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L’art. 12 de la convention de La Haye

L’INCIdENCE dE La PubLICITé SuR La dISTRaCTIoN dES bIENS du TRuST

A. L’art. 12 de la convention de La Haye

L’art. 12 de la Convention prévoit que “le trustee qui désire faire inscrire dans un registre un bien meuble ou immeuble, ou un titre s’y rapportant, sera habilité à requérir l’inscription en sa qualité de trustee ou de telle

1 Notre position a déjà été exposée plus succinctement in Peyrot A., “La mention du trust dans les registres publics et la protection des créanciers de bonne foi : un regard critique” in rsDA 81/5 (2009), pp. 366-373.

façon que l’existence du trust apparaisse, pour autant que ce ne soit pas interdit par la loi de l’Etat où l’inscription doit avoir lieu ou incompatible avec cette loi.” Le but de cette norme est de favoriser la reconnaissance du trust dans les pays qui ne connaissent pas l’institution. Elle vise à faciliter l’administration du fonds du trust par le trustee en faisant reconnaître ses droits et pouvoirs sur celui-ci, et ce faisant à assurer une meilleure protec-tion des droits des bénéficiaires2. Dans la mesure où l’art. 12 est une norme de facilitation, la publicité est logiquement prévue sous une forme faculta-tive. La norme conventionnelle laisse le choix au trustee de tirer parti de la publicité du trust ou au contraire d’y renoncer (par exemple pour des motifs de confidentialité3). En particulier, le défaut de publicité du rapport de trust n’est pas assorti de quelconques effets juridiques. L’on relèvera en outre que selon l’art. 12 in fine de la Convention, la publicité n’est pos-sible que si elle n’est pas interdite ou incompatible avec la loi de l’Etat de l’inscription. En effet, dans certaines juridictions, le système tabulaire ne permet pas de faire mentionner le rapport de trust, en sus de l’inscription du trustee en tant que propriétaire4. Cette précaution vise essentiellement les juridictions de common law, pour lesquelles la publicité du trust peut être, au contraire, considérée comme un obstacle à l’aliénation des biens du trust, puisqu’elle entraîne un devoir d’information de l’acheteur quant au pouvoir de disposition effectif du trustee5.

2 Jauffret-spinosi, p. 60 : “Dorénavant, la tâche des conservateurs des hypothèques sera clarifiée et les trustees administrant et gérant des biens à l’étranger pourront, s’ils le désirent et s’ils pensent que l’inscription sera favorable à l’administration du trust et assurera une meilleure protection des droits des bénéficiaires, faire connaître la nature et la consistance des biens mis en trust en les soumettant à inscription.” Dans ce sens également, Van Loon, p. 31 : “Article 12 of the Convention aims at facilitating the life of a trust, which under trust law is in principle ‘veiled’ in a civil law environment where registration and publicity of right is often essential.” Cf. aussi Gaillard / Trautman (Convention), p. 29.

3 Cf. à cet égard Böckli, p. 28 : “Der Trust ist strickte privat, und das ist eine der Eigen-heiten, die ihn für die private Vermögensverwaltung so anziehend machen. Der Treuhän-der ist Volleigentümer (‘legal owner’), tritt als solcher auf und ist im Allgemeinen nicht verpflichtet, seine “intern”, gegenüber den Begünstigten nach Massgabe der Teuhandur-kunde geltende Treuepflicht offen zu legen.”

4 Cf. dans ce sens Kötz (Kollisionsrecht), p. 583. La question s’est notamment posée en italie où la possibilité de mentionner le rapport de trust a finalement été admise par la doctrine majoritaire ; cf. notamment Bartoli, p. 571 ss.

5 Harris, p. 338 et p. 340 ; Hayton (Hague Convention), p. 277 : “A trustee or trustees need not take advantage of the facility and may, instead, register ordinarily as owner or

Chapitre 3 : L’incidence de la publicité sur la distraction des biens du trust 83

Pour le surplus, la norme conventionnelle fixe un cadre général. Il appartient aux Etats parties de réglementer les modalités de la publicité, notamment dans sa portée et ses effets6. Selon l’art. 12 de la Convention, la publicité peut porter tant sur des titres, des biens meubles ou des im-meubles. Sont par ailleurs visés tant les registres publics que les registres privés, tel que le registre des actionnaires7. Les Etats parties peuvent agir à l’intérieur de ce cadre.

