• Aucun résultat trouvé

La « tempête » des deux guerres mondiales

Chapitre 1.1 : États et frontières en Europe : définition, évolution moderne

1.1.5 La « tempête » des deux guerres mondiales

La constitution de la Triple alliance autour de l’Empire allemand a contribué à la fin du

19

ième

siècle et dans les premières années du 20

ième

siècle au dialogue des puissances exclues.

Le Royaume-Uni, échaudé par la politique d’armement naval allemand, fait des concessions

diplomatiques en se rapprochant de la France malgré de nombreuses tensions coloniales.

L’Empire russe et la France se sont rapprochés diplomatiquement depuis 1892 en constituant

l’Alliance franco-russe face à la Triplice. Malgré les tentatives allemandes de ménager ces trois

puissances et d’éviter leur rapprochement, Russes et Brittaniques soldent diplomatiquement

leurs différends et permettent la fondation d’une Triple-Entente entre le Royaume-Uni,

l’Empire russe et la France républicaine en 1907 (Milza, 1995). Près d’un siècle après le congrès

de Vienne, le panorama politique et géopolitique européen est transformé et deux puissants

blocs s’opposent.

Du point de vue des frontières politiques et des souverainetés, de nombreux contentieux

territoriaux sont en suspens et agitent les opinions publiques. L’annexion de l’Alsace et de la

Lorraine par l’Empire allemand est un puissant catalyseur nationaliste en France et en

Allemagne. À l’Est, l’Empire russe a échoué face au Japon dans ses tentatives coloniales en

Mandchourie et sur les îles Sakhaline ; l’Empire russe a en outre dû faire face à une révolution

en 1905 : il sort de ces deux évènements épuisé et affaibli. En 1908, le parti nationaliste et

réformateur des Jeunes-Turcs renverse le sultanat ottoman.

De 1912 à 1913, les guerres balkaniques éclatent, au bénéfice de la faiblesse ottomane

et de la reprise de vigueur russe. La diplomatie russe encourage l’alliance de la Serbie, de la

Bulgarie et de la Grèce dans une ligue, qui déclare la guerre à l’Empire ottoman. Chacun des

alliés théoriques se livre dans les faits à une course de reconquête territoriale suivant ses propres

ambitions régionales. La Bulgarie, se sentant lésée territorialement des fruits de cette première

campagne, déclenchera une nouvelle offensive militaire cette fois contre les territoires

convoités acquis par les Serbes et Grecs. Cette deuxième phase du conflit sera stoppée net par

l’intervention roumaine et turque. Humilié, l’État bulgare rejoindra la Triple alliance (Milza,

1995).

En 1913, seule une poignée d’États du continent ne s’affilie pas à cette implacable

logique des blocs. Le fort clivage géopolitique des blocs préfigure l’embrasement de 1914.

70

L’Europe en 1913, par Allix PIOT, Francetv éducation

L’historiographie courante retient souvent l’assassinat de l’archiduc et héritier de

l’Empire austro-hongrois François-Ferdinand à Sarajevo en juin 1914 par un nationaliste

bosniaque lié aux services serbes comme l’élément déclencheur de la Première Guerre

mondiale. L’assassinat à en effet pour conséquence l’ultimatum austro-hongrois contre la

Serbie, suivi de la déclaration de guerre qui mettra en mouvement les jeux d’alliance structurant

la logique des blocs opposant Triple alliance et Triple-Entente et entraînera l’Europe et le

monde dans la Première Guerre mondiale. Mais il nous semble nécessaire de préciser que cet

évènement est une cause parmi d’autres d’une dynamique socio-historique plus large et qu’il

convient de prendre en compte le contexte général, ce qui amènerait à penser que si l’assassinat

n’avait pas eu lieu, un autre évènement aurait déclenché le conflit mondial, et cela pour trois

raisons essentielles :

Premièrement, du fait de la situation géopolitique et diplomatique, extrêmement tendue

et bloquée, comme nous l’avons décrite au fil des pages précédentes. Un conflit militaire était

jugé inévitable par les diplomaties française et allemande (Milza, 1995).

71

Deuxièmement, du fait du poids des acteurs patronaux industriels

48

dans les affaires

militaires et politiques des États, encourageant la course à l’armement et les choix bellicistes

49

.

Troisièmement, la prégnance dans les élites politiques et civiles des opinions

nationalistes et bellicistes, notamment en France et en Allemagne, et la mise en échec des

initiatives pacifistes des tendances socialistes et révolutionnaires ouvrières.

