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5. C ADRE THEORIQUE

5.4. L E ROLE DE L ’ ECOLE DANS LA PERPETUATION DES STEREOTYPES DE SEXE

5.4.3 Evaluation et effets d’attentes

Différentes variables peuvent avoir une influence sur la notation. Si l’origine sociale ou l’apparence physique peuvent avoir un effet sur la valeur de la copie, il en va de même de la variable sexe. Elle introduirait un biais systématique. Une expérience, qui a été réalisée à plusieurs reprises dans trois pays différents, consiste à donner à un panel d’enseignant·e·s les mêmes copies d’un travail, bon, moyen ou médiocre, avec un prénom de fille ou de garçon.

Les copies considérées comme venant de garçons obtiennent en moyenne des notes plus élevées que celles provenant de filles (Mosconi, 1994, pp. 250-251). Sur des copies de physique, lorsqu’il s’agit d’un bon travail, la note est plus élevée si elle correspond à un prénom de garçon. Lorsque le travail est médiocre, la note est moins mauvaise avec un prénom de fille. L’attente de réussite scientifique est donc différentielle, elle est plus grande du côté des garçons, ce qui a comme conséquence qu’on les punit plus sévèrement lorsqu’ils sont mauvais. L’attente étant moins grande pour les filles, elles bénéficient de plus

22 d’indulgence (Bonrepaux, 2003). N. Mosconi (1994) parle de double standard d’évaluation des élèves.

Les attentes et les exigences pédagogiques envers les garçons et les filles sont différentes.

Elles répondent à ce que M. Duru-Bellat appelle la « sous-réalisation » des garçons. Les garçons seraient intelligents, ils auraient de grandes possibilités, mais sous-exploitées, faute de faire les efforts suffisants. Les filles feraient, elles, ce qu’elles peuvent et réussiraient grâce à leur travail. Une notion d’inné et d’acquis intervient ici. Les garçons auraient une intelligence innée, qu’ils n’utiliseraient pas toujours au maximum de leurs potentialités, alors que les filles auraient plutôt une intelligence acquise, par leur côté studieux. L’élève brillant s’oppose à l’élève scolaire. Ces catégories avaient déjà été relevées par P. Bourdieu dans sa sociologie des classes sociales (Mosconi, 1994, pp. 248-249).

De même, le mérite accordé aux travaux des élèves est différent en ce qui concerne le soin.

Pour un travail féminin, le soin est considéré comme naturel et n’est donc pas félicité. Il passe même pour conformiste. Venant d’un garçon, le soin est valorisé car perçu comme étant le fruit d’un travail méritoire. A l’inverse, un travail peu soigné ne sera pas toléré de la part d’une fille alors qu’il passe pour naturel venant d’un garçon (Mosconi, 1994, p. 250). Quant à l’évaluation du comportement des élèves, les termes utilisés sont différents : les filles sont dociles et sérieuses, le conformisme et la passivité sont valorisés ; les garçons sont créatifs, originaux, indépendants (Duru-Bellat, 1990, pp. 61-62).

Effets d’attente

Au-delà des comportements réels des élèves, ce sont les attentes à leur égard qui contribuent à produire un comportement attendu. Cette notion, appelée effet d’attente, effet Pygmalion ou encore prophétie auto-réalisatrice (self-fulfilling prophecy) est fondamentale dans l’analyse des interactions entre les maître·sse·s et les élèves. Le message implicite de l’enseignant·e a-t-il une valeur instrumentale, c’est-à-dire peut-a-t-il entraîner effectivement le comportement attendu ? Un effet d’ «étiquetage » entre en jeu. Si les filles sont « étiquetées » comme ayant plus de difficultés en mathématiques, la prophétie auto-réalisatrice va se mettre en marche, et le comportement attendu va être produit (Duru-Bellat, 1990, pp. 66-67). Ou, comme le dit C.

Marry, « la croyance des maîtres dans la supériorité des garçons en mathématiques et de celle des filles en littérature est décelée, dès l’école primaire, alors même que les différences de performance sont inexistantes. Ces attentes fonctionneraient comme « des prophéties auto-réalisatrices », alimentant la moindre confiance des filles et la surévaluation des garçons en mathématiques » (2003, p. 8).

