Section I. La cohérence avec le droit international
Paragraphe 1. La régulation internationale du terrorisme et du mouvement des personnes
B. Le droit international sur le mouvement des personnes
Le droit international migratoire actuellement en construction inclut autant les droits de lhomme que des prérogatives souveraines de contrôle migratoire170.
Cest ainsi que, dune part, en addition aux instruments internationaux spécifiquement liés à la migration et lasile, plusieurs normes de droit international des droits de lhomme établissent des droits minimaux pour les immigrants liés à leur qualité de personne, de travailleur ou sur la base du principe dégalité et de non‐discrimination, indépendamment de la situation administrative du ressortissant étranger. Le contenu de ces droits minimaux, ainsi que la portée du principe dégalité et de non‐discrimination au sujet de la population migrante, a été précisé par les organes de contrôle de ces instruments internationaux, à travers des arrêts, avis consultatifs et autres publications171.
Dautre part, le droit international reconnait aux États certaines prérogatives souveraines de contrôle territorial qui font partie du droit coutumier international et sont le noyau de la Nation‐État moderne.
Ces deux axes du droit migratoire international présentent un rapport de proportion inversée, où le renforcement de la prérogative de contrôle souverain limite la garantie des droits
170 Bien que les États ne semblent pas prêts à créer un système de protection universel des droits des
migrants, ni à définir des critères dadmission, de traitement ou dexpulsion des étrangers sur leur sol, le droit migratoire international se nourrit du droit international des droits de lhomme et la mise en uvre de ces normes faite par les tribunaux internationaux et régionaux (PÉREZ GONZÁLEZ, C. (2012):
Migraciones irregulares y derecho internacional, Valencia, Ed. Tirant Lo Blanch, 1e Ed., p. 3, PÉREZ‐
PRAT, L. (2007): Inmigración y Derecho Internacional: ¿un acuerdo imposible?, Curso de Derechos Humanos de Donostia‐San Sebastián, Vol. VII, pp. 143 à 144 et RIGAUX, F., (2000): Immigration, droit
international et droits fondamentaux, dans Les droits de lhomme au seuil du troisième millénaire. Mélanges en hommage à Pierre Lambert, Bruxelles, Ed. Bruylant, p. 693).
171 Dans son avis consultatif de 2003 la CItDH affirme lexistence des droits minimaux pour tous les
immigrants, y compris les immigrants sans‐papiers. Selon la Cour, cet avis consultatif est obligatoire pour les États‐Unis, puisquil engage à tous les États membres de lOEA liés par la Charte de lOEA, la Déclaration Américaine des Droits et Devoirs de lHomme de 1948 (ci‐après « DADH »), la DUDH ou le Pacte International relatif aux droits civils et politiques de 1966 (ci‐après « PIDCP »). Voir Condición
minimaux, et vice‐versa172. Néanmoins, le droit international ne propose pas une articulation
précise entre les axes du droit migratoire. Il tolère son déploiement parallèle et spontané.
Les mesures antiterroristes insérées dans les politiques migratoires et dasile font partie de laxe de contrôle migratoire et de protection de la souveraineté et, en tant que telles, limitent aussi les droits des immigrants reconnus par le droit international.
Bien que la Convention Internationale sur la Protection de tous les Travailleurs Migrants et des Membres de leur Famille de 1990 développe les droits politiques et civils déjà insérés dans les traités généraux des droits de lhomme et clarifie la portée des droits économiques, sociaux et culturels de ce groupe173, le défaut de ratification des États‐Unis et de lEspagne174 prive son étude de pertinence175. De plus, cette convention ninclut pas de règles visant la lutte
antiterroriste.
172 BOSNIAK, L. S. (1991): Human Rights, State sovereignty and the protection of undocumented
migrants under the international migrant workers convention, International Migration Review, Vol. 25, Nº 4, Special Issue: U.N. International Convention on the protection of the Rights of all migrant Workers and Members of Their Families (hiver, 1991), pp. 737 à 770.
