (Akrich 2002 ; Alter, 2000 ; Callon, 2003 ; Chauveau et al., 1993, Huguenin, 2006).

La continuité et la complémentarité territoriale intra Guyane (ex. de la position du seul abattoir à Cayenne), celles avec l’Europe et l’écorégion (notamment frontalière : Brésil et Surinam), nécessitent aussi une lecture sur les flux, les perceptions et les ressentis en matière : de production, d’activités commerciales (et touristiques), d’équité et de maintien social. Les porteurs d’enjeux de notre étude se trouvaient dans une « plateforme » en recherche de complémentarités entre le rural (dont la pêche), la nature (Amazonie française, Parc National49, le tourisme vert), le minier (or), les hautes technologies (CSG). Ils ont pour finalité d’éviter des dérives non réversibles sur le plan territorial et sur le plan sociétal, avec chacun leur priorité suivant leurs perceptions entre la nature le rural et l’urbanisation (Jollivet, 2001). Notre « projet d’études actions » conduit en « recherche impliquée » nécessitait non seulement une "rationalité scientifique & technique" et la "rationalité paysanne", mais aussi des systèmes de savoirs et de sens qui se confrontent. Notre sensibilisation aux acquis des sciences humaines nous a permis de tenir compte des savoirs et « savoir-faire » des éleveurs et agents du développement. Savoirs qui se sont révélés indispensables pour ajuster nos recherches afin de construire en commun des applications, des règles d’appréciations50.

Au carrefour de ces savoirs, rationalités et perceptions, nous nous sommes trouvés dans une position stratégique ; position qui s’est transformée en rôle de médiateurs, traducteurs d’un langage à l’autre (Lavigne Delville, 1990). Cela nous a amené à développer une posture

"d’empathie – constructive" au sens des travaux sociologiques anglo-saxons dit du "Care"

(Tronto, 1987) pour saisir les savoirs très divers empiriques et les traduire dans un fonds culturel commun.

Olivier de Sardan & Paquot (1990) posent comme problématique sur le sujet : "Savoirs populaires et agents de développement", les savoirs techniques locaux témoignent d'un faisceau d'objectifs et de contraintes, auxquels ils répondent plus ou moins bien, et auxquels les innovations techniques vont se confronter, d'où l'intérêt de connaître ces savoirs et ces savoir-faire, qu'ils soient techniques ou sociaux. Il ne s'agit pas pour autant de mythifier les savoirs populaires, qui sont multiples, hétérogènes, diversement efficaces.

Porte-parole des savoirs technico-scientifiques, les agents de développement (et de recherche) doivent pour être efficaces devenir des médiateurs entre ces deux systèmes de savoir. Il ne s'agit pas là de traduire simplement des messages techniques en langues locales mais de participer à la négociation informelle, aux confrontations de stratégies et de logiques qui se jouent autour de l'intervention. Si c'est de fait la pratique des plus expérimentés d'entre eux, la formation à l'enquête qualitative, à l'écoute des savoir-faire et des pratiques locales, peut aider les agents à une meilleure connaissance de leurs interlocuteurs et à mieux jouer leur rôle.

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de Malet, 2006.

222. Conjugaisons de règles de l’écologie et de l’agronomie

Au sein même de l’agronomie, les approches classiques de la recherche ont tendance à séparer la zootechnie et l’agronomie fourragère de la prairie (Hubert, 2004). Notre objet de recherche donnait justement « sens » à un continuum entre ces deux domaines.

Antérieurement le fossé entre les recherches en agronomie et en écologie avait été plus important. Actuellement la tendance semble se combler peu à peu. Les progressions en matière de recherche agronomique et écologique étaient conduites de façons parallèles, voire même divergentes (Deléage, 1991).

