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Comme le notent Gérard Brugnot et Marie-Pascale Baligand (2007) du Cemagref, on disserte beaucoup dans la littérature française sur l'expertise et très peu de l'expertise. Cela signifie que le discours sur l'expertise est souvent abstrait, avec des "termes vagues". Concrètement, cela signifie qu'il est difficile d'appréhender concrètement comment se construit une expertise en concertation en se livrant seulement à un état de l'art bibliographique. Néanmoins, nous avons pu recueillir des éléments pertinents pour comprendre ce que cette expression recouvre et les difficultés qu'elle pose.

Comme le notait le COMOP Recherche, "le terme d'expertise peut recouvrir dans le langage courant un métier, un niveau de compétence, voire une série de tâches". C'est cette dernière acception retenue par la norme AFNOR NF X50-110 que nous reprenons à notre compte : "L'expertise est une démarche fréquemment utilisée pour élaborer des avis, des interprétations, des recommandations, en vue de prévoir, de prévenir, d'innover, de construire, d'expliquer l'origine d'événements ou de catastrophes, d'établir des responsabilités, d'éclairer la résolution de conflits, d'évaluer des dommages, des objets, des biens ou des services de toute nature" (Guillou, 2008).

Nous pouvons rappeler également que "la légitimité de la parole de l'expert tient autant à son savoir supposé qu'à la vérité des contenus que cette parole énonce et à la pertinence pratique des conséquences de ces énoncés en termes de décision", ce qui relève à la fois de l'ordre épistémologique (notion de vérité), éthique ("c'est en toute bonne foi et en toute indépendance que l'expert énonce cette vérité"), et praxéologique ("l'action issue de la décision est supposée adéquate aux objectifs visés"). In fine, "l'expertise est demandée sur la base d'une confiance qui résulte de la croyance en la réunion de ces trois dimensions dans la figure de l'expert" (Ancori, 2009).

a) État des lieux

Gérard Brugnot et Marie-Pascale Baligand (2007) constatent que "la difficulté de la mise en œuvre de l'expertise scientifique provient de ce qu'elle est peu codifiée pour l'instant", même si "la démarche de l'Inserm est un repère tout à fait intéressant". Et plus loin : "Il n'y a pas de modèle d'organisation adapté à tous les cas. Dans chaque cas, on peut s'aider de modèles ; on doit le faire si on en a la possibilité, mais il faut savoir improviser. Cette improvisation peut être indispensable pour faire face à des obstacles imprévus." Aujourd'hui il existe un

certain nombre de chartes de l'expertise propres aux établissements (plutôt générales) avec ou sans un guide de bonnes pratiques répondant aux questions concrètes des chercheurs engagés dans une expertise (Brugnot et Baligand, 2007). Le COMOP Recherche (Groupes transversaux « Recherche et expertise » et « Science et société ») recommandait lors du Grenelle de l'environnement d'élaborer une nouvelle charte nationale de l'expertise, en s'interrogeant "sur l'intérêt d'ouvrir l'adhésion à une telle charte aux acteurs du secteur privé ou associatif, producteurs potentiels d'expertise" (Guillou, 2008).

Pour l'Europe, le plan d'action "Science et société" de la DG Recherche consacre un chapitre entier à l'expertise (Commission européenne, 2002). On y lit notamment : "Il y a un besoin d'ouvrir le processus [d'expertise] en fournissant des occasions pour que s'expriment les visions alternatives ("une compétition d'idées"), qu'un regard extérieur s'exerce et qu'un débat constructif ait lieu. L'expérience montre que quand les réseaux scientifiques se connectent avec les décideurs nationaux, les représentants de parties prenantes

— y compris la société civile quand c'est approprié — et suivent des procédures transparentes, alors le caractère conflictuel de certains sujets se trouve largement désamorcé et l'acceptation de la régulation qui en découle est accrue."

