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CHAPITRE II : L’IMMERSION DANS UN ENVIRONNEMENT MARCHAND

I. L’atmosphère de vente

I.3. Le contrôle perçu

116 Un site web marchand présente une variété de chemins et de fonctionnalités, qui permettent aux participants de contrôler le contenu de la plate-forme commerciale et le déroulement de l’expérience (Jiang et Benbasat, 2005). En effet, la perception de contrôle pendant l’expérience en ligne, permet au consommateur de se l’approprier (Carù et Cova, 2004). La sensation de contrôle représente une « une force structurante de l’activité orientée vers le besoin de démontrer sa compétence, sa supériorité et sa maîtrise de l’environnement » (White, 1959 ; in Lunardo, 2005, p. 2). Il représente alors une composante à part entière de l’atmosphère du site marchand (Mathwick et Rigdon, 2004). Si le concept de contrôle a fait l’objet de nombreuses recherches en psychologie (e.g., Whiter, 1959), dans le contexte de l’expérience de consommation en ligne, peu d’études se sont penchées sur ce phénomène, qui nous semble primordial.

Dans le cadre de notre recherche, le contrôle de l’expérience semble jouer un rôle très important. Il constitue, en plus de l’environnement expérientiel, l’un des éléments déterminants de l’immersion. En effet, pendant la navigation, le consommateur n’a pas constamment le contrôle de l’expérience. Si le contenu expérientiel du site est diffusé de manière à satisfaire l’internaute, des risques ne doivent pas être négligés. La perte possible du bien-être psychologique en raison de l'utilisation d’un site marchand, peut très rapidement mettre fin à l’expérience de visite (Keh et Pang, 2010). Il s’agit alors de permettre à l’internaute de garder un certain pouvoir sur le déroulement de l’expérience en ligne.

I.3.1. La conceptualisation du contrôle dans les points de vente

Le concept de contrôle est habituellement rattaché à la théorie du lieu de contrôle (Rotter, 1966). Cette théorie admet que le contrôle constitue un trait de personnalité. Elle suggère que « si les individus perçoivent au cours du temps des contingences entre leurs actions et les résultats qui en découlent, cela vient renforcer leurs croyances quant à leur contrôle sur les événements (individus à lieu de contrôle interne) ; s’ils ne perçoivent aucune contingence, ils attribuent au contraire les résultats de leurs actions à une force extérieure, telle que la chance ou la fatalité (individus à lieu de contrôle externe) » (Lunardo, 2011 ; p. 5). Cette conceptualisation du contrôle se fonde sur une distinction dichotomique entre les consommateurs et ne prend pas en compte les facultés cognitives, affectives, émotionnelles et comportementales, mises à disposition par les clients pendant l’expérience de consommation.

Le contrôle est exprimé par Skinner et Guiltinan (1985) comme le pouvoir qu’exerce une fraction sur une autre. Il désigne « le point auquel une partie influence les décisions

117 stratégiques et opérationnelles d’une autre partie du canal » (p.70). La foule de faits et de connaissances qui émanent de l’expérience, ont amené les chercheurs à proposer une conceptualisation plus situationnelle du phénomène de contrôle perçu (Mathwick et Rigdon, 2004). Le contrôle constitue alors l’ensemble des convictions et des certitudes qu’un individu détient à un moment donné, dans sa capacité à effectuer des modifications, dans le sens qu’il désire et sur le contexte dans lequel il se trouve (Averill, 1973). Nous parlons alors de contrôle perçu qui exprime, l’illusion de l’influence que peut avoir l’individu sur son environnement.

Des chercheurs, en psychologie environnementale, suggèrent une approche différente aux deux précédentes. Ils proposent, que le contrôle doit davantage être assigné à une réaction qu’à une action (Mehrabian et Russell, 1974) appelé domination. Hui et Bateson (1991), définissent le contrôle du consommateur comme « le degré de pouvoir et d’influence sur la spécification du service, sa réalisation, et le résultat » (p.816). Il constitue une réaction affective, associé à une émotion traduisant chez le consommateur, le sentiment d’être capable d’influencer ou de contrôler la situation dans laquelle il se trouve (Lunardo, 2011). Plus la sensation de maîtrise est importante, plus le consommateur s’aperçoit que l’environnement est sensible à ses actions.