173 Sur ce point voir la partie III (articles 8‐35) de la Convention. Son article 44 (2) consacre des droits
additionnels pour les travailleurs en situation administrative régulière, y compris le droit au regroupement familial, qui pourtant, est faiblement établi. 174 Largument invoqué pour justifier la non‐ratification de cet accord a souvent été la préexistence de ces droits dans les traités généraux de droit de lhomme (MATTILA, H.S. (2002): « Protection of Migrants Human‐rights: Principles and Practice », International Migration, Vol. 38, Nº 6, Special Issue, 2002, p. 59). 175 Les travailleurs migrants jouissent de la protection dune série dinstruments internationaux. Dans ce sens, voir la Convention de lOIT N° 97 concernant les travailleurs migrants de 1949, la Convention N° 143 sur les migrations dans des conditions abusives et sur la promotion de l'égalité de chances et de traitement des travailleurs migrants de 1975 et les recommandations Nº 86/1949 et Nº 51/1975. Sur ce point voir CHETAIL, V. (2008): International Legal Protection of Migrants and Refugees: Ghetto or Incremental Protection? Some Preliminary Comments dans PADMAJA, K. (sous la dir.) Law Of Refugees:
Global Perspectives, ICFAI University Press, 2008, pp. 33 à 45 et CHOLEWINSKI, R. (1997): Migrant Workers in International Human Rights Law: Their protection in countries of employment, Clarendon:
1º La régulation des personnes étrangères au sein du droit des droits de lhomme Selon les instruments internationaux de droits de lhomme, il y a certains droits qui appartiennent à tous les individus indépendamment de leur situation administrative, cest‐à‐ dire du simple fait quils sont des êtres humains176.
Ces droits de lhomme découlent de la reconnaissance dun droit limité de migrer177 et de
retourner dans son pays dorigine et de résidence. Bien quil nexiste pas un droit à immigrer proprement dit, cet ensemble de droits se traduit par certaines exigences minimales de traitement de la population étrangère qui se présente à la frontière ou qui se trouve à lintérieur du territoire de lÉtat178.
Lobligation de respecter et garantir ces droits humains est consacrée dans plusieurs instruments internationaux. La portée de cette obligation nimplique pas seulement la reconnaissance formelle des droits, mais exige aussi quils aient un effet utile179.
De la même manière, le respect du principe dégalité et de non‐discrimination180, qui est composé des éléments de non‐discrimination, égalité devant la loi et égale protection de la loi,
176 Selon larticle 1 de la DUDH : « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits ».
177 Bien que larticle 13(1) du DUDH semble reconnaitre un droit démigrer et un droit dimmigrer,
larticle 12 du PIDCP nétablit le droit dimmigrer que pour les étrangers en séjour légal. 178 Le droit international des droits de lhomme, applicable à tous les êtres humains, est contenu dans la DUDH, le PIDCP et le Pacte International relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1967 (ci‐ après « PIDESC »). Des traités spécifiques développent ces droits. 179 GLOBAL GROUP ON MIGRATION (2010): « Statement on the Human Rights of Migrants in Irregular Situation », 30 septembre 2010, <http://www.globalmigrationgroup.org/pdf/GMG%20Joint%20Statement%20Adopted%2030%20Sept% 202010.pdf>, [Consulté le 04 janvier 2014]. 180 Voir les articles 2(3) et 26 du PIDCP, larticle 14 de la CEDH, larticle 1 du Protocole 12 de la CEDH et
les articles 1 et 24 de la Convention Américaine relative aux Droits de lHomme de 1969 (ci‐après « CADH »).
nimplique pas seulement labstention de la part de lÉtat de réaliser certaines actions qui créent des situations de discrimination de jure, mais aussi de facto181.
La liste de droits minimaux prévoit certains droits civils, tels que le droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne, le droit de ne pas être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et le droit à un procès équitable et à des recours légaux appropriés182.
Certains droits sociaux économiques et culturels sont aussi garantis, y compris le droit à la santé, à un niveau de vie suffisant, au logement et à léducation183.
