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L’importance de la taille

Dans le document Luxe Marketing Management (Page 23-26)

Dans presque toute activité, la taille est un élément majeur, voire l’élément le plus important, lorsque l’on compare des entreprises ou des industries entre elles.

Cependant, dans le monde du luxe, la taille ne semble pas revêtir une si grande importance. En général, les entreprises sont petites, mais elles sont respectées et impressionnantes. Dior Couture réalise un chiffre d’affaires annuel d’environ 800 millions d’euros alors que le groupe PSA réalise un chiffre d’affaires de 56 milliards d’euros. Peugeot est donc en fait 70 fois plus grand que Dior Couture. Si nous prenons General Motors, le chiffre d’affaires est aux alentours de 150 milliards d’euros et est donc 200 fois plus grand que celui de Dior Couture. Les nombres de salariés se trouvent quasiment dans le même rapport, si ce n’est un rapport plus élevé.

Mais lorsque l’on demande à un Américain de citer un produit français ou une entreprise française, il citera Dior avant Peugeot. La même chose se produit si vous interrogez un consommateur chinois ou japonais. Quelque chose justifie cette différence : la notoriété. La marque Dior est plus connue de par le monde, que la marque Peugeot. Et cette grande notoriété vient du fait que les consom-mateurs ont une véritable curiosité pour le luxe et pour les marques liées à la mode. Ils lisent des articles à leur sujet dans les magazines et souhaitent en savoir plus.

Avec un portefeuille de plus de cinquante marques, le groupe LVMH dégage un chiffre d’affaires d’environ 15 milliards d’euros et doit être comparé, sur ce point, à Gap, dont le chiffre est de l’ordre de 11 milliards d’euros, ou à Zara Inditex, avec ses 8 milliards d’euros. En d’autres termes, si la comparaison est judicieuse, la moyenne des marques LVMH – ce qui recouvre quelques-unes des marques les plus puissantes de l’industrie du luxe – est à peu près 10 fois ou 20 fois plus petite que Zara ou Gap.

Une première conclusion s’impose : les marques de luxe sont relativement petites mais jouissent d’une très grande notoriété. Ainsi, malgré leur image et leur présence publicitaire dans le monde entier, ces entreprises sont de taille petite ou moyenne (à l’exception des grands groupes qui sont d’ailleurs souvent des conglomérats de petites entreprises). Certaines entreprises sont très petites.

Cardin réalise un chiffre d’affaires annuel mondial de seulement 10 millions d’euros. Carven, de son côté, génère un chiffre d’affaires de l’ordre de 1 à 2 millions d’euros. C’est un chiffre beaucoup plus petit que celui réalisé par un concessionnaire Volkswagen d’Athènes ou par un petit groupe propriétaire de cinq supermarchés à Birmingham.

LES PARTICULARITÉS DE L’INDUSTRIE DU LUXE

© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit

Comment des entreprises aussi petites peuvent-elles avoir une présence aussi forte dans l’esprit des consommateurs ?

Des chiffres d’affaires difficilement comparables

Dans le secteur du luxe, comparer les chiffres d’affaires peut revenir à comparer des pommes et des oranges, car ces chiffres peuvent résulter d’éléments très divers. Si nous prenons par exemple le chiffre d’affaires de Louis Vuitton, les choses sont relativement simples car cela comprend exclusivement les ventes réalisées par les 400 magasins du groupe dans le monde. Mais si nous prenons Carven, son chiffre d’affaires est l’addition des ventes détail de leur propre bouti-que, des ventes de prêt-à-porter chez les grossistes, des ventes export et des reve-nus provenant des licences attribuées à des entreprises externes au groupe. En règle générale, on peut dire que les ventes de gros représentent environ la moitié des ventes détail, les ventes export représentent autour de 20 % des ventes détail et les royalties de licences se montent en général à 10 % des facturations, qui, à leur tour peuvent provenir du commerce de détail, de gros, et des ventes export.

Cela n’a donc tout simplement pas de sens de comparer deux entreprises en termes de chiffre d’affaires.

Pour comparer les chiffres d’affaires de deux marques, il faudrait multiplier une partie de l’activité par un coefficient pour rendre compte des différences entre les ventes export et les ventes en gros, par exemple, de manière à se ramener finalement à un équivalent ventes détail. Mais cela demeurerait trompeur car une marque se développant essentiellement grâce à des accords de licence reste plus faible qu’une marque contrôlant 100 % de ses activités dans ses propres points de vente. De surcroît dans la plupart des cas, la répartition entre détail, commerce de gros, export et royalties provenant de licences n’est pas communiquée et il est difficile d’établir des hypothèses.

