• Aucun résultat trouvé

124 La deuxième partie de notre travail de thèse est centrée sur la présentation de l’analyse linguistique des relations spatiales pour les 24 idiolectes. Les corpus sont ici appréhendés en phrases énoncées oralement. L’axe syntagmatique fait l’objet d’une analyse détaillée pour chaque exemple. Cette partie est répartie en quatre chapitres. De manière générale, l’analyse se fonde sur 437 phrases (simples et complexes). Nous inventorions 400 phrases véhiculant une valeur spatiale à sens concret, 22 phrases à valeur spatiale mais à sens abstrait et 15 phrases à valeur spatiale représentant des devinettes. Ces phrases sont exploitées de différentes manières en fonction des points syntaxiques abordés dans les quatre chapitres. Le chapitre 4 présente l’analyse linguistique des phrases de nos corpus pour les sept relations spatiales. Notre observation porte sur 400 phrases (simples et complexes). L’objectif est de mettre en évidence les structures prédicatives qui portent l’expression de ces relations spatiales. Il s’agit de structures prédicatives verbales et verbales. La prédication non-verbale est appréhendée par les adjectifs et les noms. Cette analyse précise le programme valenciel et la nature des unités lexicales et grammaticales, pour les exemples présentés. Pour les autres chapitres de cette deuxième partie, les corpus sont appréhendés en 607 syntagmes prédicatifs regroupant les phrases simples et les phrases complexes découpées en syntagmes prédicatifs. Le chapitre 5 fait part de l’étude des adpositions de manière générale, pour les unités la (lâ / là) et sa du créole réunionnais, et en particulier de celles qui participent à l’expression linguistique des relations spatiales. Les trois principales adpositions auxquelles nous avons accordé un intérêt particulier sont les prépositions, les postpositions et les circumpositions. Ce chapitre aborde aussi les traits pluricatégoriels et stables de ces unités grammaticales. L’analyse présentée dans le chapitre 6 se fonde uniquement sur quatre relations spatiales (localisation, déplacement, mouvement, déplacement + mouvement). Ce chapitre présente une étude des structures verbales prédicatives à valeur spatiale selon leur fréquence d’emploi dans les corpus pour ces quatre relations spatiales. Nous étudions aussi les verbes qui entrent dans plusieurs programmes valenciels et élaborons un lien avec l’étude des verbes à emploi transitif et des verbes à emploi intransitif. En effet, l’identification de ces derniers dans nos corpus concerne les verbes régissant un actant objet et les verbes à objet Ø.

Cette étude prend en compte les circonstants locatif, temporel, de manière et d’accompagnement relevés dans nos corpus. Ce chapitre inclut l’étude de l’ordre des mots pour laquelle nous montrons les combinaisons les plus attestées dans nos 24 idiolectes. Nous présentons le lien entre syntaxe et prosodie ainsi que les unités lexicales et grammaticales stables et les variations morphologiques. Dans ce chapitre, seule l’étude de la prosodie porte sur les 400 phrases (simples et complexes). Le chapitre 7 est consacré à l’étude de

125 l’opposition concret / abstrait identifiée parmi les unités lexicales et grammaticales à valeur spatiale de nos corpus. Cette analyse se fonde sur 22 phrases exploitées en 24 syntagmes prédicatifs. Nous confirmons aussi que l’expression des relations spatiales se manifeste dans huit devinettes créoles identifiées dans un idiolecte des corpus de type 1 (entretiens oraux libres). L’analyse de ces devinettes porte sur 17 phrases. Ce chapitre intègre l’étude des repères concrets et des toponymes qui établit un lien avec la mémoire spatiale collective en tradition orale réunionnaise. Pour ce point d’analyse, nous basons notre observation sur 607 syntagmes prédicatifs.

Les préambules à l’analyse linguistique des relations spatiales :

Les constructions syntaxiques des verbes révèlent des particularités que nous présentons ici. Nous identifions, en créole réunionnais, des verbes à forme longue et à forme brève. Il s’agit de dimorphisme verbal. Toutefois, dans nos corpus, nous notons chez une informatrice de Cilaos et une informatrice du Tampon l’emploi de forme verbale longue qui relève d’une variété du créole. Cet emploi à forme longue d’un verbe monovalent atteste un circonstant locatif. Dans ce cas, il est plus courant d’employer une forme verbale brève. Dans l’exemple n° 10 (f, 1936, S.M, Cilaos), le verbe à forme longue regardé pourrait être remplacé par la forme brève regard.

Ex. (10) : Zot na pa labitud regardé a droit a gosh !

