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La législation antijuive en France

Dans le document Vichy et les juifs (Page 40-43)

Les Juifs dans L’Éclair

3. La législation antijuive en France

Avant la défaite, un seul et curieux article relatif aux Juifs, et voulu humo- ristique, intitulé « Les nazis de Narbonne » (29 janvier) est à signaler. L’Éclair cite le supplément du dictionnaire Le Littré, qui souligne que les chefs des Juifs établis en France au Moyen Âge, notamment dans la région de Narbonne, portaient le nom de « nassi1 (na-zi) ». Après un bref rappel historique de cet-

te « institution juive » (en hébreu le vocable “nassi” signifie “prince”), l’article finit ainsi : « On sait qu’en Allemagne le mot nazi est une contraction, un peu forte, de “national-socialisme” qui est le nom du parti d’Hitler. Mais si on s’en rapporte à la signification qu’on vient de voir du nazi ou nassi (na-zi) », au Moyen Âge, Hitler pourrait être appelé le prince des Juifs, ce qui serait drôle ».

Après la défaite, le 20 juin, la nomination de Himmler dans la capitale fran- çaise (« Le chef de la Gestapo à Paris ») est annoncée ainsi : « Frontière suisse, 19 juin. Himmler est arrivé à Paris pour prendre la direction de la Gestapo dans cette ville. La dépêche de source allemande donnant cette nouvelle ajoute qu’elle remplit d’épouvante « les Juifs et les autres ennemis du régime réfu- giés dans la capitale française ».

Trois brefs articles sont consacrés à la déchéance de la nationalité françai- se : « Mesures protectrices » (22 juillet) où nous trouvons le slogan « La France aux Français ! », « La Révision des naturalisations » (25 juillet) et « A propos de

la nouvelle loi sur les naturalisations » (25 juillet) dont l’objectif est d’éviter « le

moyen d’être assimilé à un Français sans en être digne ». Toujours à propos de la déchéance de la nationalité française, dans « Les financiers israélites ne

tenaient guère à leur qualité de Français » (10 septembre), L’Éclair cite le commen-

taire caustique suivant d’Alex Delpeyron, paru dans le journal Échos de Paris sur « la présence des plus opulents représentants de la finance israélite dans la première charrette des déchus » : « En ce qui concerne les gros profiteurs du capitalisme international, retenons à leur charge que leur attachement à notre pays ne dépassait point la conservation de leurs intérêts matériels et ils n’entendaient demeurer français qu’à condition de demeurer riches. Le retrait de leur nationalité ne saurait donc les attrister que dans la mesure où leurs

bien immobiliers, fermes, châteaux, propriétés de rapport ou d’agrément ne leur appartiendront plus. Car tout ce qui est transportable les a suivis dans leur exil. Gens de précaution, ils n’ont oublié que ce qui s’étalait au soleil de France, et comme ils préconisaient naguère en commandant les utopistes du Front Populaire…“L’action directe et la reprise individuelle”, ils ne sauraient protester aujourd’hui contre la confiscation de leurs biens ordonnée par le Gouvernement. Gardons pour d’autres notre indulgence ».

Le 4 octobre, L’Éclair annonce en première page « Le Statut des Israélites

va être promulgué » avec un texte presque identique à celui paru dans Le Petit Méridional du même jour. Dans son article introductif, ce premier « Statut

des Juifs », définit le Juif du point de vue racial : « Est regardé comme Juif pour l’application de la présente loi, toute personne issue de trois grands- parents de la même race ou de deux grands-parents de la même race, si son conjoint lui-même est juif2 ». Les articles suivants énumèrent toute une

série de fonctions formellement interdites aux Juifs ; en fait, cette loi élimine les Juifs des organismes élus, des postes de responsabilité, de la fonction publique, l’armée, la magistrature, l’enseignement, la presse, la radio, le cinéma. Certaines exceptions sont concédées aux anciens combattants, aux décorés de la Légion d’honneur à titre militaire ou de la médaille militaire, de même qu’aux Juifs qui « dans les domaines littéraire, scientifique, artistique, ont rendu des services exceptionnels à l’État français3 », mais uniquement

pour les activités subalternes de la fonction publique.

Le 9 octobre, le quotidien reproduit la loi abrogeant le décret Crémieux et annoncée sous le titre : « Le décret Crémieux réglant le statut politique des Juifs

Algériens est abrogé4 ».

