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L’Unedic  comme  acteur  de  régulation  du  marché  du  travail

Première partie : Recomposition des politiques publiques de l’emploi et nouveaux cadres paradigmatiques

3.   L’Unedic  comme  acteur  de  régulation  du  marché  du  travail

Un troisième axe, plus récent, du rôle de l’Unedic dans les politiques d’activation concerne l’accompagnement et la formation des chômeurs, sur lequel nous reviendrons dan le chapitre consacré à l’ANPE et à son rapprochement avec l’Unedic.

Première étape, la mise en place du PARE en 2001, pour lequel le Régime d’Assurance Chômage « s’auto-institue dans une fonction autonome de régulation du marché du travail (aide au retour à l’emploi, nouveaux contrats de travail), et dans ses rapports avec les chômeurs indemnisés puisqu’il établit avec eux une relation contractuelle individuelle définissant des engagements réciproques » (Freyssinet, 2002, p.18). D’autre part, l’Unedic augmente très fortement sa participation dans le financement de l’ANPE pour la mise en place du PARE, de 10,8% en 2001 à 30,8% en 2004, tandis que dans la même période, le financement de l’Etat diminuait de 78,9% à 64,6% (Cour des Comptes, 2006).

De plus, grâce à la loi de 2005 qui supprime le monopole de l’ANPE, l’Unedic passe directement des conventions avec des organismes de placement privé. L’Unedic devient ainsi potentiellement « un opérateur à part entière de placement avec presque autant de moyens d’action que l’ANPE » (Véricel, 2006). Autre volet renforçant l’action de l’Unedic, l’aide à la formation, pour lequel le MEDEF a obtenu l’adoption d’un ciblage sur deux types de formations : les actions répondant à des besoins identifiés, dont la satisfaction est un préalable à une embauche (AFPE, action de formation préalable à l’embauche) et les actions de formation renforçant les capacités professionnelles des allocataires concernés, visant à

« répondre à des besoins de qualification identifiés au niveau territorial ou professionnel ou à des tensions sur certains métiers » (Véricel, 2006).

Enfin, l’Unedic est à l’origine de l’introduction du profilage statistique des chômeurs, diagnostic initial de la distance à l’emploi et des risques de chômage de longue durée, réalisé en première évaluation par les agences Assedic et en articulation avec les agences ANPE (cf chapitre 3 consacré à l’ANPE).

B/ L’activation des dépenses sociales

Face à un taux de chômage global passé de 2,5% en 1970, avec une population active de 2,14 millions, à 9,8% en 2005 avec une population active de 2, 76 millions, les politique de l’emploi n’ont cessé de gagner en ampleur : représentant à peine 1% du PIB dans les années 1970, les dépenses pour l’emploi (financement des services publics de l’emploi, financement de stages, exonérations de cotisations sociales, aides aux chômeurs créateurs d’entreprises) ont été multipliées par 6 entre 1975 et 1987 (Muller, 1991, p.153). Elles atteignent 3,5% du PIB en 1988, et 4,5 % au seuil des années 200013, dépenses parmi lesquelles il figure une part importante de transferts financiers vers les entreprises (Szij, 1990).

On peut distinguer trois grandes étapes dans l’inspiration des politiques de l’emploi depuis le 1er choc pétrolier en 1973 et la montée brutale du chômage en 1974 (Szij, 1990, Dares, 2003) : la période des années 70-80, marquée par des interventions directes et massives en faveur de l’emploi et la croyance en la réversibilité du chômage, l’introduction d’un traitement économique en parallèle du traitement social du chômage dans les années 90, et depuis la fin des années 90-2000, une réflexion renouvelée sur la protection sociale avec l’introduction de la notion d’activation des dépenses passives de protection sociale, qui passe notamment par la mobilisation de leviers d’insertion centrés sur l’individu (Salognon, 2006).

Ces différentes modulations des politiques de l’emploi ne signifient pas l’abandon des dispositifs antérieurs, qui perdurent à des degrés divers. Pour autant, on peut observer au cours des trente dernières années une inflexion globale des politiques, d’abord centrées sur des dépenses dites passives et un traitement social du chômage (réduction des ressources de main-d’œuvre, indemnisations spécifiques pour des catégories ciblées, comme les seniors ou les licenciés économiques) s’orientant vers des dépenses dites actives, qui portent davantage sur un traitement économique du chômage. Ces dernières concernent à la fois des mesures

13 Lallement Michel, Le travail, Folio Essais, 2007, p.533

d’économie du régime d’indemnisation (cf partie sur l’évolution de l’assurance chômage), des mesures en faveur des entreprises (allégement des charges, actions sur des secteurs industriels ou des bassins d’emploi, dérèglementations sociales) et des dispositifs d’aide à la création d’emploi dans le secteur marchand et non marchand par le biais de contrats exonérés de cotisations sociales ou de stages rémunérés par l’Etat.

Ces inflexions des politiques de l’emploi correspondent également à des oscillations entre deux grands modèles polaires de la macro-économie (Dares, 2003, p.20). D’une part, les analyses classiques ou néo-classiques, où le marché du travail est analysé comme soumis, à l’instar des autres marchés, au libre jeu de l’offre et de la demande : les politiques de l’emploi doivent dans cette perspective faciliter l’équilibre de l’offre et de la demande en tentant de corriger les défauts d’appariement et en diminuant les facteurs de rigidité des salaires. A l’autre bout de la théorie macro-économique, la perspective de l’analyse keynésienne met l’accent sur le sous-emploi lié au chômage involontaire et fait dépendre le retour au plein emploi d’une politique économique expansive de l’Etat, en suscitant notamment des activités économiques créatrices d’emploi.

Ainsi, la politique keynésienne de relance instaurée au début des années 80 par le gouvernement socialiste, avec des mesures de réduction du temps de travail et la création directe d’emplois dans le secteur publics (Szij, 1990), laisse place à un nouveau champ d’intervention des politiques d’emploi dès la fin des années 80 : d’abord orientées vers le traitement social du chômage et les politiques de soutien à la croissance, elles sont marquées ensuite par un tournant vers l’intermédiation et le soutien des individus dans leur tentative d’insertion sur le marché du travail, tandis que les dépenses pour les emplois aidés diminuent.

En parallèle du traitement social du chômage, se met en place son traitement économique avec l’idée que « le niveau du coût du travail pour les emplois non qualifiés est responsable de l’insuffisance des créations d’emplois » (Dares, 2003). Le coût salarial et les rigidités du marché du travail sont mis en avant pour expliquer le chômage. C’est dans ce cadre qu’en 1986, sont décidés des allégements généraux des cotisations sociales pour les employeurs (abaissement du taux de l’impôt sur les sociétés, réduction de la taxe professionnelle), ainsi que des mesures de dérèglementations sociales. Début 90, les mesures d’allègement des charges des entreprises (impôt sur sociétés abaissé, taxe professionnelle plafonnée, allègement de cotisations sociales, exonération de charges pour embauche d’un premier salarié) sont accentuées.