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Chapitre 1 – Contexte de l’étude

4. L'éducation en Malaisie

La Malaisie possède un haut niveau d'éducation pour la région avec un taux d'alphabétisation de 88,7%31. Cette situation a été possible grâce à la présence de nombreuses écoles publiques et privées proposant, depuis plusieurs générations, une éducation dans la langue de chaque communauté linguistique.

a) Système éducatif

En Malaisie, il existe deux systèmes : public ou privé. Les écoles nationales, qui font partie du système public, peuvent avoir pour langue d’enseignement le malais, mais également le mandarin ou le tamoul (Lim et Marchart, 2013, p. 53). Une absence de régulations, avant la création d’un système éducatif national postcolonial, a longtemps encouragé le développement aléatoire et sauvage de ces écoles aux origines ethniques diverses et en général du secteur éducatif privé. Les écoles privées sont subventionnées par des entreprises ou associations privées ou simplement supportées par les parents à travers les frais d'écolage, et elles ont connu un fort développement, encourageant une éducation à deux vitesses : une éducation de qualité, mais coûteuse et une éducation publique, moins compétitive au niveau international au médium d'enseignement malais. L’école publique est

40 constituée de deux types d’école (Education Blueprint 2013 – 2025, p. 23) :

- Les écoles primaires publiques (Public Primary schools) dont il existe trois types et dont les médiums d’enseignement divergent : malais, mandarin et tamoul. Certaines écoles à vocation religieuse ou artistique sont en cours d’expérimentation.

- Les écoles secondaires publiques (Public Secondary Schools) qui regroupent tous les apprenants des trois écoles primaires publiques vers un système dont le malais est désormais le seul médium d’enseignement.

Le système public actuel en Malaisie tend à renforcer fortement la maîtrise du malais chez toute la population dès le plus jeune âge. Cette politique de renforcement de l’unité nationale s’exprime ainsi pleinement dans le système éducatif, tout en respectant, dans une certaine mesure, les spécificités des autres ethnies.

De nos jours en Malaisie, il existe quatre types d'écoles privées, même si elles suivent en partie le syllabus national. Ces dernières scolarisent 3% des étudiants de 7 à 17 ans en 2010, soit 145 0000 étudiants, (Chiffres tirés de l’Education Blueprint 2013 – 2025, p. 11) :

1. Les écoles privées qui proposent un curriculum national mais orientent le syllabus vers l'art, la musique, le sport ou autre. 18% des étudiants en école privée y sont inscrits.

2. Les écoles internationales qui suivent un curriculum étranger et proposent une formation diplômante étrangère. 18% des étudiants inscrits dans une école privée le sont dans les écoles internationales.

3. Les écoles religieuses qui proposent principalement une éducation islamique. La cohorte d'étudiants qui composent ces écoles représente 14%.

4. Les écoles chinoises ou tamoules indépendantes qui proposent un curriculum défini par Dong Jiao Zong (pour les écoles chinoises) et préparent les étudiants au

41 Unified Examination Certificate ou au SPM (l’examen national qui suit le syllabus malaisien). Ces écoles représentent le reste des étudiants inscrits en école privée soit 50%.

Aujourd'hui, seule l'école primaire est obligatoire, toutefois le système malaisien propose un parcours éducatif complet vers le monde du travail, comme le présente le tableau ci-dessous.

Types d'école Nombre d'années Âges Diplômes

Pre-school (maternelle)

1 an 5 ans nc

Primary (école primaire)

6 ans 6 à 11 ans UPSR

Lower-secondary (collège)

3 ans 12 à 14 ans PMR (voie générale)

MSC (voie professionnelle)

Upper-secondary (collège)

1 à 2 ans 15 à 16 ans SPM (voie générale)

Post-secondary et tertiary (lycées et lycées professionnels)

1 à 6 ans Plus de 17 ans STPM ou STAM ou

collège de spécialité (polytechnique, institut des maîtres) pour la voie générale.

DKM ou DVM pour la voie professionnelle.

Illustration 4 - Le système scolaire primaire et secondaire en Malaisie

Le SPM, l'examen clôturant le secondaire, propose comme sujets obligatoires et principaux : le malais, l'anglais, l'éducation islamique (pour les musulmans), l'éducation morale (pour les non-musulmans), l'histoire, les mathématiques et les sciences. Des options sont parfois disponibles en arts, santé, information et technologie de la communication, langage et

42 littérature, technologie, sciences et mathématiques, sciences sociales et religion (Education Blueprint 2013 – 2025, p. 6).