Ce procédé est d’autant plus efficace qu’il ne se met pas en place uniquement dans l’univers scolaire : « La dynamique qui va des stéréotypes aux effets d’attente, puis au comportement attendu, fonctionne en l’occurrence avec une efficacité d’autant plus grande que ce qui prend place dans le contexte de l’école est convergent avec les « messages » que véhicule la socialisation familiale et extra-scolaire (les médias notamment) » (Duru-Bellat, 1990, p. 117).

Il est généralement attendu des filles un comportement plus passif, plus scolaire, plus patient.

Ces qualités font d’elles de bonnes élèves, elles répondent aux attentes demandées dans le

« métier d’élève » (Perrenoud, 1984). Si elles sont reconnues en ce sens, ce n’est du moins pas leur intelligence qui est mise en avant, mais bien leur conformisme, terme connoté tout de même négativement.

23 5.4.4 Interactions

Interactions enseignant·e·s-élèves

Au sein d’une classe, les interactions sont plus nombreuses entre les enseignant·e·s et les garçons qu’avec les filles. Ils reçoivent plus d’attention que leurs camarades féminines.

Lorsque l’on demande à des enseignant·e·s de se positionner, ces dernier·ère·s sont certain·e·s d’octroyer la même attention aux filles qu’aux garçons. Une étude anglaise, étayée par des enregistrements vidéo, montre que deux tiers du temps est accordé aux garçons. De plus, alors que les maître·sse·s sont informé·e·s de ces résultats, lorsque l’expérimentation est tentée à nouveau, les interactions avec les filles passent à 45%, et ne sont donc toujours pas égales.

Après la séquence, les enseignant·e·s disent avoir eu l’impression de favoriser grandement les filles (Mosconi, 1994, p. 245).

Par ailleurs, la nature des questions adressées aux filles et aux garçons diffère. Les questions complexes, directes, ouvertes ou semi-ouvertes et les interrogations multiples sont plutôt adressées aux garçons, alors que les filles répondent à des questions fermées ou à choix multiples. Dans la résolution de problèmes, les filles recevront plus d’instructions, les garçons d’explications des principes sous-jacents. On applique le double standard, les garçons sont poussés à développer leurs capacités intellectuelles, les filles leurs compétences de réalisation d’un travail demandé. Les maître·sse·s donnent par ailleurs plus d’appréciations favorables aux garçons sur le contenu de leur travail et aux filles sur la présentation. Des différences interviennent aussi en fonction des disciplines, les enseignant·e·s établissant plus de relations avec les filles en lecture et avec les garçons en mathématiques, ce qui est conforme aux stéréotypes de sexe.

La nécessité du maintien de la discipline joue elle aussi le jeu des stéréotypes de genre.

Quel·le enseignant·e n’a jamais utilisé la division filles-garçons comme régulateur ? La mixité est utilisée comme instrument de gestion pédagogique. Les filles sont souvent utilisées pour établir un bon climat, une bonne atmosphère dans la classe. La différence des sexes, marquée ici par le plus grand calme des filles et la moindre connivence entre les filles et les garçons, est utilisée comme instrument de construction du groupe classe. L’alternance filles-garçons aux tables d’une classe en est un bon exemple. (Mosconi, 1994, voir aussi Duru-Bellat, 1990 et Zaidman, 1996). Les comportements des filles sont plus gratifiants pour l’enseignant·e, celles-ci ayant mieux intégré leur « métier d’élève », qui requiert patience, conformité, discipline autant que capacités intellectuelles. Elles assurent par ailleurs une atmosphère plus calme, plus studieuse et un bon esprit dans la classe. Elles sont utilisées pour aider les garçons dans leur travail, pour relayer la parole de l’enseignant·e, etc. Cette adéquation au « métier d’élève » serait liée aux modalités de socialisation familiale, les préparant à ce rôle. Les enseignant·e·s utilisent donc certaines compétences des filles dans le but de faciliter la gestion de la classe. Elles sont utilisées comme « auxiliaires de pédagogie », « relais », « aides pédagogiques » (Houel & Zancarini-Fournel, 2001, voir aussi Zaidman, 1996).