Nous ne reviendrons pas sur la chronologie précise de la Première Guerre mondiale

50

.

De 1914 à 1918, les grandes puissances s’affrontent violemment dans ce qui sera le premier

conflit à véritable intensité industrielle (Goya, 2004). « Les violences de combat qui se sont

déployées lors de la Grande Guerre ont généré, décidément, un « acquis de brutalité »

particulièrement lourd, dont le poids s’est fait sentir bien au-delà de l’armistice de 1918 »

(Audoin-Rouzeau, 2008 : 265). L’armistice est signé dans une Europe en ruine, au prix

d’environ dix millions de victimes militaires mais aussi civiles, créant une rupture

démographique dans les sociétés. Du point de vue politique et géopolitique, quatre éléments

majeurs émergent du conflit :

- La seconde Révolution russe de 1917, vers la fondation de l’Union des républiques

Socialistes Soviétiques (URSS) en 1922 : le choc de la Première Guerre mondiale

accélère la contestation sociale interne à l’Empire russe et mène à une seconde

révolution 12 ans après 1905. Le tsar est destitué. Les tendances révolutionnaires

modérées, dont Kerenski est l’homme fort, dirigent un gouvernement provisoire qui

continue l’engagement russe dans la guerre. Les tendances bolcheviks menées par

Lénine renversent Kerenski avec le soutien populaire et pour mot d’ordre « la Paix, le

Pain et la Terre». La Russie se retire du conflit mondial et une période d’incertitude de

4 ans s’ouvre à l’Est en pleine guerre mondiale. La guerre civile fait rage sur tout le

territoire russe entre troupes blanches pro-tsaristes et troupes révolutionnaires, mais

également entre les diverses forces révolutionnaires (Ferro, 1997). Les Blancs

bénéficieront de l’appui allemand, austro-hongrois, ottoman, japonais, britannique et

français, dans une alliance objective anti-communiste en parallèle à la poursuite du

conflit mondial. Au terme d’années terribles, un armistice est finalement signé entre la

Russie révolutionnaire et les empires centraux de la Triple alliance en 1918 à

Brest-Litovsk définissant les frontières. Mais les vainqueurs de l’Entente poursuivront

48 Nous citerons notamment les empires industriels Krupp et Thyssen en Allemagne, et le Comité des forges ou

celui des houillères en France, avec les empires industriels Renault, Schneider etc.

49 On reviendra sur ce point aux commentaires et sources citées page 68

50 Pour une chronologie cartographiée, voir Buffetaut, 2005. Voir également Becker, 2013. On signalera aussi dans un registre moins académique mais particulièrement stimulant en termes d’archives colorisées la série documentaire Apocalypse, Première Guerre mondiale (Clarke et Costelle, 2014).

72

jusqu’en 1920 les hostilités face à l’Armée rouge créée en 1918 sans parvenir à démettre

le nouveau pouvoir révolutionnaire. En 1922, l’URSS est fondée, tournant décisif dans

l’histoire du 20

ième

siècle (Hobsbawn, 1999).

- La dislocation des empires vaincus de la Triple allianceet la reformulation frontalière :

un nouvel ordre européen est formulé lors du traité de Versailles de 1919. Les territoires

des empires centraux de la Triple alliance vaincue sont démantelés. Guillaume II

abdique et le pays s’enfonce dans une importante crise politique, c’est la fin du Reich,

c’est la fin du règne des Habsbourg également et du sultanat ottoman. Les vainqueurs

annexent les territoires revendiqués, et de nouveaux États souverains émergent sur les

ruines des empires

51

: la carte politique est profondément redessinée en Europe et dans

le Moyen-Orient. Les vaincus sont soumis à d’importantes sanctions économiques,

notamment l’Allemagne qui voit sa puissance industrielle restreinte (Milza, 1995).

- Engagement des États-Unis, émergence de nouveaux pôles de puissance et prémices

décoloniales : le pouvoir nord-américain est longtemps resté neutre pendant le conflit,

se limitant à un engagement commercial prolifique, notamment au bénéfice de ses

partenaires britanniques et français à qui il assure des prêts et la livraison de ressources

et de marchandises. Il s’engage dans la Première Guerre mondiale aux côtés de la

Triple-Entente à partir de 1917 quand l’Allemagne engage ses sous-marins dans le torpillage

systématique des navires. Ce premier interventionnisme économique puis militaire et

diplomatique confirme les États-Unis comme puissance mondiale. En parallèle, le Japon

confirme sa place de puissance régionale en Asie. La Première Guerre mondiale

confirme l’émergence de nouveaux pôles de puissance extra-européens, la période de

l’hégémonie européenne est close. Dans les colonies des puissances européennes, des

mouvements politiques autonomistes, anticoloniaux et indépendantistes émergent

lentement (Milza, 1995).