Nous aimerions rappeler que la Malaisie n'est un pays indépendant que depuis 1957 et que la langue officielle, le malais, ne l'est que depuis cette date. C'est en prenant en compte cet héritage colonial et pluriethnique que nous aimerions rendre compte de la situation des médiums d'enseignement et de l'enseignement des langues étrangères, des langues secondes en Malaisie et de l’apprentissage du français.

b) Enseignement du français

L’enseignement du français, et des langues étrangères, fait partie des priorités du développement éducatif du pays comme le définit le rapport du Ministère de l’Education (Education Blueprint 2013 – 2025, p. 33) :

« As the system builds up capacity and capability, the Ministry will

also expand the provision of other important languages such as Spanish, French, and Japanese. »32

Le « Education Blueprint 2013 – 2025 », qui résume et présente l’état et les prévisions de la politique éducative du pays sur 18 années, prévoit même qu’en 2022 / 2023, toutes les écoles publiques seront en mesure de proposer le français comme langue seconde. Actuellement, ces écoles ne le font que lorsqu’un professeur est disponible et que plus de 15 étudiants en font la demande particulière. Un véritable intérêt est donc porté à l’enseignement des langues étrangères, même si pour l’instant, la Malaisie en reste aux prémices de cet enseignement, comme nous le verrons plus tard. Cependant, de nombreux enseignants et chercheurs (Teh et Lim, 2010) se demandent si la Malaisie n’est pas un milieu saturé en termes d’enseignement des langues étrangères, étant donné la situation actuelle, où les langues locales et officielles ne sont pas maîtrisées de façon homogène et où le système éducatif cherche encore la place des médiums d’enseignement. La place du français et des langues étrangères est ainsi une véritable problématique actuelle.

32 « A mesure que le système développe son aptitude et sa capacité, le Ministère renforcera ses dispositions à

43 Le français en milieu institutionnel

Concrètement les chiffres disponibles sur le site33 de l’Ambassade de France en Malaisie peuvent être classés et analysés ainsi (les chiffres datent de 2011, sauf contre-indication) :

Effectif global Diplômes proposés Nombre

d’établissements Enseignement

secondaire public 4200 SPM (en option)

DELF Scolaire (2000 inscriptions en 2006)

54

Enseignement

secondaire privé 1200 SPM (en option)

ALevel, IGCSE, Cambridge, etc. 1234 Enseignement supérieur 4400 Licence 21 Alliance Française 3000 DELF / DALF 2 Total 12 800

Illustration 5 - L’enseignement du français en Malaisie en 2006

33http://www.ambafrance-my.org/-Education-et-sciences, consulté en août 2013.

34 Ces écoles sont : Alice Smith School - Kuala Lumpur, Sayfol International School - Kuala Lumpur, Mont

Kiara International School - Kuala Lumpur, Garden International School - Kuala Lumpur, Sekolah Jerman Kuala Lumpur, The International School of Kuala Lumpur, Kolej Tuanku Ja’afar - Negeri Sembilan, ELC International School – Selangor, Cempaka International School – Selangor, Mutiara International Grammar School – Selangor, MAZ International School – Selangor, Kinabalu International School – Sabah, The International School of Penang (Uplands)

44 Toujours selon les chiffres de l’Ambassade de France (disponibles sur le site en 2013 et exposés dans le tableau « Illustration n°5 », le français se placerait comme première langue européenne – sans compter l’anglais – et serait la 3ème langue étrangère apprise. Il est à noter que les chiffres ne présentent pas l’enseignement du français dans les écoles secondaires et établissements supérieurs privés qui appartiennent aux systèmes ethniques (écoles chinoises ou tamoules), les 12 écoles citées faisant uniquement partie des écoles internationales de langue anglaise.

Toujours dans l’optique de promouvoir la coopération linguistique et éducative, en 2006, le MFUC (Malaysian French University Center) a été créé et propose un accompagnement aux étudiants qui souhaitent apprendre le français en France, mais gère en parallèle les programmes d’échange avec la France pour l’éducation secondaire et supérieure et encadre la mise en place des collaborations entre différents centres d’enseignement. Dans le cadre de cette coopération bilatérale, le nombre d’étudiants partant étudier en France a triplé entre l’an 2000 et l’année 2009, passant de 200 à 600 (Chiffres tirés du site de l’Ambassade de France en Malaisie).

Si en 2011, l’effectif total des apprenants de français représentait 5 400 étudiants en 2013, ce chiffre affiche une nette progression avec 8400 étudiants en 2013 (chiffres du Ministère de l’Education malaisien cités par Lim et Marchart, 2013, p. 53). En 2014, environ 1000 étudiants malaisiens étudient en France, ce qui représente une augmentation de 100% par rapport aux chiffres datant de 2009 (CCIMF Newsletter, 2014).

Et en effet, les trente dernières années ont vu le français prendre une place prépondérante dans l’enseignement des langues secondes alors qu’il avait toujours été absent des curricula depuis la décolonisation jusqu’à 1984 où il a été officiellement réintroduit dans les syllabus pour prendre la place de langue seconde (Lim et Marchart, 2013, p. 55). L’introduction du français est donc relativement récente dans cet environnement plurilingue où la place de langue seconde avait déjà été donnée à l’anglais.

