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L’instabilit´ e des barchanes

Dans le document Morphogenese et Dynamique des Barchanes (Page 148-150)

5.2 Instabilit´ e fondamentale des barchanes solitaires

5.2.3 L’instabilit´ e des barchanes

Pour ne pas perdre en g´en´eralit´e, nous pouvons distinguer deux situations tr`es diff´e- rentes comme le montre le sch´ema Fig. 5.2.

Fig. 5.8 –Diagrammes de stabilit´e pour une barchane solitaire. (a) cas ∆ > 0 (cas r´eel), le flux de sortie grandit moins vite que le flux d’entr´ee et la barchane est instable. (b) ∆ < 0, le flux de sortie grandit plus vite que le flux d’entr´ee et dans ce cas, la barchane est dans une position d’´equilibre stable. Sur ces deux graphiques la courbe en pointill´es −.−, indique que pour α trop grand (a) ou trop petit (b), aucune solution n’est possible, le flux d’entr´ee ne pouvant s’ajuster au flux de sortie.

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un bilan de masse positif, et elle grossit. Ceci ´etant, elle est instable, puisque comme la dune grossit elle capte plus de sable! R´eciproquement, si le flux diminue l´eg`erement, la dune rapetisse et donc re¸coit moins de sable, entraˆınant une diminution du volume de la dune. C’est dans cette situation qu’est naturellement le Cccmod`ele. On peut aussi concevoir l’instabilit´e avec un flux constant et une taille qui varie l´eg`erement, l’effet est le mˆeme: la barchane est instable. Par contre si ∆ < 0 nous sommes dans la situation oppos´ee puisque la perte de sable ´evolue plus vite que l’apport de sable par qin et la dune est

stable : elle perd plus de sable quand elle grossit qu’elle n’en gagne et donc retrouve sa position d’´equilibre. Ainsi, la stabilit´e d´epend du signe de ∆, ce qui revient `a dire que la stabilit´e d’une barchane repose sur la diff´erence de croissance entre la taille de ses cornes et sa largeur totale. Le mod`ele Ccc pr´evoit le cas instable tout comme les rares mesures de terrains [32] montrant que la largeur des cornes croit proportionnellement moins vite que la largeur de la dune. Cette instabilit´e se retrouve formellement dans l’analyse du bilan de masse d’une barchane initialement dans la configuration ´equilibr´ee, V = V∞, w = w∞

et qin = q∞ et dont la largeur devient w et le volume devient V `a cause d’une petite

perturbation:

˙

V = qinw − Q(∆ + αw) (5.8)

soit en rempla¸cant V par son expression en fonction de w : ˙

w = q∞w − Q(∆ + αw)

3bw2 , (5.9)

Avant d’aller plus loin, il est naturel de d´efinir le temps d’adaptation `a un changement de volume τv par : τv = V − V∞ ˙ V , (5.10)

ce qui, au voisinage du point d’´equilibre donne apr`es simplification des termes d’ordre O(2) τv =

3bw3∞

Q∆ (5.11)

La longueur d’adaptation correspondante est λv d´efinie par:

λv=

3abw2

∆ (5.12)

Dans ce cas, le bilan de masse lin´earis´ee autour du point d’´equilibre (w∞, q∞) s’´ecrit tr`es

simplement :

τvw = w − w˙ ∞. (5.13)

Le signe de τv ´etant celui de ∆, nous retrouvons le caract`ere instable des barchanes dans

le cadre du mod`ele Ccc . En revanche si l’on suppose ∆ < 0, les barchanes deviennent des objets stables. En effet, dans cette situation (voir Fig. 5.8), le flux de sortie varie plus rapidement que le flux d’entr´ee lorsque la largeur de la dune change.

Les barchanes produites par le mod`ele Cccsont ainsi instables. Mais de plus, comme les donn´ees de terrains et les r´esultats des exp´eriences ”aquarium” indiquent tout deux que le flux de sortie augmente moins vite que le flux d’entr´ee avec la largeur de la barchane, il faut se r´esoudre `a l’id´ee que les barchanes sont ”naturellement” instable, et qu’il ne s’agit aucunement d’un artifice de la mod´elisation Ccc . Pourquoi, dans ce cas observe t’on des barchanes sur le terrain? Un argument possible, propos´e dans la th`ese de Sauermann [32], est que ce type d’instabilit´e est tellement lent, que nous ne pouvons observer effectivement

son d´eveloppement. Malheureusement, cet argument ne tient pas. En effet, en utilisant les ordres de grandeur d´etermin´es dans la section pr´ec´edente, nous pouvons estimer τv et

λv les temps et distances sur lesquels l’instabilit´e pr´ec´edente se d´eveloppe. Nous trouvons

pour une dune de 20m de large, τv ' 14.4 mois et λv ' 160 m, alors que pour une dune

bien plus large de 100 m, nous obtenons : τv ' 1.1 si`ecle et λv ' 4 km. Ces ordres de gran-

deur peuvent paraˆıtre importants. N´eanmoins, les barchanes que nous observons dans les corridors de dunes sont a priori bien plus vieilles! Plus pr´ecis´ement, il est courant de suivre l’´evolution de dune de 20 m sur plusieurs ann´ees et sur des distances bien plus grandes. De mˆeme les m´ega barchanes de la r´egion de Tarfaya, existent probablement depuis des mill´enaires si on date leurs apparitions aux alentours de la baisse du niveau des oc´eans dans cette r´egion [121].

En ce qui concerne les couloirs de barchanes, cette distance caract´eristique de (d´e)stabilisation λv est bien inf´erieure `a la longueur d’un champ de dune (sup´erieure `a 100km) et n’importe

quelle ´evolution se faisant sur cette ´echelle a largement le temps de s’y d´evelopper et de- vrait ˆetre observ´ee au moins dans les corridors, ce qui n’est pas le cas. Ainsi, l’argument de Sauermann ne tient pas.

L’existence de cette instabilit´e fondamentale est donc ´etrange puisque nous observons effectivement des barchanes sur le terrain. Il est alors tentant d’imaginer que les inter- actions entre dunes stabilise l’´evolution des barchanes individuellement d’une part, et de ce fait stabilise aussi les corridors. Avant d’aller plus loin et de regarder la stabilit´e d’un corridor de barchanes en fonction de la stabilit´e individuelle de ces dunes, nous pouvons nous int´eresser `a deux autres ´echelles de temps et d’espace, tr`es diff´erentes mais qui vont intervenir n´ecessairement dans une ´etude de stabilit´e d’un corridor. Le premier temps est simplement le temps de la dynamique propre d’une barchane (temps de retournement) et le deuxi`eme est celui d’interaction par le flux entre deux barchanes voisines.

Dans le document Morphogenese et Dynamique des Barchanes (Page 148-150)