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Chapitre 2 : Insertion nationale et provinciale dans le système sud-est asiatique

2.1.1 L’intégration régionale, des enjeux économiques

Dans une perspective d’intégration régionale en Asie du Sud-Est continentale, et plus globalement en Asie-Pacifique, le Laos s’est premièrement appuyé sur la variable économique. Comme analysé dans le chapitre précédent (Tableau 1.1 et Figure 1.4), l’essor économique du pays et le développement national n’auraient pu se produire sans des aides publiques au développement (APD) et des investissements directs étrangers (IDÉ) conséquents. Tertrais décrit que la crise financière asiatique de 1997 a détourné les IDÉ pendant près de dix ans vers la Chine qui, à l’époque, rassurait davantage compte tenu de sa croissance rapide. Mais au cours de la deuxième moitié des années 2000, les IDÉ au Laos ont repris de l’importance, au point de dépasser en 2013 le volume annuel des APD. Cette tendance s’est corrigée dans l’ensemble de l’Asie du Sud-Est, où les flux annuels d’IDÉ ont augmenté de 26% au tournant des années 2010, alors qu’au même moment, les flux d’IDÉ en Asie orientale – Chine, Japon et Corée du Sud – n’ont augmenté que de 9% annuellement. Entre 2000 et 2011, le Vietnam, la Chine et la Thaïlande sont respectivement les principaux investisseurs au Laos (Tertrais,

2014 : 54-55). Favorisés par le développement progressif des axes routiers (Warr, 2008), ces investissements étrangers se répartissent dans plusieurs secteurs touchant prioritairement l’exploitation des ressources naturelles et de la terre, principales richesses du pays (Delang et al, 2013 : 151). Plus spécifiquement, les secteurs hydroélectriques, miniers (argent, cuivre, gypse, or, pierres précieuses etc.) et agricoles (hévéa, café, thé, eucalyptus, canne à sucre etc.) constituent le socle de la modernisation de l’économie rurale. Dans un pays où l’État reste propriétaire des terres, d’importants revenus fiscaux peuvent être produits, à la fois grâce aux concessions d’exploitation et aux produits d’exportations (GoL, 2011 : 17-18). Entre 1989 et 2008, les projets portant sur les ressources naturelles ont mobilisé près de 80% des IDÉ (Kyophilvong, 2009 : 81). En plus de stimuler la croissance et de générer d’importants revenus, l’exploitation des ressources naturelles permet au Laos d’accélérer son processus d’intégration régionale en renforçant les liens commerciaux avec ses pays voisins. Par ailleurs, cette orientation économique s’arrime incontestablement à la stratégie de réduction de la pauvreté :

Future growth enhancing investments and development priorities which reflect the economic potential of the country’s natural resource base have been identified by the Government as a vehicle for increasing national revenues and, thus, poverty eradication. Hydropower, mining, tourism, wood- and agro-processing industries are the highest priorities for investments leading to economic growth and increased revenues (GoL, 2004 : 5).

Dès le début des années 1990, le secteur de l’exploitation hydroélectrique est apparu pour le l’État laotien comme une évidence, compte tenu : (i) du potentiel hydraulique du Mékong et de ses affluents, (ii) de la situation stratégique du pays dans une région à croissance rapide, et (iii) du besoin en devises étrangères (Usher, 1996 : 127 ; Porter et Shivakumar, 2011 : 6-7). Le Laos a pour ambition d’être le premier producteur d’électricité en Asie du Sud-Est continentale. Ainsi, en 2010, on dénombre onze installations hydroélectriques opérationnelles, et près d’une centaine d’autres en construction ou en projet d’étude (Figure 2.1), bien plus que dans les pays voisins (ICEM, 2010). L’un des projets à la fois des plus impressionnants et des plus complexes, ayant abouti en 2010, est la construction du barrage Nam Theun 2 (NT2) dans la province de Khammouane (Phomsoupha, 2010). Avec un coût total de 1,5 milliard de dollars, le NT2 a une capacité de production de 1 088 Mégawatts (MW).