La majorité des recherches démontre que la perception de contrôle pendant l’expérience de magasinage a une influence positive sur les réactions subjectives de l’individu (e.g., Lunardo, 2011), qu’elles soient émotionnelles, affectives et cognitives. Il s’agit notamment du plaisir (Mathwick et Rigdon, 2004), du flow (Hoffman et Novak, 2009) et de l’immersion (Csikszentmihalyi, 1990). Par ailleurs, Mollen et Wilson (2009) expliquent que le contrôle perçu participe à la construction de l’attention focalisée et de l’immersion. Le contrôle se retrouve alors, équivalent à l’une des composantes expérientielles du point de vente, puisque le niveau de contrôle est lié aux compétences de l’individu, de façon à avoir le sentiment de pouvoir atteindre aisément son objectif. Le sentiment de contrôle perçu engendre alors des expériences subjectives, qui constituent l’expérience d’immersion et les états connexes à l'esprit du client (Hoffmann et Novak, 1996).

I.3.2. La conceptualisation du contrôle perçu pendant l’expérience d’immersion en ligne

Pendant la navigation, l’accès à l’expérience d’immersion en ligne se fait par l’intermédiaire d’un média qui permet le contrôle de la visite. Toutefois, si le sentiment de

118 contrôle est perdu, la visite perd de sa valeur et le degré d’acceptation de l’utilisateur faibli. Le contrôle en ligne se réfère aux capacités des utilisateurs à personnaliser et choisir le contenu du site Web pour atteindre leurs objectifs (Ariely, 2000).

Jiang et Benbasat (2005) parlent plutôt de contrôle virtuel, relatif au contrôle recherché par les individus dans les environnements de réalité virtuelle. Ils identifient deux dimensions : le contrôle visuel et le contrôle fonctionnel. Le contrôle visuel permet aux consommateurs de manipuler des images de produits sur le Web, pour voir les produits sous différents angles ; et le contrôle fonctionnel permet aux consommateurs d'explorer et de découvrir les caractéristiques et les différentes fonctions du site. La recherche montre que le contrôle (visuel et / ou fonctionnel) permet aux consommateurs l’accès à l’immersion totale.

Par ailleurs, Wann et Mon-Williams (1996), évoquent la manipulation directe, généralement associée à une représentation graphique, permettant aux utilisateurs de contrôler directement les objets de leur intérêt. Dans une interface de réalité virtuelle, la manipulation du contenu peut avoir les mêmes effets et engendrer les mêmes sensations qu’une manipulation réelle (Hutchins et al., 1986).

Dans notre recherche, nous concentrons davantage sur la capacité des consommateurs, à contrôler et interagir facilement avec l’environnement virtuel. Le contrôle constitue la capacité de l'utilisateur à choisir le contenu et la forme de l’environnement virtuel, à travers la possibilité de tourner, d’agrandir ou rétrécir le produit, et l’aptitude de l’environnement virtuel à répondre adéquatement aux ordres du client (Jiang et Benbasat, 2005 ; Algharabat et Dennis, 2010). Lorsque l’internaute a le sentiment de contrôler l’atmosphère marchande, cela lui donne une impression de liberté, propice à l’immersion. En effet, le contrôle perçu pendant l’expérience d’immersion, représente l’impression d’avoir le choix dans la sélection des résultats ou des objectifs (Averill 1973). Ce contrôle représente un facteur important dans la production d’expériences convaincantes en ligne (Ghani et Deshpande 1994). En effet, une variété de contextes montre que, les utilisateurs du web ont tendance à se sentir et se comporter de façon plus positive lorsqu’ils perçoivent plus de contrôle sur leur environnement (Mathwick et Rigdon, 2004).

