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L’environnement imme´diat des pale´ochenau

A` l’instar d’autres plaines alluviales, la dynamique se´dimentaire d’ensemble

est celle d’un colmatage avec un nivellement ge´ne´ral de la topographie, ce qui rappelle les observations effectue´es dans la valle´e de la Seille (Rotillon 2002b) (fig. 25). Ce rapprochement permet d’envisager l’existence d’une topographie probablement plus marque´e au moment des occupations me´solithiques, condi- tionnant les modalite´s d’implantation et les choix s’y rapportant. Le lien e´troit entre l’occupation du secteur 1 et le pale´ochenal 1, situe´ a` sa limite nord-est, pourrait e´voquer un tel cas de figure avec un choix d’implantation tourne´ vers une topographie particulie`re, ici la berge d’un chenal. En effet, bien qu’une vision spatiale extensive et inte´grale fasse de´faut, la configuration de la nappe de vestiges, restitue´e a` partir des donne´es des sondages, montre l’existence d’une occupation qui, a` l’image de la distribution des vestiges, s’inscrit dans une bande de 50 m de long sur 20 m de large. Cette bande, rigoureusement paralle`le a` l’axe du pale´ochenal, e´voque l’occupation d’une pale´oberge. La mise en e´vidence d’une relation e´troite avec un pale´ochenal proche a de´ja` e´te´ souligne´e, en parti- culier dans le cadre de l’e´tude du site de Ruffey-sur-Seille (Se´ara et al. 2002). Or, il convient de distinguer les pale´ochenaux actifs, comme sur le site de Noyen- sur-Seine (Mordant, Mordant 1989), et les pale´ochenaux inactifs, comme sur le site de Ruffey-sur-Seille. Il est malheureusement difficile de pre´ciser ce point a` Pont-sur-Yonne. Cependant, la configuration de l’occupation du secteur 1, indi- quant l’absence de vestiges au niveau de l’amorce du pale´ochenal, pourrait sugge´rer que ce dernier e´tait en eau lors de la fre´quentation du site. Le niveau d’activite´ hydrologique est important a` de´finir, car il permet d’envisager des relations lie´es soit a` la pratique d’activite´s spe´cifiques, comme la peˆche, soit a` des crite`res plus ge´ne´raux de choix d’implantation.

Meˆme si les crite`res de choix demeurent difficiles a` pre´ciser, un certain attrait pour les secteurs de´prime´s, correspondant majoritairement a` des pale´ochenaux non actifs comme cela a e´te´ de´montre´ a` Ruffey-sur-Seille, semble se de´gager. Il s’agit en fait d’une pre´dilection pour la proximite´ de zones de´prime´es de toute nature, correspondant soit a` l’irre´gularite´ du toit de la grave, soit a` des incisions conse´cutives a` des crues, soit a` des colmatages diffe´rentiels, car ces zones ont probablement constitue´ un point d’appel assez fort en concentrant les e´coule- ments d’eau en dehors et pendant certaines pe´riodes de crue. Par ailleurs, ce caracte`re « drainant » a pu influencer le de´veloppement de la ve´ge´tation, en favorisant la mise en place d’un milieu assez ouvert et plus propice aux instal- lations humaines. Ce type de crite`re dans le choix d’implantation pourrait justifier l’occupation du secteur 3, situe´e au sommet d’une barre graveleuse sensiblement de meˆme orientation que les pale´ochenaux. En effet, la pre´sence de gravier a probablement favorise´ les e´coulements et limite´ le de´veloppement d’un certain type de ve´ge´tation en raison des faibles possibilite´s d’enracinement qui y sont associe´es.

Aussi, la physionomie probablement assez he´te´roge`ne de la plaine alluviale de l’Yonne devait-elle s’accompagner d’un environnement ve´ge´tal diversifie´, com- pose´ d’une mosaı¨que de ve´ge´tation contribuant a` la rendre particulie`rement attractive.

=E´volution des syste`mes de chenaux et impact sur l’environnement

Le trace´ exact des pale´ochenaux, ainsi que leurs grandes phases de fonctionne- ment n’ont pas pu eˆtre pre´cise´s en raison du caracte`re trop limite´ des investiga- tions. C’est pourquoi la question de la chronologie de l’activite´ hydrologique et de son possible impact sur l’environnement physique, ainsi que sur les condi- tions d’occupation, reste en suspens. Il est toutefois possible d’obtenir quelques indications, graˆce en particulier a` la prise en compte de donne´es plus ge´ne´rales et spe´cifiques au domaine alluvial. Il convient de remonter le´ge`rement avant la pe´riode qui nous inte´resse avec le Tardiglaciaire, durant lequel il est atteste´ que les grandes plaines alluviales sont re´gies par un syste`me hydrologique caracte´rise´ par des chenaux en tresse, qualifie´s e´galement d’anastomose´s (Bravard, Petit 1997). Le Tardiglaciaire serait caracte´rise´ a` Pont-sur-Yonne par de grandes incisions, telles que celle identifie´e pour le pale´ochenal 2 dont la base du com- blement est rattache´e a` l’Allero¨d (Leroyer, Allenet 2000). Puis s’effectue un passage vers un syste`me de chenaux mieux de´finis, plus e´troits et sinueux, comme cela a e´te´ reconnu sur le site de Ruffey-sur-Seille (Rotillon 2002b)

