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L’ORGANISATION INTERNE COMME FACTEUR DE LEGITIMITE

§ 2 UNE ORGANISATION INTERNE LIEE AUX FINALITES

B- L’ORGANISATION INTERNE COMME FACTEUR DE LEGITIMITE

L‘indépendance des autorités de concurrence, vue comme un choix du Congrès en vue d‘encadrer l‘accomplissement des missions de l‘organe de régulation413

, dépend des stratégies du Congrès pour anticiper le résultat de l‘activité des administrateurs experts qui la composent414. Les « procédures » déterminées ex ante par le législateur peuvent réduire la marge de pouvoir discrétionnaire de l‘autorité de concurrence en imposant par exemple des délais stricts dans la prise de décisions415. Le nombre de stratégies que le législateur pourrait envisager semble illimité, tout comme les formes d‘organisation interne possibles pour les autorités de régulation de la concurrence. Quant aux « procédures » liées à la manière dont les autorités de concurrence colombiennes sont structurées, trois points semblent essentiels dans l‘analyse de leur organisation interne.

Au delà de la composition interne existante – ou envisageable – des autorités de concurrence, une plus grande « impartialité structurelle » dans la prise de décision de ces autorités semble hautement souhaitable. A titre d‘exemple, ni le principe de séparation des fonctions de poursuite, d‘instruction et de participation au délibéré de la sanction, ni sa manifestation institutionnelle, n‘apparaissent clairement à l‘intérieur des autorités colombiennes chargées d‘organiser la régulation de la concurrence. En

vue prospectif, la concentration de l‘organisation de la régulation de la concurrence dans l‘autori té de concurrence transversale pourrait s‘inspirer également du modèle allemand.

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L‘indépendance est entendue ici comme le potentiel de l‘autorité de concurrence de s‘éloigner des finalités définies par le législateur ex ante, et non pas comme l‘influence du législateur sur le résultat de l‘activité de l‘autorité administrative indépendante (contrôle) ex post.

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droit colombien, une telle séparation semble pourtant requise par l‘article 29 de la Constitution, relatif au debido proceso de las actuaciones administrativas y

judiciales, et similaire à l‘article 6 de la CEDH416. Par comparaison, les autorités de régulation françaises ont assuré la séparation des fonctions de poursuite, d‘instruction et de participation au délibéré. Dans l‘exemple de l‘A.R.C.E.P417

, le chef du service juridique, le rapporteur et le collège de l‘A.R.C.E.P. assurent, chacun en ce qui le concerne, une des trois fonctions. De plus, le collège délibère hors la présence du rapporteur, du chef du service juridique ou de leurs adjoints418.

Ensuite, et toujours dans le même ordre d‘idées, les autorités qui participent à la régulation de la concurrence en Colombie doivent refléter une séparation structurelle effective entre l‘organe de décision et celui chargé du règlement des conflits entre opérateurs économiques. Comme dans le cas des sanctions adoptées par les autorités de concurrence, il s‘agit de compétences quasi-juridictionnelles qui doivent être entourées de garanties procédurales419.

Enfin, l‘organisation interne des autorités de la régulation de la concurrence en Colombie peut éventuellement permettre plus de participation des citoyens dans la prise de décisions. Dans ce but, le législateur colombien peut par exemple attribuer à

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Mathew D. MCCUBBINS, « The Legislative Design of Regulatory Structure », op.cit., p. 737.

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Article 6 de la CEDH, droit à un procès équitable.

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Articles 18 à 22 du règlement intérieur.

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Article 22, ibid. En outre, diverses dispositions du règlement intérieur visent à assurer, par exemple, le respect du principe du contradictoire ou un délai raisonnable dans la procédure de sanction, mais aussi dans la procédure de règlement des différends, voir par exemple les articles 10 et suivants de la décision n° 99-528, du 18 juin 1999, portant règlement intérieur (J.O.R.F., n° 166, du 21 juillet 1999, p. 10849). Cette évolution n‘en est cependant pas restée là. Une deuxième adaptation du règlement intérieur de l‘ARCEP a été réalisée le 10 janvier 2006 dans l‘optique de respecter la Convention européenne des droits de l‘homme (Décision n° 06-0044, du 10 janvier 2006, du 10 janvier 2006 de l‘Autorité de régulation des Communications électroniques et des Postes portant règlement intérieur, modifiée par les décisions n° 2007 -0556, du 28 juin 2007 et n° 2007-0705, du 26 juillet 2007 portant modification du règlement intérieur ; voir également lettre de l‘ARCEP, mars- avril 2006, p. 15). Elle prend en compte notamment les modifications introduites par la loi du 9 juillet 2004 qui donnent compétence au directeur des services de l‘autorité pour mettre en demeure la personne en infraction de se conformer aux obligations transgressées.

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C‘est le cas en France de la CRE. Le législateur français a réformé son fonctionnement en conférant à un organe spécialisé et intégré dans la Commission, le Comité de règlement des différends et des sanctions, les compétences indiquées par sa dénomination. Sa composition traduit la « juridictionnalisation » de l‘organe. Il est composé en effet de deux conseillers d‘Etat nommés par le vice-président du Conseil d‘Etat, et de deux conseillers à la Cour de Cassation désignés par le premier président de la Cour de Cassation ; v. Hubert DELZANGLES, op.cit., p. 443.

ZARATE-PEREZ Anibal-Rafael| Thèse de doctorat | juin 2011

une structure des autorités de concurrence la charge des rapports avec les opérateurs économiques concernés, ce qui paraît faciliter notamment la collecte des informations et le suivi journalier de l‘évolution du marché régulé. Cette structure peut constituer alors une sorte de relais entre l‘autorité de concurrence et ces opérateurs économiques, outre qu‘elle renforce en elle-même la légitimité de l‘autorité de concurrence « indépendante » en droit colombien. Si bien qu‘il faudra trouver un équilibre entre le souci d‘efficacité administrative et des mécanismes institutionnels légitimant l‘activité des autorités de concurrence « indépendantes ».

Pourtant, ces mécanismes statutaires devront être accompagnés d‘autres facteurs d‘indépendance. Comme nous l‘avons étudié, certaines garanties d‘indépendance liées à l‘organisation interne des autorités de concurrence, tels que le pluralisme à l‘intérieur de ces autorités, ne suffiraient pas à renforcer l‘indépendance statutaire de ces autorités. Il est par conséquent indispensable de compter avec des mécanismes additionnels d‘indépendance, tels que ceux liés au statut de leurs membres.

Chapitre 2

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