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Le modèle d’Uppsala et les international new ventures (INV)/Born globals

internationalisation une revue de littérature

1.2 Le modèle d’Uppsala et les international new ventures (INV)/Born globals

Similaire à l’IDP, mais du point de vue de l’entreprise, J. Johanson et Vahlne (1977) ont développé le modèle d’Uppsala pour poser des questions relatives à l’aspect comportemental des entreprises à l’international, particulièrement sur la localisation et les modalités d’expansion(Meier et al., 2010). Sur la base de l’hypothèse de manque de connaissances pour l’internationalisation (Carlson, 1966), le modèle d’Uppsala étudie le processus d’internationalisation autour d’un concept nommé « psychic distance », distance liée à l’incertitude spécifique aux marchés étrangers (Meier et al., 2010). Le concept de la distance psychique provient de la littérature en commerce international, où il est considéré comme une des principales difficultés de l’échange international. Le modèle d’Uppsala emploie ce concept pour décrire les risques liés aux difficultés d’apprentissage et aux incertitudes lorsque les entreprises opèrent dans un environnement étranger (Shuster et Ambos, 2013). On est à l’opposé de l’avantage de localisation du paradigme OLI de Dunning, car les facteurs tels que la distance internationale influencent la trajectoire d’internationalisation des MNE (N. Zhou et Guillen, 2016). L’entreprise cherche à cumuler les connaissances « expérientielles » et adopte un processus de décision incrémental en fonction de la distance psychique (de proche à loin) afin de réduire l’incertitude et de s’internationaliser(Si et Liefner, 2014).

Autrement dit, en termes de diversification géographique, l’entreprise commence à s’internationaliser dans des marchés qu’elle connaît le mieux, puis progressivement elle se diversifie dans des marchés qui lui semblent moins familiers(Y. Luo et Tung, 2007). Du point de vue de l’entreprise, l’engagement de ressources à l’international augmente en fonction des connaissances expérientielles acquises durant le processus d’internationalisation dans lequel 4 étapes séquentielles se retrouvent (J. Johanson et Vahlne, 1977; D. Wu et Zhao, 2007). Ces 4

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étapes d’internationalisation du modèle d’Uppsala sont respectivement : sans activités d’export régulières ; export par agent indépendant ; création de filiale commerciale et création de filiale de production(J. Johanson et Vahlne, 1977 ; 1990).

Après un succès dans les études sur les MNE des pays développés, le modèle d’Uppsala a été contesté à la suite de la publication d’Oviatt et McDougall (1994), qui étudie l’internationalisation des PME et des Start-ups. Cet article qualifie les entreprises qui, depuis leur naissance, s’engagent dans plusieurs zones géographiques et génèrent une répartition géographique de leur chiffre d’affaires équivalent à ceux des grandes firmes multinationales, d’ « International New Ventures » ou de « Born globals » (Meier et al., 2010, Ricard et Zhao, 2018). Ces derniers s’intéressent au fait que l’entreprise s’internationalise d’entrée de jeu. En outre, un autre courant s’adresse à la vitesse d’internationalisation en mettant avant la dynamique du processus afin de proposer une « internationalisation accélérée » des entreprises dans leur développement (Chetty et al., 2014 ; Tan et Mathews, 2015). Non seulement pour les EMNE, mais aussi les DMNE (Bonaglia et al. 2007 ; Ramamurti, 2012 ; Yiu, 2011), l’évolution sociale et technologique a contribué énormément (mais pas complètement, en témoigne par exemple le recours aux expatriés) à l’intégration de l’environnement international des firmes, à l’obtention des ressources et aux connaissances entrepreneuriales qui aident les entreprises à s’internationaliser plus tôt et/ou plus rapidement(Ramamurti, 2012). Les entreprises à internationalisation accélérée sont probablement soumises au modèle d’Uppsala, alors que les INVs ou les Born globals le sont moins (Cavusgil et Knight, 2015 ; Oviatt et McDougall, 1994 ; H. Tan et Mathews, 2015).