(fig. 25). A` Pont-sur-Yonne, il est possible que ces chenaux, plus petits, s’inscri-

vent dans les bandes d’activite´s larges correspondant a` l’emplacement des che- naux d’aˆge tardiglaciaire et pour cette raison soient assez difficiles a` de´tecter par des sondages ponctuels. En fait, le passage d’un style alluvial a` un autre se fait de manie`re assez progressive. Au Bore´al, des divagations encore importantes des e´coulements existent dans le nord-est du Bassin parisien (Pastre et al. 1991). Par ailleurs, cette e´volution de la dynamique fluviale s’accompagne de celle du couvert ve´ge´tal, avec une tendance a` la croissance progressive des pollens

d’arbres. A` mesure que la foreˆt se de´veloppe, la fourniture de se´diment au

syste`me alluvial de´croıˆt pour aboutir, a` la fin du Bore´al, a` des taux de se´dimen- tation pratiquement nuls. Ce caracte`re pourrait expliquer la proximite´ stratigra- phique entre l’occupation me´solithique de la seconde moitie´ du Bore´al et le sol atlantique du secteur 1.

Les donne´es ge´ne´rales indiquent une certaine stabilite´ du milieu pendant tout le Bore´al. Comme l’a de´montre´ l’e´tude de la Seille dans le Jura, les crues, ainsi que

les petits chenaux, ont joue´ un roˆle assez faible. Ce point semble eˆtre confirme´ par les quelques e´tudes de faunes de mollusques des fonds de valle´e en Bour- gogne qui indiquent, pour le Pre´bore´al, de nombreuses crues, alors qu’au Bore´al, les valle´es deviennent plus se`ches en liaison avec l’e´rosion line´aire des cours d’eau (Rousseau et al. 1991). Ce sche´ma ne peut eˆtre transpose´ a` l’en- semble des plaines alluviales, comme l’ont montre´ les travaux de Th. Ducrocq dans le nord de la France ou` le syste`me alluvial est domine´ par des valle´es plus encaisse´es (Ducrocq 2001). Graˆce a` la re´pe´tition des observations concernant les contextes d’occupation, il a pu mettre en avant des sche´mas d’implantation the´oriques et e´volutifs sur la base du de´veloppement des colmatages tourbeux de certains fonds de valle´e. Une constante se de´gage : la recherche d’une surface se`che situe´e pre`s d’un cours d’eau.

Pour l’essentiel, les donne´es du site de Pont-sur-Yonne semblent en accord avec la recherche d’une surface d’implantation se`che ou a` capacite´ drainante, et

galets calcaires, matrice sableuse sables fins, limono argileux au sommet sables, argileux au sommet limons argileux

pédogenèse à caractère hydromorphe pédogenèse, sol de type fluviosol brunifié pédogenèse ralentie, rajeunissement anthropique pédogenèse contemporaine

TEXTURE DU SÉDIMENT ÉVOLUTION POST-DÉPOSITIONNELLE

15 000 14 000 13 000 12 000 11 000 10 000 8 000 9 000 7 000 6 000 5 000 4 000 3 000 2 000 1 000 TARDIGLACIAIRE HOLOCÈNE

TEMPS DYNAMIQUE DE LA PLAINE

incision aggradation

DYNAMIQUE DU CHENAL PHASES

CLIMATIQUES (d'après M. Magny) ? ? âge BP DRYAS récent ALLERØD PRÉBORÉAL BORÉAL ATLANTIQUE ancien ATLANTIQUE récent SUBBORÉAL SUBATLANTIQUE 4 880 6 900 8 030 9 200 10 970 13 000 BØLLING DRYAS ancien 16 000 ? chronozones années solaires avant notre ère

PHASES D'OCCUPATIONS

Joux Cerin

Dryas récent Chalain Petit Âge Glaciaire

Le Bourget Pluvis Remoray Grand Maclu Onoz 1 Dryas ancien Würm Petit Maclu 2 820 3 450 PLÉNIWÜRM SUPÉRIEUR

Fig. 25 : Ruffey-sur-Seille A Daupharde : e´volution de la morphologie fluviale et de la dynamique de construction de la plaine de la Seille.

laissent en suspens la question de l’existence, a` proximite´, d’un cours d’eau ou d’une mare, comme cela a e´te´ reconnu sur le site de Noyen-sur-Seine. Rappelons que l’e´tude mene´e a` Ruffey-sur-Seille n’a pas de´montre´ un caracte`re aussi syste´- matique que dans le nord de la France de cette relation de proximite´ avec une zone en eau.

Synthe`se

Ici encore, les donne´es arche´ologiques traduisent le rapport tre`s fort entre occu- pation et milieu alluvial, meˆme si les motivations ne sont pas toujours e´videntes a` de´finir. Le site de Pont-sur-Yonne l’illustre parfaitement. Pourtant, il convient de garder a` l’esprit le fait que les conditions de conservation de ce milieu, particulie`rement favorables, peuvent conduire a` sure´valuer son roˆle attractif. Rappelons la situation encore re´cente pour l’est de la France, mais pas unique- ment, ou` l’on imaginait assez difficilement l’existence de campements de plein air d’importance, tant le roˆle des abris paraissait privile´gie´ dans le mode`le d’occupation. En de´pit de ces conside´rations, il n’en demeure pas moins que le contexte alluvial du site de Pont-sur-Yonne s’est re´ve´le´ propice a` la de´finition d’un premier cadre chronostratigraphique qui, graˆce a` des investigations plus pousse´es, aurait pu constituer une re´fe´rence solide. Par ailleurs, il offre certaines des conditions favorables et ne´cessaires pour documenter, parmi les nombreuses proble´matiques arche´ologiques, celle des crite`res de choix d’implantation.

Des donne´es arche´ologiques nombreuses,

mais ine´galement repre´sente´es