Et d'ajouter plus loin que "le but n'est pas seulement d'instiller un sentiment de confiance mais aussi de produire des politiques qui soient plus robustes". À ce titre, la Commission proposait

• d'établir un ensemble de lignes directrices afin de guider ses pratiques en matière de sélection et d'utilisation des expertises à des fins d'élaboration de politiques

• de conduire une étude pilote pour la création d'un réseau ouvert de scientifiques et organismes concernés par les questions scientifiques, sur internet

• de publier un schéma pour des systèmes communs de référence scientifiques à l'échelle de l'Europe (European Common Scientific Reference Systems) (Commission européenne, 2002).

Cette vision de l'ouverture de l'expertise à la société correspond à ce que l'on nomme le "deuxième cercle de l'expertise" depuis la Conférence de citoyens sur les OGM de 1998 et le rapport Kourilsky-Viney (Bonneuil et al., 2004). Ainsi, selon le Conseil économique, social et environnemental, "l'analyse des risques gagnerait à être menée dans deux cercles interactifs mais distincts : un premier cercle composé de scientifiques, le deuxième comprenant également des scientifiques, mais aussi des représentants de la société civile" (Ailleret, 2009).

Evoquant les crises sanitaires des années 1990 (sang contaminé, vache folle, amiante), la Fondation sciences citoyennes (2004) rappelle que les décideurs politiques avaient été amenés à "créer des agences d'expertise (AFSSA, AFSSAPS, AFSSE), qui sont moins dépendantes de la tutelle administrative et prétendent éclairer non seulement le décideur mais aussi la société (saisine associative, site web…)." Et "sous la même pression des crises et des contestations", plusieurs comités d'experts se sont ouverts aux associations de malades, d'écologistes ou de consommateurs (voir par exemple la Commission du génie biomoléculaire, le Comité de biovigilance, la loi démocratie sanitaire, la Commission Française du Développement Durable …)." Et si ce ne sont souvent que des strapontins, les auteurs soulignent que "ces strapontins ont parfois été des leviers !"

Concernant les OGM, la création d'un "deuxième cercle d'expertise sociétale au dessus de la Commission du génie biomoléculaire" (CGB) était l'une des recommandations issues de la conférence de citoyens organisée en juin 1998

(Fondation sciences citoyennes, 2003). Malgré un semblant d'ouverture (deux postes réservés aux défenseurs de l'environnement et des consommateurs), les organisations de la société civile qui participent au processus d'évaluation des OGM au sein de la CGB regrettaient en 2008 "son caractère exclusivement scientifique et plus encore la prééminence de la biologie moléculaire", qui

"oblige en quelque sorte à la nomination de spécialistes" (PSX2, 2008b). On retrouve aujourd'hui dans le Haut Conseil des biotechnologies créé en 2009, aux côtés d'un comité scientifique multidisciplinaire, un véritable comité économique, éthique et social — lequel rassemble élus locaux, parlementaires, associations, professionnels, salariés et personnalités qualifiées.

b) Problématiques

Nous avons déjà évoqué la question du statut des connaissances apportées ou construites par les ONG. Quand on s'attaque à l'expertise, cette question devient brûlante. C'est ainsi que l'idée des deux cercles de l'expertise entretient une frontière entre deux types de compétences, de légitimités — le premier cercle pratiquant une analyse scientifique et technique, et le second cercle procédant à une évaluation risque/bénéfice "dans le cadre strict des hypothèses de risque retenues par le premier cercle" (Ancori, 2009).

On nomme "travail de démarcation" ("boundary work") le processus par lequel des groupes tentent de se démarquer des groupes qui cherchent à les critiquer ou supplanter. Le groupe des experts, doté de la légitimité, décide ou non de donner la parole aux profanes qui tentent de s'insérer dans les processus d'expertise et de décision. Comme l'expertise portée par les profanes est souvent individuelle ("anecdotal evidence"), le registre de la preuve apportée ne suffit pas toujours à la qualifier face à d'autres connaissances considérées comme plus