181 Des corps internationaux et régionaux, judiciaires et quasi‐judiciaires, ont affirmé lobligation des
États de respecter et dassurer la jouissance égale des droits de lhomme, ainsi que de protéger les personnes contre toute discrimination dans lexercice de leurs droits. Voir sur ce point, Condición
Jurídica y los derechos de los migrantes indocumentados (2003) : cité note 73 ; Legal Resources Foundation c. Zambie (2001) : Commission Africaine de droits de lhomme et des peuples,
Communication Nº 211/98, 29e Session Ordinaire, 7 mai 2001 et lAffaire relative à certains aspects du
régime linguistique en Belgique (1968) : CEtDH, Requête Nºs 1474/62, 1677/62, 1691/62, 1769/63,
1994/63, 2126/64, Arrêt du 23 juillet 1968). Lâge, le handicap, le statut économique et social, la situation de santé, le statut de mariage, lorientation sexuelle et lidentité sexuelle sont des motifs prohibés de discrimination. Voir dans ce sens, Comité des droits économiques, sociaux et culturels (2009) : Observation générale Nº 20, La non‐discrimination dans l'exercice des droits économiques, sociaux et culturels, 22 mai 2009 ; Propuesta de Modificación a la Constitución Política de Costa Rica Relacionada con la Naturalización (1984): CItDH, Avis Consultatif OC‐4/84 et les décisions de la CEtDH dans Affaire Alatulkkila et autres c. Finlande (2005) : CEtDH, Requête Nº 33538/96, Arrêt du 28 juillet 2005 ; lAffaire Sidabras et Dziautas c. Lituanie (2004) ; CEtDH, Requêtes Nºs. 55480/00 et 59330/00, Arrêt du 27 juillet 2004, lAffaire Salgueiro da Silva Mouta c. Portugal (1999) : CEtDH, Requête Nº 33290/96, Arrêt du 21 décembre 1999, lAffaire E.B. c. France (2008) : CEtDH, Requête Nº 43546/02, Arrêt du 22 janvier 2008 ; lAffaire Love et al. c. Australia (2003) : CDH, Communication Nº 983/2001, 25 mars 2003 et lAffaire Young c. Australia (2003) : CDH, Communication Nº 941/2000, 6 août 2003.
182 Le CEtDH a exclu explicitement le droit à un recours dans le cadre des procédures dentrée sur le
territoire (Affaire Maaouia c. France (2000) : CEtDH, Requête Nº 39652/98, Arrêt du 5 octobre 2000, para. 37). Le Comité des droits de lhomme de lONU (ci‐après « CDH ») a laissé cette question ouverte (Adu c. Canada (1994) : CDH, Communication Nº 654/1995, 28 décembre 1994). 183 Les droits économiques sociaux et culturels sont reconnus dans la DUDH, le PIDESC ainsi que dans dautres traités des droits de lhomme au sein de lONU. Ces instruments incluent une série de droits relatifs au droit de travail, tels que les droits syndicaux et de lendroit du travail, le droit à la santé, à léducation et à la sécurité sociale, le droit à un niveau de vie suffisant ‐ y compris le droit au logement, à la nourriture, à leau et aux installations sanitaires ‐ et le droit de participer aux activités culturelles. Plusieurs de ces droits ou quelques aspects de ceux‐ci sont protégés par les instruments de droits civils et politiques. De même que les droits civils et politiques, les droits économiques, sociaux et culturels sont universellement applicables à tous les individus, y compris toutes les catégories de migrants. Ces
Des droits liés au statut de travailleur de la personne immigrante sont également protégés. Le travailleur migrant doit être protégé contre lexploitation et labus, ne peut pas être réduit ni en esclavage ni en servitude non volontaire, a le droit à des conditions équitables et favorables de travail et à la sécurité sociale.
Toutefois, comme lobligation étatique de traitement conforme à ces standards minimaux commence lorsque le migrant franchit la frontière et se trouve sur le territoire du pays daccueil, la détermination du moment où sa juridiction commence est très importante184. Le terme juridiction est plus large que celui de territoire national. Il sétend pour comprendre la zone internationale ou dattente dun aéroport185 et tout autre espace où lÉtat concerné ait un contrôle efficace186.
droits ne doivent pas être interprétés pour exclure de manière injustifiée les personnes étrangères. Le Comité des droits économiques sociaux et culturels a affirmé que la prohibition de discrimination sapplique aussi à la nationalité (Comité des droits économiques, sociaux et culturels (2009) : cité note 182, para. 30). Certains types de discrimination entre nationaux et étrangers sont autorisés par larticle 26 du PIDCP, mais le CDH na pas précisé la portée de cette autorisation (CDH (2000a) : Observation
Générale Nº 28, Égalité des droits entre homme et femme, 29 mars 2000, para. 31).
