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Le cadre juridique et politique européen en matière de services des

2.1. La directive Services de médias audiovisuels

La directive Télévision sans frontières (89/552/EEC) a été adoptée par le Conseil de l’Union européenne en accord avec le Parlement européen le 3 octobre 1989. Elle visait à garantir la libre circulation des services de diffusion dans le marché intérieur en préservant certains objectifs d’intérêt public, parmi lesquels la protection des enfants153. En 1996, le Livre vert sur

la protection des mineurs et de la dignité humaine dans les services audiovisuels et d’information a été publié. Il décrivait le passage des services audiovisuels d’un modèle médiatique centralisé à un paradigme de communication individuelle. Puis il analysait la réglementation et les politiques au niveau national, européen et international. Enfin, il promouvait des indications pour un cadre réglementaire plus flexible relativement aux nouveaux services154. En particulier, le Livre vert soulignait ce qui suit :

« L’ensemble des capacités offertes par ces réalisations dépendra de la manière dont la société tout entière trouvera le juste équilibre entre la liberté d'expression et les considérations d'intérêt public, entre les politiques visant à favoriser l'apparition de nouveaux services et la nécessité de garantir que les possibilités ainsi ouvertes ne soient pas détournées par une minorité aux dépens de la majorité. »155

La même année, la communication sur le contenu illégal et préjudiciable sur Internet (COM (96) 487) est publiée par la Commission européenne, pour définir la différence entre contenus illégaux et préjudiciables156. La directive Télévision sans frontières (adoptée en 1989, revue en

1997) impose aux États membres de prendre des mesures adéquates afin d’empêcher la diffusion soit d’éléments potentiellement nuisibles pour le « développement physique, mental ou moral des enfants », soit de contenus qui encouragent des comportements racistes, sexistes, contraires à des identités religieuses ou nationales157. La directive Services de médias

audiovisuels est entrée en force le 19 décembre 2007 en tant que directive 2007/65/EU et transposée par les États membres avant le 19 décembre 2009. Codifiée le 10 mars 2010 par le

153 Council Directive 89/552/EEC of 3 October 1989 on the coordination of certain provisions laid down by Law,

Regulation or Administrative Action in Member States concerning the pursuit of television broadcasting activities (3.10.1989).

154 CASAROSA, Federica. Children Protection Online: Uneasy Steps towards a Balance between Risks and

Freedoms. European Journal of Legal Studies. 2010, vol. 2, n° 3.

155 Livre vert sur la protection des mineurs et de la dignité humaine dans les services audiovisuels et d’information

COM (96) 483 final (16.10.1996).

156 Communication au Parlement Européen, au Conseil, au Comité économique et social et au Comité des régions.

Contenu illégal et préjudiciable sur Internet. 16 octobre 1996, COM (96)487.

157JACQUINOT-DELAUNAY, Geneviève, KOURTI, Evangelia.Des jeunes et des médias en Europe. Nouvelles

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Parlement européen et le Conseil (2010/13/UE) et approuvée en mai 2016, elle se concentre sur la fourniture des services audiovisuels dans les États membres au niveau juridique et administratif. La directive Services de médias audiovisuels fait aussi référence à la protection des mineurs et à l’interdiction d’inciter à la haine158. Sa mise en œuvre est contrôlée par les

représentants de pays membres réunis dans un comité de contact. Le Groupe des régulateurs européens des services de médias audiovisuels a été constitué en 2014 pour informer sur l’application de la directive.

En ce qui concerne la protection des mineurs, la révision de la directive établit que les contenus les plus nuisibles – qui apparaissant sur tout type de service audiovisuel – sont soumis aux mesures les plus strictes, comme les codes PIN et le cryptage. De plus, les fournisseurs des services audiovisuels sont tenus d’informer suffisamment les utilisateurs du contenu nuisible pour les mineurs. Ainsi, un système de décryptage peut être utilisé par les États membres. Le principe de base de la protection des mineurs fait partie des valeurs fondamentales des démocraties, comme la liberté d’expression. La Commission européenne propose une synthèse de la régulation graduée dans le schéma suivant.159

Aperçu de la réglementation graduée en matière de protection des mineurs dans la directive Services de médias audiovisuels

Contenu qui pourrait nuire gravement aux mineurs

Interdiction totale Article 27 (1)