Plus de 93% de l’électricité générée par le barrage est exportée en Thaïlande et les 7% restants sont utilisés pour la consommation nationale (Warr et al, 2012 : 443-444). Pour 2020, le Laos prévoit atteindre une capacité de production électrique supplémentaire d’environ 12 500 MW, majoritairement destinée à l’exportation (2 930 MW opérationnels en 2011), et de fournir un accès électrique à 90% des foyers du pays (Banque mondiale, 2009a ; BAD, 2010 : 4 ; Banque mondiale, 2011a : 5). Comme l’évoque Pholsena, la Thaïlande est le principal bénéficiaire de la production électrique du Laos, qui en achète plus de 80%, suivie par le Vietnam, dont la « demande reste

comparativement faible ». Ainsi, les revenus tirés de la seule vente d’électricité ont

permis de multiplier rapidement par 4,6 la valeur des exportations du pays, alors qu’elles sont passées de 24 millions de dollars ÉU en 1995 à 112 millions de dollars ÉU en 2000 (Pholsena, 2011 : 162). Selon une étude de scénarios de la Banque mondiale, publiée en 2011, le secteur hydroélectrique pourrait rapporter, entre 2010 et 2025, une moyenne annuelle de 330 millions de dollars ÉU en revenus fiscaux pour l’État laotien (Banque mondiale, 2011a : 6). Ces revenus, en particulier ceux découlant de la production d’électricité du barrage NT2, doivent officiellement permettre à l’État de poursuivre sa stratégie de développement national et de réduction de la pauvreté. À long terme, et sous la supervision de la Banque mondiale, différents domaines seront financés comme l’éducation (35%), les réseaux routiers (30%), la santé (20%) et l’environnement (15%), tous considérés par l’État laotien comme prioritaires (Warr et

al, 2012 : 444). Comme l’assure la Banque mondiale, « NT2 revenues will be applied effectively and transparently to priority activities in support of poverty reduction and environmental management » (Banque mondiale, 2009b : 1).

Du côté du secteur minier, les réserves minérales considérables dont dispose le pays constituent un atout précieux pour attirer les capitaux étrangers. À partir des années 1990, des programmes de prospection et d’exploration sont financés par des organismes internationaux en vue de cartographier les ressources géologiques et minérales du Laos (Banque mondiale, 2011b : 5). Parallèlement, l’arrivée rapide d’investisseurs étrangers a poussé l’extraction de ces ressources à un stade plus avancé, marquant la transition d’une exploitation jusqu’alors artisanale à une exploitation davantage industrielle (Mottet, 2013 : 220-223). L’or et le cuivre sont les principaux minerais exploités et exportés. Le potentiel total d’extraction de ces minerais est de 500-600 tonnes pour l’or et de 8 à 10 millions de tonnes pour le cuivre (MINDECO, 2006 : 6). La Chine, le

Vietnam et la Thaïlande sont les trois premiers investisseurs dans le secteur minier et comptent respectivement pour 57%, 22% et 7% des investissements au Laos, soit plus de 86% du total (Kyophilvong, 2009 : 90). En 2008, 85 compagnies minières étrangères et 42 compagnies minières nationales étaient recensées, contribuant en tout à 178 projets miniers – aux différents stades de prospection (40), d’exploration (85), d’étude de faisabilité (7), et d’exploitation (46) – sur l’ensemble du territoire national (DoM, 2008). Parmi ces 127 compagnies minières, deux compagnies chinoises combinent une valeur de production de 700 millions de dollars en 2008, MMG Lane Xang Minerals Limited (MMGLXML) et Phu Bia Mining (PBM), ce qui représente plus de 90% de la valeur totale de production de l’industrie minière du Laos. Selon une autre étude de scénarios de la Banque mondiale, le secteur minier pourrait rapporter, entre 2010 et 2025, une moyenne annuelle de 163 millions de dollars en revenus fiscaux pour l’État laotien (Banque mondiale, 2011b : 16-20). De la même manière, les revenus tirés de l’industrie minière doivent d’abord permettre de financer le développement national et de réduire la pauvreté : « Energy and mining sector is a strategic sector in both the

short and long term. It is an energy sector and it aims to serve the society and generate income to accumulate capital, to be expended on the country’s socio-economic development » (GoL, 2011 : 99).