- La création de la Société des Nations (SDN) : lors du traité de Versailles, l’urgence pour

les puissances victorieuses du conflit est de rétablir dans le cadre existant du système

des États souverains un ordre international stable. Les diplomates s’engagent dans une

51 Au compte des nouveaux États il faut citer la Finlande, la Pologne, la Tchécoslovaquie, la Croatie. La France se réapproprie l’Alsace et la Lorraine. L’Italie, qui a renversé son alliance pendant la guerre, arrache le Trentin de la tutelle austro-hongroise. La Roumanie annexe de larges territoires frontaliers. L’Empire ottoman s’effondre, donnant naissance au territoire turc moderne. Le reste des territoires ottomans du Moyen-Orient est partagé entre la France et le Royaume-Uni.

73

voie nouvelle en réfléchissant à un instrument d’équilibre et d’arbitrage international

permanent et conjoint. Ces efforts aboutiront à la première tentative historique de

construire une institution internationale où seraient présentes les représentations

diplomatiques de l’ensemble des États, visant à favoriser et encadrer les échanges et

tractations diplomatiques pour éviter les conflits bilatéraux et maintenir une paix

internationale et une sécurité collective durable (Marbeau, 2001). Les États-Unis du

président Wilson en seront les principaux promoteurs : « Il faut qu’une association

générale des nations soit constituée en vertu de conventions formelles ayant pour objet

d’offrir des garanties mutuelles d’indépendance politique et d’intégrité territoriale aux

petits comme aux grands États » (Becker, 2002 : 91) soutient-il dès 1919. La France et

le Royaume-Uni vont nuancer le projet américain, au nom de l’indépendance de leurs

intérêts géopolitiques respectifs. Le projet prendra néanmoins forme mais avec des

ambitions plus mesurées. La SDN ne sera dotée d’aucune force militaire propre. De

plus, les mesures contraignantes que les États siégeant dans la SDN pourront exercer

envers un autre État seront limitées à des sanctions économiques. Les sanctions

militaires nécessiteraient l’unanimité du conseil et les interventions ne seraient l’objet

que de « recommandations facultatives ». La Société des Nations naîtra en 1920 de ce

compromis. Le siège sera localisé à Genève, en Suisse, à tradition neutre depuis le

Congrès de Vienne. La SDN formalise diplomatiquement l’avènement d’un monde

multilatéral, et l’institutionnalisation des relations internationales (Marbeau, 2017).

Dans l’immédiat après-guerre la géographie politique européenne est donc profondément

remaniée et les gouvernements doivent faire face à une vague de grèves et de tentatives

révolutionnaires, comme autant d’échos à la révolution russe et aux rébellions et fraternisations

sur le front. La crainte d’un basculement communiste s’empare des élites des pays concernés.

74

La nouvelle carte de l’Europe à l’issue des traités de paix: nouvelles frontières, territoires contestés et vague révolutionnaire.

Entre 1918 et 1920, l’Italie

52

, la Hongrie

53

et l’Allemagne

54

sont confrontées à des

grèves générales sérieuses et à des tentatives révolutionnaires, quand des tentatives d’agitations

sociales initiées par les socialistes et communistes échouent en France, au Royaume-Uni, en

Pologne, en Bulgarie, mais aussi aux États-Unis. Cette phase de luttes sociales doit autant du

chaos social et politique de l’après-guerre que de l’élan créé par la révolution russe et la

fondation du Komintern en URSS

55

. Face au Biennio Rosso en Italie, à la révolution spartakiste

en Allemagne et à la république des conseils en Hongrie, les gouvernements et le patronat ont

recours à des milices d’anciens combattants nationalistes d’extrême-droite pour contenir et

52 De grandes grèves ouvrières et paysannes secouent les régions industrielles du Nord et la plaine du Pô. Voir notamment Gianinazzi, 2006.

53 Les forces communistes hongroises tentent de copier les soviets russes dans le chaos qui suit la dislocation austro-hongroise. L’intervention de milices appuyée par les États voisins mettent fin à la tentative. Voir notamment Siklos, 1969.

