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L’environnement comme complément découplé des agents

SYSTEMES MULTI-AGENTS ET INTELLIGENCE ARTIFICIELLE DISTRIBUEE

5. elles peuvent avoir un mécanisme d’adaptation de leurs attributs et paramètres internes en

1.3.2 L’environnement comme complément découplé des agents

Elles partagent un même environnement, constitué de données externes au SMA, statiques ou dynamiques, mais dont l’éventuelle dynamique interne est donnée a priori, indépendamment

de l’état du SMA

L’environnement est extérieur au SMA, et constitue une donnée. En terme de « système », il est hors de la « clôture dynamique ». Si des éléments du système évoluent de façon explicite en fonction d’autres (par opposition aux mécanismes indirects de production de l’environnement par les agents), ils prennent le « statut » d’agents. Cette propriété de séparation de l’environnement est très importante lorsque l’on s’intéresse à la convergence du SMA. En effet, tout élément découplé, et donc l’environnement, n’est pas pris en compte dans

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Il ne faut pas confondre ici le modèle et la réalité : on peut parler d’un système multi-agents constitué d’agents modélisant des individus humains, à des fins de simulation par exemple ; en revanche, un utilisateur humain qui interagit avec un SMA n’est pas un agent dans un SMA « plus large ».

l’étude de la convergence. L’environnement est une « entrée » du système. Comment, dans une telle conception, modélise-t’on les capacités de certains agents d’agir sur l’environnement, de le modifier, et parfois simplement de l’utiliser comme vecteur des interactions internes (stigmergie) ? Cette question se pose de façon caractéristique dans trois situations couramment rencontrées dans la littérature : quand un « agent robot » déplace des objets du monde, quand un agent informationnel « publie » de l’information sur des réseaux ouverts, ou lorsqu’un agent recourt à des marqueurs inscrits dans l’environnement pour le structurer. Nous y reviendrons plus loin, mais nous donnons ici une proposition alternative.

a. L’environnement actif

Les auteurs classiques considèrent que l’environnement est modifiable par les agents, soit globalement, et sans présomption des contraintes propres à l’environnement qui pourraient empêcher ces modifications, soit en distinguant des « objets passifs » [Ferber, 1995, p. 15], subissant l’action des agents. Or, plus récemment, Ferber et Müller [1996], pour des problèmes de spécification, ont été amenés à introduire des notions « d’influence » et de « réaction », qui permettent de préciser le résultat effectif de la combinaison des actions produites par les agents, que ce soit sur les agents eux-mêmes, ou sur l’environnement. En adjoignant à l’état de l’environnement un état des influences courante, ainsi qu’une dynamique engendrant le nouveau couple <état, influences>, ils font de l’environnement une entité qui change et agit, en produisant de nouvelles influences. Les agents peuvent soit produire directement des influences à partir de leur perception de l’environnement (agent « tropiques »), soit prendre en plus en compte un état interne, et le mettre à jour (agents « hystérétiques »). Les « percepts », sont dans ce modèle, issus des influences. En bref, et hormis par le fait que l’ensemble des influences est « localisé » sur l’environnement, plutôt que distribué sur les agents, les caractéristiques dynamiques des agents et de l’environnement sont exactement similaires, chacun produisant des influences, soit à partir d’autres influences, soit à partir d’états internes, eux-mêmes mis à jour à partir d’autres influences.