Le journal revient sur « Le Régime des Juifs résidant en France » le 18 octobre, en le résumant et justifiant de la manière suivante : « Les textes adoptés en Conseil des Ministres et qui régiront la situation des Juifs français résidant en France vont paraître au “Journal Officiel”. Le Gouvernement, dans son œuvre de reconstruction nationale a dû, dès les premiers jours, étudier le problème des Juifs et celui de certains étrangers qui, ayant abusé de notre hospitalité, n’ont pas peu contribué à notre défaite. Partout, et spécialement dans les services publics, si réelles que soient les honorables exceptions dont chacun pourrait fournir un exemple, l’influence des Juifs s’est fait sentir insinuante et, finalement, décomposante. Tous les observateurs s’accordent à constater les effets fâcheux de leur activité au cours des années récentes, durant lesquelles ils eurent dans la direction de nos affaires une part prépondérante. Les faits sont là et commandent l’action du Gouvernement, à qui incombe la tâche pathétique de restauration française. Le Gouvernement entier, dans une absolue sérénité, s’est défendu de faire œuvre de représailles. Il respecte les personnes et les biens des Juifs : il les empêche seulement d’assurer certaines fonctions sociales, d’autorité, de gestion, de sa formation des intelligences, l’expérience lui ayant prouvé, comme à tous les esprits impartiaux, que les juifs exerçaient dans une tendance individualiste jusqu’à l’anarchie. Notre

désastre nous impose l’obligation de regrouper les forces françaises dont une longue hérédité a fixé les caractéristiques. Il ne s’agit pas de facile vengeance mais d’indispensables sécurités. Le Gouvernement pourra d’ailleurs affranchir de certaines limitations qu’il prescrit dans l’intérêt vital de la France, ceux des Juifs qui auront mérité de la Patrie. Et cette réserve prouve dans quel esprit d’humanité il s’est efforcé de régler une question dont l’actuel bouleversement a démontré le caractère universel ».

Le lendemain, le samedi 19 octobre, nous trouvons en première page le texte du « Statut des Juifs résidant en France », avec le sous-titre suivant : « Les israélites sont exclus de l’exercice du pouvoir, de la justice, de l’enseignement, de la police et des cadres d’officiers de l’armée» et plusieurs titres intercalaires : « Fonctions publiques et mandats interdits » (avant l’article 2), « Exceptions pour les anciens combattants » (avant l’article 3), « Carrières libérales et professions libres » (avant l’article 4), « Presse – Théâtre – Cinéma – Radio » (précédant les articles 5 et 6), « Cessation de fonction » (avant l’article 7), « Services exceptionnels » (précédant les articles 8, 9 et 10).

Toujours en première page, dans une rubrique intitulée « Le Régime des étran-

gers », est publié le résumé suivant du texte de la loi sur les « Ressortissants

étrangers de race juive », donné à Vichy le 4 octobre5 presque identique à ce-

lui paru dans Le Petit Méridional : « Les ressortissants étrangers de race juive pourront être, à l’avenir internés dans des camps spéciaux, par décision du préfet de leur département. Une Commission chargée de l’organisation et de l’administration de ces camps est constituée au ministère de l’Intérieur et comportera un inspecteur général des services administratifs, le directeur de la police du territoire et des étrangers, le directeur des affaires civiles du ministère de la Justice ou leurs représentants, ainsi qu’un représentant du ministère des Finances. Les ressortissants étrangers de race juive pourront également se voir assignés une résidence forcée par le préfet du département de leur résidence». Enfin, un long commentaire non signé, dans la rubrique « La Politique», intitulé « La loi sur les Juifs», s’emploie à défendre la politique gouvernementale, les mesures prises contre les Juifs, dont certains « repré- sentant la haute finance internationale» sont considérés responsables de la défaite et des malheurs de la France : « Les mesures que le gouvernement vient de prendre contre les Juifs sont une manifestation de l’instinct de con- servation d’une France qui veut garder intacte son âme nationale et ne veut plus être placée sous la tutelle d’une encombrante minorité. Il ne s’agit plus de mener, à propos de cette question juive, une campagne d’opinion qui bien vite engendrerait le sectarisme et l’exagération. Il faut reconnaître, du reste, que durant les deux guerres, certains Juifs ont fait vaillamment leur devoir et que d’autres ont honoré les Lettres et les Sciences, et c’est dans un esprit de totale équité qu’en leur faveur certaines dérogations ont été prévues. Il s’agit uniquement de constater un fait et de s’employer à en détruire les néfastes effets. C’est à cela que tend la décision gouvernementale. Ce fait ? Nul ne peut l’ignorer. Les éléments juifs s’étaient emparés, depuis quelques années,

des principaux rouages du pays et avaient sacrifié les intérêts généraux de la France à leurs intérêts particuliers de caste. Nous ne citerons pas de noms. Ils sont sur toutes les lèvres et sont mêlés à toutes les campagnes et à tous les actes qui ont préparé d’abord, consommé ensuite la défaite. Représentants de la haute finance internationale, avocats de nombreux intérêts étrangers, les Juifs visés par la nouvelle loi se sont servis de la France et ne l’ont point servie. La révolution nationale à laquelle nous a convié le maréchal devait s’accompagner d’une sérieuse épuration, car tous les responsables de nos malheurs ne peuvent plus continuer à occuper des postes de confiance dans la France nouvelle. La loi sur les Juifs répond à cette nécessité ».

§2. L’ANNÉE 1941

Aucune mention n’a été retrouvée sur la situation en Palestine, l’ensemble des articles sont regroupés autour des mêmes thèmes que pour l’année précédente.

Dans le document Vichy et les juifs (Page 40-43)