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Une jurisprudence étrangère bien établie

La responsabilité du banquier s’appréciera en fonction des rapports le liant au client, et du niveau des prestations concernées (exemple : dans un contrat de gestion de valeurs mobilières : obligation de résultat ou de moyens). La nature juridique de la prestation sera un élément déterminant dans l’appréciation de cette responsabilité.

En principe, sur le banquier qui conseille son client, ne pèse qu’une obligation de moyens et non de résultat. Mais lorsque le conseil prodigué donne pour acquis ce qui n’est que possible, faudrait-il y voir une obligation de résultat ? il s’agit ici d’une appréciation laissée aux juges de fond.

Lorsque le conseil repose sur l’appréciation des risques et des chances (ce sera le cas lorsque le client sollicite les conseils de son banquier à propos d’une diversification de ses activités), le banquier agira prudemment en procédant à une évaluation, et surtout en assortissant ses conseils de réserves.

La Cour de Cassation dans un Arrêt du 23 Juin 1987 (471) rappelle que satisfait à son devoir de conseil, la banque qui prodigue à son client qui reconnaît les avoir reçues, de larges informations sur la technicité de l’opération et le caractère dangereux de celle-ci.

Pour engager la responsabilité du banquier, le client devra prouver la faute du banquier, c’est-à-dire ici, l’absence de conseil ou le manque de pertinence du conseil ou le conseil erroné.

Dans une espèce, une personne avait acquis sur les conseils de son conseil en investissement, des parts dans plusieurs sociétés de construction. Ces dernières ayant eu besoin de liquidités pour achever les programmes immobiliers qu’elles avaient entrepris, décidèrent, conformément à la loi, de solliciter de leurs associés des appels de fonds supplémentaires.

S’estimant mal conseillé, le client refuse de répondre à ces appels de fonds et assigne son conseiller financier. Ce dernier est condamné par la première Chambre Civile de la Cour de Cassation le 13 Mars 1990, à se substituer à son client dans l’ensemble de ses droits et obligations d’associé.

Ce qui est reproché au conseiller financier ici, c’est d’avoir mal conseillé son client. En effet, le conseiller financier devait en même temps conseiller cet investissement à son client, l’informer des devoirs et des droits qui découlent de sa nouvelle qualité d’associé, notamment de l’obligation pour lui de répondre aux appels de fonds supplémentaires.

Les conseils dispensés par le banquier doivent être adaptés au profil de chaque client.

En l’espèce, le débiteur de l’obligation (le conseil en investissement) a trompé son client sur l‘étendue de ses obligations, car ce dernier était sûrement ignorant du droit des sociétés.

Mais il ne suffira pas de prouver le préjudice. Il appartient au client aussi de prouver le lien de causalité entre la faute du banquier et le préjudice qu’il a subi. Toute la difficulté sera de déterminer l’influence du conseil mal donné (ou absent) sur la décision prise par le client. Dans certains cas, cette influence sera déduite de l’ignorance du client. En effet, il faut qu’il en mesure d’apprécier exactement ce que lui propose le banquier. S’il s’agit par exemple de ces opérations de marché, qui ont pour finalité la gestion de la trésorerie de l’entreprise et qui portent sur ces produits si sophistiqués qu’il faut être expert pour en mesurer les risques, ou simplement comprendre de quoi il s’agit, le client s’en remet totalement à son banquier.

Quand le banquier, en liaison avec les conseils donnés et les montages proposés, se fait rédacteur d’actes et donne à son client des conseils juridiques et fiscaux, il encourt en pareille circonstance, les responsabilités qu’encourt un conseiller juridique et fiscal. Il s’agit ici, en principe et en règle générale, d’obligation de moyens. La responsabilité du banquier dépendra du rôle juridique qu’il aura effectivement joué (472).

Les conseils que le banquier donne, doivent être objectifs, raisonnables et correspondre aux besoins de son client, sous peine d’engager sa responsabilité.