24 Alors que l’école prône l’égalité entre les enfants et peut paraître plus progressiste que certains milieux familiaux, elle va toutefois utiliser les compétences socialement acquises des filles pour appuyer sa pédagogie, et donc participer au maintien d’une certaine forme de division sexuée. Au lieu de prendre en compte les stéréotypes de genre dans ses objectifs, elle choisit de les ignorer, provoquant un renforcement. Cette non-prise en compte conduit à valider les traitements différentiels (Zaidman, 1996).

Interactions élèves-enseignant·e·s

Les élèves garçons prennent plus souvent l’initiative dans les classes, ils monopolisent l’espace sonore. Ils n’hésitent pas à prendre la parole sans être sollicités. Ils font environ 50%

de réponses spontanées de plus que les filles (Zaidman, 1996, p. 113). Ils sont plus actifs, n’hésitent pas à interrompre et à couper la parole.

Il faut toutefois rester attentif à ne pas généraliser. Les filles et les garçons ne sont pas des groupes homogènes, et tous les garçons ou toutes les filles n’ont pas un comportement typiquement conforme à leur sexe. On trouve aussi dans les classes des filles qui s’expriment beaucoup et des garçons calmes. Il faut aussi être attentif aux variables cachées, ou aux variables associées, tels que le niveau social ou le niveau scolaire, qui peuvent avoir une influence sur la prise de parole (Zaidman, 1996, p. 124).

25 5.4.5 La récréation

La cour de récréation est un lieu qui, bien que surveillé par les enseignant·e·s, est plus libre que la classe. Il y a, à l’école, deux modèles en lien avec les relations sexuées : l’espace classe et l’espace de la récréation. Si dans l’espace classe, le modèle théorique dominant est celui du mélange des individus sans prise en compte, en principe, du sexe des individus, dans la cour de récréation, le modèle dominant est celui de la séparation des sexes, séparation largement spontanée. Deux modèles de la mixité s’opposent : le mélange et la séparation. Pour effectuer une analyse des rapports de sexe, il est donc également utile d’observer les relations dans l’espace récréatif. Le facteur genre est là le facteur dominant de la définition de la situation.

(Zaidman, 1996, p. 17, voir aussi p. 206).

La cour de récréation est une illustration intéressante des rapports de pouvoir entre filles et garçons au sein de l’école. On les laisse là librement choisir leurs jeux, leurs partenaires ainsi que l’espace (au sein de la cour bien sûr) dans lequel ils vont mettre en place le jeu.

Néanmoins ces attitudes sont, là encore, bien souvent le résultat d’une socialisation primaire de la différence et de l’inégalité. A travers le jeu se préparent les rôles de domination. Comme illustration à ces propos, il suffit d’observer les comportements présents dans une cour de récréation. La séparation géographique de la cour de récréation répond à une norme masculine d’exclusion. Les jeux qui occupent les garçons nécessitent un grand espace, tels que les jeux de ballons (football et autres), les courses, etc. Les filles doivent alors se contenter d’un espace restreint, dans lequel elles mettent en place des activités telles que les jeux d’élastique, marelles, etc. Alors que les espaces ne sont pas délimités dans une cour de récréation, les garçons vont étendre leurs activités à l’ensemble de l’espace disponible. Ainsi, les garçons dominent largement l’espace : ils courent et c’est aux autres d’être attentif. Il ne reste dès lors aux filles qu’à utiliser l’espace restant, elles se positionnent à la périphérie de l’espace occupé par les garçons. Les filles situent donc leur espace en fonction de celui occupé par les garçons.

La différence des sexes est ainsi un point central dans l’organisation des jeux et de l’espace (Zaidman, 1996).

Dès lors, la récréation a comme rôle social l’apprentissage des rapports de pouvoir.

L’apprentissage du rapport à l’autre y a lieu. Pour les garçons, il a comme but l’apprentissage du pouvoir et de la domination. Pour les filles, il prépare à la sujétion. Il y a construction et perpétuation de l’exclusion des femmes des lieux de pouvoir. Bourdieu met en avant le concept de violence symbolique (1987, cité par Zaidman, 1996, p. 13). Les jeux des enfants participent à la production de l’habitus de genre. Cette domination de l’espace permet de rejouer symboliquement la séparation entre privé (traditionnellement féminin) et public (traditionnellement masculin).

