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LE PROCESSUS DE CONSTRUCTION ETATIQUE DE BEN BELLA

ALGERIEN ET DE SON SECTEUR PUBLIC

1.2. LES PRINCIPES PHILOSOPHIQUES, IDEOLOGIQUES, POLITIQUES ET ECONOMIQUES DE L’ETAT ALGERIEN

1.2.1. LE PROCESSUS DE CONSTRUCTION ETATIQUE DE BEN BELLA

La période 1962-1966 apparaît comme une phase de transition particulièrement difficile, chargée de contraintes politiques, économiques, financières et sociales. Au cours de cette période, les premières mesures tendant à construire le socialisme par l’instauration de l’autogestion et la création des premières sociétés et offices nationaux ont été entreprises 1.

L’importance du chômage et du sous-emploi perceptibles à l’œil nu est confirmée par le premier recensement général de la population et de l’habitat en avril 1966. Ce dernier a déterminé un taux de 25% de participation au travail de la population active, les 3/4 restants étant au chômage 2.

Face à la situation dégradée de toutes les potentialités de l’économie, l’Etat s’est trouvé dans l’obligation de diriger l’économie nationale et d’assurer son développement. De ce fait, il est devenu l’agent principal de la refonte de l’économie et de l’ensemble des rapports sociaux.

L’Etat a affirmé sa responsabilité directe dans la stratégie du développement national qui supposait la constitution d’un vaste secteur public. L’Etat, par l’intermédiaire de ce secteur, doit se substituer aux mécanismes spontanés du

1

A. BRAHIMI, L’économie algérienne, Editions OPU. Alger 1991, p. 8 2

M. OURABAH, Les transformations économiques de l’Algérie au 20ème anniversaire de l’indépendance, Editions ENAG, Alger,1982, p. 64.

marché, commander le processus des investissements et contrôler l’adaptation du processus au modèle adopté 1.

Dans leur proclamation du 1er novembre 1954, les fondateurs du FLN ont fixé pour objectif à leur mouvement « l’indépendance nationale » par la restauration de l’Etat algérien souverain démocratique et social 2.

Au lendemain de l’indépendance et après le départ massif de l’encadrement étranger de l’administration, de l’industrie, et des différents services, L’Etat s’est trouvé propriétaire du patrimoine des entreprises. L’octroi d’un fort pouvoir d’intervention à l’Etat dans le domaine de la gestion financière visait à assurer une gestion économique et comptable stricte des entreprises.

1.2.1.1. LE PROCESSUS IDEOLOGIQUE DE BEN BELLA

Dans le rapport qu’il a présenté au 1er congrès du parti en avril 1964, Ben Bella a affirmé la primauté de l’action révolutionnaire sur les tâches de construction institutionnelle et de réorganisation du pays. « L’Etat reste l’instrument d’application du socialisme » dit le président Ben Bella. Pour préciser le contenu de sa pensée, le chef de l’Etat algérien insistera tout au long de ses discours sur cette fonction essentielle de l’Etat. Il met l’accent sur le fait que celui-ci doit être au service du peuple algérien.

K. Mameri s’est intéressé à l’argument avancé par le président Ben Bella dans son apport « Etat socialiste » le peuple est son soutien le plus ferme. Il écrit « si l’on est parvenu à une telle prise de conscience, ce n’est nullement le fruit d’un hasard, d’une circonstance accidentelle ou d’un calcul politique. Cette prise de conscience qui se traduit par l’identification du peuple au socialisme, procède

1

N. Efftekhari, Rente et dépendance en Algérie, revue Peuples Méditerranéens N°26. Paris, 1984, p. 36. 2

d’une longue maturation dont il convient, selon nous, de rechercher la source et l’origine dans la Révolution algérienne. » 1

L’histoire atteste sans le moindre doute qu’aucune révolution victorieuse ne s’est écartée du socialisme. Ceci pour dire, qu’en ce qui concerne l’Algérie, il est raisonnable de considérer que la Révolution de 1954 a donné naissance au socialisme.