Cette proximité entre environnement et agent, pour leurs parties dynamiques, incite à s’orienter vers notre proposition, dans laquelle toute entité qui accepte des entrées (influences) issues d’autres entités, est un agent. En revanche, toute entité qui ne subit aucune influence appartient à l’environnement. Un « objet passif » n’existe pas : soit il n’a qu’un comportement « balistique » et il appartient à l’environnement, soit il peut subir des influences, et alors sa

Modèles Multi-Agents pour l’Aide à la Décision et la Négociation en Aménagement du Territoire

62 « réponse » est l’objet d’une modélisation, prenant en compte sa dynamique propre, ainsi que la nature de l’influence, quel qu’en soit l’émetteur.

b. Exemples de séparation environnement / agent

Si on revient à notre question pratique initiale, un bloc mobilisé par des « agents robots » est

un agent. Car, son état peut évoluer en fonction des influences produites par les « agents

robots ». Et la cooccurrence d’influences sera prise en compte par un mécanisme de combinaison appelant une addition quelconque, ici vectorielle.

Dans le cas de l’agent informationnel, on considère un groupe d’agents coopérant dont l’environnement est constitué par l’ensemble des informations disponibles sur le réseau. Quand un agent « publie », soit il diffuse par lui-même, et alors il s’agit simplement d’une fraction de son état interne (sa mémoire) qu’il rend accessible aux autres, soit il dépose des informations dans une base de données, dont le gestionnaire constitue intrinsèquement un agent, dans notre cadre de définition. Dans ce contexte ouvert, le concepteur ne maîtrise que ses propres agents, mais la communication d’informations particulières à l’environnement, quand elle se fait par envoi de message, suppose la prise en compte d’un service destinataire, qui, lors de la conception initiale, devra avoir été modélisé, même de façon abstraite et générique. Le concepteur, en mettant en place la fonction de communication vers l’environnement, avec une certaine finalité d’action, construit, de facto, pour ses agents, l’image d’agents réceptionnaires, même si les concepteurs des services concernés se sont situés dans un autre cadre. En particulier, il ne peut y avoir publication d’informations par émission intentionnelle de messages, que s’il existe des conventions plus ou moins élaborées sur le langage utilisé. Le fait de concevoir un agent informationnel dans une perspective multi-agents implique ainsi de « plaquer » sur les parties de l’environnement qui sont modifiables, l’image d’un agent. Ceci, afin que le modèle d’action de l’agent ainsi conçu soit cohérent et calculable. Cet artifice n’a rien d’exceptionnel ou de pathologique, car il s’agit simplement d’une forme de régularisation explicative (une métaphore) pour des environnements ouverts. En faisant l’hypothèse qu’il existe un agent « en face », on rend possible la mise en place de processus collectifs.

La question de la stigmergie est beaucoup moins triviale. Et pour en comprendre la finesse, on imaginera que dans un cadre multi-robots stigmergique, il existe un robot « pont » utilisé pour franchir des difficultés, ou que les robots s’organisent pour franchir les obstacles et permettre

le passage d’autres robots (il existe des espèces de fourmis ayant ce type de comportement). Si un chemin marqué passe par le robot pont, il est clair que les marques dépendent de ce robot. Dans une approche classique, l’environnement a des attributs modifiables qui vont décrire la présence de marques. Mais dès qu’il donne aux marques un comportement particulier (affaiblissement du marquage dans le temps, diffusion spatiale), afin de produire certaines formes de processus, le concepteur transforme les marques en des entités ayant une certaine activité, une dépendance aux agents, et éventuellement à l’environnement (et s’il pleuvait ?). Il n’y a pas d’opposition à en faire des agents, n’ayant pas la même complexité, le même « grain » que les agents robot, mais qui, sans doute, concourent au processus, et résultent d’une construction volontaire.

On voit dans ces exemples que le critère caractéristique du statut d’agent réside essentiellement dans la propriété 2 de notre définition : une entité du système modélisé, qui a une dynamique décrite ou construite intentionnellement par le concepteur, en fonction d’objectifs posés pour le SMA, et d’exigences de cohérence fonctionnelle, prend le statut d’agent dans le SMA. A l’inverse, l’environnement regroupe toutes les entités qui, soit ne changent pas, soit ont une dynamique découplée de l’état du SMA, et qui, par là-même, ne constituent qu’une entrée ou une commande sur la dynamique productrice de résultats.