"universelles" ou "généralisables". Pourtant, cette preuve peut être recevable quand elle a trait à des conditions locales ou sociales, apportant un cadrage du risque qui complète celui des experts — surtout quand ce dernier est parcellaire ou inexistant. Quand l'autorité ou le groupe d'expertise ne peut faire rentrer cette preuve anecdotique dans sa construction de la "science", alors la preuve anecdotique bascule dans la registre du "politique". En Grande-Bretagne, cette stratégie a mené à une impasse pour traiter de la question des effets sur la santé de la téléphonie mobile et le panel d'experts a été remplacé par un nouveau groupe reconnaissant l'utilité des preuves anecdotiques ou non revues par les pairs ("non-peer reviewed"), au moins à titre d'indications sur le type de recherches qu'il restait à mener. À l'inverse, les preuves anecdotiques d'un lien entre le vaccin ROR (contre la rougeole, les oreillons et la rubéole) et l'autisme n'ont jamais été acceptées par la communauté scientifiques ; la parole des profanes a dans ce cas été rejetée. Il y a donc un large spectre d'attitudes institutionnelles ou collectives possibles face à l'existence de preuves individuelles ou locales, lesquelles attitudes sont également façonnées par le travail de démarcation (ou d'effacement de la démarcation) effectué par les experts (Moore et Stilgoe, 2009).

Autre exemple : en France, "l'association Santé Environnement Provence a organisé une mesure de la pollution dans des crèches, ce qui est apparu comme un moyen pour les acteurs locaux de se réapproprier le débat en imposant leur logique au détriment de celle des épidémiologistes qui ont rejeté cette méthode en raison de sa non-scientificité" (Salomon et al., 2009).

Salomon et Borraz (2009) reconnaissent, dans l'expertise scientifique, la

"difficulté à rouvrir certaines boîtes noires, à introduire d'autres formes de connaissance ou d'autres méthodologies, à introduire des savoirs qui ne sont pas

toujours stabilisés". Pourtant, l'exemple de la téléphonie mobile en Grande-Bretagne montre qu'au modèle classique de l'expertise — et même du modèle des deux cercles — est en train de se substituer une nouvelle approche, laquelle

"conçoit l'expertise comme un processus ouvert à la société, qui a recours à des savoirs hétérogènes, socialement distribués. Adoptant une attitude plus humble, l'expertise est censée présenter non seulement les faits prouvés mais aussi les jugements et les incertitudes scientifiques. Par ailleurs, les questions telles que la confiance et la démocratie ne sont plus dissociées de l'évaluation de risques" (Salomon et al., 2009). Pour certains auteurs,

"intégrer dans un modèle d'expertise et de gouvernance des risques l'implication active des différentes parties prenantes au processus n'est pas seulement faire une concession à la démocratie : étant donné que ce modèle rend mieux compte que les autres de la complexité du monde actuel, une telle intégration résulte tout simplement d'une exigence de rigueur analytique" (Ancori, 2009).

L'incertitude scientifique est une question clé pour l'expertise. Mais comme le montrent les sociologues Danielle Salomon et Olivier Borraz (2009), il est très difficile de penser cette incertitude indépendamment des aspects sociaux ou politiques. En effet, les incertitudes scientifiques s'imbriquent avec "les incertitudes sociales –qui renvoient de façon très globale à l'ensemble du comportement des acteurs qui sont parties prenantes ou parties intéressées à un système–" et "les incertitudes politiques —que ce soit à propos du régime de régulation, en termes de décision ou même du contexte institutionnel—".

Ensemble, ces incertitudes "produisent un processus dynamique et deviennent indissociables". Ainsi, "l'analyse des mouvements sociaux montre au fond que ces derniers ont acquis une capacité d'action réelle", qui peut se manifester à trois moments différents :

• le moment de l'émergence des risques

• le moment de la production d'expertise

• le moment de la décision.

