Section II. Le phénomène migratoire
Paragraphe 2. La Migration : ses données et concepts basiques
En 2013, plus de personnes que jamais vivent hors de leur pays dorigine70. De fait, 232 millions
de personnes ou 3,2% de la population mondiale étaient issus de la migration internationale. Dans ce groupe, 45,2 millions de personnes étaient déplacées, dont 15,4 millions étaient des réfugiés71.
Bien que les motifs qui fondent la décision démigrer soient très divers, la recherche de meilleures conditions de vie semble être un élément déterminant de la décision migratoire. Les personnes quittent leur pays dorigine notamment parce quelles sont en quête de services publics, de travail ou de sécurité personnelle72.
Malgré tout, une distinction plus claire peut être faite entre la migration volontaire cest‐à‐ dire le déplacement motivé par une décision individuelle visant notamment à améliorer la situation économique du ressortissant étranger ‐ et la migration forcée, qui résulte de laction dune tierce partie.
70 OIM (2003) : « Migration and History », Section 1.3, 2003, disponible sur
<http://www.rcmvs.org/documentos/IOM_EMM/v1/V1S03_CM.pdf>, [Consulté le 11 juin 2014], p. 4.
71 HCR (2013) : « Tendencias globales 2012 », 2013, disponible sur
<http://unhcr.org/globaltrendsjune2013/Tendencias_Globales_2012_baja.pdf>, [Consulté : le 30 juin 2014]. Voir aussi, El País, Más de 50 millones de refugiados en el mundo según la ONU, 20 juin 2014,
disponible sur
<http://internacional.elpais.com/internacional/2014/06/20/actualidad/1403247770_211119.html>, [Consulté le 30 juin 2014].
72 La Cour interaméricaine des droits de lhomme (ci‐après « CItDH ») partage cette idée. La Cour
considère que le mouvement de personnes a lieu en raison des différences entre les conditions de vie existantes entre le pays dorigine et le pays de destination. Condición Jurídica y los derechos de los
A. Migration forcée
La migration forcée a lieu lorsque lémigrant quitte son pays dorigine motivé par une crainte bien fondée dêtre persécuté, dans le cas des réfugiés, ou parce que sa vie ou son intégrité physique est mise en danger par un groupe particulier ou lÉtat, cas où il peut bénéficier de la protection internationale subsidiaire. Dans les cas moins clairs, lorsque lémigrant fuit une situation de violence généralisée, par exemple, on parle de personnes déplacées.
Or, les pratiques étatiques qui causent la migration forcée existent depuis longtemps73. Dabord, les gouvernements utilisent leurs lois migratoires pour soccuper de la dissidence politique à travers limposition de lémigration forcée74. En général, les gouvernements ne forcent pas seulement le départ des dissidents, mais aussi dune portion substantielle de la population hostile au régime.
De la même manière, les régimes révolutionnaires utilisent lémigration à grande échelle comme une manière de transformer la structure sociale du pays.
Ensuite, les politiques de migration forcée servent à des fins de politique extérieure, en particulier, pour faire pression sur les pays voisins75.
Finalement, les États peuvent encourager la persécution dune personne qui fait partie dun groupe à cause de son ethnicité, orientation sexuelle, genre, religion ou tout autre condition
73 Il y a de nombreux exemples de migration forcée dans lhistoire de lhomme. Au XVe siècle la
couronne espagnole force le départ des Juifs. Au XVIe siècle la France chasse les huguenots. Au XVIIe et XVIIIe siècle la couronne britannique pousse les protestants dissidents à sétablir dans les nouvelles colonies. Plusieurs pays en développement ont forcé le départ des personnes appartenant à une minorité ethnique. Cest le cas des Chinois au Vietnam, des Indiens et Pakistanais en Afrique de lEst, des Tamils au Sri Lanka, des Bahaïs en Iran, des Kurdes en Turquie, Iran et Irak et des Chakmas au Bangladesh. WEINER M. (1990) : « Security, Stability, and International Migration, Defense and Arms Control Studies Program », Working Paper, décembre 1990, disponible sur <http://web.mit.edu/ssp/publications/working_papers/WP‐90‐2.pdf>, [Consulté : le 11 juin 2014] p. 7‐ 8. 74 Les grecs furent les premiers à exiler les dissidents. Les gouvernements autoritaires contemporains forcent le départ des dissidents comme une alternative à lemprisonnement. WEINER M. (1990) : cité note 74, pp. 8 à 9. 75 WEINER M. (1990) : cité note 74, p. 9.
sociale, soit par létablissement de lois qui incitent à la discrimination ou à la violence, soit par lomission de protéger les citoyens victimes de cette violence ou discrimination. B. Migration volontaire La migration volontaire inclut les déplacements motivés par le désir personnel daméliorer les conditions de vie dans le pays dorigine ou de résidence actuelle. Les raisons qui justifient cette émigration sont notamment économiques, mais incluent aussi le regroupement familial.
Cependant, le caractère volontaire de cette migration a été remis en cause par certains auteurs qui ne considèrent pas que lémigration motivée par une menace réelle à la survie constituée par une situation de pauvreté extrême puisse être caractérisée comme une migration volontaire76.
Il y a notamment quatre types de situations administratives par rapport à la migration : la résidence permanente, lautorisation de travail temporaire, le refuge ou dautres régimes de protection internationale, ainsi que limmigration non autorisée ou situation administrative irrégulière. Tous les séjours inférieurs à trois mois ne relèvent pas de limmigration. Même les étudiants ne sont pas des migrants, car leur séjour est réputé temporaire par nature.
Cependant, ces catégories sont plutôt dynamiques. De ce fait, un demandeur dasile considéré comme un immigrant sans‐papiers au moment de lentrée, peut devenir un résident de longue durée. Les résidents permanents, de leur côté, peuvent être entrés en utilisant un titre de séjour temporaire. Les étudiants peuvent changer leur statut pour celui de travailleur sils respectent certaines conditions. Et finalement, les migrants volontaires en général peuvent devenir des réfugiés du fait du changement de circonstances de leur pays dorigine ou des immigrants non autorisés sils ne réunissent plus les critères dadmission ou dépassent la validité de leurs autorisations.
76 GZESH, S. (2008): « Redefining forced migration using human rights », Migración y Desarrollo, 2008,