Enfin, pour ce qui tient du secteur agricole, la Banque mondiale estime qu’en 2013 environ 10% du territoire étaient cultivés, soit plus de 2 335 000 d’hectares. Cependant, « il est difficile de connaître la surface totale des terres agricoles converties en

plantations commerciales », en raison de l’absence de statistiques officielles et des

rapides transformations rurales (Pholsena, 2011 : 166). Malgré tout, il est possible d’affirmer que ces surfaces sont en augmentation, et continueront d’augmenter à l’avenir : « Ministry of Agriculture and Forestry […] have targeted a goal of 500,000

hectares of industrial plantations in Laos by 2020 » (Barney, 2007 : 10-11). Le café et

l’hévéa constituent deux cultures prépondérantes. Au sud du pays, sur le Plateau des Bolovens, la production de café totalise 70 000 hectares, près de 95% de la surface totale des plantations de café au Laos (LCB, 2014 : 4). Depuis 2008, le Vietnam et la Thaïlande sont les principaux investisseurs dans le secteur du café (Delang et al, 2013 : 155). L’Association des exportateurs de café laotien recense 28 000 tonnes de café exportées en 2013 – principalement vers l’Europe – soit plus de 95% de la production totale du Laos (Schönweger et Messerli, 2015 : 98). Dans les provinces du nord, la

culture de l’hévéa occupe des surfaces bien plus grandes, plus de 200 000 hectares en 2007 selon le Comité national de Planification et d’Investissement (Phimmavong et al, 2009 : 502). Ici, le besoin en matières premières de l’économie chinoise et la proximité géographique de la frontière « influenced the shape of ‘development’ in adjacent parts

of […] Laos » (Sturgeon, 2013 : 71). Outre le fait d’être une matière indispensable dans

l’industrie mondiale (Umar et al, 2011), le caoutchouc naturel apparaît, selon Manivong et Cramb (2008), comme une production où les investissements sont lucratifs pour des populations montagnardes pauvres, impliquées dans des politiques de sédentarisation et de réduction de la pauvreté. En 2007, plus de 2700000 tonnes de caoutchouc ont été exportées, soit une moyenne d’environ 1,36 tonne/hectare (Hicks et Voladeth, 2009 : 25).

Source : MRC Hydropower database – Crédits : University of Canterbury

Le survol de ces trois secteurs, centraux dans l’économie laotienne, permet ainsi d’avoir un aperçu des stratégies adoptées par le gouvernement pour intégrer le pays dans l’économie mondiale. Combinés, les revenus engrangés devraient en théorie permettre à l’État de développer le pays et d’améliorer les conditions socioéconomiques de la population de façon durable. Malgré tout, il faut préciser que ces projets – l’édification de barrages, l’extraction de minerais, ou le développement de plantations – s’accompagnent parfois d’effets indésirables sur les populations et leurs milieux de vie, en particulier d’un point de vue environnemental. Le World Wide Fund (WWF) s’alarme au sujet de la perte de biodiversité et l’érosion accélérée des berges du Mékong (RFI, 2012) ; Lazarus s’interroge de l’impact sur l’utilisation des sols et au sujet de la préservation des forêts (2009 : 27-28) ; et Phimmavong rappelle les préoccupations des consommateurs, des scientifiques et des politiciens à propos du changement climatique, de la biodiversité et de la durabilité des ressources naturelles (2009 : 508). D’un point de vue socioéconomique, les projets hydroélectriques (BAD, 2010), miniers (Delang et

al, 2013) et agro-industriels (Weiss, 2013) nécessitent parfois des relocalisations ou un

accaparement des terres qui peuvent avoir pour conséquence un appauvrissement des populations rurales : « The government recognizes that the modernization itself […]

could create social changes that would leave some people unable to benefit from the NEM and even worse off » (Rigg, 2005 : 25). L’apparition des processus de

marchandisation et de monétarisation ont par ailleurs provoqué une compétition accrue pour l’accès à la terre (Sturgeon et al, 2013 : 67), une individualisation croissante au sein des communautés (Pholsena, 2011 : 169), et une augmentation des services à bas prix, notamment des services sexuels (Doussantousse et al, 2011). Enfin, Usher s’inquiète de l’impact des projets d’investissements sur les moyens de subsistance des plus pauvres, qui dépendent à la fois des forêts et des rivières (1996 : 126).

