• Aucun résultat trouvé

De l’unaire au ternaire

Dans le document tel-00823278, version 1 - 16 May 2013 (Page 80-83)

DEUXIEME PARTIE

A - DES CONCEPTS

2) De l’unaire au ternaire

Pour comprendre au mieux tout le sens symbolique que le bateleur revêt dans la quête initiatique, Shoral90 nous conseille de consulter « l’archéomètre de Saint-Yves d’Alveydre » et ses vingt deux signes sacrés de « l’alphabet très ancien de l’Atlantide dit Vatan ». Pour ce dernier, le couvre chef du bateleur (Planche X, fig. 22, lame I) symbolise les énergies qui prennent source dans les étoiles. Cet infini d’énergies se construit par l’association de trois signes de cet alphabet que sont Aleph 1, Samech 60 et Thau 400 (Planche X, fig. 21). Cette lecture symbolique laisse à penser que la psyché humaine se structure selon trois modes énergétiques.

Le premier, Aleph 1 est symbolisé par une ligne droite qui scinde le cercle en deux parties.

Cette droite représente la division en devenir de l’œuf primordial. La vie se construit dans la division de toute chose. Mais cette droite est aussi « la corde sonore » qui, selon les Chinois et les Orientaux, est la représentation parfaite du ciel : « elle a ce don tout spécialement parce qu’elle révèle, par analogie, à l’âme éduquée, l’idée du ciel et de ce qu’il contient, c’est-à-dire les principes et les lois que l’homme ne peut que constater et qui ne sont pas sa création. »91 Aleph 1 c’est aussi la corde au repos qui ne demande qu’à vibrer et se libérer de sa nature figée identifiable à la mort, dont est né le bateleur. Mais en réalité Aleph 1 porte la vie en lui. Aleph 1 symbolise l’ « écriture céleste ». Dans la symbolique Taoïste, Aleph est comparable au Dao d’avant la naissance du ciel « silencieux et vide » (Planche sans nombre, fig. 49). Ce premier symbole nous ramène à l’idée que l’appareil analytique s’apparente à un acte de procréation. Les énergies cosmiques viennent féconder les énergies telluriques, l’homme par le ciel en quelque sorte. Dans le Bloc-notes magique, Freud fait allusion à

90Shoral, Forces magiques, études archéométriques, Editeur Perthuis, Durville, 1970.

91 Ibid.

tel-00823278, version 1 - 16 May 2013

l’appareil perceptif psychique et prend la peine de le diviser en deux fonctions distinctes. La première qu’il nomme première couche correspond au « stimulus », et la seconde au « pare stimulus ». Ces deux phases représentent bien celle de la réception des stimuli, puis de leur harmonisation. Toutes deux font penser à la méiose cellulaire. Ce n’est que lorsqu’intervient la fonction de gravure avec le système Pc-Cs décrit par Freud que débute alors un phénomène de nidation similaire à celui de l’embryogénèse humaine, lorsque l’œuf vient s’implanter dans la matrice utérine féminine. S’en suit un phénomène de division que nous avons intitulé duplication de l’objet.

La lame I, le bateleur (Planche VII, fig. 14), représente la première carte du jeu initiatique. Elle symbolise le mode unaire. Tout comme le trait unaire dont parlera Lacan, le bateleur (Aleph 1), dans sa forme élémentaire de signifiant, représente l’œuf primordial, support de l’identification symbolique. Contrairement au signifiant tel que le définit Saussure, cet archétype du trait unaire n’est pas reproductible dans sa forme. Il disparaît au contraire au profit de l’objet qui en découle. C’est le propre de l’archétype qui, pour être parlant, n’a pas besoin de figurer au sein d’une chaîne de signifiants. C’est bien dans ce sens que Lacan (Séminaire sur l’identification) le considérait, en tant qu’élément de comptage d’individualités, un élément mathématique : le numéro un. Mais si celui ci, associé à d’autres traits unaires, ouvre des portes sur une structure cohérente (le processus d’individuation) ou sur des cycles (duplication, différenciation, inversion, effraction), il recouvre alors sa qualité de chaîne signifiante. C’est ainsi que du processus d’individuation jungien émergeront deux autres traits, celui du binaire et celui du ternaire. Aleph 1, c’est l’énergie contenue dans sa forme androgyne. Aleph 1 est une énergie en devenir.