B. L’art. 149d LDiP

1. Teneur

L’art. 12 de la Convention a été concrétisé dans notre droit à l’art. 149d LDIP, qui régit de la sorte la publicité du trust en Suisse. Ce dernier est formulé comme suit.

Art. 149d Dispositions spéciales concernant la publicité

1 Lorsque les biens d’un trust sont inscrits au nom d’un trustee dans le registre foncier, le registre des bateaux ou le registre des aéronefs, le lien avec le trust peut faire l’objet d’une mention.

2 Le lien avec un trust portant sur des droits de propriété intellectuelle enregistrés en Suisse est, sur demande, inscrit dans le registre pertinent.

3 Le lien avec un trust qui n’a pas fait l’objet d’une mention ou qui n’a pas été inscrit n’est pas opposable aux tiers de bonne foi.”

En tant que titulaire juridique du fonds du trust, le trustee est nécessai-rement le propriétaire inscrit ou enregistré dans le registre pertinent8. Cela ressort notamment de l’art. 2 § 2 lit. c de la Convention de La Haye qui prévoit que le titre des biens du trust est établi au nom du trustee (ou d’une autre personne pour son compte). Le trust est, quant à lui, dépourvu d’une telle capacité faute de personnalité juridique. L’inscription ou l’en-registrement du trustee comme propriétaire dans le registre pertinent est

co-owner if it is considered that the marketability and value of the assets would other-wise be detrimentally affected – on the basis that foreign purchasers would not want the aggravation of worrying about trustee’s powers of disposition and beneficiaries’

rights.” Cf. aussi Koppenol-Laforce (Convention), p. 40.

6 Koppenol-Laforce (Convention), p. 35.

7 Gutzwiller, p. 98, N 12-4 ; Jauffret-spinosi, p. 59 ; von overbeck (rapport expli-catif), p. 396, N 121.

8 Wolf / Jordi, p. 72.

au surplus une formalité nécessaire pour lui permettre d’acquérir le titre sur le bien ou le droit en cause9. Dans cette perspective, l’art. 149d LDIP vise à informer les tiers que le trustee détient le bien ou le droit en cette qualité, et non pas à titre privé. Les biens du trust sujets à publicité en Suisse sont les immeubles, les bateaux et aéronefs, ainsi que les droits de propriété intellectuelle, soit les biens et les droits soumis à une publicité tabulaire via un registre public. Le législateur suisse a en revanche renoncé à prescrire la publicité d’un rapport de trust existant sur des biens meubles ou des créances.

La publicité du rapport de trust est prévue sous une forme potestative.

L’art. 149d al. 1 et 2 LDIP indique en effet que le lien de trust “peut” être mentionné ou inscrit dans le registre pertinent10. L’intention du législa-teur suisse a été de laisser aux intéressés le libre choix de révéler ou non l’existence d’un rapport de trust sur un bien donné. En réalité, il ne s’agit toutefois pas d’une simple faculté, car le défaut de publicité n’est pas sans conséquences. L’art. 149d al. 3 LDIP prévoit en effet que le rapport de trust qui n’a pas été mentionné ou inscrit n’est pas opposable aux tiers de bonne foi. En cela, la norme suisse s’écarte de l’art. 12 de la Convention de La Haye, lequel n’assortit le défaut de publicité d’aucun effet juridique.

Dans la mesure où elle est facultative, l’indication du rapport de trust n’est pas entreprise d’office. Elle doit faire l’objet d’une requête. La loi n’in-dique toutefois pas quelles sont les personnes habilitées à la former. En matière immobilière, selon les lignes directrices de l’Office fédéral chargé du droit du registre foncier et du droit foncier11, une telle demande peut émaner du trustee en tant que propriétaire de l’immeuble12. Elle peut éga-lement être faite par le settlor au moment du transfert de l’immeuble dans le fonds du trust13. Quant aux bénéficiaires, ils ne peuvent requérir la men-tion directement. Cela étant, si la loi applicable prévoit l’obligamen-tion pour le

9 Guillaume (Trust), p. 41.

10 A noter que l’expression “lien de trust” n’est pas adéquate. il conviendrait plutôt de se référer à la “relation de trust” ou au “rapport de trust”.