En somme, l’intégration économique du pays suppose qu’à long terme les bénéfices du développement et de la modernisation amélioreront les conditions de vie des populations rurales. Mais cette stratégie implique aussi à court terme certains compromis dont les premières victimes sont ces mêmes populations rurales et l’environnement. En plus de la variable économique, le Laos s’est deuxièmement appuyé sur une variable politique, incontournable pour parvenir à pleinement s’intégrer dans la région.

2.1.2 … mais aussi géopolitiques

Pour comprendre les enjeux géopolitiques actuels, il est nécessaire de rappeler brièvement les trajectoires qui ont contribué à la formation du territoire. En complément des aspects historiques décrits dans le premier chapitre, quelques éléments politiques sont à ajouter. Comme l’explique Taillard, le Laos est à la fois une terre de transition entre deux grands ensembles physiques, un pays de passage pour le commerce, et un carrefour des peuplements. Mais, par sa configuration spatiale et son histoire, le Laos est aussi un État-tampon. Depuis le 10ème siècle, le Laos « s’est trouvé au centre de tous

les conflits entre les puissances du nord et du sud d’abord, puis entre celles de l’est et de l’ouest ensuite » (Taillard, 1989 : 29-31). Malgré son statut d’État dominé, le pays

est parvenu à se maintenir, notamment grâce à son système politique :

On touche ici à l’une des conditions de reproduction de l’État-tampon : ses principaux voisins veulent qu’il existe un allié sûr à leurs marges, de manière à les séparer d’un ennemi potentiel ou à leur garantir l’accès à un axe stratégique. C’est ce qui explique que le Laos, malgré un rapport de force défavorable avec ses voisins, ait pu persister jusqu’à nos jours alors qu’il a été, en maintes occasions depuis le XVIIIe siècle, sur le point de

disparaître (ibid, 1989 : 31).

Désormais, l’État laotien espère pouvoir jouer un rôle plus important à l’échelle régionale. Avec la fin de la Guerre froide et des guerres d’Indochine, Dwyer parle alors de « regional economic (re)integration » (2014 : 386) avec pour objectif de transformer les « battlefields into marketplaces », selon le mot du Premier ministre thaïlandais Chatichai Choonhavan, en 1988. Le processus d’intégration politique du Laos à l’échelle régionale s’est déroulé en quelques étapes depuis le début des années 1990. Son adhésion à l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) le 23 juillet 199718 constitue l’un des premiers aboutissements majeurs venant lui donner un rôle, même minime, sur la scène politique internationale (Pholsena et Banomyong, 2004 : 30). L’une des principales raisons de l’adhésion du Laos à l’ASEAN est simplement dû au fait que le pays n’avait aucun intérêt à rester indéfiniment isolé. Les dirigeants laotiens de l’époque le savaient ; d’où la nécessité des réformes du NME qui ont mis fin à l’isolement économique et diplomatique du pays, tout en réorientant sa politique interne, devenue plus ouverte et moins restrictive (Kislenko, 2009 : 46). Wang confirme

cette démarche et précise que les principales motivations d’intégration des pays d’Asie du Sud-Est sont politiques et économiques. Ces motivations permettent notamment de consolider la paix, d’accroître la sécurité régionale, de rendre les pays faibles plus forts en étant unis plutôt que divisés, d’établir des accords commerciaux régionaux réciproquement préférentiels, etc. (2005 : 22-23). D’autres motivations sont aussi énoncées par Tung, lorsqu’elle passe en revue les trois grandes théories de relations internationales en Asie, afin de comprendre les relations entre le Vietnam et l’ASEAN (2002 : 109-118). Pholsena et Banomyong transposent cette grille au cas du Laos, ce qui permet similairement d’appréhender les relations du pays avec l’organisation. (i) Le Laos a plus à gagner par la coopération que par la compétition. L’ASEAN permet au pays d’avoir, d’une part, une plus grande visibilité internationale et, d’autre part, lui confère un statut plus égal face à des pays voisins bien plus puissants. (ii) Sa participation à des institutions multilatérales permet de servir ses intérêts nationaux, comme la sécurité. Un exemple concernait le contentieux avec la Thaïlande au sujet de la délimitation des 1 754 kilomètres de frontières terrestres et fluviales, source de tensions entre les deux pays (St John, 1998 : 38)19. L’adhésion du Laos à l’ASEAN a ainsi offert la possibilité d’entreprendre des débats plus apaisés avec la Thaïlande. (iii) Basé sur une vision constructiviste, l’ASEAN promeut la paix régional et la stabilité, ce qui garantit au Laos une certaine autonomie dans sa politique intérieure comme étrangère. À l’inverse, durant les périodes de conflits qui opposaient des nations plus fortes, le pays était contraint de se rallier à un camp en raison de sa vulnérabilité (Pholsena et Banomyong, 2004 : 35-45). Au final, comme l’affirme Weightman, l’union de ces pays leur a jusqu’à présent offert plus d’avantages que de contraintes : « These

