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Les définitions des termes dans les débats sur la directive Services de médias audiovisuels

Analyse d’Alceste sur les « définitions des termes »

4.1.2. Les définitions des termes dans les débats sur la directive Services de médias audiovisuels

Les discussions relatives aux définitions des termes dans les débats sur la politique et la réglementation concernant les services de médias audiovisuels ont été analysées. Les interventions se concentrent sur les définitions de certains concepts clés, tels que ceux de service public, d’œuvre audiovisuelle européenne et sur la distinction entre services linéaires et non linéaires267.

267 Bien que la même analyse aurait pu être étendue aux « définitions des termes » présentes dans les débats sur la

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Le service public Des réflexions essentielles sont proposées au sujet de l’importance du service public ou universel afin de garantir la diversité culturelle et le pluralisme. À cet égard, le mandat des services de diffusion publique audiovisuelle établit la responsabilité des États membres de garantir l’accès à certains services à tous les citoyens268.

Les références à la définition de « service public » ne sont présentes que dans le débat intitulé Politique audiovisuelle communautaire à l’ère numérique du 5 septembre 2000. Un orateur propose une définition du « service universel » selon laquelle il garantirait des valeurs dans l’intérêt de la collectivité, tels que le pluralisme et l’accès libre à la culture, comme décrit ci-dessous :

« Qu’est-ce qui pourrait mieux protéger la diversité et le pluralisme qu'un service universel ? Qu'est-ce qui assurerait le libre accès à l'information, au divertissement et au savoir ? La télévision publique n'est pas un monopole et ne devrait pas l'être. Un des buts de la fonction publique, cependant, est l'intérêt général, et pour cette raison elle doit être évaluée. »269

Cette intervention indique même que la télévision publique devrait exercer une fonction informative dans l’intérêt général, sur la base d’un critère de transparence financière qui permettrait de distinguer les activités commerciales de celles des services publics. De plus, l’orateur pense qu’une telle politique européenne – considérée comme étant « digne de l'évolution des technologies » – conduirait au « basculement de l'ensemble du système ».

Cependant, une critique est faite sur le choix d’adopter un concept emprunté au secteur des télécommunications, dont l’application au secteur audiovisuel ne donne pas de résultat immédiat.En outre, l’une des difficultés signalées réside dans la différence de conception de l’idée de diffusion publique entre les États membres, les corporations et les diffuseurs, en raison de la variété des valeurs et principes. Néanmoins, ces définitions sont considérées cruciales à l’âge numérique, quand le développement de l’infrastructure implique celui du contenu270.

L’œuvre audiovisuelle européenne

pour des raisons scientifiques et pour des limites temporelles. D’autre part, nous renvoyons à l’analyse d’Alceste pour une réflexion concernant ces débats et les définitions recherchées.

268 En 1997, un accord a été trouvé parmi les représentants des États membres sur l’adoption d’un protocole

concernant le financement des organisations de diffusion du service public, pendant une rencontre Eurotop à Amsterdam du 16 au 18 juin 1997. Le protocole inclut une définition du rôle du service public et établit que les États membres restent libres de fournir des financements à cette diffusion, qui n’affecte pas les conditions de commerce et de compétition. Dans Schuijt G. (1997) Adoption of a Protocol on Public Service Broadcasting

to the Amsterdam Treaty, IRIS 1997-7:6/8 Legal Observations of the European Audiovisual Observatory. Protocol to the TEC(j) Public Broadcasting and (j) Services of general economic interest, 18 June 1997.

269 Tuesday, 5 September 2000 - Strasbourg - Community audiovisual policy in the digital age. 270 Ibidem.

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La définition d’« œuvre audiovisuelle européenne » est abordée dans les deux débats du 5 septembre 2000 – intitulé Politique audiovisuelle communautaire à l’âge numérique – et du 6 septembre 2005 – relatif à la directive Télévision sans frontières (89/552/CEE). Par rapport à la définition d’« œuvre », le débat se concentre sur la façon de traiter les œuvres nationales produites et diffusées dans les pays membres et sur la nature transnationale des œuvres « européennes ». Cet aspect est présent dans deux interventions plutôt limitées du débat de 2000. Au cours du débat suivant, en 2005, on souligne l’absence d’une définition positive d’« œuvre ». Son importance est liée à la protection de la diversité culturelle, à la fois en ce qui concerne la circulation des œuvres audiovisuelles dans l’espace européen et en ce qui concerne les travaux sur les productions commerciales d’autres pays. Sur ce dernier point, l’exemple des produits américains est donné.

En 2000, la Commission se propose, à court terme, de définir une « œuvre audiovisuelle européenne ». La directive Télévision sans frontières (89/552/CEE) avait prévu la circulation des œuvres nationales dans les pays mêmes ; l’adjectif « européenne » vise la diffusion des productions audiovisuelles au-delà de ces limites dans le but de développer des échanges culturels. D’autre part, la définition ne peut pas se limiter à la circulation des œuvres, mais elle est étendue au contenu, comme souligné dans cette intervention :

« La question du contenu de l’œuvre nous concerne tous. Quel contenu peut définir une œuvre, si elle n’est pas un contenu financé selon une approche pluraliste de la production ? Les partenariats sont nécessaires pour la création audiovisuelle actuelle et future, mais les stratégies et les monopoles hégémoniques s'opposent à la création elle-même. Il n'y a rien de plus dangereux que les concentrations actuelles d'opérateurs qui ont à la fois la capacité de radiodiffusion et des archives de matériel. »

Par conséquent, la définition d’« œuvre européenne » s’étend aux modalités de la création audiovisuelle, qui doit respecter des critères pluralistes afin de contrer des stratégies de marché hégémoniques et monopolistiques.

