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La presse : une origine difficilement datable

Chapitre I. Évolution du rapport au territoire dans la presse

Section 1. La presse : une origine difficilement datable

Section 1. La presse : une origine difficilement datable 

Dès lors, les composantes de la presse vont influencer de manière considérable  le  lecteur  pourtant  méfiant  ou  bien  même  pusillanime.  Il  en  est  pour  témoignage  cet  extrait  d’un  article  du  Monde  Diplomatique136 :  « De  plus  en  plus  de  citoyens  prennent conscience de ces nouveaux dangers. Ils expriment une extrême sensibilité  à  l’égard  des  manipulations  médiatiques  et  semblent  convaincus  que,  dans  nos  sociétés  surmédiatisées,  nous  vivons  paradoxalement  en  état  d’insécurité  informationnelle. L’information prolifère, mais avec une garantie de fiabilité nulle. Il  arrive  souvent  qu’elle  soit  démentie.  On  assiste  au  triomphe  du  journalisme  de  spéculation et de spectacle, au détriment du journalisme d’information. La mise en  scène  (l’emballage)  l’emporte  sur  la  vérification  des  faits ».  Au  rang  de  celles‐ci, 

nous comptons aussi le journaliste, le photographe, le metteur en page137. Ces trois  personnages  vont  devoir  façonner  avec  rigueur  l’information  pour  qu’elle  soit  assimilable ; inéluctablement la presse vit des jours difficiles au son tonitruant des  TIC devenues une mythologie moderne dans l’ère de la communication.  

a. L’évolution de la presse depuis Renaudot 

Nous ne pouvons passer sous silence que l’information se porte bien138, qu’elle  alimente une multitude de supports nouveaux. Les «gratuits »croissent de manière  exponentielle  au  fil  d’un  temps lui‐même raccourci  par  la  rapidité  de  diffusion  de  l’information. Dans l’histoire de la presse, très en avance sur le temps actuel, Moïse‐ Polydore  MILLAUD  fonde  en  1863,  Le  Petit  Journal  et  inonde  les  rues  de  Paris 

136. Ignacio RAMONET, Le Monde Diplomatique, De la qualité de l’information dépend celle du débat citoyen, Médias en crise, janvier 2005.

137. Au XVIIe siècle, du point de vue de la hiérarchie, les typographes pouvaient être rangés sous trois catégories : le prote, le metteur en pages et le paquetier ; mais ces distinctions étaient, à vrai dire, à peu près fictives : un prote pouvait perdre son emploi et redevenir metteur en pages ou chef de conscience. Il n’était pas rare de voir un metteur en pages reprendre la casse et lever la lettre comme à ses débuts.

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faire une incursion dans la presse gratuite140. Elle n'est pas nouvelle141. Elle naît en  réalité  dans  les  années  1835  avec  Tam  Tam  distribué  à  Paris  et  son  lointain  descendant, Paris Boum Boum142 qui commence sa carrière en 1982, suivi de près  par  l’hebdomadaire  À  nous  Paris  en  1999  diffusé  exclusivement  dans  le  métro  parisien.  Cette  presse  se  cantonne,  à  cette époque‐là,  essentiellement aux  petites  annonces  dans  le  domaine  de  l'automobile,  de  l'immobilier  et  des  réclames  émanant  des  grandes  surfaces.  Des  initiatives  du  même  genre  étaient  apparues  dans  certaines  villes  de  province  dans  les  années  1960.  À  l'origine  très  mal  considérée en raison de sa conception peu soignée, la presse gratuite a patiemment  franchi les échelons, et a laissé entrevoir la palette de ses possibilités. Les taux de  pénétration sont remarquables143. De plus, les maquettes se sont améliorées et les  sujets  diversifiés :  horoscopes,  programmes  télévisuels,  rubriques  pratiques,  etc.  L'innovation,  venue  de  Scandinavie,  consiste  à  incorporer  une  véritable  partie  rédactionnelle entourée de publicité, et de rentrer par la petite porte de la Presse  Quotidienne  Nationale  (PQN).  La  révolution  numérique  dont  Serge  JULY  soulignait  dans  les  colonnes  du  Monde  les  bouleversements  attendus,  écrivant :  «l’ère  du  numérique  a  créé  un  nouveau  monde  qui  bouleverse  l’industrie  médiatique,  son  économie  comme  ses  usages »144.  « Nous  avons  changé  notre  façon  de  faire  du  journalisme »145