1.2.1.2. PROCESSUS ECONOMIQUE DE BEN BELLA

L’environnement de l’Etat dans cette doctrine de « socialisme » s’identifie à un agent économique très fort qui est, en l’occurrence, seul capable de conduire un processus d’autonomisation vis-à-vis du marché mondial capitaliste, d’une part et d’auto centrage du développement (création d’un marché national) 2 d’autre part. La finalité du développement économique algérien est avant tout l’affirmation de l’indépendance nationale c’est-à-dire la confirmation et la consolidation de l’indépendance politique par la conquête de l’indépendance économique.

1.2.2. 1965 OU L’ACCROISSEMENT DU ROLE DE L’ETAT. MUTATION DE L’ETAT (BOUMEDIENE)

Le rôle conféré à l’Etat paraît singulièrement renforcé 3. Il est, nous semble-t-il, dicté par les circonstances difficiles dans lesquelles l’Algérie doit accomplir sa percée pour sortir du sous développement.

Le Président Boumediene accorde énormément d’importance à l’Etat. Il n’y a aucun doute que son objectif est de le renforcer plus qu’auparavant: recréer l’Etat

1

K. MAMERI, Réflexion sur la constitution algérienne, Editions OPU, Alger 1976, p. 62 2

B.HAMEL. Economie de l’Etat et socialisme en Algérie, Editions OPU Alger 1989, p. 31. 3

algérien 1. En Algérie, il se trouve de plus que l’Etat est perçu comme le restaurateur et le protecteur de la personnalité algérienne. C’est à travers lui que se manifeste l’existence de l’Algérie et de son peuple longtemps relégués dans l’oubli ( parce que, précisément il n’y avait nul Etat qui leur soit propre pour attester de leur existence ! ).

Si l’on quitte la période passée pour revenir au présent, l’on découvre de nombreuses et fortes raisons qui confèrent à l’Etat une importance telle que l’on a pu la mesurer dans le langage du Président Boumediene.

Ce dernier affirme que l’Algérie indépendante ne peut poursuivre sa marche et gagner sa place comme pays majeur et responsable du bonheur de son peuple que si elle dispose d’un Etat à la hauteur de cette mission.

1.2.2.1. PROCESSUS IDEOLOGIQUE DE BOUMEDIENE

Le Président Boumediene s’engage rapidement dans une politique de nationalisation des intérêts étrangers: nationalisation des mines, des compagnies d’assurances et des banques en 1966, des sociétés pétrolières, des entreprises de distribution et des entreprises industrielles. C’est, notons-le, la poursuite d’un processus entamé sous Ben Bella avec la nationalisation des terres agricoles.

Ces nationalisations d’entreprises, dont la plupart sont françaises, peuvent être analysées comme des mesures de souveraineté parachevant la lutte de libération. Le 24 février 1971, le Président Boumediene avance les termes de « récupération des richesses nationales » au moment où l’Algérie prend le contrôle des sociétés françaises de production de pétrole brut.

Avec l’accroissement de son rôle, sous la direction de Boumediene, l’Etat est reconnu comme le sujet et le moteur d’une entreprise dont l’ambition est la « refonte totale de la société, « c’est l’Etat, non le peuple, qui est le souverain

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véritable, un souverain qui se veut éclairé, tuteur et pédagogue de la nation, chargé de la conduire, sous l’emblème du socialisme, à la modernité ». 1

1.2.2.2. PROCESSUS ECONOMIQUE DE BOUMEDIENE

Le régime de Boumediene appréhende d’autant les aspects politiques qu’économiques ou sociaux de la finalité de développement. Le développement économique est avant tout le moyen d’affirmer la nation et l’Etat. Il s’agit, par la mise en place d’un appareil productif diversifié et complexe, de consolider les infrastructures matérielles du pays. La finalité du développement économique Algérien est avant tout l’affirmation de l’indépendance nationale s’exprimant dans une société moderne. Par ailleurs, dans le domaine de l’édification économique, c’est surtout après 1965 que le secteur public va connaître sa plus grande expansion. Du fait de la série des mesures de nationalisations prises entre 1966 et 1971, l’Etat est devenu le plus grand investisseur, le plus grand employeur. Il détient aussi le monopole sur le commerce extérieur.