• Aucun résultat trouvé

La belle résistance des métropoles urbaines

Par suite de la limitation des moyens financiers susceptibles d’être consacrés aux études des performances naturelles des territoires, seuls sont évaluées en 2003 les performances des territoires entourant les communes de France. De plus, en l’absence d’analyses détaillées des attractivités des différentes natures d’espaces naturels, un seul facteur d’attractivité est utilisé, celui, moyen, attaché aux espaces naturels qu’ils soient aquatiques, agricoles ou forestiers. Ce n’est qu’en 2006 qu’une exploitation spécifique de l’enquête transport de l’Ile de France permet d’identifier les facteurs d’attractivité relatifs aux espaces aquatiques intérieurs, aux espaces agricoles et aux espaces forestiers. L’analyse reste encore à faire pour les espaces aquatiques maritimes et pour les espaces de montagne, notamment les champs skiables.

Avec une définition simplifiée de l’utilité associée aux espaces naturels, c’est-à-dire en traitant de façon identique les espaces aquatiques intérieurs, les espaces agricoles ou les espaces forestiers et en n’affectant pas de coefficients spécifiques aux littoraux maritimes, ni aux espaces de montagne, les résultats obtenus sont déjà très intéressants. Ils confirment ce que l’analyse des seize agglomérations témoins avait déjà identifié : la très bonne résistance des aires urbanisées. Les grandes agglomérations françaises obtiennent des performances naturelles qui les situent dans une gamme de 5000 € à 7500 € par an alors que des zones rurales isolées, a priori mieux

112

intégrés dans le milieu naturel, atteignent des performances légèrement plus faibles, de l’ordre de 4500 € à 5500

€.

Ce résultat s’explique par le cumul de trois facteurs :

- Les aires urbanisées, lorsque les schémas d’urbanisme sont bien étudiés, comportent de vastes espaces naturels préservés. L’interdiction de construire est même le premier acte fondateur d’un urbanisme de qualité. Pour prendre un exemple, au sein de l’agglomération parisienne, la ville nouvelle de Marne la Vallée comporte 4000 hectares de forêts, 36 plans d’eau, 20 kilomètres de bord de Marne aménagés.

Les espaces naturels représentent plus de 40% de la superficie de la ville. La région Ile de France dont la population atteint 11 millions d’habitants comporte, sur 12 000 kilomètres carrés, 7200 kilomètres carrés de forêts, plans d’eau et espaces agricoles. On a de la peine à imaginer que, sur un territoire aussi modeste, 2% de la superficie du territoire national, des espaces naturels de cette importance sont effectivement préservés. On observe des situations comparables dans les principales aires urbaines françaises.

- Les réseaux de transport des grandes agglomérations sont très puissants. Ils permettent dans des temps donnés d’accéder à de vastes espaces urbanisés ou naturels. Ainsi, en Ile de France, les résidents de l’agglomération parisienne, en dépit d’une très forte densité d’urbanisation, peuvent accéder en une heure à 12 000 hectares d’espaces naturels, les habitants de l’agglomération marseillaise à 248 000, ceux de l’agglomération bordelaise à 338 000, ceux de l’agglomération de Montpellier à 153 000 alors que les habitants d’agglomérations plus modestes comme Bourges ou Agen accèdent respectivement à 111 000 et 112 000 hectares. L’accessibilité aux espaces naturels en dehors des cœurs urbains les plus denses est ainsi relativement homogène sur tout le territoire.

- Le niveau de vie des habitants des aires métropolitaines est bien plus élevé que celui des zones rurales isolées. Or, en stricte orthodoxie économique, la valorisation de l’intérêt porté aux espaces naturels doit être pondérée par le niveau de vie, c’est-à-dire par la valeur de l’heure travaillée. Au sein de l’agglomération parisienne, le salaire horaire net est, en l’an 2000, de 17,11 €, à Marseille il est de 13,61 €, à Bordeaux de 14,46 €, à Montpellier de 13,25 €. A Agen, il descend à 12,26 € et à Agen à 12,94 €. Dans les zones rurales les plus isolées, il ne dépasse pas 7,18 €, soit une valeur 2,4 fois inférieure à celle de l’heure travaillée en Ile de France.

On comprend dès lors que la combinaison de ces trois facteurs donne, en termes de performances naturelles, une vision de la France relativement homogène. Les grandes agglomérations atteignent des niveaux d’accessibilité aux espaces naturels du même ordre de grandeur que les zones rurales isolées. Comme le niveau de vie des habitants y est sensiblement plus élevé, les performances naturelles y sont globalement légèrement plus élevées.

Entre les aires urbaines, les grandes infrastructures de transport, notamment les autoroutes interurbaines, dessinent des zones d’accessibilité privilégiées aux espaces naturels, ce qui, à la réflexion, se comprend aisément.

Le fait de ne pas avoir individualisé, dans une première phase d’étude, les attractivités spécifiques des littoraux maritimes ou des espaces de montagne explique que leur intérêt en termes de performances naturelles n’apparaisse pas. Ce sera l’objet des études ultérieures que de mettre en évidence ce phénomène important d’attractivité des espaces côtiers et des massifs montagneux.

La carte des performances naturelles de la France montre en définitive la situation très équilibrée des conditions d’accès aux espaces naturels, quelle que soit la région considérée. La France est un pays peu dense qui dispose de vastes espaces naturels, de très haute qualité paysagère. Elle permet d’offrir aux citadins des lieux de ressourcement diversifiés. La tendance à l’extension des aires urbaines associée à une légère diminution de la densité moyenne de ces aires et à la préservation des vastes espaces naturels permet ainsi de concilier durablement vitalité économique et bien-être.