26 5.4.6 Paradoxe de l’éducation

Il existe un paradoxe entre les visées officielles de l’enseignement obligatoire et le curriculum caché transmis. L’école a, dans ses fondements, pour but d’offrir les mêmes chances à tous et toutes, une égalité de traitement et d’accès aux savoirs, et a comme principe directeur celui de l’indifférenciation. Cependant les curriculums cachés transmis vont dans le sens d’une reproduction de l’idéologie dominante masculine. Si le message officiel est l’appropriation des mêmes savoirs par les filles et les garçons, ce message est perturbé par des attentes implicites. Les attentes vont dans le sens contraire, notamment dans la conviction que la place des filles est secondaire et que leur réussite scolaire est de moindre importance.

D’après la majorité des enseignant·e·s, l’école ne fait pas de différences, mais au contraire aide à faire progresser la cause de l’égalité. Il y a là une ambivalence entre le message égalitariste et l’utilisation qui est faite des compétences des filles produites par le milieu familial et social. Nous ne pouvons pas dire que l’école produit plus de stéréotypes que les autres instances de socialisation. Toutefois, nous pouvons constater qu’elle les consolide en refusant de prendre en compte cette analyse dans ses pratiques. L’école a auprès des enfants, et de la société en général, une forme d’autorité. Si les enfants perçoivent qu’un traitement différent est normal à l’école, cela valide la normalité des inégalités entre filles et garçons et les rapports de pouvoir. Pour que la mixité scolaire mette en pratique son principe d’égalité, il faudrait renoncer au leurre de la neutralité et prendre en compte cette problématique (Zaidman, 1996, voir aussi Chaponnière, 2006).

La plupart du temps, les reproductions de stéréotypes de genre, les attentes et les traitements différentiels sont produits de manière totalement inconsciente. Ni les parents, ni les professionnel·le·s de l’éducation n’ont conscience des rôles qu’ils·elles inculquent. Ils·elles ont l’impression de se conformer à des différences naturelles alors que ces différences sont créées socialement (Valabrègue, 1987). Par ailleurs, les élèves non plus ne perçoivent pas ces différences, comme le remarque N. Mosconi : « Telle fut ma première découverte ; ni les enseignants, ni même les élèves, le plus souvent, ne soupçonnent que, dans les classes, garçons et filles sont traités de manière différente et encore moins en quoi peuvent consister ces différences, dans les interactions qui ont lieu. » (1994, p. 242).

Par ailleurs, la majorité des enseignant·e·s sont réticent·e·s à parler de différences de compétences et de performances en fonction des sexes. Cela va à l’encontre de l’idéologie égalitaire de l’école. Ces questions remettent en cause le principe d’égalité entre les individus, ce qui provoque cette réticence (Zaidman, 1996, p. 90).

27 5.4.7 Effets de la socialisation différenciée

Les choix opérés sont souvent perçus comme étant le résultat de goûts, de vocation, d’attrait, d’aspiration. Toutefois, s’il y a intérêt ou préférence, il faut concevoir que cela ne « tombe pas du ciel » et n’est pas le fruit d’une prédisposition génétique. Les choix répondent à des normes de constructions sociales. L’explication en termes d’intérêts typiquement féminins nie la responsabilité des modèles sexuels transmis par la socialisation dans les différences de parcours. On ne peut parler de vocations ou d’aspirations typiquement féminines sans prendre en compte la dimension sociétale présente dans de tels choix (Duru-Bellat, 1990, p. 95).

Des recherches, décrites par E. Ferrez, ont mis en avant un lien entre les différences d’attention des professionnel·le·s et les différences d’aptitudes entre les sexes, notamment en ce qui concerne les aptitudes spatiales et analytiques. Les professionnel·le·s de l’éducation donnent plus fréquemment aux garçons des explications détaillées, ce qui favoriserait l’exploration, la manipulation et la résolution de problèmes. Ils·elles ont par ailleurs une plus grande proximité physique avec les filles, ce qui les expose plus aux modèles adultes et pourrait ainsi favoriser les aptitudes verbales. Par ailleurs, l’encouragement d’activités différenciées peut également influencer le développement de capacités cognitives et sociales différentes. Les activités plus fréquemment réalisées par les garçons, tels que les jeux de construction, d’emboîtement, les LEGO, qui encouragent la manipulation et l’exploration, favorisent un développement des compétences mathématiques, analytiques, scientifiques et spatiales. Les activités plus fréquemment réalisées par les filles, comme les jeux de poupées, de dînette, de magasin, qui renvoient à des jeux de rôles, favorisent le développement des aptitudes verbales. Il existerait un lien entre la participation à des activités dites masculines et la réussite à des épreuves spatiales (Ferrez, 2006, pp. 76-77).