139. Bernard VOYENNE, les journalistes in- Revue française de Sciences politiques, décembre 1959, volume 9, p. 908.

140. Le syndicat de la presse gratuite (SPG), fondé en 1973, a adhéré en 1981 au Bureau de Vérification de la Publicité (BVP). Le CDPG (organisme de constat de la distribution des périodiques gratuits créé en 1982) est devenu la section « Presse gratuite » de Diffusion Contrôle en 1992. Ludovic HIRTZMANN et François MARTIN, Le défi des quotidiens gratuits, Éditeur MultiMondes, 2005, p. 58.

141. Laurent MARTIN, La presse écrite en France au xxe siècle, Le livre de poche 610, Paris, 2005, p. 192.

142. Tirage 350 000 exemplaires, Le syndicat de la presse gratuite (SPG), 1982,Ludovic HIRTZMANN et François MARTIN, Op. Cit.

143. Stratégies, édition du 26 janvier 1996 : la pénétration des « gratuits » a pu atteindre jusqu'à 50 % dans les grandes villes et 80 % dans les villes de taille moyenne.

144. Pascale SANTI, Le Monde 1er septembre 2006.

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notre  commentaire  vers  le  papier,  matière  même  des  « monuments »  de  la  mémoire sur lesquels reposent la « langue et la nation146 ». À l’instar du support de  l’écriture et de l’image fixe, il constitue matériellement notre relation de dialogue  avec les générations passées et reste le média essentiel des échanges intellectuels  de notre temps. Le papier est omniprésent dans notre univers de communication :  affiches,  dessins,  photos,  livres,  journaux,  magazines  mais  également  constitution,  monnaie fiduciaire picturale, diplômes. Or, ce papier qui parfois nous encombre et  dont  nous  nous  débarrassons  avec  désinvolture  est  aussi  celui  qui  constitue  une  part  essentielle  de  notre  existence  sociale.  Il  est  l'éphémère  et  la  permanence,  le  sens  et  l’insignifiance,  le  précieux  et  le  jetable,  la  mémoire  et  l’oubli.  Il  construit  notre  quotidien  médiatique :  nous  « lisons »  un  journal  ou  un  magazine,  nous  « consultons »  les  médias  numériques147.  Nous  comprenons  dès  lors  le  souci  d’établir, ne serait‐ce que de façon empirique, l’existence d’une valeur intrinsèque  que  nos  congénères  lecteurs  placent  dans  le  papier.  Car,  si  l’on  accepte  la  distinction  de  deux  principales  formes  de  la  communication  médiatique,  la  forme  papier et la forme numérique, il est à l’évidence que le support papier l’emporte sur  son homologue numérique par le simple fait qu’il n’est pas palpable. 

Cet apostolat d’une presse façonnée avec rigueur, adaptable aux lecteurs les plus  différents,  dans  une  mouvance  sociale  et  culturelle  ambiguë,  nous  corrige  de  ce  désir  de  pluralisme.  Nous  ne  pouvons  que  nous  faire  le  défenseur  de  cette  thèse  afin d’appréhender l’homme dans sa complexité pour lui donner l’absolution quant  à sa manière de percevoir les choses et de les transmettre en utilisant un filtre qui  parfois échappe à la pensée rationnelle. La presse est étroitement liée au contexte  socioculturel et que Pierre ALBERT décrit148 : 

146. Nous donnons à ces deux mots : langue et nation, une connotation forte teintée de patriotisme.

147. Pascale SANTI,Le Monde 7 mars 2007, « Pour la première fois en 2006, l'audience des sites Internet, des quotidiens et de leurs suppléments a été mesurée. Trois nouveaux indicateurs ont été créés : la mesure conjointe de tous les quotidiens, celle de leurs sites et celle de leurs suppléments. Au total, l'apport du Web et des suppléments est de 13,7 millions de lecteurs par rapport à la lecture au numéro un jour moyen. »