Dans le cas contraire, c'est-à-dire en l’absence de contrôle, le client a l’impression d’être bombardé, baladé d’un point à un autre, la qualité de l’expérience de visite se dégrade rapidement. Un sentiment de frustration peut même surgir. Le client est alors amené à quitter le site ou à s’acharner, deux résultats qui ne sont pas souhaitables pour le marchand. Les concepteurs du site doivent donc impérativement éviter d’enfermer les visiteurs dans des séquences où ils perdraient le contrôle de leur navigation (Jiang et Benbasat, 2005). Il s’agit

119 donc, de proposer au client un niveau de contrôle conciliable avec ses compétences (Jiang et Benbasat, 2004).

Dans la définition du contrôle perçu en ligne, Mathwick et Rigdon (2004) ajoutent la notion de perception de choix conduit à l’amélioration du bien-être de l’internaute, alors que son absence amplifie les effets néfastes de la perception d’un défi insurmontable. Le contrôle semble fonctionner comme une condition préalable au comportement d’approche des consommateurs. Favorisant l'exploration et la manipulation des environnements marchands sur Internet (Ward et Barnes, 2001). Par exemple, dans le domaine des jeux en ligne, le sentiment de contrôle constitue l'une des explications de l’immersion (Lepper et Malone, 1987). Il s’agit d’une variable explicative de l’accès à l’expérience d’immersion en ligne. Ce qui conforte l’idée de Carù et Cova (2006b), qui stipulent que la stimulation des sens à travers l’environnement expérientiel, ne suffit pas à réaliser l’immersion.

En conséquence, la spécification et la réalisation du contrôle sont représentées par une offre qui permet au consommateur de participer à une expérience, au sein de laquelle il peut modifier lui-même certains éléments constitutifs, parmi un ensemble de modules de choix préétabli par l’entreprise ; et de se procurer le produit co-construit (Merle, Chandon et Roux, 2008). Elle permet donc au consommateur de choisir son parcours pendant la navigation (la spécification) tout en participant pleinement à l’expérience (la réalisation).

Cette littérature suggère que le contrôle est associé à l’expérience optimale et fonctionne comme un mécanisme, qui permet aux individus de s'adapter à des tâches difficiles (Karasek et Theorell, 1990 ; Jiang et Benbasat, 2005). Lorsque le contrôle est atteint, les ressources attentionnelles qui ont été détournées pour faire face à la surexcitation ou à la surcharge d'informations, peuvent être libérées pour répondre aux défis de l’atmosphère marchande en ligne. Le contrôle semble fonctionner comme une condition essentielle de la maîtrise de l'enjeu qui induit le plaisir de la visite ou l'état d'anxiété (Webster et Ho, 1997 ; Mathwick et Rigdon, 2004 ; Jiang et Benbasat, 2005). En conséquence, ce sentiment peut dominer un défi accru. En revanche, un manque de contrôle est associée à de faibles niveaux de difficulté, impliquant simplement « une acceptation passive de ce qui arrive » (Ward et Barnes, 2001, p. 140). D’où le rôle crucial du contrôle perçu dans la formation des réactions affectives, émotionnelles et cognitives, pendant l’expérience d’immersion en ligne.

120 La première section de ce chapitre, met en évidence les différents facteurs qui pourraient influencer l’expérience d’immersion en ligne. Il s’agit des composantes expérientielles du site.

En effet, les composantes expérientielles d’un site marchand jouent un rôle essentiel pendant l’expérience de visite en ligne. Ces éléments de la plate-forme commerciale, associées aux compétences des internautes, permettent l’interaction dans les contextes virtuels et déclenchent les dimensions cognitives, sensorielles, sociales et affectives, propres à l’état d’immersion.

Si les attributs de l’atmosphère des sites web marchands ont fait l’objet de nombreuses études, notre y recherche associe l’importance de l’outil de contrôle du site comme condition à l’expérience immersive. Les internautes cherchent à maximiser le contrôle pendant le déroulement de la visite, pour se sentir libres pendant la tâche qu’ils effectuent. Plus le contrôle est fortement perçu, plus l’accès à l’immersion est favorisé, puisqu’il contribue fortement à l’absorption cognitive et à l’attention.

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