Dans le domaine de la gestion des parcours, des pâturages et de l’agropastoralisme, une convergence était admise par de nombreux auteurs51, dont les débats ont débuté dès l’émergence du concept d’écosystème. Pour Tansley, qui a défini le concept d’écosystème52 en 1935, il faut « tenir compte des facteurs biotiques et tout particulièrement de l’homme » (Deléage, 1991). Il rejetait la démonstration qui était en cours à son époque, selon laquelle il fallait conférer deux statuts différents au broutage des herbivores sauvages et à celui des herbivores domestiques. Le premier aurait eu un rôle progressif dans son développement jusqu’au climax bison-bouteloa, et le deuxième aurait eu un rôle purement régressif.

« Une activité de broutage suscité par un élevage peut détruire un écosystème, mais elle

favorise du même coup l’apparition d’un nouvel écosystème, qui doit d’ailleurs le plus souvent être maintenu par une intervention humaine contre des plantes jugées nuisibles ou contre divers prédateurs des animaux domestiques » (Deléage, 1991).

Des recherches plus récentes montrent aussi la pertinence de conjuguer le domaine agropastoral aux études écologiques : Granger et Balent (1994) qualifient la prairie de système écologique prairial « caractérisé par des aspects structurels et fonctionnels. [...] La

particularité des systèmes écologiques prairiaux tient au fait que l’homme en conditionne le fonctionnement ».

Nous avons donc considéré les prairies implantées comme des écosystèmes issus et pilotés par des pratiques agronomiques, que nous avons qualifiés plus précisément d’agro- écosystèmes prairiaux. En cela nous rejoignons plusieurs travaux conduits en :

- France métropolitaine (Gueugnot, 1993 ; Balent et al., 1993 ; Balent et Gibon, 1999 ; Baudry, 1991 ; Bornard, 2004 ; Daget, 2000 ; Dupraz, 2005 ;Poissonet et al., 1992 ; Rousset, 1999),

- Région chaudes : à La Réunion (Blanfort, 1996), au Brésil (Topall, 2001), dans les llanos d’Amérique du sud (Rippstein et al., 2001).

51 Audru, 1965 ; Audru et Boudet, 1964 ; Audru et al., 1987 ; Balent et Duru, 1984 ; Balent, 1987 ; Bille et al., 1967 ; Bille, 1970 ; Boudet, 1973 ; César, 1976 ; Daget, 1978 ; Daget et Poissonet, 1969 ; Gibon, 1981 ; Guinochet M., 1973, Koechlin 1961 &, 1963 ; Loiseau et al., 1984 ; Loiseau et al. 1988 ; Peyre de Fabrègues, 1965 ; Van Andel et Van den Bergh, 1987...

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Un écosystème désigne l'ensemble formé par une association ou communauté d'êtres vivants (ou biocénose) et son environnement géologique, pédologique et atmosphérique (le biotope). Les éléments constituant un écosystème développent un réseau d'interdépendances permettant le maintien et le développement de la vie. Certes, contrairement à Tansley, l’écosystème a souvent été pris dans un esprit strictement naturaliste (métaphore du verre d’eau) (Hubert, 2004)en réalité, l’écosystème doit être perçu par une lecture topocentrique et non géométrique. La notion de frontière délimitée n’a pas de sens pour une écologie fonctionnelle. Ainsi pour tenir compte des imbrications d’écosystèmes, des changement de niveaux prenant en compte les continuum, biogéographiques et des zones d’enchevêtrement entre biomes, le terme d’écocomplexe est parfois utilisé (Blandin, 1992 ; Blandin & Lamotte, 1988).

223. L’agroécologie

2231. Considération sur l’agroécologie

Encadré n° 2 : Des chapitres introductifs de l'ouvrage classique "L'agroécologie, base scientifique de l'agriculture alternative", par Miguel Altieri (1983), nous avons souligné les considérations suivantes : 1 - Le terme agroécologie fait référence aux écosystèmes.