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travers  les  films,  la  littérature  à  travers  les  livres…  […]  Une  publication  de  presse offre une masse de feuilles imprimées, support de l’information ou de la  fiction  qu’elle  diffuse.  Son  étude  doit  donc  à  la  fois  s’attacher  à  décrire  un  produit  matériel  et  un  service  intellectuel.  Si  le  numéro  d’un  journal  est  le  même  pour  tous  ses  lecteurs,  chacun  d’eux  le  lit  à  sa  manière  et  réagit  individuellement à sa lecture ». 

La véritable origine de la « presse » est encore méconnue. Pourtant, des dates,  des  parutions,  des  hommes  de  la  littérature  occasionnelle  fourmillent  au  fil  des  ouvrages  sur  le  sujet.  Avec  l’arrivée  de  l’imprimerie  en  France,  dans  le  milieu  du  XIVe siècle, la diffusion de livres, de petites plaquettes imprimées149 contenant des  récits  de  batailles  et  d’ouvrages  rois,  des  faits‐divers  plus  ou  moins  arrangés  font  une  apparition  remarquée.  Depuis  GUTENBERG,  vers  1430‐1440  et  la  mise  en  application de sa découverte à une échelle industrielle, jusqu’à La Presse d’Émile de  GIRARDIN,  en  1836,  quatre  siècles  se  sont  écoulés  durant  lesquels  l’histoire  des  médias  fut  un  mélange  subtil  entre  l’aventure  industrielle  et  d’innombrables  combats  pour  la  Liberté.  Depuis  cette  époque,  la  croissance,  la  propagation  des  médias à l’intérieur des démocraties privilégiant l’aspect multiple des êtres et des  choses, se placent sous le phénomène de la concurrence médiatique. Ils s’engagent  dans une rivalité afin de conquérir des publics disparates. Face à une réalité sociale  qui,  se  transformant  en  profondeur,  résiste  toujours  davantage  à  nos  grilles  d'analyses  traditionnelles  et  rend  ainsi  opaques  des  univers  que  nous  croyons  jusque  là  familiers,  chacun  ressent  intimement  le  besoin  de  se  faire  à  nouveau  le  pointeur  de  ce  que  nous  savons  de  l'être  humain  et  de  la  société  et  par  delà  la  composante éclectique des médias. C'est pour relever le défi de la compréhension  du temps présent qu’est apparu cet outil médiatique inédit, né de l'articulation et  du  croisement  des  différentes  sciences  humaines  mises  au  profit  de  l’information  propagandiste150

149 . Nous pensons ici aux « occasionnels » et autres « canards » précurseurs s’il en est de la presse contemporaine.

150. Propagande est écrite ici dans son acception du XVIIe siècle (1622) à savoir « qui doit être propagée » dont nous parlons plus en avant dans ce texte comme étant une idée pénétrée durant la Révolution française et qui

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linguistique,  histoire,  géographie,  démographie,  science  politique,  philosophie...  toutes  ces  disciplines  constituent  et  construisent  les  sciences  humaines  concomitamment  d’une  mouvance  médiatique  subordonnée  à  l’élaboration  d’une  dépêche  assimilable  par  les  lecteurs.  Nous  pouvons  alors  dire  que  l’histoire  des  médias  ne  devient  lisible  et  explicable  qu’en  s’inscrivant  dans  l’évolution  des  sociétés  contemporaines.  L’émergence  dans  le  paysage  médiatique  d’instruments  de  diffusion  et  de  communication,  depuis  la  presse  à  imprimer  de  GUTENBERG  jusqu’aux  moyens  technologiquement  avancés,  influence  et  configure  de  manière  significative le panorama social et par delà même le panorama médiatique.  