11 Ces lignes directrices ont été émises le 28 juin 2007 et s’adressent aux divers inspecto-rats et offices cantonaux du registre foncier. elles reposent sur de simples recomman-dations et n’ont ainsi pas force contraignante.

12 Lignes directrices de l’office fédéral chargé du droit du registre foncier et du droit fon-cier, p. 3 ; Foëx (mention du trust), p. 84 ; Guillaume (Trust), p. 43 ; Gutzwiller, p. 173 s., N 149d-8.

13 Lignes directrices de l’office fédéral chargé du droit du registre foncier et du droit foncier, p. 3 ; Foëx (mention du trust), p. 84 ; Wolf / Jordi, p. 73.

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trustee de procéder à la publicité du trust, ils peuvent obtenir judiciaire-ment que la judiciaire-mention soit portée au registre foncier14. Certains auteurs font également référence au protecteur du trust dans certaines circonstances15.

En ce qui concerne les immeubles, la réglementation de la publicité du rapport de trust à travers la forme de la mention est relativement atypique en droit suisse. En effet, selon la jurisprudence16 et la doctrine majoritaire17, les mentions portées au registre foncier n’ont en principe qu’une fonction purement informative. A l’inverse, elles n’ont en règle générale ni effet constitutif ni effet déclaratif, en ce sens que le rapport juridique concerné existe indépendamment de la mention et est opposable aux tiers même à défaut de celle-ci. L’art. 149d al. 3 LDIP s’écarte toutefois de ce régime, en prévoyant que le rapport de trust n’est pas opposable aux tiers de bonne foi à défaut de mention, ce qui revient à attribuer à cette dernière un effet déclaratif. Fondée ou non18, cette solution n’a pas lieu d’être discutée ici, puisqu’elle est désormais ancrée dans la loi.

2. Processus législatif

L’art. 149d LDIP a fait l’objet de diverses modifications au cours du proces-sus législatif. La portée de la publicité était prévue à l’origine de façon très large et a été restreinte au fur et à mesure. Nous examinerons ci-après les différentes étapes du processus législatif, du premier avant-projet d’arrêté fédéral à l’adoption de l’art. 149d LDIP.

14 Lignes directrices de l’office fédéral chargé du droit du registre foncier et du droit fon-cier, p. 3 ; cf. aussi Foëx (mention du trust), p. 84 s. ; Gutzwiller, p. 174, N 149d-8 ; Vogt, N 5 ad art. 149d LDiP.

15 Foëx (mention du trust), p. 85 ; Gutzwiller, p. 174, N 149d-8 ; Vogt, N 5 ad art. 149d LDiP.

16 ATF 124 iii 211 (fr.), JT 1999 ii 122, cons. 1a.

17 Cf. notamment Deschenaux, p. 578 ss ; Guillaume (Trust), p. 43 ; schmid, N 71 ad art. 946 CC ; steinauer, p. 293, N 839a ; Thévenoz (Trusts), p. 128. Pour un exposé détaillé des effets des mentions et des diverses tendances doctrinales, cf. Pannatier Kessler, p. 128 ss.

18 Le choix de la mention a été largement critiqué dans la procédure de consultation.

L’office fédéral a toutefois maintenu sa position, considérant qu’ “une inscription au registre foncier qui signale des relations déjà existantes et dont le seul effet juridique est d’exclure la bonne foi d’un tiers qui bénéficierait autrement d’une protection à ce titre, devrait prendre la forme d’une mention.” ; cf. message (Trusts), p. 606. Pour une critique doctrinale sur le choix de la mention, l’on renverra à Pannatier Kessler, p. 140 ss.

