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C/ L’exclusivité et les tiers

Le concédant est tenu de protéger le secteur concédé du concessionnaire contre les autres concessionnaires membres du même réseau, et maintenir l’ordre de cette

exclusivité dans le réseau2. Il s’engage aussi à ne pas fournir son produit à d’autres distributeurs tiers au réseau3. L’insertion d’une clause exclusivité entre les

concessionnaires membres d’un réseau suppose donc l’exclusion de commerçants tiers. Cependant, ces derniers ont contestés la validité de cette exclusivité, et se plaignent que le concédant refuse de les fournir et les invite à s’adresser à son distributeur exclusif4. Il faut dire que le contrat cadre de distribution justifie un refus de vente à des distributeurs hors réseau5. En France, « … la loi du 1er juillet 1996 a abrogé la prohibition du refus de vente. Désormais, il suffit d’appliquer le droit commun des obligations. Du fait que l’exclusivité consentie à ses concessionnaire, le concédant n’est plus en état d’offre publique et ne saurait se voir reprocher un refus de contracter. »6.

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F. COLLART DUTILLEUL et Ph. DELEBECQUE, op.cit., p.889, n°943 et p.890, n°944. 2 M. IBRAHIM ENNADJAR, op.cit., p.59.

3

Dans un contrat de distribution, le tiers peut être un commerçant concurrent du (fournisseur, distributeur) ou bien un client.

4

Y. GUYON, op.cit., p.894, n°829.

5 P. PUIG, op.cit., p.124, n°164 ; F. COLLART DUTILLEUL et Ph. DELEBECQUE, op.cit., p.886 et p.887, n°941 ; et D. FERRIER, op.cit., p.128, n°300 ; v. égal. M. BEHAR-TOUCHAIS et G. VIRASSAMY, op.cit., p.744, n°1352 et s.

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* La sanction du tiers lors de la violation d’un lien d’exclusivité

On constate que les tiers sont tenus d’une obligation négative, c’est-à dire du devoir de ne rien faire qui puisse aider le fournisseur à violer l’obligation issue du contrat. Le distributeur victime de la concurrence par un commerçant parallèle, peut intenter une action en concurrence déloyale sur le fondement de l’article L.442-6-I-6e du Code commerce français qui dispose que « Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou (L. n° 2003-7 du 3 janv. 2003) « personne immatriculée au répertoire des métiers» … de participer directement ou indirectement à la violation de l’interdiction de revente hors réseau faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou exclusive exempté au titre des règles applicables en droit de la concurrence »1, mais le fournisseur auparavant doit établir la licéité du réseau de distribution et notamment prouver la mauvaise foi de ce distributeur, ce qui est difficile2, comme il peut intenter une action civile sur le fondement de l’article 1382 du Code civil français3.

Il peut être affirmé qu’il y a d’une part, une atteinte à la situation contractuelle, sanctionnée par la responsabilité contractuelle, et d’autre part, une atteinte au processus concurrentielle, c’est-à-dire que cette violation est sanctionnée sur le plan civil, et sur le plan de la concurrence déloyale. Toutefois, l’ignorance de cette exclusivité par des tiers ne peut en aucun cas constituer une concurrence déloyale4. Seulement l’ignorance des tiers n’est pas toujours justifiée, les tiers sont tenus donc de respecter la situation juridique créée par le contrat de distribution comportant une exclusivité conclue entre

1

Le législateur algérien reste réticent face à cette situation. 2 Y. GUYON, préc., p.894, n°829.

3

En droit algérien c’est l’art. 124 du C. civ. qui est applicable. Il dispose : « Tout fait quelconque de

l’homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer ».

4

« L’ignorance de l’existence d’un lien contractuelle d’exclusivité peut certainement se justifier du fait de

l’absence de registre regroupant les contrats de distribution comportant une exclusivité. En l’absence d’un tel instrument, il est pratiquement impossible de connaître l’ensemble des réseaux de distribution, et, partant, l’ensemble des liens contractuels d’exclusivité qui ont pu se tisser…L’ignorance paraît alors tout à fait légitime. Dans cette hypothèse, la mise en jeu de la responsabilité du tiers, ignorant l’existence des contrats d’exclusivité, ne peut bien sûr pas être envisagée » : S. LEBRETON, op.cit., p.425 et p.426,

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un distributeur exclusif et un fournisseur d’un produit d’une grande marque, (l’affaire Guerlain)1.

Paragraphe 2 : L’exclusivité dans le secteur de la distribution

automobile

La distribution dans le secteur automobile en Algérie2 est encadrée par le décret exécutif n°07-390 du 12 décembre 2007 fixant les conditions et modalités d’exercice de l’activité de commercialisation de véhicules automobiles neufs. Toutefois, ce décret n’apporte certainement pas le régime des relations entre le concédant et le

concessionnaire3, notamment le lien d’exclusivité4.

« Le domaine de la distribution automobile à, par ailleurs, toujours été considéré comme particulier, justifiant les raisonnements juridiques, et donc, des règlements d’exemption particuliers »5, la distribution automobile en Europe est encadrée par le règlement d’exemption n°1400/2002/CE de la commission du 31 juillet 20026. D’une

1 Trib.com. Nantes, 23 avril 1956, Sté Guerlain c. Dame Vandanjou : JCP 1956, éd. G., II, 9640, R. PLAISANT et J. LASSIER ; cité par : S. LEBRETON, op.cit., p.426, n°325.

2

La distribution d’automobile en Algérie est un marché de plus en plus porteur : K. BENELKADI, El Watan Économie, n°1, 28 fév. 2005, p.7.

3 Par contre la relation entre le concessionnaire et l’autorité concernée, ainsi que la relation entre le concessionnaire et ses distributeurs et revendeurs agréés est bien déterminée.

4 Il n’y a qu’un seul article (art. 6 qui nous renvoi à l’art.10 de l’ordonnance n°03-03 relative à la concurrence) qui prévoit la conclusion des contrats d’achat comportant des clauses exclusivité, et que cette dernière ne confère pas à son titulaire un monopole de distribution qui a pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence. Cependant, le législateur algérien reste muet concernant la durée et la portée de cette exclusivité.

5 D. MAINGUY, op.cit., p.408, n°433. 6

« Ce fut d’abord le règlement de la commission n° 123/85/CEE du 12 décembre 1984, venu à

l’expiration le 30 juin 1995 et remplacé par le règlement n° 1475/95/CE de la commission du 28 juin 1995, JOCE 29 juin, n° L.145 (modifié par le règlement n°1215/1999/CE), applicable depuis le 1er octobre 1995,…un nouveau texte, conçu dans l’actuelle perspective de droit de la concurrence, telle qu’elle résulte du règlement n°2790/1999/CE de la commission du 22 décembre 1999, dessine les solutions en matière d’exemption des accords de distribution automobile » : R. BOUT, M. BRUSCHI, M. LUBY et

S. POILLOT-PERUZZETTO, op.cit., p.1606, n°4551.

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part, ce règlement prévoit la possibilité pour les constructeurs (concédants) de choisir entre l’exclusivité et la sélectivité dans leurs réseaux. D’autre part, on constate aussi la suppression des clauses qui restreignent le multimarquisme1.