Surtout, selon les auteurs, il ne faut pas chercher absolument à contrôler et gouverner ces incertitudes. "Il s'agit au contraire de les laisser telles qu'elles sont, c'est-à-dire des incertitudes qui sont éminemment contestables et ouvertes à la discussion. Cela suppose aussi de pouvoir introduire dans ces dispositifs de nouvelles formes et de nouvelles modalités de connaissance sur ces activités, qui ne se réduisent pas à des formes légitimées et reconnues de production scientifique, mais qui introduisent également d'autres formes de connaissance.(…) Il s'agit aussi de pouvoir organiser des débats entre les différentes parties intéressées afin qu'elles expriment des points de vue, des attentes et des revendications." Citant le Grenelle de l'environnement, le Grenelle des ondes, ou le Deuxième plan national santé-environnement 2 (PNSE2), les auteurs voient une convergence vers l'idée de "créer des dispositifs chargés non pas de clore des controverses, mais au contraire d'organiser cette négociation récurrente autour des modalités de production des connaissances et d'usage de ces technologies" (Salomon et Borraz, 2009). Le modèle de la co-construction reconnaît ainsi la complexité des évolutions sociales, ce qui contraste avec les modèles présentant "un public indifférencié face aux experts (modèle standard et modèle de la consultation)" et présentant "la dynamique sociale en termes de simples confrontations de groupes d'intérêts (modèle standard révisé)"

(Ancori, 2009).

Enfin, Dominique Pestre (2003a) fait remarquer que "par-delà le processus d'expertise formellement organisé, il est essentiel de réserver un espace pour la contestation extérieure (…) l'histoire des dernières décennies ayant

montré que bien des idées (…) finalement intégrées comme savoir commun, ont d'abord eu leur origine dans une contestation qui n'arrivait pas à se faire entendre par les canaux normaux. À moins de devenir soudainement très confiants dans l'espèce humaine, le social et le fonctionnement de nos institutions scientifiques et politiques (…), nous pourrions considérer que ce principe gardera de sa pertinence dans le futur." La Fondation sciences citoyennes (2003) rappelle ainsi que "ce sont les mouvements citoyens (et les chercheurs citoyens) qui ont à chaque fois réouvert des débats activement verrouillés par d'autres acteurs" — et de se féliciter "de la fonction d'alerte scientifique et politique que les actions de fauchage, dans leur ensemble, ont joué depuis 1997".

c) Propositions

Une des plus fameuses propositions pour ouvrir l'expertise et la co-construire, due à Michel Callon, Pierre Lascoumes et Yannick Barthe, est l'instauration d'arènes publiques d'un type nouveau, les "forums hybrides" : "organisés sur des sujets très divers, ces forums se déroulent dans l'espace public, rassemblent différentes catégories d'acteurs concernés par ces sujets (scientifiques, associations, syndicats, décideurs politiques, mais aussi individus lambda), et traitent de manière indistincte des aspects scientifiques, techniques, culturels, économiques, politiques et éthiques des sujets abordés. C'est précisément parce que l'ensemble de ces acteurs veulent participer à la fois aux débats sur la composition de l'intérêt général et au processus de construction des connaissances, que se sont formés ces nouveaux espaces d'expertise sociotechnique. En contraste avec une recherche « confinée » menée dans le secret des laboratoires, ces forums veulent inventer de nouvelles collaborations entre ce type de recherche et une recherche « en plein air ». La démocratie dialogique qu'ils visent à incarner va jusqu'à une co-définition par les chercheurs et par les groupes concernés des problèmes qu'il s'agit de traiter" (Ancori, 2009).

Les forums hybrides cherchent à transformer les problèmes plutôt qu'à les régler définitivement, en une série d'équilibres provisoires (on retrouve l'importance de la gestion dynamique) : "loin de consister à choisir entre des options connues et stabilisées, l'exercice est ici de faire émerger de nouvelles options en reconfigurant l'espace de ce qui est pensable et l'éventail des choix possibles au sein de cet espace" (Ancori, 2009). Cela rejoint l’idée de la démocratie comme "régime dans lequel les solutions sont ouvertes et en outre négociables", et de la discussion politique n’ayant pas de conclusion logique, même si elle n’est pas sans décision (Pestre, 2010).

d) Difficultés

Certains auteurs préviennent que l'ouverture de l'expertise à la société, qui la rend "socialement plus robuste", peut avoir d'autres conséquences néfastes car

"elle risque en même temps de tendre vers la démagogie et la technocratisation de la participation" (Salomon et al., 2009), d'autant plus qu'il en résulte un affaiblissement de l'autorité de la science qui peut laisser le

"champ libre aux rapports de force et aux effets d'opinion" (Charvolin et al., 2008). On peut s'interroger aussi sur "les mécanismes de clôture qui sont à l'œuvre, ces dispositifs - bien que généralement inclusifs - fabriquant toujours des exclus, délibérément ou par manque des ressources nécessaires pour participer.