Uniquement disponible de manière à ce que les mineurs n’entendront ou ne verront généralement pas ce contenu – Article 12

Contenu susceptible de nuire aux mineurs

Pas de restrictions S’assurer que les mineurs dans la zone de diffusion n’entendent ou ne regardent pas normalement ces émissions par cryptage ou par d’autres mesures –Article 27 (2) (3)

Tableau 8. Réglementation graduée en matière de protection des mineurs

La directive Services de médias audiovisuels différencie le contenu qui pourrait être nuisible, le « contenu qui est susceptible d'affecter les mineurs » et les « contenus qui pourraient sérieusement nuire » aux enfants ; ce dernier est totalement interdit. Les spectateurs sont informés de la nature des contenus par des mesures techniques, telles que le cryptage,

158 Directive 2010/13/EU du Parlement européen et du Conseil du 10 mars 2010 visant la coordination de certaines

dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels (directive Services de médias audiovisuels).

159 Ce tableau a été repris et traduit du portail de la Commission européenne à ce lien : https://ec.europa.eu/digital-

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l’avertissement acoustique ou un symbole clairement identifiable pendant la durée du programme. L’article 27(1) de la directive fait référence à ces mesures :

1. « Les États membres prennent les mesures appropriées pour que les émissions de radiodiffusion télévisuelle relevant de leur juridiction n'incluent pas les programmes susceptibles de porter gravement atteinte au développement physique, mental ou moral des mineurs, en particulier les programmes comportant de la pornographie ou de la violence gratuite. »

L’article 27, aux paragraphes 2 et 3, applique les mêmes mesures au contenu qui « est susceptible d'affecter les mineurs ». Nous les rapportons ci-dessous :

1. « Les mesures prévues au paragraphe 1 s'étendent également à d'autres programmes susceptibles de nuire au développement physique, mental ou moral des mineurs, sauf si cela est sécurisé, en sélectionnant le moment de la diffusion ou en prenant toute mesure technique pour que les mineurs dans la zone de transmission n'entendent habituellement pas, ou ne voient, pas ces émissions. » 2. « En outre, lorsque ces programmes sont diffusés sous forme non codée, les États membres veillent

à ce qu'ils soient précédés d'un avertissement acoustique ou soient identifiés par la présence d'un symbole visuel tout au long de leur durée. »

Codifiée en 2010 comme directive 2010/13/EU, elle a étendu la protection des mineurs aux services non linéaires de diffusion des contenus. Les services linéaires et non linéaires sont inclus dans le titre « services de médias audiovisuels ». Cependant, les indications relatives aux services à la demande sont différentes160.

Les programmes qui ne respectent pas les réglementations européennes sont contrôlés au niveau national. Dans les cas d’incertitude sur la responsabilité, les régulateurs nationaux sont tenus de coopérer au niveau international. La Commission européenne évalue la performance des États membres.

Certaines définitions ne sont pas harmonisées par la directive, comme celles relatives aux termes « mineur », contenu « nuisant gravement » ou « susceptible de nuire » aux enfants, ou même « pornographie ». D’autre part, la directive insiste sur les instruments de co-régulation et autorégulation pour les nouveaux services audiovisuels, une réglementation qui permet une flexibilité majeure pouvant accueillir les diverses traditions légales des États membres161.

Les différentes interprétations nationales du contenu « gravement compromettant » n’ont pas été harmonisées dans la directive Services de médias audiovisuels. Elles se réfèrent uniquement à la « pornographie ou violence gratuite ». Bien que le Parlement européen ait proposé l’inclusion de ces deux exemples dans l’article 12 de la directive dans le cadre du

160 CAPPELLO, Maja (dir.). The protection of minors in a converged media environment. IRIS plus, European

Audiovisual Observatory, Strasbourg, 2015.

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processus d’adoption, la proposition n’a pas été acceptée par la Commission européenne et le Conseil.

La mise en application de la directive dans les États membres est hautement discrétionnaire en ce qui concerne les « sujets sensibles culturellement et moralement, comme la protection des mineurs ». Cette dernière est considérée comme « une zone sensible caractérisée par une diversité de perceptions culturelles au niveau national »162.

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2.2. L’approche multipartite à l’éducation aux