Le premier avant-projet d’arrêté fédéral datant du 18 décembre 2003 a été soumis à une pré-consultation informelle au sein des milieux intéres-sés. Il prévoyait une réglementation de la publicité très large. Pas moins de quatre dispositions spéciales étaient consacrées à la publicité (cf. art. 149c à 149f 1erAP-LDIP) portant respectivement sur les immeubles, bateaux et aéronefs19, le patrimoine mobilier d’un trust20, les valeurs à ordre21, ainsi que les droits immatériels22. Dans chaque cas, la publicité du rapport du trust était prévue sous une forme contraignante. Chacune des règles pré-cisait en outre qu’en l’absence d’indication du rapport de trust, ce dernier n’aurait aucun effet juridique à l’égard des tiers de bonne foi. Quant aux meubles, le premier avant-projet prévoyait d’assurer la publicité du lien de trust à travers un registre public à instituer par le Conseil fédéral, par ana-logie avec le pacte de réserve de propriété. Pour les immeubles, bateaux et aéronefs, l’indication du rapport de trust était initialement prévue sous la forme d’une annotation obligatoire dans le registre pertinent. Le pre-mier avant-projet contenait également un art. 242a 1erAP-LP (devenu par la suite l’art. 284b LP) qui assujettissait expressément le droit de distraction à l’observation des dispositions spéciales sur la publicité23.

19 Art. 149c 1erAP-LDiP : “ 1 Lorsque des biens du trust sont inscrits au nom du trustee dans le registre foncier, le registre des bateaux ou dans le registre des aéronefs, l’exis-tence d’une relation de trust doit faire l’objet d’une annotation. 2 une relation de trust qui n’a pas fait l’objet d’une annotation n’a aucun effet juridique à l’égard des tiers de bonne foi.”

20 Art. 149d 1erAP-LDiP : “1 Lorsqu’un patrimoine mobilier fait partie intégrante des biens du trust, l’existence d’une relation de trust doit être inscrite dans un registre public à instituer par le Conseil fédéral. 2 une relation de trust qui n’a pas été inscrite dans le registre n’a aucun effet juridique à l’égard des tiers de bonne foi.”

21 Art. 149e 1erAP-LDiP : “ 1 s’agissant des valeurs à ordre, l’existence d’une relation de trust doit faire l’objet d’une mention auprès de l’endossement. 2 une relation de trust qui n’a pas été mentionnée n’a aucun effet juridique à l’égard des tiers de bonne foi.”

22 Art. 149f 1erAP-LDiP : “ 1 Les relations de trust qui existent s’agissant de brevets, de designs, de marques et d’obtentions végétales enregistrés en suisse doivent être ins-crites dans le registre pertinent. 2 une relation de trust qui n’a pas été inscrite n’a aucun effet juridique à l’égard des tiers de bonne foi.”

23 Art. 242a 1erAP-LP : “ 1 en cas de faillite d’un trustee, les biens du trust sont distraits de la masse en faillite, après déduction des droits du trustee sur ces biens, dans la mesure où les prescriptions des Art. 149dc-f LDiP concernant la publicité ont été ob-servées. 2 si le débiteur ou un tiers fait valoir qu’un élément du patrimoine fait partie des biens d’un trust et si l’administration conteste le bien-fondé de cette prétention, elle impartit au trust un délai de 20 jours pour intenter action au for de la faillite.

L’art. 65, al. 1bis est applicable par analogie. Passé ce délai, la revendication du débi-teur ou du tiers est périmée.”

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A la suite des critiques exprimées lors de la pré-consultation infor-melle, la réglementation de la publicité a fait l’objet de diverses modifi-cations dans le second avant-projet, soumis à une procédure de consul-tation formelle24. Les quatre dispositions spéciales ont été ramenées à une seule norme, à savoir l’art. 149c 2eAP-LDIP, traitant de la publicité du lien de trust sur les immeubles, bateaux et aéronefs, et sur les droits de propriété intellectuelle25. L’idée – fortement critiquée – d’un registre des biens meubles détenus en trust a au contraire été abandonnée, de même que la publicité relative aux valeurs à ordre26. A propos des pre-miers, l’Office fédéral de la justice a reconnu qu’il n’était de nos jours plus possible de déduire de la possession d’une chose une apparence de droit sur celle-ci27. La publicité sur les immeubles, bateaux et aéronefs fut cette fois prévue sous la forme d’une mention (et non d’une annotation), res-tée obligatoire à ce stade. En outre, l’art. 242 1erAP-LP fut converti en un art. 284b 2eAP-LP et la référence à l’observation des prescriptions sur la publicité supprimée.