54 Comme en Hongrie, une tentative révolutionnaire communiste est menée par la frange la plus radicale de l’ancien parti social-démocrate allemand. Les corps francs balayent les forces révolutionnaires et permettent l’installation de la république de Weimar. Voir Broué, 1971.

75

réprimer les tentatives révolutionnaires rouges

56

: le poids décisif que prennent les milices et

corps francs comme remparts anticommunistes mènera leurs leaders au pouvoirs, comme pour

Mussolini en Italie, Horthy en Hongrie, quand Hitler manque sa tentative de putsch en Bavière

en 1923. L’élan fasciste italien inspirera les décennies suivantes toute l’extrême-droite

européenne et les régimes autoritaires. Ligues, partis, milices ou corps francs deviennent des

acteurs politiques de première importance dans toute l’Europe, à l’exemple des Croix-de-Feu

en France (Soucy, 2004).

Malgré ces évènements dans les vies politiques internes des États, les relations

internationales connaissent une brève détente dans la première décennie de

l’entre-deux-guerres, dont la SDN comme forum international est en partie l’artisan (Milza, 1995). Le point

de tension diplomatique le plus brûlant reste la question des réparations de guerre qui

maintiennent une forte rivalité franco-allemande. Le Royaume-Uni et les États-Unis

interviendront diplomatiquement pour renégocier un compromis vis-à-vis des réparations de

guerre qui ne mettent pas en péril l’Allemagne de Weimar

57

. Signe que la fin des années 20 se

place sous des auspices plus apaisées en Europe, un projet d’Union fédérale européenne est

présenté en 1929 à la SDN par le Français Aristide Briand (Milza, 1995 : 100). Il porte l’idée

d’une fédération des États européens, inspirée des courants paneuropéens qui ont fleuri

après-guerre

58

. Le projet sera rejeté majoritairement aux prémices de la crise de 1929.

La crise économique de 1929 survenue aux États-Unis

59

va approfondir le marasme

social et l’instabilité politique d’une Europe dont les Américains sont devenus les principaux

créditeurs après-guerre. Cela sera d’autant plus vrai pour les pays comme l’Allemagne, dont

l’économie est grevée par les réparations faramineuses imposées par le traité de Versailles. La

crise exacerbe les tensions sociales dans le pays, et les courants communistes et

nationaux-socialistes s’affrontent pour contester le pouvoir détenu par le maréchal Hindenburg qui

maintient à flot d’une main de fer l’Allemagne de Weimar depuis 1925. Ce dernier réélu

octroiera cependant le poste de chancelier à Hitler en 1933. Le Parti national-socialiste des

travailleurs allemands (NSDAP) et son chef sont en effet largement soutenus par le patronat

allemand qui mise sur un régime autoritaire et stable pour assurer leurs intérêts

60

. Hitler

consolidera sa position à l’aide de manœuvres antiparlementaires (Bernstein et Milza, 2014),

56 Voir notamment Guerin, 2001 pour les exemples italiens et allemands, mais aussi Garrigues, 2011 pour les exemples en France.

57 Le plan Dawes et la conférence de Londres. Voir Milza, 1995.

58 Ces courants paneuropéens sont inspirés à des degrés variables d’un pacifisme par l’équilibre des États, par la volonté de construire une Europe unie face aux nouveaux acteurs internationaux et encore par l’anticommunisme (voir le livre Paneurope de Richard Coudenhove-Kalergi publié en 1923, inspiré par ces trois éléments).

59 Voir notamment Brunet et Launay, 1993.

76

de purges et exactions antisémites et d’une forte répression politique anticommuniste

(Chapoutot, 2010). À la faveur de la mort du président Hindenburg, il obtient les pleins pouvoirs

par plébiscite

61

. La république de Weimar est morte de facto assassinée par les manœuvres

nazies et ceux qui les soutinrent. L’Allemagne du troisième Reich se met en place. Ce

changement de régime et l’hégémonie du NSDAP de Hitler dans le pays va avoir des incidences

profondes pour la vie politique et diplomatique de toute l’Europe, et amorcer les prémices de

la Seconde Guerre mondiale.

