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CHAPITRE II : L’IMMERSION DANS UN ENVIRONNEMENT MARCHAND

II. La réalité virtuelle

II.1. Définitions de la réalité virtuelle

6 Pour les spécialistes de la réalité virtuelle (Wexelblat, 1993 in Suh et Lee, 2005, p. 675), un site marchand ne constitue pas un dispositif totalement immersif à proprement parler, dans le sens où le visiteur ne dispose pas d’un équipement particulier, comme un casque et des gants, par exemple. L’usage du terme « immersif » au sens technique, pour désigner un site où un personnage qui évolue dans un décor réel et qui s’adresse directement au visiteur en lui parlant, est donc, d’une certaine manière, quelque peu abusif. Nous l’employons ici pour faire un parallèle avec l’expérience immersive que l’on trouve dans les recherches en marketing (e.g., Carù et Cova, 2003 ; Fornerino, Helme-Guizon et Gotteland, 2008).

122 Lorsque nous avons entamé nos recherches dans le domaine de la réalité virtuelle, nous avons rencontré une multitude de termes utilisés métaphoriquement pour désigner la réalité virtuelle (i.e., « environnements virtuels » ; « mondes artificiels » ; « mondes virtuels » ; « réalité artificielle » ; « environnements 3D » ou encore d’ « expérience synthétique »). Par ailleurs, les définitions de ce concept sont abondantes, du fait que le terme « Réalité Virtuelle » décrit différentes applications issues de disciplines multiples (Fuchs et al., 2006).

Les premiers travaux sur la Réalité Virtuelle se sont orientés vers la conception et la réalisation d’interfaces comportementales favorisant l’immersion de l’utilisateur et ses capacités d’interaction dans l’univers virtuel. La réalité virtuelle est assimilée à « un domaine scientifique et technique exploitant l’informatique et des interfaces comportementales en vue de simuler dans un monde virtuel le comportement d’entités en trois dimensions, qui sont en interaction en temps réel entre elles et avec un ou plusieurs utilisateurs en immersion-pseudo- naturelle » (Cadoz, 1994). Ces interfaces ont pour objectif d’amplifier le sentiment de présence de l’utilisateur au sein des univers virtuels (e.g., Slater et al., 1994 ; Schloerb, 1995 ; Witmer et Singer, 1998 ; Morineau, 2000). Elles viennent éclairer les réflexions philosophiques sur le sentiment d’ubiquité ou la capacité d’exister en plusieurs lieux simultanément (e.g., Flach et Holden 1998 ; Zahorik et Jenison 1998).

La réalité virtuelle est un moyen pour les humains de visualiser, manipuler et interagir avec des ordinateurs et des données extrêmement complexes (Aukstakalnis et Blatner, 1992). Il s’agit d’une simulation électronique d'environnements irréels, expérimentés via des casques de réalité virtuelle et des combinaisons câblés permettant à l'utilisateur d'interagir dans des situations tridimensionnelles réalistes (Coates, 1992).

Par ailleurs, la réalité virtuelle est considérée comme l’illusion de la participation à un environnement synthétique plus que l’observation extérieure d’un environnement. Elle permet de naviguer et voir un monde en trois dimensions. La réalité virtuelle est un clone de la réalité physique (Von Schweber et Von Schweber, 1995) où le concept d’expérience est central. Il s’agit de l’expérience d’être dans un monde virtuel (ou dans un lieu distant) sans y être physiquement (Rheingold, 1993). Cette expérience extraordinaire engendre l’immersion grâce à des outils de stimulation multi-sensorielle (Earnshaw et al., 1993). Les utilisateurs portent des casques-écran munis de capteurs de position, voient des images stéréoscopiques, entendent un son 3D et explorent un monde interactif en trois dimensions (Pimentel et Texeira, 1993). Progressivement, l’apparition de la réalité virtuelle a permis de créer des

123 environnements en trois dimensions. Dès lors, l’interaction 2D devrait laisser la place à une interaction dite 3D, plus adaptée aux possibilités offertes par ces nouveaux environnements.

Quéau (1993) place la technologie au centre de sa réflexion. Il définit la réalité virtuelle à travers la notion de monde virtuel : C’est « une base de données graphique interactive, explorable et visualisable en temps réel sous forme d’images de synthèse tridimensionnelles de façon à donner le sentiment d’une immersion dans l’image ». Quant à Slater, Usoh et Steed (1994), se tournent davantage vers les conditions de satisfaction des pulsions qui tiennent compte des exigences du réel. En effet, ils définissent la réalité virtuelle comme une réalité réelle ou simulée. Dans cette réalité le « Moi » croit qu’il est dans un environnement autre que celui dans lequel se trouve le corps physique. Il y perçoit une information sensorielle corrélée avec la capacité de sentir la position, l’orientation et le mouvement des parties de son propre corps dans cet environnement. Il s’agit d’ « un univers de modèles (au sens scientifique) au sein duquel tout se passe comme si les modèles étaient réels (au sens de persistant et résistant) parce qu’ils proposent simultanément la triple médiation des sens, de l’action et de l’esprit » (Tisseau, 2001).

La réalité virtuelle peut être assimilée à un domaine scientifique et technique au sens large. Ce champ exploite l’informatique et les interfaces comportementales dans le but de simuler dans un monde virtuel le comportement d’un ou plusieurs utilisateurs en interaction avec des objets en trois dimensions. Cette interaction a lieu en immersion pseudo-naturelle par l’intermédiaire de canaux sensori-moteurs (Fuchs, 2003).

Toutes ces définitions se rejoignent sur le fait que l’individu n’est plus passif au sein du système créé. En effet, l’utilisateur peut interrompre l’expérience à tout moment (Tisseau, 2004) et peut relancer la simulation là où il l’avait arrêtée. Il peut ainsi perturber le système en modifiant son chemin (ou son état), tester un comportement particulier ou encore expérimenter une idée. Les dispositifs de réalité virtuelle permettent d’observer les conséquences des changements effectués sur un système en fonctionnement.

Pendant l’expérience, l’individu s’engage dans l’environnement virtuel (Witmer et Singer, 1998). Il n’est plus sollicité par aucune action attentionnelle en dehors de l’activité elle-même (Agarwal et Karahanna, 2000). L’individu est impliqué, absorbé et totalement engagé dans l’expérience (Lombard et Ditton, 1997). Les technologies de la réalité virtuelle propulsent les utilisateurs au rang d’acteurs. La stimulation des sens provoque la sensation d’être plongé dans un univers virtuel tout en étant isolé du monde réel.

La multiplicité des définitions de la réalité virtuelle est due au nombre important des applications correspondantes. Toutefois, l’objectif commun de ces définitions est de

124 « permettre à une personne (ou à plusieurs) une activité sensori-motrice et cognitive dans un monde artificiel, créé numériquement, qui peut être imaginaire, symbolique ou une simulation de certains aspects du monde réel » (Fuchs et al., 2006). Il s’agit de s’extraire de la réalité physique pour changer virtuellement de temps, de lieu et/ou de type d’interaction avec un environnement simulant la réalité (Fuchs, 1996).