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§11 – Le code TANG en 653

Section 2 : L’élaboration française des principes de procédure pénale

B- L’ancien régime

L’ancien régime se confond avec la Renaissance, et tire son nom du changement radical opéré par les Révolutionnaires de 1789 et lié à la Gouvernance de notre pays qui passe d’un système

53 D’où vient le Code pénal ?, Yves CARTUYVELS, Presses Université OTTAWA, 1996, 2-7603-0432-9.

54 Article 104 : les juges ont le devoir de prononcer « les peines proportionnées à la nature du délit » tout en interdisant toute condamnation pour un acte non prévu par les textes.

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de royauté à un système qui tendra vers la « République » non sans soubresauts. Là encore, les Rois ont tenté d’organiser la justice pour la sortir d’un système religieux lié à l’inquisition pour la faire tomber dans le domaine national. On doit à cette période quelques grandes notions procédurales telles que le Ministère public moderne, ou tout simplement la codification de la procédure.

1 – Le droit pénal de l’ancien régime

38. Naissance du Ministère public. Pendant longtemps la justice est une affaire seigneuriale appelée loi féodale. Au milieu du XVIème siècle, on redécouvre le droit romain de Justinien sur lequel se base le système juridique enseigné par les universités italiennes à partir du XIIème siècle.

Ce droit est remis au gout du jour par l’apport des théories chrétiennes.

Le ministère public nait à la fin du XIIème siècle.

Tout d'abord c'est un praticien chargé par les parties de rédiger et de suivre les actes de procédure pour leur compte, et qui se spécialise dans la défense du roi devant ses propres tribunaux.

La première mention d'un procureur du roi apparaît dans les OLIM55 en 1278 et une ordonnance de 1303 donne enfin à la fonction une existence officielle.

39. Codification de la recherche de la preuve. A partir du XIIIème siècle disparaissent les anciens modes de preuve tels que les ordalies unilatérales, ce sont les épreuves du fer rouge et de l'eau bouillante, ou les épreuves de confrontation avec arbitrage divin qui disparaissent progressivement sur le territoire comme en 1116 à YPRES (suppression du duel judiciaire), ou ensuite en 1127 à Saint-Omer56.

Le serment purgatoire se maintient sous l'appellation de purgation canonica, il tombe rapidement en désuétude devant les juridictions laïques. En 1280 Philippe III a rendu une

55 4 premiers registres du Parlement de Paris conservant les arrêts des rois Saint-Louis (Louis IX), Philippe Le Hardi, Philippe le Bel, Louis le Hutin, Philippe le Long, de 1254 jusqu’en 1318.

56 Charte de Saint-Omer en 1127, par Guillaume De FLANDRE, article 8 : Sur tout marché de Flandre, s'ils sont

l'objet d'une plainte, ils seront justiciables des échevins, sans duel ; qu'à l'avenir, en effet, ils soient affranchis du duel.

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ordonnance pour interdire cette pratique qu'il qualifie de mauvaise coutume, incompatible avec une bonne justice.

Saint-Louis (Louis IX) prend deux ordonnances en 1254 et 1258 la première portant sur les matières civiles, l'autre les procès criminels.

Celle de 1258 fut mal reçue, en effet la noblesse considérait le duel comme la seule preuve noble ; le procès d'ENGUERRAN DE COUCY en est révélateur57.

La torture (la question) refait son apparition, le principe précédent étant trop favorable au prévenu au début du XIIIème siècle dans les coutumes de Saint-Gilles (1210-1215)58 et de Lerida en 1228 qui s’appliqua dans le pays Catalan.

On la retrouve ensuite dans la charte octroyée en 1246 par louis IX à Aigues mortes, plus tard dans la fameuse ordonnance de réformation de 1254, le roi interdisant de mettre à la question les personnes honnêtes et bien famées, même pauvres, sur les dires d'un seul témoin.

Il s'agissait pour le roi de modérer le zèle de ses agents, sans doute trop enclins à utiliser cette facilité de procédure à l'instar des inquisiteurs.

Dès la première moitié du XIVème siècle l'usage de la question tend à se généraliser. A la fin du moyen âge, la torture est devenue un procédé normal d'instruction dans le cadre de la procédure pénale appliquée aux crimes les plus graves. Strictement encadrée par la doctrine dans le cadre d'une procédure dite extraordinaire ; si elle était utilisée en dehors des règles, elle pouvait mettre en jeu la responsabilité du juge, le mener à être privé de son office, devoir réparation à la victime et une amende au roi. Ce qui limitait assez l'usage de la question. Voici ces règles:

Elle n'était possible que s’il existait à l'encontre du suspect des présomptions « violentes » de culpabilités et ces indices devaient être "considérables" au point de rendre la culpabilité « très

57 En 1259, cité devant le roi pour avoir occis 3 damoiseaux qui chassaient sur ses terres, le sire de COURCY prétendait refuser l'enquête et se purger par duel, conformément à la tradition. Le roi passa outre, condamnant l'irascible seigneur sur les seuls témoignages, l'affaire fit grand bruit. Elle indigna la noblesse qui considérait comme contraire à la liberté des chevaliers que de simples témoins, des roturiers puissent le faire condamner en justice. Cette interdiction ne fut donc pas respectée.

