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Langue ou variété langagière dominante dans les instances de socialisation aussi variées que la crèche,

CHAPITRE II : concepts pour une éducation au plurilinguisme en contexte scolaire

51 Langue ou variété langagière dominante dans les instances de socialisation aussi variées que la crèche,

l’école, les centres aérés, clubs sportifs, etc. Elle vise à qualifier du point de vue de l’enfant, toute la langue ou variété langagière utilisée hors du cadre familial dans la mesure où on considère que le cadre familial, ou assimilé représente le lieu de la première socialisation.

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Voir pour cette dimension notamment Byram (2009)

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Voir pour un approfondissement Coste (2010b)

54 Qu’il « s’agisse des langues enseignées (L1, L2, langue d’origine, langue vivante étrangère, etc.) ou des

langues non-enseignées comme matières du programme et ce, quel que soit leur statut (langue officielle, régionale, de migration, minoritaire, etc.)

concourent, en offrant l’occasion à l’enfant de faire à l’école l’expérience de la diversité, à fonder une identité ouverte à la pluralité des langues et des cultures.

Elle offre un changement de perspective méthodologique pour

l’enseignement/apprentissage des langues, et propose des outils méthodologiques qui permettent une prise en compte des caractéristiques sociolinguistiques et socioculturelles des contextes variés.

Pour paraphraser Lőrincz et De Pietro (2011), il ne s’agit pas seulement de tolérer la diversité sociale et culturelle à l’école, ni même de la prendre en compte à des fins folkloriques lors des fêtes d’écoles, mais bien d’en faire un socle pour la construction de savoirs parce que « [la] valorisation des langues apprises et parlées en dehors de l’école est une nécessité pédagogique et éducative. » (Conseil de l’Europe 2010)

Il s’agit alors d’accorder à l’enfant le droit d’être d’accueilli à l’école dans tout ce qu’il est, en lui aménageant des moments d’apprentissage où il peut composer avec, s’appuyer sur, les langues de son patrimoine pour les mettre au service du développement de savoirs, savoir-faire et savoir-être, comme autant d’outils à sa construction en tant qu’être social dans un monde en voie de créolisation55

.

55« J’appelle créolisation la rencontre, l’interférence, le choc, les harmonies et les disharmonies entre les

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CHAPITRE III : croisement

Stratégie méthodologique pour une mise en synergie des langues et des littératies

« Véhiculaire ou non, une langue qui ne se hasarde pas au trouble du contact des cultures, qui ne s’engage pas à l’ardente réflexibilité d’une relation paritaire aux autres langues, me paraît, peut-être à long terme, condamnée à l’appauvrissement réel »

(Glissant, Poétique de la relation,1990, 126) La langue de scolarisation qui joue un rôle central dans la réussite scolaire et dans l’environnement social est aussi le lieu où se cristallisent certaines des tensions de l’école.

Cette langue, à la fois matière enseignée et médium des apprentissages dans d’autres matières, est également la langue dans laquelle s’opère pour la plupart des élèves l’entrée dans l’apprentissage formel de l’écrit. « Mais c’est aussi la langue qui, en raison notamment de la normalisation et de la standardisation formelles associées à l’écrit partagé, est non seulement posée comme langue commune, celle de la communauté scolaire dans son fonctionnement ordinaire, mais aussi (re) présentée comme une et unifiée. » (Castelloti, Coste et Duverger, 2008, p10)

Ce statut de langue, symbole et garante de cohésion sociale au sein d’un système réputé unifiant et homogène, donne lieu à des pratiques normatives qui peuvent conduire à placer et maintenir dans des formes d’insécurité linguistique les élèves les plus en difficulté ou issus de l’immigration.

Des tensions donc, liées à la fois à une évolution des contextes sociaux et politiques en matière d’éducation qui font que l’école doit désormais composer avec :

- une reconnaissance du droit des élèves à parler une autre langue que la langue majeure de scolarisation (langue minoritaire, régionale, de migration),

- une prise en considération de ces autres variétés et de ces autres langues qu’elle n’a pas toujours vocation à enseigner,

- la promotion, via le conseil de l’Europe, de la diversité linguistique et culturelle comme moyen pour approfondir la compréhension mutuelle, consolider la citoyenneté démocratique et maintenir la cohésion sociale.