Quelle est la part exclue – quels acteurs sans voix ? – quels problèmes sans audiences ? – dans les dispositifs de participation ?" (Charvolin et al., 2008). Et si le modèle des forums hybrides pâtit d'une "conception quelque peu angélique du fonctionnement de la parole au sein de l'espace public", l'épistémologue Bernard

Ancori (2009) prévient qu'il ne faudrait pas rejeter "la notion de démocratie participative en raison d'une confusion avec celle de démocratie d'opinion". "Ces questions font l'objet d'un débat qui s'est intensifié dans le monde anglo-saxon, suite à la publication de l'article de Collins et Evans sur la troisième vague des recherches concernant les études des sciences et des techniques. Ces auteurs adoptent une démarche normative et proposent de limiter les tendances actuelles à « l'extension » (l'implication d'un nombre croissant d'acteurs pour légitimer les décisions scientifiques et techniques) en sélectionnant les participants au débat en fonction de leurs compétences en matière d'expertise ou de leur expérience des problèmes en cause" (Charvolin et al., 2008). Et si le sociologue Florian Charvolin et ses collègues y voient une contribution intéressante, ils regrettent que "le cadrage étroit adopté par Collins et Evans ne permet[te] pas de prendre en compte les changements socio-techniques plus larges propres aux débats sur les choix scientifiques et techniques dans les espaces publics."

Autre série de difficultés, celles concernant la (re)définition du rôle des experts dans une expertise ouverte. "Comment les scientifiques peuvent-ils répondre aux apports de la société civile en des termes scientifiques ? Quel est le rôle des experts quand la situation est très politisée ? Un défi important est d'éviter qu'ils assument des questions qui sont adressées aux politiques"

(Salomon et al., 2009).

En tous cas, "les institutions scientifiques ne sont pas toujours à même d'admettre les incertitudes ou de traiter des questions portées par le public.

Malgré les efforts d'ouverture, on observe une tendance à persister dans la négation des incertitudes et dans le découpage entre questions scientifiques et questions non-scientifiques en limitant ainsi le cadrage des problèmes (…). Cela conduit à entretenir une tension entre les positions des scientifiques et celles de la société civile qui rend le débat difficile, voire impossible" (Salomon et al., 2009). Les OSC interrogées par l'étude européenne PSx2 (2008b) se montrent aussi "globalement très critiques sur la participation du public à la science telle qu'elle est organisée par les autorités", non pas pour la rejeter en bloc mais pour formuler le souhait que cette "participation devienne effective, notamment par une prise en compte des conclusions et des propositions formulées lors de telles consultations".

e) Conclusion

Nous pouvons laisser la conclusion de ces différents points à Dominique Pestre (2003a), rappelant que "la confiance et l'acceptabilité sociale ne se décrètent pas, qu'elles se construisent à travers des procédures claires et une transparence en continu, et que le travail des comités d'experts, même idéalement mené, ne peut se substituer au débat et à l'assentiment social s'exprimant par les canaux les plus divers, constructifs ou "sauvages". Il faut aussi savoir que la confiance dans le travail de ces comités de nature multiples est une œuvre de longue haleine, qu'elle est un ouvrage à toujours remettre sur le métier, comme l'a été en son temps l'acceptation de la démocratie. En ce sens, son rapport au pouvoir démocratiquement élu est une question centrale : si celui-ci n'agit pas avec constance en ces matières, aucun apprentissage ne se fera et l'instabilité du social en sera renforcée."

Surenchérissant à propos de la diversité des canaux où va s'exprimer l'assentiment social, Florian Charvolin et al. (2008) nous met en garde de ne pas figer "une conception étroite de la participation", aboutissant à ce que des formes de participation comme "le conflit, l'opposition, la résistance" soient

"délégitimées par l'adoption d'une ingénierie de la participation, les seuls publics qui comptent étant ceux qui sont construits par les dispositifs d'évaluation participative".