Les professions proposées aux enfants par les médias, les livres, les jeux ou la télévision peuvent de même être questionnées. Si les métiers liés à la construction sont massivement associés au sexe masculin, il en va de même des emplois avec un statut social supérieur, comme médecin. Les modèles présentés aux filles sont plus restreints, les professions liées au sexe féminin étant celles des soins, de l’esthétique, de la prise en charge d’enfants et de la vente. Ces représentations rejoignent les choix opérés dans la réalité par les jeunes. Cet aspect semble logique : en effet, comment se projeter dans une profession si l’on ne l’a jamais vue comme modèle possible et existant ? Pour opérer un choix, nous avons besoin d’avoir à disposition des modèles. Il en va de même pour faire un choix en fonction de son sexe. Pour qu’une fille choisisse un métier dit masculin, elle doit avoir eu à un moment ou à un autre un modèle, réel ou fictif, démontrant que ce choix est possible (Dafflon Novelle, 2006, p. 372).

Ainsi, afin de limiter les difficultés rencontrées par les filles voulant exercer un métier dit masculin et inversement, il s’agirait de préparer l’orientation tout au long de la scolarité et d’aider à développer dès l’enfance les aspirations et les choix personnels en fonction de la personnalité de chacun, sans être enfermé dans des modèles de genre qui emprisonnent et limitent les possibilités (Valabrègue, 1984, p. 11). Ce constat est d’autant plus pressant lorsqu’on observe les recherches sur la scolarisation des filles. En effet, alors que celles-ci ont de meilleurs résultats que les garçons dans leur scolarité primaire puis dans les enseignements généraux, cette réussite n’a pas d’impact en terme d’égalité dans le domaine professionnel.

Les filles réussissent mieux à l’école, ont de meilleurs résultats, redoublent moins, font des études plus longues et sont finalement désavantagées dans le domaine professionnel, où elles ont moins de postes à responsabilité, sont moins bien payées à qualification et emploi égal et sont plus touchées par le chômage et l’emploi précaire. Il semble qu’un décalage important se

28 passe au moment de l’orientation, où les filles perdent leur avantage (Zaidman, 1996, p. 37, voir aussi Dafflon Novelle, 2006, p. 382). Il s’agit de deux faits sociaux contradictoires : une réussite scolaire forte des filles et un maintien des ségrégations au terme de la scolarité, voire au cœur de celle-ci. La réussite scolaire n’a pas de valeur en soi, elle prend de la valeur si elle se transforme en capital social (Baudelot & Establet, 1992, p. 17).

Le traitement différentiel a d’autres conséquences. N. Mosconi fait l’hypothèse que cette socialisation différentielle pratiquée à l’école et inculquée aux élèves participe à l’amoindrissement de l’estime de soi observé chez beaucoup de filles. Le curriculum caché transmis leur fait comprendre que la place dominante est réservée aux garçons, ce qui provoque une moindre propension à l’affirmation, qui va perdurer jusqu’à l’âge adulte. La place qui leur est accordée dans le cadre scolaire est perçue comme une dévalorisation (Mosconi, 1994, p. 253).

29 5.5.LES MANUELS SCOLAIRES

Selon F. & C. Lelièvre, « on peut dire qu’il y a sexisme quand les textes et les illustrations des manuels scolaires décrivent des hommes et femmes dans des fonctions stéréotypées qui ne reflètent pas la diversité des rôles. […] Il y a également sexisme lorsque les manuels scolaires se bornent à exposer une situation existante sans la critiquer ou sans présenter d’alternative.

On peut considérer que cela équivaut à accepter (dans les faits) implicitement les inégalités et

On peut considérer que cela équivaut à accepter (dans les faits) implicitement les inégalités et