Voilà matière à contrarier, mais aussi à raviver les bons vieux arguments en faveur de la nécessité d’une maîtrise par tous les élèves (surtout les plus en difficulté) d’une langue commune unique et normée comme remède ultime contre l’échec scolaire et l’unique voie vers la construction d’identités stables menant à une bonne intégration sociale. En plaçant donc au cœur d’une éducation plurilingue et interculturelle la langue de scolarisation (voir schéma ci-dessous), pivot de toute éducation langagière, on entend prendre en considération ces tensions en reconnaissant la maîtrise de cette langue comme objectif premier de tout projet éducatif tout en affirmant l’intérêt didactique et sociétal à s’appuyer sur la diversité des langues et cultures pour construire les savoirs et le vivre ensemble, y compris dans et pour l’apprentissage/acquisition d’une langue étrangère spécifique.

Légende :

- l’apprenant et les langues présentes à école : toutes les variétés linguistiques susceptibles d’être utilisées par l’élève à l’école (y compris dans la cour de récréation)

-langue de scolarisation : langue, notamment nationale, dans laquelle se font les apprentissages scolaires (savoirs, notions, raisonnements, comportements…)

- langues régionales ou minoritaires et de la migration : variétés prises en compte dans l’école, valorisées, ou vecteurs d’enseignement d’autres matières, ou encore objets d’enseignement

- langues étrangères : langues autres figurant comme matières scolaires du programme Figure 1: langues dans l’éducation/langues pour l’éducation (extrait de Cavalli et al.2009, 10)

Langues régionales, minoritaires et de la

migration

LANGUE(S) DE

SCOLARISATION vivantes et classiques Langues étrangères-

Langue comme matière

Langue(s) des autres matières

L’apprenant et les langues présentes à l’école

76 Cette triple articulation : langue de scolarisation, autre langue enseignée et autres dimensions plurilingues et pluriculturelles (Coste 2010b), « désanctuarise » la langue majeure d’enseignement et ouvre de nouvelles perspectives didactiques à son enseignement, « Le défi est dès lors de faire en sorte que tout ce qui se pratique en dehors et à côté de la langue de scolarisation bénéficie à cette dernière et, inversement, que la manière dont celle-ci est travaillée et développée permette aussi l’ouverture sur la pluralité. » (Ibid., 18)

Une fois ces quelques principes établis, se pose la question des stratégies didactiques à mettre en œuvre dans le cadre d’une éducation plurilingue et interculturelle, question également au centre des projets tels que Langues dans l’éducation/Langues pour l’éducation (Cavalli et al. 2009) ou celui de l’ADEB (Castellotti et al.2008), déjà cité,

dont les auteurs s’accordent à considérer comme indispensable le rôle des approches plurielles.

Notre conception se situe dans une démarche liée à une éducation aux langues spécifiquement centrée sur l’entrée dans l’écrit. Elle s’appuie sur les compétences développées par les enfants dans le cadre ce que nous appelons les pratiques de littératie informelles56 dont nous estimons la reconnaissance comme susceptible de faciliter l’entrée dans l’écrit d’abord, puis l’implication de l’enfant dans l’apprentissage formel de la lecture en langue de solarisation. L’objectif étant de ménager, pour l’enfant « allophone » des moments de rencontre avec l’écrit dans la langue familiale, de manière à ce que les spécificités de l’écrit lui soient données à voir, percevoir et à entendre, aussi à travers la langue avec laquelle il est le plus familier. Mais également, de faire vivre aux enfants « autochtones » une expérience de l’altérité des écrits dans plusieurs langues (la langue de scolarisation, la langue étrangère enseignée et les langues des enfants de la classe) selon la diversité linguistique représentée dans la classe de manière à favoriser un regard distancié sur la langue et son fonctionnement.