184 Bien quun principe basique du droit des droits de lhomme oblige les États à garantir, assurer et
protéger les droits humains de toutes les personnes sous leur juridiction, indépendamment de leur nationalité (articles 2(1) du PIDCP et 1 de la CEDH), un principe général du droit nuance cette obligation leur donnant une prérogative discrétionnaire quant à ladmission sur leur territoire (KAMTO, M. (2007) : « Rapporteur spécial des Nations Unies sur lexpulsion des étrangers », Troisième rapport sur lexpulsion des étrangers », 19 avril 2007 disponible sur <http://daccess‐dds‐ ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/N07/313/15/PDF/N0731315.pdf?OpenElement>, [Consulté le 4 février 2014], paragraphes 2 et 7). Voir aussi, Affaire Moustaquim c. Belgique (1991) : CEtDH, Requête Nº 12313/86, Arrêt du 18 février 1991, para. 43; lAffaire Vilvarajah et autres c. Royaume‐Uni (1991) : CEtDH, Requêtes Nºs. 13163/87‐13164/87‐13165/87‐13447/87‐13448/87, Arrêt du 30 octobre 1991, para. 102; lAffaire Chahal c. Royaume Uni (1996) : CEtDH, Requête Nº 22414/93, Arrêt du 15 novembre 1996, para. 73; lAffaire Ahmed c. Autriche (1996) : CEtDH, Requête Nº 25964/1994 Arrêt du 17 décembre 1996, para. 38 ; lAffaire Boughanemi c. France (1996) : CEtDH, Requête Nº 22070/1993, Arrêt du 24 avril 1996, para. 41; lAffaire Bouchelkia c. France (1997) : CEtDH, Requête No 23078/93, Arrêt du 29 janvier 1997, para. 48; lAffaire H. L.R. c. France (1997) : CEtDH, Requête Nº 24573/94, Arrêt du 29 avril 1997, para. 33 et lAffaire Abdulaziz, Cabales et Balkandali c. Royaume‐Uni (1985) : CEtDH, Requête Nºs. 9214/80; 9473/81; 9474/81, Arrêt du 24 avril 1985, para. 67. 185 Affaire Amuur c. France (1996) : CEtDH, Requête Nº 19776/92, Arrêt du 20 mai 1996, paras. 52 et 53. 186 Voir CDH (2004a) : Observation Générale Nº 31, La nature de lobligation juridique générale imposée aux États parties au Pacte, 26 mai 2004, paras. 10 et 11; Delia López Burgos v. Uruguay (1979) : CDH, Communication Nº R 12/52, 6 juin 1979; Celiberti de Casariego v. Uruguay (1981) : CDH, Communication
Cependant, laccès à ces droits devient, parfois, impossible pour les migrants en séjour irrégulier, soit en raison de la dénégation de jure, soit en raison de la création dobstacles de
facto à leur exercice, tels que la menace dexpulsion ou linternement fondé précisément sur
lillégalité du séjour.
Or, bien que lÉtat retienne sa prérogative de contrôle migratoire, il y a des cas où le droit international exige des États de permettre lentrée ou le séjour dun ressortissant étranger. Cette obligation concerne les cas liés à la protection internationale ou au regroupement familial.
Dans le premier cas, lÉtat doit sabstenir dexpulser létranger qui demande la protection internationale en vertu de linterdiction de refoulement187. La prohibition du refoulement
Nº 56/1979, 29 juillet 1981 ; lAffaire des Activités Armées sur le territoire du Congo (République
Démocratique du Congo c. Ouganda) (2005) : Cour International de Justice, Arrêt du 19 décembre 2005,
Recueil 2005, p. 168, paras. 180 et 216 ; Conséquences juridiques de lédification dun mur dans le
territoire palestinien occupé (Avis Consultatif) (2004) : Cour Internationale de Justice, Recueil 2004, p. 136, para. 109; lAffaire relative á lapplication de la Convention pour la prévention et la répression du
crime de génocide (Bosnia‐Herzégovine c. Serbia et Montenegro) (2007) : Cour Internationale de Justice,
Arrêt 26 du février 2007, Recueil 2007, p. 43 ; lAffaire relative à lapplication de la Convention pour
lélimination de toutes les formes de discrimination raciale (Georgia c. Fédération Russe) (2008) : Cour
Internationale de Justice, Demande en indication de Mesures conservatoires, Ordonnance du 15 octobre 2008, Recueil 2008, p. 353, entre autres. La CEtDH a établi la portée de la juridiction extraterritoriale de lÉtat. Cette juridiction existe si lÉtat exerce le contrôle efficace dun individu à travers ses fonctionnaires, soit légalement ou pas (Affaire Solomou et autres c. Turquie (2008) : CEtDH, Requête Nº 36832/97, Arrêt du 24 juin 2008, paras. 50 et 51). La juridiction de lÉtat peut se prolonger aux eaux internationales dans certains cas. La Commission Interaméricaine des droits de lhomme (ci‐ après « CIDH ») a établi que le fait de forcer le retour des demandeurs dasile interceptés à haute mer, viole le droit de demander lasile (Comité Haitiano de Derechos Humanos c. Estados Unidos (1997): CIDH, Caso 10.675, Informe No. 51/96, Informe de Méritos, 13 mars 1997, paras. 156, 157 et 163). La CEtDH considère que les mesures dintersection de bateaux, y compris à haute mer, attirent la juridiction de lÉtat qui réalise linterception (Affaire Medvedyev et autres c. France (2010) : CEtDH, Requête Nº 3394/03, Arrêt du 29 mars 2010, paras. 62 à 67).