Les professeurs de français

Avant l’indépendance, aucun programme d’enseignement du français n’avait été mis en place et l’enseignement des langues européennes restait ainsi le domaine des écoles

45 religieuses ou étrangères où des missionnaires se portaient volontaires pour enseigner d’autres langues (Lim et Marchart, 2013, p. 54). En 1957, la décolonisation a permis d’amorcer la lente mise en place officielle du français dans le paysage éducatif. Puis en 1976, les premiers cours de français ont été introduits dans un internat (Sekolah Datuk Abdul Razak) et de plus en plus d’écoles secondaires ont commencé à proposer des cours, mais l’arabe restait pour le gouvernement une priorité (Lim et Marchart, 2013, p. 55). Toutefois, aucun cursus national n’avait été mis en place et les professeurs avant 1972 étaient souvent bénévoles et fournissaient ainsi leur propre matériel (Lim et Marchart, 2013, p. 56). L’enseignement du français a donc dès le début été la volonté d’une poignée d’enseignants qui, poussés par leur passion, ont souhaité la partager.

Aujourd’hui, dans l’enseignement privé international, les enseignants sont à majorité anglophones et sont issus de pays anglo-saxons, principalement de l’archipel britannique et ceux-ci suivent le curriculum qui prépare à l’examen final (Cambridge, International Baccalaureate). Pour les enseignants de français, certains sont parfois d’origine française, parfois anglo-saxonne, malaisienne ou bien même étrangère.

Pour l’enseignement public, les professeurs sont Malaisiens et sont très souvent issus des programmes de formation des enseignants instaurés depuis 1972, lors d’un premier accord avec le gouvernement français qui a permis de préparer une dizaine de professeurs à l’enseignement du français. Ces premières formations comprenaient un cycle en Malaisie (avec les Alliances Françaises), puis un cycle de deux ans en France. Toutefois, ces premiers programmes ont connu des succès mitigés et ce n’est que depuis l’introduction en 1984 du français dans les matières à enseigner (Lim et Marchart, 2013, p. 55) qu’un système plus soutenu a été institué pour les professeurs de français destinés à l’éducation publique. Dès 1991, des programmes plus encadrés avec un cycle en université malaisienne, puis un cycle de 4 ans en France ont été introduits et perdurent toujours aujourd’hui. En 2013, 60 professeurs enseignent dans 56 établissements publics, externats et internats (Lim et Marchart, 2013, p. 56).

Présence française

La France est donc bien présente en Malaisie, même si la présence anglo-saxonne domine et monopolise le terrain de l’éducation. Deux Alliances Françaises sont établies depuis 1961 en

46 Malaisie (une à Kuala Lumpur et une à Penang, objet de la présente recherche) et une Chambre du Commerce et de l’Industrie existe également sous nom de Malaysian French Chamber of Commerce and Industry créée en 1991 (www.mfcci.com).

L’Ambassade de France, quant à elle, a ouvert ses portes dès 1957, au côté de 15 autres pays, sur le territoire de la nouvelle Monarchie fédérée de Malaisie. Et si en effet, les relations diplomatiques entre les deux pays sont restées minces durant la colonisation, si ce n’est des rivalités de territoires et de routes marchandes, aujourd’hui subsistent quelques traces de la présence française. L’écrivain et prix Goncourt 1930, Henri Fauconnier a immortalisé la Malaisie des planteurs dans son livre Malaisie. Pierre Boule, en 1952, publie Le sacrilège

malais et le troisième écrivain planteur, Pierre Lainé, avec L’oreiller en porcelaine achève

l’épopée des premiers expatriés français. Tous trois arrivés à la suite de l’implantation de la Société Financière du Caoutchouc dans les années 1920 (De Vathaire, 2009, p. 55), leur présence nous montre une implantation française démographique faible, mais une forte présence économique.

Economie et contacts avec la France

La Malaisie des années 2000 à nos jours est marquée économiquement par des contacts principalement asiatiques en termes d’import et d’export et les échanges se font principalement dans la zone de l’Asean. En revanche, même si seulement 300 entreprises françaises sont implantées en Malaisie (CCIMF Newsletter, 2014), la France reste le 16e fournisseur de la Malaisie et le 3e fournisseur européen. La Malaisie représente 10% du marché français dans l’Asean, derrière Singapour, l’Indonésie et la Thaïlande. 38% de nos exports vers la Malaisie se font dans le domaine de l’aéronautique (Airbus) et dans le domaine informatique et électronique, avec 13% de nos exports vers la Malaisie35.

La France importe de plus en plus de biens en provenance de Malaisie et nous sommes actuellement leur 19e client (La France est le 4e client au sein de l’UE, derrière les Pays-Bas, l’Allemagne et le Royaume-Uni), en partie en raison de la baisse du ringgit36. Le partenariat de la France est toutefois plus soutenu avec Singapour qui reste notre premier partenaire économique, puis l’Indonésie, suivie du Vietnam et de la Thaïlande.

35 Les échanges commerciaux franco-malaisiens en 2015, mars 2016,

https://www.tresor.economie.gouv.fr/File/422858 et consulté le 05/08/2016.

47 Ainsi, les contacts économiques avec la France restent relativement minces, même si ces derniers tendent à se renforcer d’année en année et malgré le fait que cette région ne soit pas particulièrement liée à la France.