2.1.2.3.3 Les améliorations à apporter à la valorisation des différentes catégories d’espaces naturels.

Une étude récente de la Direction Régionale de l’Equipement d’Ile de France portant sur les niveaux d’attractivité des différentes catégories d’espaces naturels, effectuée à ma demande et éditée le 13 février 2003, apporte un éclairage très intéressant. Cette étude repose sur l’analyse de l’enquête globale de transport réalisée en 2001 en Ile de France. Elle consiste à exploiter le motif de déplacement promenade. La corrélation du nombre de déplacements avec la superficie des espaces naturels est très élevée, ce qui confirme la validité de la méthode d’évaluation des performances naturelles.

113

Le niveau d’attractivité varie sensiblement suivant la catégorie de l’espace naturel considéré. Si on adopte le facteur 1 pour la moyenne régionale, on trouve les valeurs suivantes :

- Espaces aquatiques : 9,2048 - Espaces agricoles : 1,1395 - Espaces forestiers : 0,1794

Si l’attractivité très élevée des espaces aquatiques se comprend bien, il est plus étonnant d’observer une attractivité plus élevée pour les espaces agricoles que pour les espaces forestiers. Cela provient en fait du statut privé de beaucoup de forêts ou de parcs. Cela provient également du fait que les promenades quotidiennes s’effectuent plus fréquemment au sein d’espaces découverts, proches du lieu de résidence, qu’au sein de massifs forestiers plus éloignés et d’accès moins commode.

Ces pondérations s’appliquent aux différents espaces naturels traditionnels proches des zones d’urbanisation intérieures. Il reste à déterminer les attractivités spécifiques des espaces côtiers et des espaces de montagne. Une exploitation spécifique des enquêtes de transport sera demandée au CETE de l’Ouest pour la détermination de l’attractivité des espaces côtiers et au CETE de Lyon pour la détermination de l’attractivité des espaces de montagne.

Doté de ces informations, une nouvelle évaluation des performances économiques des territoires pourra être réalisée sur l’ensemble du territoire français et si possible européen. On disposera, à ce moment-là, d’une image fidèle des performances naturelles associées aux lieux de résidence de l’ensemble des Français, et plus généralement des Européens.

2.1.2.3.4 Le rôle des déplacements pour loisirs verts effectués entièrement en dehors du territoire habituel de résidence. L’amélioration des méthodes d’évaluation des performances naturelles

Une autre voie d’amélioration de l’évaluation des performances associées aux déplacements pour

« loisirs verts », qui constituent l’essentiel des déplacements touristiques, est de prendre en considération avec tout le soin nécessaire l’ensemble des déplacements touristiques qui n’ont aucune extrémité au domicile du résident et qui ne s’effectuent pas au sein du territoire fréquenté quotidiennement. Comme on l’a vu, lorsqu’on prend en considération les déplacements pour loisirs verts qui ont une extrémité au domicile, on ne reconstitue qu’une partie des déplacements de week-end, de petites et de grandes vacances. Les déplacements qui n’ont aucune extrémité au sein du territoire enquêté ne sont pas pris en considération dans les enquêtes globales de transport effectuées au domicile des résidents. On délaisse ainsi traditionnellement les déplacements qui sont effectués entièrement en dehors du lieu de résidence et sur des territoires qui ne sont pas celui de la vie quotidienne. Pour le calcul des performances des déplacements à vocation économique, cet aspect a été pris en compte forfaitairement sous la forme d’un coefficient multiplicateur appliqué aux déplacements pour « motifs économiques autres que les déplacements domicile travail ». Pour les déplacements à vocation de "loisirs verts », par contre le phénomène est pour le moment ignoré. Or il présente une grande importance puisqu’il explique l’essor des maisons de campagne, celui des gîtes ruraux et celui de l’hôtellerie de vacances.

Il conviendrait en fait à l’occasion des prochaines enquêtes globales de transport d’interroger les résidents sur les déplacements aussi bien pour motif économique que pour motif touristique qu’ils effectuent entièrement en dehors du territoire sur lequel porte l’enquête, territoire qui constitue principalement le lieu de vie attaché à la résidence. On déterminerait de la sorte les niveaux de génération de déplacement liés à ce type de situation et les coefficients caractérisant l’effet distance associés à ces échanges. On pourrait pour les motifs économiques déterminer les performances liées à l’hôtellerie d’affaires ou aux déplacements en « ricochet » effectués en dehors du lieu d’enquête et donner ainsi une vision plus précise de la création de valeur qui en découle, valeur qui est actuellement prise en compte simplement de façon forfaitaire. On pourrait surtout déterminer les performances naturelles associées aux territoires comportant des maisons secondaires, des gîtes ruraux et de l’hôtellerie de vacance. Les niveaux de vie associés à ces valeurs seraient ceux des touristes occupant ce type de résidence de week-end ou de vacances. On dégagerait ainsi une image très précise du phénomène touristique qui se développe rapidement. On pourrait de plus déterminer si les performances naturelles sont reliées ou non aux PIB résultant spécifiquement de cette activité touristique tels que chiffres d’affaires liés à l’hôtellerie, la restauration et les services associés.

Dans l’immédiat, il serait utile d’apprécier si les enquêtes globales de transport effectuées au niveau national ne permettent pas déjà d’identifier les principaux paramètres liés à ces déplacements qui n’ont aucune extrémité au sein du territoire quotidiennement fréquenté. Il y a là un champ de recherche intéressant pour les prochaines années.

114

Outline

Documents relatifs