Le fait que certaines marques se développent à travers des licences, avec des royalties comptant pour seulement 2 à 3 % du prix de vente consommateur, peut expliquer pourquoi la taille des entreprises est parfois très réduite, même lorsque la marque est très présente dans divers magasins de par le monde. Cepen-dant, une marque comme Hermès qui (excepté pour ses parfums) vend presque exclusivement dans ses propres boutiques, réalise quand même un chiffre d’affai-res d’1,5 milliard d’euros. Ce n’est peut-être pas grand-chose comparé à PSA ou Renault, mais pour une entreprise de luxe, c’est assez impressionnant.

Le mélange des activités rend difficile la compréhension de quelques commen-taires officiels de dirigeants d’entreprises de luxe lorsqu’ils parlent d’un objectif de 100 millions d’euros de chiffre d’affaires en Chine ou au Japon. Parlent-ils de

ventes globales, telles qu’elles seront reportées dans leurs bilans consolidés, ou parlent-ils d’un volume de ventes au détail qui ne leur rapportera que 3 à 5 millions d’euros en redevances provenant de licences ? La différence est bien évidemment considérable.

En règle générale, les communiqués officiels doivent être considérés avec circonspection, étant donné que, comme nous venons de le voir, comparer des entreprises du luxe en termes financiers peut s’avérer assez difficile.

Un personnel en nombre limité

Le fait que la plupart des entreprises soient petites ou de taille moyenne a une conséquence évidente : leur personnel est en nombre limité. En Chine par exemple, les marques de luxe les plus performantes ont des équipes de 200 à 300 personnes, la plupart d’entre elles travaillant dans les boutiques. L’aspect « petite entreprise » est encore amplifié par le fait que les entreprises doivent avoir une présence mondiale. Il est probablement vrai de dire qu’il y a plus de responsables du marketing dans des entreprises comme Procter & Gamble ou Nestlé que dans la totalité du secteur du luxe.

Plusieurs éléments expliquent cette situation.

D’abord, certaines entreprises ne sont pas seulement petites : elles peuvent être très petites. Certaines marques fonctionnent uniquement avec un petit studio de création qui examine les tendances et conçoit les produits, tout le reste des activités étant confié à des partenaires sous licences et à des distributeurs. Et donc, après le studio de création, le domaine d’activité le plus important est celui du service juridique, qui peut relever d’un conseil externe à l’entreprise, et qui prépare et assure le suivi des contrats avec les partenaires externes à l’entreprise. Certaines entreprises dans le domaine de la mode ont des effectifs mondiaux ne dépassant pas 15 à 30 personnes.

Ainsi, la marque Ungaro ne possède qu’un studio de création et un nombre limité de boutiques, la fabrication et la distribution étant entièrement sous-traitées.

Cette tendance à sous-traiter les activités de production constitue la seconde caractéristique très particulière du secteur du luxe. Chanel ne possède pas ses propres usines fabricant son prêt-à-porter ou sa maroquinerie. La plupart du temps, les entreprises du luxe ne possèdent qu’une ou deux usines réalisant des prototypes et quelques gammes de produits. Le reste est soigneusement contrôlé, mais réalisé par des sous-traitants. C’est ainsi le cas de la plupart des montres de luxe, dont les éléments sont produits par différentes entreprises, la marque se chargeant de l’assemblage final.

Pour un fabricant d’automobile, tout est question d’usines, de machines et d’équipement ; pour les marques de luxe, en revanche, c’est affaire de création et

LES PARTICULARITÉS DE L’INDUSTRIE DU LUXE

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de communication d’un message. Où les produits sont-ils fabriqués ? Qui les fabrique ? Combien de consommateurs savent que certaines entreprises du groupe LVMH, que Bally ou Prada font fabriquer leurs produits ou des éléments de produits en Chine ou en Inde ? Quels sont les défis à relever, de ce fait, au niveau de la production ? Il semble que cette question ne soit jamais posée.

Enfin, outre l’activité de création, l’élément le plus important dans les processus de l’industrie du luxe, c’est la distribution physique. Chez Lancôme, ce sont sans doute 80 % des employés du monde entier qui se tiennent derrière un comptoir.

Chez Gucci, une partie importante du processus se passe dans les boutiques.

Pour faire carrière chez Prada ou Salvatore Ferragamo, il n’est pas inutile de démarrer dans une boutique – car c’est là que se fait le contact avec le consom-mateur. Très peu des employés d’une marque de luxe sont basés au siège de l’entreprise, la majorité de l’effort en termes de personnel ayant lieu dans les boutiques. Le siège du groupe Ferragamo, le Palazzo Feroni à Florence, sert aussi de boutique d’exception d’envergure mondiale et de musée, ce qui en fait un important outil de communication en direction du consommateur.

La majorité des entreprises évoluant dans le secteur du luxe est donc de petite taille. Les chiffres d’affaires comprennent des éléments difficiles à évaluer et à comparer. Beaucoup d’activités sont sous-traitées, tant au niveau de la fabrica-tion que de la distribufabrica-tion, et les équipes sont très réduites.

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