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Depuis l’antiquité, le climat et la position géographique du littoral méditerranéen, situé au carrefour de trois continents, ont favorisé l’implantation de cités67 dans lesquelles les échanges commerciaux et culturels florissaient. D’après le Plan Bleu (2009), c’est une région ou les questions environnementales et de développement se posent avec une particulière acuité. En effet, si désormais plus de la moitié de la population mondiale est urbaine, dans les pays du pourtour de la Méditerranée (22 pays riverains), ce sont deux habitants sur trois qui vivent déjà dans les espaces urbains. En même temps, la Méditerranée, en particulier la rive Sud et Est, est et sera plus touchée par le changement climatique que la plupart des autres régions du monde au cours du 21ème siècle. Les impacts de la hausse des températures, la diminution des précipitations, l’augmentation du nombre et de l’intensité des évènements extrêmes (inondations, glissements de terrain, feux de forêts etc..) et la hausse possible du niveau de la mer68 se superposent et amplifient les pressions liées aux activités humaines déjà existantes sur l’environnement naturel avec, en particulier, la question cruciale de la raréfaction des ressources en eau (figure -11-), dont la demande a doublé depuis cinquante ans (Plan Bleu, 2008)69, (500 m3/personne/an correspondent au seuil de pénurie d'eau déjà atteint en Algérie, en Israël, en Libye, à Malte

,

dans les Territoires Palestiniens, et en Tunisie

).

Cette région est aussi l’un des principaux « sites critiques »de la biodiversité mondiale. Elle rassemble 10% desespèces connues de végétaux supérieurs sur seulement1,6% de la surface terrestre et 7% des espèces marinessur moins de 0,8% de la superficie des océans. Beaucoup d’entre elles sont endémiques (figure -12-). La mer Méditerranée, mer semi-fermée, entourée

de côtes souvent très peuplées et objet d’une fréquentation touristique intensive, est soumise à

une forte pression humaine liée aux activités littorales comme au trafic maritime (elle accueille 30% du trafic fret maritime international et 20 à 25% du transport maritime d’hydrocarbures70) qui génère des impacts sur la qualité du milieu marin et sur les écosystèmes.

67 Sur les côtes d’Afrique du Nord, se succèdent les phéniciens, les vandales, les grecs, les romains, les arabes, les ottomans (turcs) et les français. En Algérie, ce sont les périodes ottomane (de 1515 à 1830) et française (de 1830 à 1962) qui ont laissé le plus de traces, même s’il existe aussi de nombreux vestiges des autres occupants à l’image des ruines romaines de Tipasa.

68 L’élévation du niveau de la mer est évaluée à 35 cm d’ici la fin du siècle.

69Extrait de la conclusion d’un important rapport de prés de 600 pages établit en juillet 2008, intitulé « Changement climatique et énergie en Méditerranée »

70 D’après « les perspectives du Plan Bleu sur le développement durable en Méditerranée », juillet 2008, rapport établit dans le cadre de « La Stratégie méditerranéenne pour le développement durable » (SMDD), adoptée en 2005 et qui a fixé quatre orientations principales : 1/anticiper et planifier la croissance urbaine ; 2/ valoriser le patrimoine urbain méditerranéen ; 3/ améliorer la qualité de vie et réduire les inégalités ; 4/ améliorer la gouvernance urbaine et renforcer la solidarité entre villes méditerranéennes.

94 Figure -11- Ressources en eau dans les pays méditerranéens Source : Plan Bleu d’après sources nationales

Figure -12- Zones à fort endémisme végétale en Méditerranée Source : Plan Bleu ALGERIE

Chapitre -5- Une petite ville touristique du littoral devenue chef-lieu de wilaya : Tipasa

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En Algérie, l’attractivité des zones côtières, concentrant de nombreuses ressources, s’est confirmée pendant la période coloniale et a été renforcée après l’indépendance par l’implantation d’importants investissements industriels. Aujourd’hui, le littoral algérien représentant un linéaire côtier de 1622.8 km pour une superficie de 3929.41 km², continue de concentrer de nombreuses ressources et opportunités, sa population a triplé depuis 1962 (selon les données du recensement de la population et l’habitat de 2008, 21.5 millions d’habitants, soit 63 % de la population totale (34.1 millions) est concentrée dans le nord du pays sur une superficie qui représente 4 % du territoire national). Le taux d’urbanisation a doublé depuis 1966, (Beghoura A. (2009), et son développement engendre de plus en plus de nuisances et de dégradations environnementales.