Trad. Litt. : « Vous n’a pas Ø habitude Ø regarder à droite à gauche ! » Trad. : « Vous n’avez pas l’habitude de regarder autour de vous ! »

Dans l’exemple n° 208 (f, 1990, P.R, Le Tampon), le verbe à forme longue tonbé peut être remplacé par la forme brève tonb.

Ex. (208) : Li la tonbé dan la rivièr !

Trad. Litt. : « Il MP a tombé dans la rivière ! » Trad. : « Il est tombé dans la rivière ! »

Dans nos corpus, nous notons des variations morphologiques du verbe sava « aller, partir » qui se décline en parti, alé, sar, sa. Ces formes identifiées sont analysées en tant que verbes pleins. Les formes sar et sa sont aussi examinées en tant que marqueurs préverbaux.

126 Les verbes étudiés sont composés de marqueurs para-aspectuels qui correspondent à des verbes. L’emploi de marqueurs para-aspectuels est équivalent à l’emploi d’auxiliaires de mode dans d’autres langues comme « falloir, vouloir, pouvoir » (Staudacher-Valliamée, G., 2004). Par exemple, dans nos corpus nous relevons komans lèv « commencer à lever » marquant le début d’une action. La dernière particularité identifiée dans la construction syntaxique des verbes est le marqueur préverbal non accompli « i » au temps Ø qui n’est pas toujours attesté surtout chez les jeunes informateurs des corpus de type 2. Dans l’exemple n°

373 (f, 2005, G.B, Saint-Denis), la jeune informatrice n’emploie pas le marqueur préverbal i dans la structure syntaxique du verbe alors que son corpus atteste cet emploi dans d’autres exemples.

Ex. (373) : In garson gard dan in bot !

Trad. Litt. : « Un garçon regarde dans un botte ! » Trad. : « Un garçon regarde dans une botte ! »

L’exemple n° 351 (f, 1999, R.F, Saint-Denis) illustre l’emploi du marqueur préverbal i dans un verbe similaire à l’exemple précédent : i gard.

Ex. (351) : Le garson i gard dan son soulié !

Trad. Litt. : « Le garçon MP regarde dans son soulier ! » Trad. : « Le garçon regarde dans sa chaussure ! »

Concernant les déterminants, en créole réunionnais « certains déterminants connaissent des variantes : in marqueur indéfini, se réalise inn ou inm devant l’adjectif (p)ti : inn ti, inm pti

“un petit” ».208 Dans les idiolectes, c’est la première variante inn qui est la plus inventoriée.

Parmi les variations morphologiques relevées dans nos corpus, nous notons des formes régionales qui relèvent d’un créole des Hauts. Il s’agit de l’usage des déterminants possessifs vot « votre », mé « mes » et du pronom de personne vi «vous». Ces formes régionales concernent l’informateur de Cilaos (h, 1952, V.P, Cilaos). Nous présentons l’exemple n° 91 illustrant le pronom de personne vi « vous ».

208 Gillette, Staudacher-Valliamée, 2004, op. cit. Grammaire..., p. 58.

127 Ex. (91) : Tou lé samedi vi dsann!

Trad. Litt. : « Tous les samedis vous MP descends ! » Trad. : « Tous les samedis vous descendez ! »

L’usage du déterminant Ø dans le corpus créole réunionnais de notre thèse endosse plusieurs valeurs :

- Le déterminant Ø occupe une place à part entière dans la classe grammaticale des déterminants de ce créole.

- Lorsque nous précisons le temps d’un verbe créole, le temps Ø correspond au présent.

- Nous parlons dans notre analyse linguistique de verbe à adposition Ø, ce qui signifie que le verbe fonctionne avec une adposition Ø, à la différence du verbe qui fonctionne avec une adposition.

- Nous signalons également les verbes à sujet Ø, non tributaires de la servitude subjectale. De même, il existe des verbes à objet Ø (cf. 6.4.2. et 6.4.3., p 255-257). D’autres verbes sont identifiés comme verbes à circonstant Ø (cf. 6.3.1. et 6.3.3., p. 237-239, p.242-243). Il s’agit de ceux qui ne fonctionnent pas avec un circonstant à valeur locative, temporelle ou de manière.

- Nous évoquons les structures prédicatives à Sujet ou à Objet Ø qui réfèrent à des structures prédicatives dans lesquelles nous ne relevons pas d’Actant sujet ou d’Actant objet. Celles-ci sont parfois signalées de cette manière SVØC (emploi verbal non attesté), SØVC (emploi Sujet non attesté).

128

Chapitre 4 : L’analyse syntaxique en structures