La réglementation de la publicité fut encore une fois modifiée dans le projet d’arrêté fédéral de décembre 2005. L’art. 149c 2eAP-LDIP devint l’art. 149d P-LDIP. Ce dernier prévoyait désormais la mention ou l’inscrip-tion du rapport de trust sous une forme facultative. Selon le Message : “En réaction à la procédure de consultation, l’objectif est d’établir clairement que l’inscription au registre n’est pas une obligation à proprement parler mais une simple formalité, dont la violation entraîne les inconvénients ci-tés à l’al. 3.”28 Cet assouplissement est probablement dû à l’argument, dé-fendu notamment par L. Thévenoz, selon lequel l’instrument du trust ou la loi étrangère applicable peut imposer, interdire ou laisser à la discrétion du trustee l’indication de la relation de trust dans les registres publics et

24 Les résultats de la procédure de consultation formelle ont été consignés dans le rap-port du Département fédéral de justice et police d’avril 2005.

25 Art. 149d 2eAP-LDiP : “ 1 Lorsque les biens meubles d’un trust sont inscrits au nom du trustee dans le registre foncier, le registre des bateaux ou dans le registre des aéro-nefs, l’existence d’une relation de trust doit faire l’objet d’une mention. 2 Les relations de trust liées à des brevets, designs, marques, obtentions végétales enregistrées en suisse doivent être inscrites dans le registre pertinent. 3 une relation de trust qui n’a pas fait l’objet d’une mention ou qui n’a pas été inscrite n’est pas opposable aux tiers de bonne foi.”

26 message (Trusts), p. 586. 

27 message (Trusts), p. 587.

28 message (Trusts), p. 606.

qu’il n’appartient pas au droit suisse de transformer la faculté prévue par l’art. 12 de la Convention en une obligation29.

Outre de légères modifications de forme, l’art. 149d P-LDIP n’a pas été modifié depuis le projet du Conseil fédéral de décembre 2005. Quant aux débats parlementaires, l’on relèvera que la question des effets de l’absence de publicité sur les droits des créanciers personnels du trustee n’a pas fait l’objet de discussions particulières devant les Chambres fédérales.

3. Les effets généraux de la mention du trust au registre foncier

Lorsque l’existence du trust est portée au registre foncier, la mention a pour effet de détruire la bonne foi du tiers. En effet, conformément à l’art. 970 al. 4 CC, applicable par analogie, nul ne peut se prévaloir du fait qu’il ignorait l’existence de la mention30. Ainsi informés, les tiers traitant avec le trustee devront s’assurer que ce dernier dispose des pouvoirs néces-saires pour entreprendre l’acte envisagé. Dès lors, par exemple l’acheteur d’un immeuble, dont le registre foncier relève qu’il appartient à un trust, doit s’assurer que le trustee dispose effectivement du pouvoir de vendre l’immeuble. S’il ne le fait pas et que le trustee n’était en réalité pas autorisé à l’aliéner selon l’instrument du trust ou la loi applicable au trust, le tiers n’est pas protégé dans son acquisition, faute d’être de bonne foi. Il s’expose ainsi à une revendication de l’immeuble par les bénéficiaires du trust sur la base de leur droit de suite. Autrement dit, la publicité effective du trust garantit l’exercice effectif du droit de suite sur le territoire suisse31.

En revanche, lorsque le rapport de trust n’est pas indiqué dans le re-gistre pertinent, les tiers ne sont pas censés connaître l’appartenance du bien à un trust. Dès lors, le tiers acquéreur n’est pas tenu de se renseigner sur le pouvoir effectif du trustee de procéder à l’acte juridique en cause.

L’acquéreur sera maintenu dans son acquisition, même si le trustee n’avait pas les autorisations nécessaires, à moins qu’il ne puisse être prouvé que l’acquéreur connaissait ou aurait dû connaître l’existence du trust par un autre biais. En définitive, le défaut de publicité du trust permet en principe

29 Thévenoz (Trusts), p. 121.

30 Foëx (mention du trust), p. 85 s. ; Guillaume (Trust), p. 43.

31 Lignes directrices de l’office fédéral chargé du droit du registre foncier et du droit foncier, p. 3 ; Pannatier Kessler, p. 143 s. et p. 197 ss.

Chapitre 3 : L’incidence de la publicité sur la distraction des biens du trust 89

d’établir la bonne foi du tiers acquéreur (sauf preuve contraire) et paralyse ce faisant le droit de suite des bénéficiaires32.

Plus complexe est la question de savoir quels sont les effets de la

Plus complexe est la question de savoir quels sont les effets de la