« Notre  esprit,  dit  justement  Henri  BERGSON,  a  une  irrésistible  tendance  à 

considérer  comme  plus  claire  l'idée  qui  lui  sert  le  plus  souvent »151. Notons  également  cette  phrase  de  Gaston  BACHELARD  qui  note  en  substance  «Il  vient  un  temps où l'esprit aime mieux ce qui confirme son savoir que ce qui le contredit, où il  aime  mieux  les  réponses  que  les  questions.  Alors  l'instinct  conservatif  domine,  la  croissance  spirituelle  s'arrête »152. Des  notions  guidant  l’esprit  humain  à  la  propagande153, il n’y a qu’un pas facile à franchir. Le trait de côte difficile à dessiner,  « sans regretter la douceur des lampes à huile, la splendeur de la marine à voile, le 

charme  du  temps  des  équipages »154 ;  nous  témoignons  qu’à  chaque  nouveau  système  technologique,  une  nouvelle  culture  s’impose.  Cette  culture  de  la  propagande est une hantise dont Serge TCHAKHOTINE nous affranchit155. Précurseur 

approche l’idée de « propager certaines idées politiques » relayées par les médias d’informations. Le Robert, dictionnaire historique de la langue française, tome 2, Paris, 2000.

151. Henri BERGSON, La Pensée et le Mouvant, Paris, 1934, p. 231.

152. Gaston BACHELARD, La formation de l'esprit scientifique, Librairie Philosophique J. VRIN, 1970, p. 15. 153. Nous employons ici propagande dans le sens de propager une idée.

154. Charles de GAULLE : Petite phrase "La douceur des lampes à huile". Dans un discours à l'Élysée, le 14 juin 1960, Le Général [de GAULLE], en référence au processus de décolonisation, prononce une de ses fameuses "petites phrases" : "Il est tout à fait naturel qu'on ressente la nostalgie de ce qui était l'Empire, tout comme on peut regretter la douceur des lampes à huile, la splendeur de la marine à voile, le charme du temps des équipages. Mais quoi ?! il n'y a pas de politique qui vaille en dehors des réalités" Archives INA (<http://www.ina.fr>), ORTF – 14/06/1960, durée 28 secondes.

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apparemment  scientifique  du  rôle  des  médias  dans  une  société  moderne.  Témoin  de la montée du nazisme dans l’Allemagne de WEIMAR, marqué par cette sorte de  génie  avec  lequel  GOEBBELS  orchestrait  la  propagande  politique  sous  les  ordres  d’HITLER, Serge TCHAKHOTINE dévoile au grand jour les dispositifs grossiers ou subtils  de  ce  vaste  maniement  orchestré  de  l’opinion  publique.  Socialiste  allemand  TCHAKHOTINE  est  le  premier  à  marquer  cette  période.  Il  étudie  le  rôle  de  la  propagande hitlérienne à la radio, il en conclut que celle‐ci a permis le contrôle des  esprits en diffusant des slogans usant des techniques publicitaires. Sa thèse s’inspire  de  la  psychologie  sommaire  du  réflexe  conditionné  d’IF.  PAVLOV.  Elle  part  du  postulat que « par certaines pratiques, on peut affaiblir la faculté de résistance des 

mécanismes  nerveux  supérieurs  “et  d’autant”  chez  la  masse  dont  le  niveau  intellectuel,  c’est‐à‐dire  la  facilité  critique  est  bien  basse »156.  Le  public  est  ainsi 

considéré  comme  une  totalité  passive  et  ignorante,  les  techniques  de  persuasion  douées  d’un  pouvoir  omnipotent.  Le  contexte  sociopolitique  de  l’époque  en  Allemagne  n’est  absolument  pas  pris  en  compte.  Ce  faisant,  S.  TCHAKHOTINE  voit,  logiquement,  dans  les  pratiques  publicitaires  des  instruments  capables  de  manipuler les foules : « Par la répétition incessante et massive des slogans », leurs 

« sonorités rythmées obsédantes », « elles créent un état de fatigue mentale, qui est  propice  à  l’assujettissement  à  la  volonté  de  celui  qui  exerce  cette  publicité  tapageuse »157. Aux États‐Unis le politologue Harold LASSWELL se donne pour objectif  de  comprendre  l'impact  et  la  meilleure  utilisation  possible  des  techniques  gouvernementales  dans  son  ouvrage158.  Pourtant  rien  n'accrédite  vraiment  la  puissance démesurée des médias, même en temps de guerre. 