Il importe dès lors que la banque connaisse tout de son client. Si la banque n’a pas à s’immiscer dans les affaires de son client, elle doit certainement s’informer de celles-ci, en fonction de la mission qui lui est confiée, donc procéder le cas échéant à des études préalables, afin de donner le conseil adéquat.

C’est ainsi que la banque qui conseillerait à une personne âgée d’investir sa fortune dans des opérations spéculatives, engagerait sa responsabilité pour manquement à son devoir de conseil, car si la perte en capital peut naître d’une faute de la banque, on peut également admettre qu’un manque à gagner puisse naître si le client a agi sur les conseils objectivement mauvais de sa banque. Ainsi, la responsabilité contractuelle d’une banque a été retenue pour avoir fait souscrire pour une somme importante à son client, les titres d’une société en redressement, alors qu’elle devait, face à un client néophyte n’ayant nullement le goût du risque et l’ayant fait savoir, lui déconseiller l’investissement dans une entreprise soumise à des fluctuations spéculatives importantes incompatibles avec le souci de sécurité exprimé par le client expressément ou implicitement en raison de sa situation personnelle qui ne pouvait échapper à la banque (473).

(472) – Vasseur, Ingénierie financière, Banque 1990.118. (473) – Poitiers, 23 Novembre 1932, 8, 1933.1.150.

La responsabilité de la banque ne sera pas seulement recherchée pour avoir activement conseillé son client, mais aussi pour ne l’avoir pas déconseillé dans certains cas. En effet, une obligation de dissuasion s’imposerait à la banque au titre de devoir de conseil lui incombant spontanément dans certaines circonstances (complexité de l’opération, client profane…).

Sans pour autant s’immiscer dans les affaires de son client, il est en effet des cas où la banque en tant que professionnel ne peut pas ne pas le mettre en garde contre le risque de certaines opérations dont manifestement il ne serait pas conscient (474).

La responsabilité du banquier est souvent invoquée dans la conclusion des opérations à terme.

En effet, le client de la banque peut se trouver entraîné dans des spéculations qui ont pour résultat de lui faire perdre des sommes importantes, dont il ne peut assurer à l’échéance le règlement. Pour prévenir les risques ainsi encourus, le banquier doit exiger de son client une couverture destinée à le protéger contre les défaillances éventuelles de ce dernier.

Selon la Cour d’Appel de Paris dans des Arrêts des 12 Mars, 27 Mai, 24 Juin et 24 Septembre 1991 (475) : « la couverture a pour fonction de protéger l’intermédiaire contre la défaillance de son client, mais sert également à protéger celui auquel la remise d’une couverture est demandée en attirant son attention sur les risques que comportent les opérations à terme de caractère spéculatif et qu’elle participe de l’obligation d’information et de conseil de la société de bourse envers son client à l’égard duquel, elle doit s’assurer avant d’exécuter les ordres donnés ».

Pendant longtemps les juges posaient le principe que les prescriptions en matière de couverture ont été formulées dans l’intérêt des intermédiaires financiers, et non pas dans celui de leurs clients, et refusaient à ces derniers le droit de se prévaloir du défaut d’exigence de la couverture (476).

Mais l’évolution jurisprudentielle moderne reflète une volonté de plus en plus affirmée des tribunaux de protéger les donneurs d’ordre, en retenant la responsabilité du banquier pour manquement à son devoir de conseil et en accueillant les demandes de dommages et intérêts des clients.

Pour engager la responsabilité du banquier, le client doit en outre prouver que le conseil était dû et n’a pas été donné. En effet, dans certaines circonstances, le banquier peut

(474) – F. J. Crédot et P. Bouteiller, opcit. (475) – Banque et Droit, Mars-Avril 1992.62

(476) – Paris 6/05/1975, J.c.p., 1975, Ed. G. II. 18128, note Boitard ; Cass. Civ. 28/03/1977 J.c.p. 1978 Ed. G. II. 18795, note Boitard ; Cass. Civ. 22/05/1985, Bull. Civ. I. n° 165.

être exonéré de cette responsabilité.

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