Le second, Samech 60 est symbolisé par deux points au centre d’un cercle, comme les deux asters d’une cellule vivante en cours de division. Ces deux points symbolisent deux pôles d’attraction qui représentent le principe de la dualité et celui de l’aimantation qui scelle le premier principe. C’est de cette dualité dont l’initié devra s’affranchir dans un premier temps, tout d’abord s’arracher à lui-même par la mort (Planche VII, fig. 15, lame XIII). Cette tension ainsi résolue interrompra le cycle de duplication de l’objet qui conduit à la persona de Jung, facilitant ainsi l’élaboration du moi avec le démarrage de la seconde phase du processus de différenciation par croisement des traces mnésiques. Dans un deuxième temps, la pulsion devra à nouveau déconstruire ses modèles directeurs afin de n’en garder qu’un, celui que la nature nous invite à suivre et que Jung nomme le Soi. Pour Jung, c’est l’effraction du système symbolique (la tour foudroyée ou maison-dieu, Planche VII, fig. 16, lame XVI). Samech 60 c’est le Diable (planche VII, fig. 16, lame XV) qui tient sous sa coupe deux personnages

mi-tel-00823278, version 1 - 16 May 2013

ânes, mi-hommes solidement attachés l’un à l’autre par une corde qui symbolise les forces magnétiques. Cette corde est reliée à ses deux extrémités, formant deux points d’ancrage qui lui interdisent toute vibration, sauf entre ses deux points. Or le monde ne se limite pas à la seule entité humaine et, si l’homme veut découvrir le monde, il doit alors se libérer de son enclave duelle. Samech 60 symbolise l’énergie du mode binaire.

Avec le troisième, Thau 400, la corde sonore est libérée de tout pincement, elle se met à vibrer et prend alors la forme d’une sinusoïde. Les pulsions « du dehors » et celles « du dedans » sont enfin en harmonie, l’homme contient le monde et le monde le contient. Nous sommes en lame XXI, le monde (Planche VII, fig. 16) qui représente pour la numérologie le ternaire (chiffre trois). Mais, pour parvenir à ce but, l’initié devra se soumettre à l’épreuve du Jugement dernier (Planche VII, fig. 16, lame XX). Trois personnages y sont en effet représentés, le troisième sort du sarcophage, témoignant ainsi de sa résurrection. Sarcophage, en hiéroglyphe, se traduit par lieu de mort ou lieu de résurrection, c’est le Phénix qui renaît de ses cendres. Thau 400, c’est « l’acte du créer » qui ne peut s’élaborer qu’au-delà des luttes antagonistes, quand toutes les pulsions de contraintes sont résolues. Jung s’est amplement inspiré de la symbolique et de toutes les connaissances qu’elle recèle afin de définir sa théorie de l’individuation. Il y aura bien sur compris tout le parti qu’il y avait à en tirer afin de percer un peu plus encore les arcanes de la physiologie analytique.

Les trois signes de l’alphabet Vatan, Aleph1, Samech 60 et Thau 400, représentent le défi qui doit être relevé lors du processus d’individuation, passer de l’unaire au binaire puis du binaire au ternaire. Confucius disait : « Je n’instruis ni les paresseux, ni les suffisants.

J’abandonne qui est incapable de trouver trois quand je montre un »92. Le signe de l’infini résulte de l’association de ces trois formes. Le un retourne au un, il représente dans le tarot initiatique la puissance émise par les énergies stellaires et son pouvoir de transformation sur notre conscience, La représentation de Mithra, celle d’Osiris, ou encore de Jésus en sont les images les plus fortes. Dans leur expression la plus large, pour chaque être humain, elles traduisent la possibilité de se défaire de tout modèle, religieux, familial ou moral, pour n’en garder qu’un, celui du principe universel. Thau 400 symbolise le ternaire, dépassement de la pulsion binaire, principe absolu du Tao chinois.

92 Cleary, Th., Entretiens, In Les pensées de Confucius, Pocket, Paris, 1995.

tel-00823278, version 1 - 16 May 2013

Dans le document tel-00823278, version 1 - 16 May 2013 (Page 80-83)