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Empedô-Klepsydra – Grotte de Pan – Apollon Hypo Makrais - Pythion

(fig. 105-106)

On distingue, en trois lieux, trois cultes différents, mais dans des dispositifs très proches. Empedô en tant que nymphe est associée au culte de Pan, et dans le même site on trouve également les traces du culte d’Apollon. D’autre part, ces sites se trouvent sur la même partie du rocher, juste en bas de l’entrée ouest de l’Acropole au niveau de l’Arrhéphorion, à l’endroit où le Péripatos et la voie des Panathénées se joignent. C’est le dernier ensemble cultuel, revêtu de symbolisme, que la procession des Panathénées et le rite des arrhéphories rencontrent, en tant que limite, avant d’entrer au sanctuaire d’Athéna Polias. Les trouvailles qui attestent la fréquentation de ces sites à l’époque archaïque sont très rares et très mélangées et les éléments qui nous amènent à l’identification de ces aménagements sont parfois assez tardifs. Sur ce sujet, l’étude de Parsons fait encore autorité330.

Empedô-Klepsydra

(fig. 107-114)

Le site de Klepsydra est fréquenté dès la préhistoire et dès le XIXe siècle des fouilles ont attesté que l’on y rendait un culte aux Nymphes. La présence des Nymphes est sûrement due aux sources331. À l’origine, la source était appelée Empedô332, et c’est au

330 PARSONS 1943.

331 LARSON 2001, p. 126-127.

332 Hésychius κ 2941 : Κλεψύδρα· κρήνηἥτιςτὸπρότερονἘμπεδὼπροσηγορεύετο, « Clepsydre : source qui était appelée auparavant Empedô ». Voir aussi Schol. Aristophane, Lysistrata, 913 : Ἐν

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Ve s. qu’elle change de nom. On construit alors une cour dallée, dont on suppose qu’elle faisait partie du sanctuaire d’Apollon Hypoakraios et servait au déroulement des rites333. Klepsydra et la cour dallée font sans doute partie des constructions postérieures aux guerres médiques, car il n’existe aucun élément qui pourrait nous indiquer une construction antérieure à 480334. Le changement de nom n’est pas le seul connu : Kallirrhoé est devenue Ennéakrounos à partir de l’époque des tyrans335. Empédô était sûrement le nom de la source (πηγή) ainsi que le nom de la nymphe de la source. Sur un vase à figures noires336, Thésée est représenté avec les garçons et les filles qui l’accompagnent en Crète. Les noms de ces jeunes gens y sont inscrits et la dernière fille derrière Athéna s’appelle ΕΝΠΕΔΟ. Klepsydra était plutôt le nom de la construction (κρήνη), du deuxième quart du Ve s., dallée après 480337.

Les voûtes des cavités, qui formaient le toit original de la grotte, se sont effondrées depuis l’Antiquité et il est difficile de reconstituer pour chaque époque l’aménagement des lieux. Des vestiges de toutes les époques, mais surtout de l’époque mycénienne, attestent que dès la fin de l’époque néolithique les habitants d’Athènes utilisaient l’eau d’Empedô338. Huit puits sont repérés dès la fin de l’époque géométrique dans la région de la source, remplis dans les années qui ont suivi les guerres médiques, non par les déchets ménagers habituels, mais par les restes minutieusement démolis des bâtiments antérieurs et du matériel qui y était déposé339. Ce matériel, si mélangé qu’il soit,

τῇἀκροπόλειἦνκρήνηἡΚλεψύδρα, πρότερονἘμπεδὼλεγομένη, « Il y avait sur l’Acropole une

source, la Clepsydre, auparavant dite Empedô ». 333 HOLTZMANN 2003, p. 201-203.

334 PARSONS 1943, p. 208.

335 Thucydide, II, 15 ; Pausanias, I, 14, I. Voir infra, p. 187. 336 Munich, n° inv. : 2243, par Archiklès et Glaukytès, vers 540.

337 Sur les nymphes nommées Empédô et sur les sources nommées Klepsydra rencontrées dans d’autres contextes, voir PARSONS 1943, p. 201-205.

338 SMITHSON 1982, p. 154, après une étude minutieuse des tessons, des formes et des ateliers de production, propose de voir une rupture d’usage à l’époque géométrique, avant la deuxième moitié du VIe s., époque où la source est de nouveau très fréquentée.

339 Surtout sur le côté ouest, au-dessous du mur nord de la cour dallée, sur une longueur de 9 m, de 60 à 75 cm de largeur et d’un mètre à 1,50 m de profondeur, voirSMITHSON 1982, p. 149. Ce canal a été fermé définitivement au Ier s. après J.-C. et les trouvailles se superposent en trois

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démontre que Klepsydra a toujours été une source accessible à tous les habitants et n’était pas réservée à un groupe particulier. Cette partie de la colline dans le roc comporte beaucoup de niches et a reçu de nombreuses offrandes.

Apollon

Les quelques inscriptions de la fin du VIe s.340 dédiées à Apollon dans cette zone, et les quelques fragments de céramique ont conduit à identifier une de ces grottes comme Pythion, en tant que double du Pythion d’Ilissos341. La description de Strabon (IX, 2, 11, C 404) des rites des Pythaïstes, qui attendaient le signe d’un éclair sur un point très précis de l’horizon situé sur les confins de la Béotie dans la direction de Delphes, pour se mettre en marche vers le sanctuaire d’Apollon Pythios, est très difficile à situer topographiquement, puisque l’on ne peut pas faire cette observation depuis la zone d’Ilissos342.

