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La simulation comme outil d’aide à la décision

une clé pour modéliser la dynamique du système éducatif 

1.3. La simulation comme outil d’aide à la décision

Cet état de fait entre en contradiction avec l’une des missions que la Communauté française a fixées pour l’enseignement : « assurer à tous les élèves des chances égales d’émancipation sociale » (Communauté française de Belgique, 1997). Il importe donc pour les autorités d’intégrer, dans leur gestion du système éducatif, un objectif de diminution des ségrégations.

C’est dans ce contexte que s’insère la communication présentée ici. Elle a pour but de décrire la méthodologie développée pour utiliser des données longitudinales dans le cadre d’une recherche commanditée par le réseau d’enseignement organisé par la Communauté française. Celle-ci a pour finalité de fournir aux cadres du réseau un système d’aide à la décision leur permettant de déterminer les actions nécessaires à l’atteinte d’un objectif visé et de prévoir les effets de leurs décisions. Ceci requiert de pouvoir anticiper les futurs possibles, de faire de la prospective (de Jouvenel, 1999), autrement dit de pouvoir envisager différents scénarios de solution et estimer leurs impacts relatifs. Toutefois, en Belgique francophone, cette anticipation est rendue particulièrement délicate par la complexité du système éducatif. Il est dès lors difficile d’envisager l’ensemble des effets d’une action, et plus difficile encore d’en évaluer les éventuels effets pervers.

La simulation individus-centrée permet de mettre en place un tel outil d’aide à la décision et d’assister la démarche prospective (Amblard, 2003 ; Gilbert & Troitzsch, 2005). La simulation consiste à imiter un processus ou un système réel, le plus souvent de façon informatisée, afin d'analyser les processus mis en œuvre et les résultats obtenus (Gilbert & Troitzsch, 2005). Pour cela, une représentation de la réalité, ou modèle, doit être construite. Dans ce cadre, l’approche individus-centrée consiste à représenter explicitement, dans le modèle, les individus qui composent la population considérée, de les mettre en relation, et de simuler leur comportement collectif (Amblard, 2003).

Une fois le modèle construit, la simulation permet, d’une part, d’extrapoler les connaissances que l’on a du système pour éclairer les décisions de gestion à prendre (simulation prédictive pour l’aide à la

décision) et, d’autre part, de prédire l'impact de changements potentiels sur le système réel sans les

appliquer concrètement (test de scénarios par la simulation) (Amblard, 2003 ; Gilbert & Troitzsch, 2005) La principale difficulté de cette approche est qu’elle suppose une bonne connaissance des règles et des variables permettant une représentation adéquate de la réalité, même simplifiée. C’est pourquoi la première étape consiste en l’extraction de règles de comportement individuel, en termes de choix d’école, qui expliquent la situation passée et actuelle, afin de modéliser le système.

Cette communication présente la méthodologie développée pour mener à bien cette modélisation. En particulier, on s’attachera à la modélisation des comportements individuels, en termes de règles d’attribution à un établissement, des élèves entrant dans l’enseignement fondamental (en 1ère année maternelle). L’objectif est donc d’utiliser ce que nous savons du passé pour déterminer un ensemble de règles qui prédisent la situation actuelle des usagers du système éducatif quant au choix d’école à l’entrée dans l’enseignement fondamental. Ceci amènera par la suite à pouvoir prédire l’évolution du système, puis à envisager une approche prospective.

2. Méthode

2.1. Démarche

Sachant qu'un modèle est toujours une simplification du système, notre modèle se veut être suffisamment précis pour refléter la réalité, mais suffisamment simple pour être représentable sous la forme d'un ensemble de règles ne nécessitant pas de connaissances mathématiques particulières. Ces règles constituent donc la description du système, étudié à travers ses caractéristiques passées, représentées par des variables.

La démarche comprend trois étapes. Dans un premier temps, il s’agit de décrire ce que nous pouvons observer en termes de choix d’établissement. Pour cela, la Communauté française de Belgique dispose de données administratives de recensement des élèves. Dans un second temps, les observations sont utilisées pour écrire des règles probabilistes d’attribution des élèves aux établissements scolaires, sous la forme « un élève possédant les caractéristiques x aura la probabilité p de fréquenter un établissement possédant les caractéristiques y ». Enfin, dans un troisième temps, la modélisation informatique est construite sous la forme d’un système multi-agents (Amblard & Phan, 2006), implémentant les règles d’attribution à un établissement. Afin de valider le modèle construit, les résultats produits doivent être comparés aux données existantes.

2.2. Données

Les données, existant dans les bases de données administratives de recensement des élèves en Communauté française de Belgique sur cinq années consécutives, sont constituées de variables (qu’il est possible d’anonymiser) permettant de caractériser les élèves, les établissements scolaires et l’environnement. Les variables d’intérêt à chaque niveau sont présentées dans le tableau 1.

Tableau 1 VARIABLES D’INTERET

Élèves Établissements Environnement (secteurs

statistiques) - Date de naissance

- Établissement fréquenté - Année d’études

- Secteur statistique de domicile (utilisé pour calculer la distance domicile-école et l’indice socio- économique) - Positionnement géographique - Agrégation des données élèves (nombre d’élèves et indice socio- économique moyen) - Limites géographiques - Indice socio-économique

2.2.1. Secteurs statistiques et indice socio-économique

Deux variables méritent une brève description : le secteur statistique et l’indice socio-économique. Le secteur statistique correspond à une division statistique du territoire belge, définie comme une

« subdivision territoriale la plus petite déterminée par l’Institut National de Statistique » (Demeuse,

2002, p.270). Il s’agit de « l’unité d’agrégation la plus petite, en taille, pour laquelle des données sont

disponibles à l’échelle de l’ensemble du Royaume » (ibid, p.270). Le territoire belge est ainsi subdivisé en

environ 20.000 secteurs statistiques, de superficie variable (plus petits en zone urbaine, plus grands en zone rurale). Les limites des secteurs statistiques et leur centre peuvent être positionnés géographiquement.

L’indice socio-économique est une variable qui, à la base, caractérise les secteurs statistiques. Initialement construit afin de mettre en œuvre la politique de discrimination positive (Demeuse et al., 1999), il est calculé sur la base de données disponibles au niveau du secteur statistique (revenu par habitant, niveau des diplômes, taux de chômage, activités professionnelles et confort des logements). Dans le cadre de la politique de discrimination positive, chaque élève se voit attribuer l’indice socio- économique du secteur statistique où il réside et apporte cet indice au niveau de l’établissement. D’un point de vue statistique, il s’agit d’une variable métrique de distribution normale, qui varie entre environ - 3,5 et 3,5 (figure 1).

Figure 1