Il s’agira, dans ce chapitre, et à travers l’étude du cas de la ville de Tipasa, ville côtière située à 68 km à l’Ouest d’Alger, de tenter de mettre en lumière les enjeux environnementaux sur le littoral méditerranéen, et les impacts de leur prise en compte (ou pas) sur le développement social et urbain, car les perspectives de croissance des villes méditerranéennes71 ne font que préfigurer une aggravation de problèmes actuels déjà inquiétants : une consommation foncière (artificialisation des sols, perte irréversible de terres arables), une accélération de la dégradation du patrimoine culturel bâti, une pollution des nappes phréatiques, une gestion des déchets inefficace, et des effets cumulatifs de tous ces facteurs sur les milieux et la santé des populations. (S. Houpin, Plan Bleu, 2011).

Le choix s’est porté sur la ville de Tipasa, faisant partie de la région côtière algéroise (avec Alger et Boumerdes) pour éclairer la problématique environnement/développement socio- urbain du littoral algérien, car c’est une ville non dépourvue de paradoxes : elle doit en même temps préserver son coté « nature » de petite ville vouée à la culture et au tourisme balnéaire, et intégrer les équipements et infrastructures pour tenir son statut de chef-lieu de wilaya, rôle assez difficile du reste, vue l’attraction et l’hyper concentration des activités au niveau de la capitale Alger, qui est située à moins de 45 minutes. D’ailleurs, il n’existe pratiquement pas de villes moyennes, au niveau Nord-centre, dont le rôle est important dans le quadrillage et l’équilibre du territoire, sauf peut-être Blida, dans une certaine mesure, mais ce n’est pas une ville littorale.

De plus, la zone côtière de Tipasa a été retenue pour l’analyse du « Profil de durabilité », c’est l’une des zones pilotes expérimentales pour les problématiques de développement durable en Algérie, en particulier pour les questions relatives à la conservation et à la valorisation du littoral.

Il existe donc une base de données non négligeable à exploiter sur la wilaya de Tipasa car elle a fait partie du PAC: Programme d’Aménagement Côtier72 de la zone côtière Algéroise, qui, à

71 Dans les pays du Sud et de l’Est, les villes moyennes et petites dont Tipaza fait partie, connaissent une forte croissance alors qu’elles manquent de ressources et de capacités techniques. En Méditerranée, la quasi moitié des urbains vit dans plus de 3000 villes de moins de 300 000 habitants (S. Houpin, Plan Bleu, 2011)

72 C’est à la demande du Gouvernement algérien et suite à l’approbation par la 10ème réunion ordinaire des parties contractantes à la Convention de Barcelone (Barcelone 1995), que le Plan d’Action pour la Méditerranée (PAM/PNUE) a décidé de formuler et mettre en œuvre un Programme d’Aménagement Côtier (PAC) pour la zone côtière algéroise. Le PAC de la zone côtière algéroise s’appuie sur les principes généraux, concepts et instruments introduits par la loi n°02-02 du 5 février 2002 relative à la protection et à la valorisation du littoral. Le programme d’aménagement côtier - PAC-, a été réalisé dans les années 2003-2005, soutenu par le PAM / Plan d’Action pour la Méditerranée, basé à Athènes [qui est l’un des 13 programmes pour les mers régionales

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travers la GIZC73, s’est fixé comme objectif principal d’engager un processus de développement durable de cette zone pilote pour le projet « Destinations »74. Ces différents travaux ont donné lieu à la publication de plusieurs rapports récents dont les enseignements et les conclusions s’avèrent très utiles pour éclairer cette étude, étant donné qu’il est difficile de trouver des données fiables et actualisées.