Les dépôts votifs d’Apollon Hypoakraios (ou Hypo Makrais343) sont pour la plupart d’époque romaine jusqu’au IIIe s. de notre ère344, et d’ailleurs certains chercheurs

couches. Dans les trois couches les trouvailles de toutes les époques sont très mélangées en des proportions différentes et on peut en tirer la conclusion que la stratigraphie y est renversée. C’est-à-dire que dans cet endroit on fouille les trois phases du nettoyage du site, dont la dernière a eu lieu le Ier s. après J.-C., commençant par les couches supérieures et plus récentes. Donc la couche supérieure de ce puits comporte le matériel le plus ancien proportionnellement, puisqu’il provient des niveaux plus anciens du site.

340 MERITT 1957, p. 79, n° 24 ; Voir l’interprétation proposée par NULTON 2003, p. 21.

341 KERAMOPOULOS 1929, p. 86-92, fut le premier à localiser à cet endroit les cultes des Pithaïstes et Apollon Pythios avec des arguments si convaincants que plusieurs chercheurs l’ont suivi considérant le problème comme résolu. Mais BRONEER 1942, p. 262-263, identifie Apollon Patrôos, Pythios et Hypo Makrais et il localise le culte au-dessus de Klepsydra ; HILL 1953, p. 95, 100 ; TRAVLOS 1971, p. 9, fig. 132-4 ; BRONEER 1960, p. 58 : à côté du culte d’Apollon Pythios il signale que cette zone fut probablement aussi dédiée à Zeus Astrapaios ; TOBIN 1993 l’identifie lui aussi comme Pythion.

342 HOLTZMANN 2003, p. 202-203 ; HELLMANN 2006, p. 211.

343 Voir les inscriptions dédicatoires, datées du Ier s. après J.-C., IG II2 2891, 2907, 2910, 2915 et SEG XXI, 678, qui mentionnent ἈπόλλωνιὑπὸΜακραῖς.

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doutent de la présence du culte de Pythios à cet endroit345. Enfin, nous trouvons l’étude de Nulton suffisamment argumentée pour prouver que le culte d’Apollon à cet endroit est inauguré seulement au Ier s.346.

Pan

Des difficultés analogues se présentent dans le cas de la grotte de Pan. Son culte est officiellement introduit après 490, parce qu’il venait alors de jouer un rôle important à la bataille de Marathon, en semant la peur panique parmi les Perses347. Venu d’Arcadie selon Hérodote348, le culte de Pan aurait été introduit dans ce sanctuaire rupestre. Il est également répandu en Attique (à Marathon, Pentélique, Phylé, Éleusis, Daphni et Vari), toujours dans des grottes où sont aussi hébergées des nymphes349. Le site du Péripatos est bien choisi, prestigieux et aussi sauvage que possible pour un site urbain350. À cet endroit, Apollon, sous le qualificatif de Patrôos cette fois, aurait violé Créüse (Kρέουσα), comme le raconte Euripide dans Ion (v. 492 et 936-938). Cette grotte double, avec deux cavités qui communiquent, désignées par D1 et D2 par Kavvadias, lors de ses fouilles en 1896, est assez facilement identifiée à l’emplacement dédié à Pan, selon des renseignements topographiques, provenant de sources antiques351. Aucun développement architectural n’y

344 NULTON 2003.

345 WYCHERLEY 1963, p. 75-79 : signale la difficulté de l’identification du sanctuaire d’Apollon Pythios. Il faut distinguer le Pythion de l’Ilissos de la grotte du Pythion au-dessus de Klepsydra ; voir aussi NULTON 2003 ; PARKER 2005, p. 52, note 5 ; GAWLINSKI 2007, p. 44-45.

GRECO 2009, p. 295, d’après les travaux deMATTHAIOU 2003, signale même le culte d’Apollon Délios à cet endroit.

346 NULTON 2003, p. 25.

347 Lucien, Dialogue des Dieux, 22, 3. 348 Hérodote, VI, 105-106.

349 BORGEAUD 1979, p. 195-237. 350 HOLTZMANN 2003, p. 203-204.

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est attesté et les trouvailles archéologiques ne sont pas suffisantes pour dater le sanctuaire avec certitude352.

CO N C L U S I O N S

Nous ne disposons que d’indices très faibles pour reconstituer la réalité topographique et cultuelle de cette région avant 510. Les fouilles donnent l’image du site à l’époque romaine et plus précisément l’état du Ier s. de notre ère, date du remblai du dernier nettoyage des dépôts votifs. Les quelques fragments archaïques attestent pourtant une présence cultuelle importante, mais il est impossible d’avancer une théorie sur l’éventualité d’un réseau cultuel entre Apollon, Pan et les Nymphes, lié aux cultes de Delphes, par rapport à Pythion d’Ilissos. Pythios serait-il une autre qualification pour Apollon Hypoakraios ? De plus, le Pythion, la grotte au-dessus de Klepsydra, soulignerait l’association de Thésée, le héros ancestral des Athéniens, avec Apollon, le père des Ioniens ; cette origine aurait été revendiquée à l’époque de Périclès. Les autres qualificatifs d’Apollon, Délios ou Patrôos, apparaissent aussi à partir du Ve s. Au VIIe et encore au VIe s. les qualificatifs qui distinguent un dieu ne devaient pas être attribués de façon à hiérarchiser les lieux sacrés en leur honneur.

Nous pouvons en revanche proposer de voir sur ce site un lieu sacré en dehors de l’Acropole et avant l’Agora, l’aboutissement de la voie des Panathénées croisée par le Péripatos, le dernier site de la procession des Arrhéphores, un lieu de passage.

352 GRECO 2010, p. 152-153 ; NENCI 1982 date la fondation de ce culte en 431 par les habitants de la chôra de l’Attique qui étaient installés dans le Pélargikon pour y trouver refuge lors de la guerre du Péloponnèse.

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