58 Coutume municipale dite de droit écrit, suivant un courant qui a traversé le sud de la France au début du 13ème

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vraisemblable ». En fait il fallait que ces indices soient pour le juge une quasi-certitude, l'aveu « sollicité » devait la transformer en certitude totale.

C'est une conséquence logique de la preuve légale, paradoxalement, c'est pour protéger le prévenu contra la subjectivité des juges et pour ne pas qu'ils se fient uniquement à leur conviction intime, qu'il leur faut un aveu en forme.

L'autre limite à l'application de la question était bien sûr la nature du crime, seuls en effet les crimes capitaux passibles d'une peine corporelle pouvaient justifier le choix de la procédure extraordinaire et donc le recours à la question.

La doctrine souligne fortement que les « tourments » doivent être modérés et surtout ne laisser aucune lésion définitive ou « déformation des membres».

En 1522 François premier crée le lieutenant criminel qui est a pour mission de rechercher les preuves, il s’agit de l’ancêtre du juge d’instruction

40. Un juge dédié à l’instruction. En 1538, l’ordonnance de VILLERS-COTTERÊT lui donne son nom moderne de juge d’instruction. Cette ordonnance réforme la juridiction ecclésiastique et rend obligatoire l’usage du français dans la justice. Le procureur du roi est confirmé en tant que partie au procès pénal, et c’est lui qui requiert le juge d’instruction pour qu’il instruise. On y retrouve les deux grandes parties du procès moderne que sont la phase de l’instruction et la phase de jugement.

2 – L’ordonnance criminelle de COLBERT 1670.

41. Un code dédié à la procédure pénale. Louis XIV commande à COLBERT59

d’importants travaux de codification du droit. Son ordonnance criminelle est le premier Code de procédure pénale français.

Elle scinde la procédure en plusieurs phases.

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- Pour poursuivre quelqu’un il faut une plainte ou une dénonciation d’une personne ou bien du parquet

- La procédure est instruite de manière inquisitoire, secrète et écrite

- La clôture de l’instruction regroupe l’ensemble des éléments de l’enquête, qui sont lus à l’accusé, puis se poursuit par un dernier interrogatoire.

- L’accusé peut ensuite tenter d’atténuer sa responsabilité en arguant de circonstances atténuantes, mais il prend le risque de se voir soumettre à la question préparatoire, qui n’est qu’un autre nom pour la torture.

- L’affaire est jugée définitivement par les magistrats qui ne s’expriment que sur la sentence sans motiver leur choix.

La procédure prévoit l’assistance d’un curateur pour les sourds et muets. Elle aménage les prisons afin de préserver l’état de santé des prisonniers et les soumet à une obligation de tenir un greffe.

II- La période post-révolutionnaire

Si notre système institutionnel a pour base les préceptes révolutionnaires, il est sans conteste que c’est sous l’Empire Napoléonien que l’organisation de notre droit moderne a vue le jour avec la naissance des codes tels que nous les connaissons de manière formelle aujourd’hui. Par la suite, il n’y eut que très peu de grandes réformes, la construction des principes procéduraux ne s’étant formée qu’à partir de retouches ponctuelles très attachées au sens politique donné par les gouvernants. Force est de constater d’une part que le droit Napoléonien était relativement complet, et que le système d’ajustement qui régissait la procédure pénale est toujours en vigueur.

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A – Le code d’instruction criminelle de NAPOLEON. 1808.

42. Codification Napoléonienne. Il s’agit d’un travail remarquable de synthétisation des usages en vigueur et souvent novateur au regard des idées de l’époque.

Il succède aux lois du 16 et 24 août 1790, qui pour la première fois, distinguent les contraventions des délits et des crimes. On appliquera, dans le code napoléonien d’instruction criminelle, à chacune de ces trois catégories une procédure distincte.

Il succède aussi à la tentative de 1791 d’élaboration d’un premier Code pénal qui s’inscrivait dans la ligne de la Déclaration des Droits de l’Homme et des citoyens de 1789 qui avait érigé le principe d’égalité des peines, de la présomption d’innocence et de la séparation des pouvoirs. Ce code supprime les peines corporelles et met en place les peines de prison. Au système de la preuve légale succède celui de l’intime conviction.

Pour la première fois la procédure pénale se sépare du droit pénal relatif aux infractions. Ce texte bien que souvent remanié va exister pendant 150 ans jusqu’en 1958.

Il est complet à tous les égards et réorganise le système judiciaire et carcéral. Le prévenu, qui n’a pas encore été condamné n’est pas en relation avec les condamnés, et va purger son temps dans une maison d’arrêt et non pas dans une « prison ».

Le code prévoit l’obligation pour le préfet de visiter les établissements pénitentiaires une fois par an pour contrôler l’hygiène et la sécurité de ceux-ci.

Il met aussi en place le mécanisme de la prescription de l’action publique, et celui de la prescription de la peine.