Les caractéristiques des écosystèmes recouvrent des éléments comme le cycle des nutriments, la régulation des populations, les flux d'énergie, et la notion d'équilibre dynamique. Ces caractéristiques s'appliquent aux écosystèmes naturels et, en des formes très altérées, aux écosystèmes anthropiques, c'est-à-dire aux écosystèmes agricoles. L'ampleur des différences entre les écosystèmes naturels et les agro-écosystèmes dépend principalement des interventions humaines qui se caractérisent généralement par leur degré d'intensification, et par le niveau de perturbation qu'elles induisent dans l'équilibre (naturel). Le degré d'intensification et le niveau de perturbation doivent être considérés comme la résultante des pressions sociales et économiques qui s'exercent sur les acteurs humains dans les agro- écosystèmes.

Cette intensification croissante est très clairement visible dans les innovations techniques en agriculture, souvent inventées sous la pression économique pour une plus grande efficience. Les innovations requièrent souvent l'uniformité (des cultures, de la gestion du sol), ce qui éloigne de plus en plus l'agro-écosystème de l'écosystème naturel.

2 - L'interdépendance entre les dynamiques sociales et naturelles illustre clairement le fait que l'étude ou la modification des systèmes de production agro-écologiques doit prendre en compte à la fois les sciences de la nature et les sciences sociales.

Elle explique aussi pourquoi un système d'information consacré à l'agroécologie doit largement reposer sur des informations locales : il doit représenter la combinaison locale des conditions sociales, techniques et naturelles.

Quelques repères sur la toile : http://www.agroecology.org/ - http://www.agroeco.org/

http://www.cnr.berkeley.edu/~agroeco3/index.html - http://www.cnr.berkeley.edu/~agroeco3/what_is_agroecology.html http://cnr.berkeley.edu/espm/index.html - http://nature.berkeley.edu/~agroeco3/sane/index.html

http://www.ccma.csic.es/dpts/agro/agro1.htm - http://agroecologie.cirad.fr/index.php - http://www.inra.fr/dpenv/estevc36.htm

____________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________ L'agroécologie

"Toute modification technologique dans le système de production entraîne des modifications dans l'importance économique des phytophages, cette importance pouvant aussi bien augmenter que diminuer. Une modification technologique qu'on doit toujours prendre en considération est la réorganisation des écosystèmes de culture, par exemple par l'association des cultures (ce qu'on appelle "intercropping, mixed cropping, alley cropping, agroforesty, etc.".) mais aussi par le contrôle des mauvaises herbes dans les cultures. Avec la réorganisation des écosystèmes, on tente d'influer sur les conditions de vie des phytophages de telle sorte que leur infestation en soit considérablement diminuée et les animaux utiles protégés. Récemment on a poursuivi cette idée en y introduisant d'autres aspects de la production, à savoir l'agroécologie, nouvelle discipline qui doit constituer la base d'une agriculture durable. On attend de l'agroécologie les bases d'un système de production de longue durée sans dégradation des ressources naturelles, c'est-à-dire le cadre d'une application d'une technologie à faibles intrants qui améliore la fertilité du sol, exploite mieux les ressources hydriques, pousse le recyclage à son point maximum, encourage la lutte biologique contre les organismes nuisibles, diversifie la production, etc. La protection des plantes n'y a plus sa place habituelle, il ne s'agit plus seulement de protéger une culture mais d'éviter la pullulation des phytophages. En matière de prévention, l'entomologiste ne dispose au fond que de 3 domaines possibles à savoir la lutte biologique, la résistance des plantes, les mesures culturales au sens large, alors que la résistance constitue de matière traditionnelle le domaine de recherche du généticien. Par des mesures culturales, l'entomologiste veut interférer dans le comportement des phytophages, c'est-à-dire qu'il veut réduire la natalité et augmenter la mortalité " (Chaubet, 1992) ; URL :

Dans le registre des sciences de la nature, la synergie entre agronomie et écologie nous a permis de progresser sur notre objet de recherche. En agropastoralisme nous avons vu qu’il existait souvent une cohésion entre pâturage et écologie. Toutefois, compte tenu de notre contexte de prairies implantées à partir d’écosystèmes très bouleversés, totalement perturbés, nous nous sommes intéressés au cadre théorique de l’agroécologie, entre agronomie et écologie : vers la gestion d’écosystèmes cultivés (Dupraz, 2005).