Comme indiqué dans les articles d’Oviatt et McDougall (1994 ; 2005), ce dernier modèle est complètement différent du modèle d’Uppsala. Les Born globals investissent dans de multiples pays, ils considèrent que l’exploitation des ressources de la firme et la création de valeur, qui leur permet d’en tirer des avantages concurrentiels, sont les moteurs de l’internationalisation. Comparé à cette dernière approche, le modèle d’Uppsala se concentre plus sur les actifs et les connaissances expérientielles de la firme. En synthèse, il semble que les propos des deux modèles se trouvent dans une logique inversée : l’un propose de maximiser la création de valeur, l’autre, de minimiser l’incertitude(Meier et Meschi, 2010).

Dans la perspective Springboard, Luo et Tung (2007) soulignent que les EMNE sont dans certains cas poussées par une nécessité de fuir les contraintes institutionnelles et commerciales

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de leurs pays d’origine. En raison de ces contraintes, les EMNE adoptent des comportent plus risqués et agressifs et suivent une trajectoire d’internationalisation unique (Ricard et Zhao, 2018).

Cependant, l’article de N. Zhou et Guillen (2016) combine le concept de Liability of

foreignness – LOF, et le paradigme OLI pour analyser les 4 motifs des entreprises qui

s’engagent à l’IDE. Il nous montre également le lien complémentaire entre les avantages OLI et les désavantages de LOF (désavantages compétitifs dont la distance psychique et liability of

outsidership, appelé aussi LOO - J. Johanson et Vahlne, 2009 ; Y. Luo et Tung, 2007 ; S. Zaheer,

1995 ; N. Zhou et Guillen, 2016).

D’un point de vue évolutif, notamment sur la vitesse d’internationalisation, l’approche Born

globals vise à expliquer les cas de PME et Start-ups qui s’internationalisent dès leur naissance

ou peu de temps après(H. Tan et Mathews, 2015), auquel le modèle d’Uppsala n’est pas adapté. Cependant, l’approche Born globals ne semble pas susceptible d'expliquer le cas d’internationalisation accélérée, notamment motivée par l’environnement économique, institutionnel, et technologique. Car dans ce cas, les entreprises de type International New

Venture (INV au sens d’Oviatt et McDougall, 1994) existent depuis l’époque des MNE des

pays développés. D’ailleurs, non seulement les petites entreprises s’internationalisent vite dans le cas des pays émergents, mais aussi les grandes multinationales.

Que ce soit Hymer (1976), Dunning (1977) ou encore J. Johanson et Vahlne (1977), Oviatt et McDougall (1994), les théories internationales sont toutes conçues en fonction des phénomènes issus des pays développés, en Europe et aux États-Unis. Fondés sur des faits tels que ceux des pays développés, ces cadres théoriques présentent probablement des lacunes face à certains phénomènes relativement nouveaux des entreprises des pays émergents. En outre, les fondations antécédentes pourraient transmettre systématiquement leurs incomplétudes aux théories conventionnelles de nos jours lorsque l’on les emploie.

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1.3. Antécédents théoriques du paradigme OLI et du modèle

d’Uppsala

Le paradigme OLI prend en compte différents courants théoriques : les coûts de transaction, la théorie institutionnelle, le modèle d’Uppsala, etc. (N. Zhou et Guillen, 2016).