187 Le droit de demander lasile est consacré par larticle 14 de la DUDH. Le respect du principe de non‐
refoulement interdit les États dextrader les demandeurs dasile, lorsque cette extradition comporte un risque de torture ou dautres violations graves des droits de lhomme. Ce principe est consacré par larticle 33 de Convention de 1951 relative au statut de réfugiés et du Protocole de New York, lArticle 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants de 1984 (ci‐après « CAT ») et les articles 6 et 7 du PIDCP. Voir aussi, HCR (2008) : « Note dorientation sur lextradition et la Protection Internationale des Réfugiés », 2008, disponible sur
limite le transfert de ressortissants étrangers lorsquil y a des motifs sérieux de croire188 quil y
a un véritable risque189 de subir une violation des droits de lhomme190. Quoique la preuve
reste initialement à la charge du demandeur dasile, une fois que celui‐ci a fourni des informations suffisantes et vérifiables, cette charge se déplace vers lÉtat, qui doit justifier la dénégation de la protection191.
La prohibition du refoulement devient absolue si lindividu risque de subir la torture ou dautres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants192. Dans ce cas, la prohibition
<http://www.refworld.org/pdfid/4ab24b382.pdf>, [Consulté le 9 juillet 2013], para 17 ; CDH (1992) :
Observation Générale Nº 20, Article 7 (Interdiction de la torture et des peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants), 10 mars 1992, para 9. Dans le continent Américain, ce principe est consacré par larticle 22(8) de la CADH, en vertu de larticle 13(4) de la Convention Interaméricaine de 1985 pour la prévention et la répression de la torture. En Europe, la CEtDH a systématiquement considéré que lobligation de non‐refoulement est inhérente à la prohibition de torture consacrée par larticle 3 de la CEDH. Voir dans ce sens, lAffaire Soering c. Royaume‐Uni (1989) : CEtDH, Requête Nº. 14038/88, Arrêt du 7 juillet 1989 ; lAffaire Chahal c. Royaume‐Uni (1996) : cité note 185 ; lAffaire Ahmed c. Autriche (1996) : cite note 185 ; lAffaire TI c. Royaume‐Uni (2000) : CEtDH, Requête Nº 43844/98, (Recevabilité), 7 mars 2000 et lAffaire Saadi c. Italie (2008) : CEtDH, Requête Nº 37201/06, Arrêt du 28 février 2008.
188 Voir par exemple, lAffaire Na c. Royaume‐Uni (2008) : CEtDH, Requête Nº 25904/07, Arrêt du 17
juillet 2008, paras. 109 et 113; lAffaire Saadi c. Italie (2008) : cité note 188, para. 125; lAffaire Nyanzi c.
Royaume‐Uni (2008) : CEtDH, Requête Nº 21878/06, Arrêt du 8 avril 2008, para. 51; lAffaire Cruz Varas et autres c. Suède (1991) : CEtDH, Requête Nº 155576/89, Arrêt du 20 mars 1991, para. 69; lAffaire Chahal c. Royaume‐Uni (1996) : cité note 185, para. 74; lAffaire Soering c. Royaume‐Uni (1989): cité
note 188, paras. 85 à 91 ; lAffaire Hayden c. Suède (1998) : Comité contre la Torture, Communication Nº 101/1997, 16 décembre 1998, para. 6.5; lAffaire C. T. and K. M. c. Suède (2007): Comité contre la Torture, Communication Nº 279/2005), 22 janvier 2007, para. 7.3 et lAffaire A. R. J. c. Australie (1997): CDH, Communication Nº 692/1996, 11 août 1997, para. 6.14.