En 2005, l’absence de définition positive d’« œuvre » dans le texte de la directive Télévision sans frontières (89/552/CEE) est considérée comme une possible source de confusion. Cette idée est commentée avec les mots suivants :

« Ce n’est pas de l'information. Ce n’est pas de la publicité. Pourtant, est-ce de la téléréalité, par exemple ? Je préférerais – comme le feraient un certain nombre de professionnels – une définition réelle. »

L’orateur continue en proposant une interprétation du mot « œuvre » qui privilégie la fonction de protection de la diversité culturelle. À cet égard, les œuvres européennes fournissent

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aux populations une connaissance des différences culturelles par leur simple circulation, comme décrit ici :

« Je suis sûr que le cinéma européen aide les gens européens – surtout les jeunes – à comprendre les peines et les joies des uns et des autres. »

Par ailleurs, la connotation « œuvre européenne » permet de véhiculer des valeurs communes aux diverses cultures. La question des valeurs est à la base de sa définition, comme le souligne cet orateur :

« Cependant, nous devons donner une réponse plus précise à la question : Qu'est-ce qu'une production européenne ? Comment pouvons-nous assurer qu'elle sera composée d'autant de films que possible avec des valeurs cinématographiques ? Pour moi, ceci est un point crucial. »271

Sur ce dernier point, dans le rapport Weber au paragraphe 14, débattu le 5 septembre 2005, il est indiqué que le Parlement devrait s'assurer que le contenu des programmes est uniquement européen ; cependant, l’intervention suivante met en évidence que la signification de l’adjectif « européen » n’est pas spécifiée :

« Cela soulève la question de savoir qui doit décider ce que signifie "européen" dans ce contexte. Je peux vous assurer que, s'il existe un univers européen, il existe une solution simple à toutes les préoccupations qu'il peut y avoir à cet égard. » 272

Une définition positive est aussi nécessaire afin d’éviter de considérer comme européennes ou de qualité des productions commerciales telles que les « téléréalités ». À ce propos, la réflexion porte sur la diffusion dans les médias européens des productions américaines. Ces dernières, en étant diffusées dans tous les pays membres, sont très populaires en Europe. Par conséquent, les tentatives de tenir la culture américaine en dehors des valeurs européennes sont considérées comme « ridicules ». À cet égard, des quotas pour les films américains seraient souhaitables pour laisser plus d’espace aux productions nationales « dans le cadre d'une culture européenne unique ». Les œuvres européennes se distinguent par opposition à ces productions273.

La distinction entre services linéaires et services non linéaires La directive distingue les services de médias audiovisuels linéaires et non linéaires. Les premiers incluent la radiodiffusion télévisuelle, déjà contenue dans la directive Télévision sans

271 Ibidem. 272 Ibidem. 273 Ibidem.

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frontières ; alors que les seconds désignent les services « à la demande », que la directive décrit comme « un service de média audiovisuel pour lequel l’utilisateur décide du moment où un programme spécifique est transmis sur la base d’un éventail de contenus sélectionné par le fournisseur de services de media ».

La distinction entre services linéaires et non linéaires est débattue dans les discussions du 12 décembre 2006 et du 28 novembre 2007 relatives à la coordination de certaines dispositions des États membres sur la diffusion télévisuelle. Nous souhaitons souligner que les définitions présentées se réfèrent exclusivement à l’évolution de la directive Télévision sans frontières (89/552/CEE).

Dans le débat du 12 décembre 2006, la recherche de définitions implique différents aspects psychosociaux, économiques et technologiques concernés par la distinction entre services linéaires et non linéaires. La différenciation entre les deux catégories de services se base sur des facteurs psychosociaux, tels que le choix des spectateurs et la formation de l’opinion publique, comme décrit ici :

« Les différents services doivent être divisés ou regroupés en deux catégories reflétant le critère double de différenciation : d'une part, le choix et le contrôle des utilisateurs, et d'autre part, l'impact de ces services sur la manière dont l'opinion publique est formée. »

L'objectif de cette distinction est également de nature économique. Elle vise la création d’un marché des œuvres européennes, qui inclut des œuvres indépendantes « plus productives et attractives pour le consommateur »274. En termes technologiques, ces deux types de service sont

distingués selon le type de medium et les modalités de diffusion du contenu dans les débats du 28 novembre 2008. Les services linéaires sont définis comme push content ; ils « délivrent un contenu en permanence dans un programme en cours » et incluent la « diffusion télévisuelle impliquant une séquence chronologique de programmes ». Les services non linéaires sont considérés pull content, c’est-à-dire « sélectionnés dans un catalogue ». Il s’agit de l’Internet, de la télévision à la demande ou d’autres services « fournis sur demande de l’utilisateur ». La différence entre les services de médias linéaires et ceux non linéaires est donc liée aux développements de la technologie et du marché. À ce propos, nous soulignons l’importance de suivre ces changements afin qu’ils ne compromettent pas les opportunités des entreprises européennes dans un contexte mondial275.

274 Tuesday, 12 December 2006 - Strasbourg - Coordination of certain of the Member States provisions on

television broadcasting.

275 Wednesday, 28 November 2007 - Strasbourg - Coordination of certain of the Member States' provisions on

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4.2. La variété des interprétations législatives