De même que la théorie des coûts de transaction, le paradigme OLI souligne l’existence de certains avantages spécifiques (Firm Specific Advantages - FSA) comme moyen qu’utilisent les MNE, étant actrices du marché imparfait, pour réduire et compenser les handicaps d’être étrangères (LOF) lors des échanges dans le marché international (Deng, 2013 ; Hobdari, Gammeltoft, Li, et Meyer, 2017 ; North, 1990 ; Williamson, 2000). Ces avantages (Firm

specific advantages) peuvent être liés à la nature de la firme ou à la nationalité des propriétaires

des MNE (Kuşluvan, 1998). À l’intérieur d’un pays donné, ces avantages peuvent se référer à certaines capacités à faire face aux inefficacités institutionnelles (Aulakh, 2007 ; Wright, Filatotchev, Hoskisson, et Peng, 2005). Ces capacités peuvent être également transférées dans les pays où l’aspect institutionnel présente une certaine similarité (Henisz, 2003 ; Khanna et Yafeh, 2007).

De même si l’entreprise décide d’investir dans un pays où l’environnement institutionnel n’est pas similaire à celui du pays d’origine, elle peut subir une LOF (le handicap d’être étrangère) importante (Globerman et Shapiro, 2009) lorsqu’elle gère ses activités à l’étranger (Deng, 2013). Autrement dit l’institution du pays d’origine fait partie des ressources d’IDE ; à l’inverse, l’institution du pays d’accueil peut être un facteur qui attire ou au contraire freine les IDEs (Y. Luo et Tung, 2007). En effet, les coûts de transaction, d’un point vue international, peuvent être générés par les institutions qui sont artificiellement mises en place sous diverses formes et à différents niveaux(Y. Huang, 2003; M. W. Meyer et Lu, 2005; Nolan, 2001), et vice

versa (i.e. la globalisation est améliorée et accélérée par diverses technologies de production,

de communication et de transport ; en même temps les institutions peuvent augmenter les barrières à l’entrée de leur marché d’origine, ce qui augmente ensuite le coût d’exportation ).

Dans la théorie institutionnelle, l’entreprise tout comme d’autres acteurs d’un environnement, sont affectées par les institutions de façon large ; il existe une coévolution de l’entreprise et de

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son environnement institutionnel (Chalençon et Dominguez, 2016 ; Dunning et Lundan, 2008a ; Gammeltoft et al., 2010). La force institutionnelle influence l’élaboration de stratégies de l’entreprise principalement par 3 aspects différents : régulateurs, normatifs et cognitifs (Scott, 1995). Les choix stratégiques des firmes sont ainsi façonnés par les cadres institutionnels dans lesquels elles sont incorporées (Deng, 2013 ; Peng, 2012 ; Yamakawa, Peng, et Deeds, 2008). Pour réussir dans l’internationalisation, les entreprises issues d’un environnement fortement institutionnalisé doivent à la fois garder une certaine liberté dans l’élaboration de leurs stratégies et bénéficier de ressources matérielles (inward investment) (Child et Rodrigues, 2005). Cette liberté stratégique peut être issue de la nature de la propriété privée qui aide l’entreprise à réduire l’intervention bureaucratique et en même à développer des compétences entrepreneuriales. La relation entre les facteurs institutionnels et les facteurs d’entrepreneuriat est donc antagonique dans la mesure où les accords qui réduisent la dépendance à l'égard de l'État donnent plus de place à l'initiative entrepreneuriale, tandis que l'exercice de cette initiative vise en partie à accroître l'autonomie des entreprises pour mobiliser des capitaux à l'étranger(Child et Rodrigues, 2005).