economic agreements might change the face of ASEAN, which until recently has been most effective in the political arena, curbing hostilities and acting as a forum to solve numerous disputes. Most importantly, a strong regional identity has been created among its members » (2011 : 409). Parallèlement, l’association des pays d’Asie du Sud-

Est leur concède l’opportunité de faire face aux nouveaux enjeux globaux, et plus particulièrement de faire contrepoids à la puissance chinoise (Shambaugh, 2013), supérieure économiquement (Ng, 2007 : 188) et militairement (Fravel, 2008 : 125).

19 Voir Michel Bruneau (2006) L’Asie d’entre Inde et Chine – Logiques territoriales des États, pour plus

Lorsque Ng discute de l’émergence économique de la Chine et des implications politiques pour l’Asie du Sud-Est, il se demande : « Does China pose a threat? » (2009 : 188). À partir de 1995, lorsque la Chine fut officiellement accueillie par l’ASEAN comme partenaire de dialogue, les objectifs stratégiques du pays avec la région ont été (i) de maintenir un environnement stable sur ses périphéries, (ii) d’encourager les liens économiques qui contribuent à la modernisation du pays et à la stabilité du régime, (iii) de convaincre les autres pays que la Chine n’est pas une menace, et (iv) d’être reconnue comme la puissance asiatique externe la plus influente (Bronson, 2007 : 5-7). Cette campagne diplomatique, plus familièrement connue comme la China’s Charm Offensive (Kurlantzick, 2007), vise à embellir les relations qui, selon les mots de Wen Jiabao – ancien Premier ministre du PRC – « hoped that

Southeast Asian countries would come to regard China as a ‘friendly elephant’ »20.

Ainsi, la Chine ne représenterait pas directement une menace pour la région mais davantage un partenaire commercial de poids, même si fortement concurrentiel. De plus, comme le pays est largement dépendant de l’importation de ressources naturelles pour son développement, ce que Mondejar et Chu n’omettent pas en comparant l’Asie du Sud-Est continentale au « China’s own backyard » (2005 : 211), son intérêt primordial est d’accroître son influence dans la région. Pour la Chine, le Laos représente un partenaire commercial de choix « because of the country’s ample mineral resources,

hydroelectric and agricultural potential, and because of its key geographic location between China’s landlocked southwestern provinces and Thailand » (Storey, 2011 :

170). Bien que la Chine soit toujours en concurrence avec le Vietnam et la Thaïlande pour devenir le principal investisseur et partenaire commercial du Laos, il est vraisemblable que la Chine prenne graduellement la main en raison du nombre croissant d’investissements et de migrants chinois qui traversent la frontière – en provenance du Guangdong, du Guangxi, du Sichuan et du Yunnan (Pina-Guerassimoff et Guerassimoff, 2004 : 96). Dû à son étroite relation avec le Vietnam (Case, 2011 : 206), le gouvernement laotien espère préserver un certain équilibre dans sa relation avec la Chine « but maintaining that equilibrium will inevitably become far more challenging » (Storey, 2011 : 175). De la même sorte, même si la plupart des pays membres de l’ASEAN ont bénéficié de l’émergence de l’économie chinoise, certains craignent « that some Southeast Asian countries may fail to catch up as China moves up its

20

technological ladder so much so that such complementary relationships may break down in the future [and some] have expressed their concern of de-industrialization and a repeat of old colonial division of labour » (Ng, 2009 : 205).

La progressive intégration politique du Laos à l’échelle régionale lui a donc permis de prendre part aux jeux diplomatiques tout en contribuant à l’essor économique de la région. Pour autant, ce gain de visibilité confronte aussi le pays à de nouveaux enjeux, qui nécessitent de trouver un juste équilibre, comme avec ses voisins chinois et vietnamien.