Ainsi  H.  MARCUSE,  dans  L’homme  unidimensionnel,  écrit‐il :  « Les  produits 

endoctrinent  et  conditionnent ;  ils  façonnent  une  fausse  conscience  insensible  à  ce 

156. Ibid., p. 131.

157. Serge TCHAKHOTINE, Ibid.,

158. Harold LASSWELL, Propaganda Techniques in- the World War, 1927 in- Éric MAIGRET, Sociologie de la communication et des médias, p. 60.

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grand nombre d’individus dans des classes sociales plus nombreuses, les valeurs de  la publicité créent une manière de vivre »159. Car « son langage va dans le sens de  l’identification  et  l’unification »160.  En  somme,  c’est  une  des  techniques  de 

l’avilissement  de  l’homme  et  de  son  aliénation.  La  condamnation  des  effets  des  médias  n’est  pas  l’apanage  des  sociétés  contemporaines.  Il  est  d’ailleurs  possible  d’en  trouver  une  forme  achevée  dès  l’Antiquité  dans  La  République  de  PLATON161,  nous présentant un SOCRATE décidé à expulser les poètes de la Cité parce que leurs  histoires sont susceptibles d’abuser les plus jeunes. 

Nous pouvons hypothéquer le fait que d’ores et déjà la société vit aux rythmes  soutenus des parutions médiatiques mouvantes. L’information est devenue un bien  de  consommation  et  même  une  marchandise  périssable  nécessaire  à  l’éclosion  d’une  nouvelle  forme  de  pensée  que  nous  pouvons  baptiser  « tendance ».  Il  nous  semble  important  de  comprendre  que  dans  le  mot  « tendance »  se  cachent  des  mouvements  de  société  dont  nous  échappent  le  sens  et  les  liens  à  une  réalité  quotidienne.  Nous  citons  cette  phrase  d’AGUEEV  nous  incitant  à  reconsidérer  que  des éléments extérieurs peuvent aussi paramétrer frauduleusement notre pensée.  

« La platitude qui réside dans la tendance de l'homme à considérer avec  mépris  tout  ce  qu'il  ne  comprend  pas,  et  dont  l'étendue  s'amplifie  à  mesure  qu'augmentent  l'inutilité  et  la  médiocrité  des  objets,  des  choses  et  des  faits  qui, en cet homme, provoquent l'admiration »162

b. L’avènement du magazine de presse et de la technologie 

Les  origines  connues  de  la  presse  écrite  se  situent  en  Europe  occidentale,  notamment  dans  les  pays  du  Nord.  L’invention  puis  les  progrès  constants  de  l’impression  permettent  la  publication  de  périodiques  à  Augsbourg,  Anvers, 

159. Herbert MARCUSE, L’homme unidimensionnel, Paris, Minuit, 1968, p. 36. 160. Ibid., p. 110.

161 . PLATON, La République, Éditeur Flammarion, édition nouvelle 2002, Collection Garnier Flammarion Philosophie, 801 p, nous avons également consulté PLATON, Le procès de Socrate, Édition J’ai lu, 2004.

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entre  puissances  européennes  comme  la  guerre  de  Trente  ans  de  1618  à  1648  stimulent  le  nouveau  marché  des  gazettes.  Il  convient  de  donner  à  Théophraste  RENAUDOT  le  titre  de  père  de  la  presse  française  grâce  à  son  hebdomadaire 

La Gazette  lancé  au  mois  de  mai  1631,  organe  officieux  de  la  Cour  de  France  qui 

publiait  dès  lors  des  nouvelles,  surtout  de  l’étranger,  tandis  que  les  Corantos  (ou 

Newsbooks)  –  huit  feuillets  au  format  livre  –  constituent  les  prémices  des 

périodiques  anglais  dès  1621.  Dans  toute  l’Europe  occidentale,  les  progrès  et  la  diversification de la presse sont constants au XVIIIe siècle. Son « explosion » a lieu  au  siècle  suivant,  sous  l’impulsion  de  l’évolution  sociopolitique  générale  (parlementarisme,  généralisation  de  l’instruction,  etc.)  et  de  la  révolution  industrielle  –  l’évolution  des  techniques  d’impression,  des  transports,  des  messageries  ainsi  que  l’urbanisation  permettant  un  abaissement  du  prix  de  vente  des journaux et l’avènement d’une presse populaire. 