La théorie des ressources (Resource Based View : RBV) est appliquée au management international. La RBV met l’accent sur les faisceaux uniques de ressources et de capacités des entreprises individuelles comme le facteur clé de leur comportements stratégiques et de leur performance(H. Tan et Mathews, 2015; Wernerfelt, 1984). L’existence d’entreprises peut être traduite par le besoin de combiner et transformer les ressources, aussi connu comme facteurs de production, qui ont pour but de générer des sorties avec une valeur ajoutée ainsi que des bénéfices(Hobdari et al., 2017). C’est par le marché de facteurs, que l’entreprise a accès aux ressources externes telles que la main d’œuvre, les capitaux, etc., nécessaires à la production et au développement de l’avantage compétitif (H. Kim, Hoskisson, et Lee, 2015). Dans une perspective de RBV, les entreprises peuvent acquérir des ressources dont elles ont besoin à travers l’internationalisation (e.g. M&A), mais la façon dont ces ressources peuvent être déployées dépend du point de départ et de l’histoire de l’entreprise(Gammeltoft et al., 2010). Les DMNE (multinationales des pays développés) sont plus orientées vers l’exploitation des ressources internes de l’entreprise lorsqu’elles possèdent un ensemble de technologies et compétences managériales uniques par rapport à celles des entreprises des pays émergents (Child et Rodrigues, 2005). Cependant, ces dernières s’inscrivent plutôt dans une perspective d’acquisition de ressources à l’extérieur afin d’exploiter les avantages spécifiques de leur pays

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d’origine (e.g. la main d’œuvre à bas coûts), face à l’existence des concurrents des DMNE dans leur marché local(Y. Luo et Tung, 2007).

Selon le modèle d’Uppsala, l’obstacle que l’entreprise rencontre est issu de son originalité héritée par ses filiales étrangères résumée dans le Liability of foreignness - LOF définie comme la difficulté et le coût de mener des opérations à l’étranger qui se traduit par des désavantages compétitifs (S. Zaheer, 1995). Quand l’entreprise investit dans un pays où la distance psychique est importante, il faut une période importante d’apprentissage afin de réduire les LOF (Si et Liefner, 2014). Ainsi, l’entreprise préfère investir premièrement dans les pays où la distance psychique est moins importante. L’avantage L du paradigme OLI est donc mis en relation avec le modèle d’Uppsala (N. Zhou et Guillen, 2016). Les filiales présentent des ancrages de leur originalité alors qu’elles doivent apprendre les connaissances (culturelles, sociales et institutionnelles) du pays d’accueil et les intégrer dans leurs connaissances existantes lorsque l’entreprise entre dans un marché étranger. Une fois que le choix de pays cible est déterminé, l’entreprise adopte des choix de modes d’entrée progressivement selon les connaissances cumulées du marché étranger. Alors, l’ordre chronologique de l’internationalisation est mis en perspective en fonction de 2 aspects différents : le choix de pays cible et le choix du mode d’entrée.

Tableau 1 : Comparaison théorique, compilation de l’auteur en fonction de Johanson et

Vahlne (1977) ; Eschlbeck (2012)

Comme indiqué, dans le tableau 1, la comparaison du modèle d’Uppsala et OLI démontre que l’avantage L peut être cumulé dans le processus d’apprentissage qui permet à l’entreprise de réduire l’incertitude dans l’engagement de ressources. En outre, le paradigme OLI suggère que l’entreprise doit avoir un avantage L avant de s’engager dans l’IDE. De façon identique, le modèle d’Uppsala explique que l’entreprise doit cumuler des expériences suffisantes pendant la phase d’exportation avant de s’engager dans l’IDE. Ainsi ces deux cadres théoriques se complètent et s’expliquent l’un l’autre. Si on adopte la perspective RBV, il n’est pas difficile de

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conclure qu’en prenant en compte le fait que l’entreprise cherche à acquérir des ressources pour la création de valeur, pendant ou après la phase d’acquisition, elle cumule des ressources en termes d’ancrage local qui contribuent à l’internationalisation. Les deux théories majeures indiquent de façon implicite l’idée de classer les sources de création de valeur et les sources des connaissances expérientielles, les unes après les autres. Cependant, nous sommes intéressés de savoir si les deux sources peuvent être acquises simultanément ou chronologiquement inversées. Une question similaire est aussi formulée comme dans l’article de Deng (2013) : « Comment les entreprises tentent-elles de surmonter les LOF dérivées de l’environnement institutionnel et social des deux pays ? »

Nous allons tenter de répondre à cette question à travers une revue de littérature concernant les études à propos des EMNE chinoises.

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