189 Ce risque ne doit pas être hautement probable, mais personnel, présent et prévisible. Voir Hayden c. Suède (1998) : cité note 189, para 6.5 et C. T. and K. M. c. Suède (2007): cité note 189, para. 7.3.
190 Voir INTERNATIONAL COMMISSION OF JURISTS (2014) : « Migration and International Human Rights
Law », Practitioners Guide Nº 6, 2014, disponible sur <http://www.icj.org/wp‐ content/uploads/2014/10/Universal‐MigrationHRlaw‐PG‐no‐6‐Publications‐PractitionersGuide‐2014‐ eng.pdf>, [Consulté le 13 septembre 2012], pp. 114 à 118.
191 A. S. c. Suède (2001): Comité contre la Torture, Communication Nº 149/1999, 15 février 2001, para.
8.6 et Affaire Na c. Royaume‐Uni (2008) : cité note 189, paras. 110 et 111.
192 Voir Zhakhongir Maksudov et autres c. Kyrgyzstan (2008) : CDH, Communication No. 1461, 1462,
1476, 1477/2006, 31 Juillet 2008, para. 12.4; Tapia Paez c. Suède (1997): Comité contre la Torture, Communication Nº 39/1996, 28 avril 1997, para. 14.5; Tebourski c. France (2007) : Comité contre la Torture, Communication Nº 300/2006, 11 mai 2007, paras. 8.2 et 8.3; Dadar c. Canada, (2005): CDH, Communication Nº 258/2004, 23 novembre 2005, para. 8.8 et Comité contre la Torture (2000) :
sapplique aux expulsions, indépendamment des considérations de sécurité y compris le terrorisme, lintérêt public, des pressions économiques ou lexistence dun fort influx de migrants193.
Ainsi, la protection du principe de non‐refoulement dans le droit international des droits de lhomme est plus large que celle du droit des réfugiés194. Néanmoins, lefficacité de cette
protection dépendra du droit national, notamment parce que le droit international ne prévoit pas de normes de procédure pour loctroi du statut de réfugié. Le défaut de procédures équitables à cet égard peut comporter la violation du droit de non‐refoulement et du droit au recours efficace195. Toutefois, le principe de non‐discrimination doit guider le procès et aucune différenciation arbitraire ne doit être faite entre les demandeurs dasile196.
Concluding Observations on Slovenia, Rapport, 2000, disponible sur <http://www.un.org/documents/ga/docs/55/a5544.pdf>, [Consulté le 5 avril 2014], para. 206. Voir aussi, lAffaire Saadi c. Italie (2008) : cité note 188, para. 127 et lAffaire Chahal c. Royaume‐Uni (1996) : cité note 185, para. 79. 193 Affaire M.S.S. c. Belgique et Grèce (2011) : CEtDH, Requête Nº 30696/09, Arrêt du 21 janvier 2011, paras. 223 et 224. 194 Voir lAffaire Saadi c. Italie (2008) : cité note 188, para. 138; lAffaire Chahal c. Royaume‐Uni (1996) : cité note 185, para. 80. Le principe de non‐refoulement inclut le refoulement indirect. Lendroit où la personne sera refoulée est une considération très importante pour déterminer le respect de ce principe (CDH (2004a) : cité note 187, para. 12; Comité contre la Torture (1997) : Observation Générale Nº 1 sur lapplication de larticle 3 dans le contexte de larticle 22 de la Convention contre la torture, 21 novembre 1997, para. 2; Hamayak Korban c. Suède (1998) : Comité contre la Torture, Communication Nº 88/1997, 16 novembre 1998, para. 7; lAffaire Salah Sheekh c. Pays‐Bas (2007) : CEtDH, Requête Nº 1948/04, Arrêt du 11 janvier 2007, para. 141; lAffaire M.S.S. c. Belgique et Grèce (2011) : cité note 194, para. 342).
195 Voir lAffaire Jabari c. Turquie (2000) : CEtDH, Requête Nº 40035/98, Arrêt du 11 juillet 2000, paras.
39 à 42.
196 Voir larticle 3 de la Convention relative au statut des réfugiés de 1951. Voir aussi, Comité pour
lélimination de la discrimination raciale (2002a): Concluding Observations on Costa Rica, Report of the