Depuis  Théophraste  RENAUDOT164,  père  fondateur  de  la  presse  moderne  vers  le  milieu du XVIIe siècle, l’édition de journaux a connu de multiples changements. La 

Gazette destinée à l’information publique devient au fil du temps une institution à 

part entière.  

Comme nous l'avons rappelé, elle a longtemps eu le monopole de la transmission  de  l'information  et  par  extension  le  magazine,  média  de  diffusion  d’une  partie  de  cette  information,  amorce  aujourd’hui  une  dérive  éditoriale  de  façon  constante.  Cette dernière interprétation profile dans notre horizon de recherche le fait que le  magazine de territoire soit en théorie indéfinissable. Dès lors la question se pose :  que peut‐on très exactement y faire entrer ? Que doit‐on en exclure ? 

163. Pierre ALBERT, Histoire de la presse, Éditeur Presses Universitaires de France – PUF, Collection Que sais-je ? 10ème édition, 2003, p. 5-12.

164. Au passage, notons que s'il se targuait de ne pas céder aux pressions des annonceurs, il n'en était pas moins inféodé à RICHELIEU, donc à l'État français. Cf. : Mémoire de Marc LEIBA, en vue de l'obtention du diplôme de sup de co, Reims Management School : Quel avenir pour la presse quotidienne nationale française ? Les difficultés chroniques rencontrées depuis les années 1980 présagent-elles de la disparition de ce média ?, Octobre 2006.

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mation  et  de  la  culture  de  masse.  Magazines  de  tendance  et  de  public,  ils  représentaient des courants sociétaux très marqués. Ils manifestent d’une certaine  richesse,  aisance  à  la  fois  financière  et  culturelle.  Cette  déclinaison  est  encore  apparente  aujourd’hui  où  le  magazine  de  territoire  et  autres  supports  de  presse  nous  instillent  cet  élixir  de  convergence  d’esprit  autour  d’un  média.  Le  journal  « illustré »  de  photographies  appelle  le  lecteur  à  une  autre  approche  de  l’information.  Nous  parlerons,  plus  loin,  de  l’importance  de  l’image.  Nous  évoquerons ce qui fait la force d’une photographie, son intérêt ne se limitant pas à  la  seule  actualité.  Nous  rappellerons  les  exigences  de  la  disponibilité  du  photographe,  son  intuition,  et  la  rigueur  des  règles  esthétiques  qui  vont  pouvoir  assurer la permanence et la richesse du message.  

L'histoire de la presse et du journalisme166 doit peut‐être éclairer ces questions  en montrant la progressive émergence du genre à travers la diversité des contenus.  Nous  devons,  à  cette  étape  du  chapitre,  faire  une  approche  sémantique  approfondie du mot « magazine » afin de convenir d’un choix relatif à son sens le  plus  précis.  En  France,  le  terme  « magasin »  avec  son  sens  nouveau  de  « dépôt,  recueil d'informations » paraissait dans le titre de certaines publications : en 1639,  Le  Magasin  Charitable,  recueil  périodique,  fut  fondé  sous  les  auspices  de  Saint Vincent DE PAUL.  

Si  le  magazine  contemporain  trouve  sa  marque  actuelle  dans  les  années  1930,  tout  commence  en  Angleterre,  en  1731167,  très  exactement,  avec  le  Gentleman's 

Magazine, un mensuel de quarante deux pages fondé par Edward CAVE, qui eut tout  de  suite  un  grand  succès,  attesté  par  le  lancement  de  concurrents :  London 

165. Citons, sans être exhaustif, les grandes réussites de cet âge d'or : Look ou Life aux États-Unis, Candide, Match ou Marie-Claire en France.

166. Le lecteur pourra se reporter, pour l’histoire de la presse et du journalisme en France, aux ouvrages suivants :