Hitler va accélérer la remilitarisation allemande et la reprise en main des industries

lourdes sarroises au mépris des accords de Versailles, et entamer un rapprochement avec l’Italie

fasciste. Bien que la conception politique et géopolitique de Hitler soit exposée dans Mein

Kampf, publié en 1925, aucune entrave sérieuse ne lui sera opposée : la SDN se montre

inefficace institutionnellement pour s’opposer aux violations allemandes, et au Royaume-Uni

comme en France opinions publiques et décideurs sont pris entre une attitude de retenue et

d’apaisement

62

pour éviter une nouvelle escalade qui mènerait à la guerre mais également une

attitude de sympathie

63

pour la reconstitution d’une Allemagne forte. À partir de 1934, l’URSS

cherche à se rapprocher diplomatiquement des Britanniques et des Français et leur propose un

pacte de « sécurité collective » face à l’Allemagne, et parallèlement les partis communistes

initient des stratégies de Fronts populaires dans le champ politique comme en France ou en

Espagne pour bloquer les avancées électorales profascistes (Milza, 1995).

L’Italie fasciste et l’Allemagne hitlérienne vont avoir les mains libres pour avancer sur

leurs intérêts géopolitiques sans rencontrer d’opposition internationale, respectivement en

réamorçant l’aventure coloniale italienne et en remilitarisant la Rhénanie.

En 1936, une guerre civile éclate en Espagne

64

. La république proclamée en 1931 est

dirigée depuis quelques mois par un Front populaire coalisant les forces républicaines et

communistes : face à eux, des généraux antirépublicains lancent un putsch militaire. Ce dernier

rate et précipite les évènements : les courants communistes et anarchistes initient une révolution

sociale (Vilar, 2002). Face au Front populaire et à l’Espagne révolutionnaire, un bloc

nationaliste antirépublicain appuyé par des généraux sécessionnistes lance des offensives

armées. Les forces antirévolutionnaires seront appuyées par des troupes et du matériel italien

61 À ce sujet, voir aussi Flonneau, 2003.

62 Le terme d’ « apaisement » a fait école pour définir la position de la diplomatie britannique sur cette décennie. Voir Adams, 1993.

63 En France voir notamment Lacroix-Riz, 2009.

77

et allemand

65

. Malgré cela, le Royaume-Uni décidera une non-intervention stricte, de même

que la France du Front Populaire

66

. Seule l’URSS et les partis communistes européens

s’engagent indirectement dans le conflit en constituant les Brigades internationales pour

soutenir le camp révolutionnaire. Elles compteront jusqu’à 40.000 volontaires internationaux

(Skoutelsky, 1998). Au terme de 3 ans de guerre, le camp antirépublicain mené par le général

Franco s’impose. Pour les États italien et allemand et pour les courants profascistes, cette

victoire espagnole ressemble à un test militaire et diplomatique remporté avec succès :

l’inaction des États tiers est vérifiée (Milza, 1995). Dans ce contexte, l’Axe Rome-Berlin est

proclamé.

L’Allemagne va alors diriger ses efforts sur les voisinages convoités et mettre en

pratique une politique étrangère pangermanique. En Autriche, les tentatives de prises de pouvoir

des équivalents nazis locaux n’ont pas abouti par les urnes : le pays est annexé sans difficultés

en 1938 à l’occasion d’un déploiement militaire. Quelques mois plus tard, Hitler précise son

intention d’annexer le territoire des Sudètes, attribué à l’État tchécoslovaque suite au

démantèlement austro-hongrois, mais historiquement allemand et peuplé majoritairement de

germanophones, votant massivement pour un parti pro-annexion à l’Allemagne. Invoquant le

« droit des nations à disposer d’elles-mêmes », Hitler fait pression sur l’État tchécoslovaque

pour exiger l’annexion de la région au Reich. Il l’obtient diplomatiquement, avec l’aval des

diplomaties britanniques et françaises qui acceptent de signer les accords de Munich le 30

septembre 1938, feintant l’absence de futures velléités territoriales. Sans réaction des

puissances internationales, Hitler occupe militairement la Tchécoslovaquie en 1939 et la

partage entre le protectorat de Bohême-Moravie dirigé par le nazi Konstantin von Neurath et la

République slovaque satellite dirigée par le prêtre Jozef Tiso.

Hitler souhaite reconstruire une continuité territoriale allemande jusqu’à Dantzig, isolée

du fait du territoire polonais. L’année 1939 est décisive car elle marque la fin de la politique de

non-intervention britannique. Face aux appétits allemands à Dantzig, le Royaume-Uni rejoint

la France sur une position excluant la répétition du scénario tchécoslovaque. Les bonnes

relations franco-soviétiques de part et d’autres du territoire allemand et le réchauffement des

rapports franco-britanniques pourraient mettre en difficulté l’Axe et stopper le pangermanisme