La notion d’agroécologie a émergé tout d’abord comme une expression "d’agriculture alternative" ayant une dimension écologique et dont les objectifs sont de :

 développer des stratégies globalisantes visant à optimiser l'ensemble des ressources des agroécosystèmes ;

 s'appuyer autant sur le savoir-faire empirique des populations locales que sur les connaissances abstraites acquises à l'extérieur (dont l'approche scientifique pour aider à objectiver et à rationaliser ce savoir-faire).

Ces stratégies reposent sur le rôle important des associations culturales et culturelles (Cavelier, 1990).

Dans son acception générale, l'expression "agriculture alternative" traduit la volonté de trouver des méthodes agricoles qui évitent ou limitent l'usage de produits chimiques (au sens de l’agriculture intégré53) et qui sont associées à de nouveaux systèmes de production : "cette approche tend à établir des modèles pérennes dont les fonctions sont liées à la :

i) sauvegarde de l'outil essentiel de production qu'est la terre enchâssée de son écrin naturel, ii) restitution d’un meilleur équilibre entre la part d'autonomie individuelle et/ou communautaire et la part d'interdépendance avec l'extérieur " (Cavelier, 1990) ".

"L'agriculture alternative" est issue du concept d' "ecological farming " des anglo-saxons,

souvent synonyme d' " agriculture alternative. "Alternative" est un adjectif qui signifie en anglais, la recherche d'une solution de remplacement, acception qui est peut être discutée, sur un plan sémantique, car en français l'adjectif "alternatif" inclut soit la notion de choix, de dilemme, soit la notion d'alternance, de successions d'états ou de phénomènes opposés. Dans le cas de l'agriculture "alternative", il s'agit bien du remplacement d'une forme d'agriculture dominante par une forme privilégiant des procédés inspirés par l'écologie : l’agroécologie. Quant à l’écoagriculture, prise dans une acception large : « la meilleure prise en compte de l'environnement dans les procédés agricoles ». Ce concept a été utilisé au Québec dans les années 1990 par le ministère de l'Agriculture (MAPAQ) sous le terme synonyme d' "écoagriculture" (Estevez et Domon, 1999).

L'agroécologie peut être considérée comme l'une des bases de la recherche pour une (ou des) agriculture(s) " alternative(s) " (Altieri, 1986). (Voir encadré n° 2). Cette expression prend aussi un sens emprunté au domaine économique où sont favorisés des cultures, des élevages et des produits fermiers non classiques, la transformation des produits à la ferme, le tourisme et d'autres services connexes de l'exploitation agricole, et la vente directe et le développement de stratégies de marketing (Gold, 1994). C'est ce sens que l'on retrouve aussi en français dans certains textes d'économistes, où "agriculture alternative " traduit la diversité des systèmes de production (Colson, 1986).

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La " production intégrée " est définie par l'OILB comme étant un système de production qui assure une agriculture viable sur le long terme, qui fournit des aliments de qualité et d'autres matières premières en utilisant au maximum les ressources et les mécanismes de régulation naturels et en limitant le plus possible les intrants dommageables à l'environnement. L'objectif est d'obtenir une récolte qualitativement optimale par des techniques culturales satisfaisant des exigences économiques, écologiques et toxicologiques (Viaux, 1997 ; Viaux, 1999).

2232. Les principaux axes de l’agroécologie54

que nous retenons de ce nouveau contour des sciences

L’agroécologie est une discipline scientifique qui utilise la théorie écologique pour étudier, concevoir, gérer et évaluer les systèmes agricoles qui sont productifs, mais aussi la conservation de ressource.

La recherche agroécologique considère que les interactions de tous les composants biophysiques, techniques et socio- économiques importants du système agricole sont à considérer comme des unités fondamentales d'étude, où des cycles minéraux, des transformations d'énergie, des processus biologiques et des rapports socio-économiques sont analysés dans l'ensemble d'une façon interdisciplinaire.